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besoin de punition

Qu’il me soit plus facile de prendre la parole, quand cette parole a pour but de dire "non" à l’injustice que de prendre la parole pour dire "oui" à la justesse tient à ceci : dire "non" à l’injustice, même si c’est là un acte moral louable, n’est pas l’équivalent du fait de dire "oui" à la justice.

Répondre "oui" à ce qu’a de juste la révélation de la dette symbolique par le signifiant sidérant implique de pouvoir soutenir ce que je ne comprends pas : le non-savoir dans lequel je suis sur la façon d’acquitter cette dette. 

Ce "oui" implique ainsi de résister à la tentation de substituer à la possibilité de soutenir ce non-savoir la possibilité de m’en acquitter en m’engageant dans la voie de la culpabilité surmoïque : voie où je pourrai cesser d’ignorer ce dont je suis coupable. L’expérience analytique nous apprend, à cet égard, que le sujet, pour échapper à la question du non-savoir, ne demande qu’à assumer le fait d’être réellement accusé, pour peu qu’il sache exactement de quel chef d’accusation il est coupable : il n’est pas exceptionnel de voir un sujet commettre une faute réelle pour être mis en rapport avec une loi qui cesse de se manifester comme questionnante pour devenir purement sanctionnante, énonçant clairement quel est le délit et de quel prix il doit être payé.

Auteur: Didier-Weill Alain

Info: "Les trois temps de la loi", éditions du Seuil, 1995, page 188. En langue allemande Bejahung (affirmation au sens de " confirmation ", se distingue de Behauptung (affirmation au sens de "assertion ")

[ ignorance ] [ refoulement ] [ Bejahung ] [ subjectivation ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

paresse

Le feignant, à ce que je crois, n'est qu'un homme qui n'a point encore de poste, ou qui croit n'en pas avoir. Chose remarquable, c'est toujours parce qu'il sait ou croit qu'on ne compte point sur lui, qu'il ne se presse point. Supposez au contraire dans cet homme l'idée, vraie ou fausse, que nul ne saura le remplacer, vous le verrez aller. C'est donc trop peu dire que de dire que l'homme aime son travail. La prise du travail est bien plus sûre. Comme ces courroies et engrenages, qui vous happent par la manche, ainsi la grande machine ne demande point permission. C'est un fait remarquable, et que je crois sans exception, que l'homme qui règle lui-même son travail est celui qui travaille le plus, pourvu qu'il coopère, et que d'autres lui poussent sans cesse des pièces à finir. Aussi je crois que sous les noms de cupidité, d'avarice, ou d'ambition, on décrit souvent assez mal un sentiment vif d'un travail à continuer, d'une réputation à soutenir, enfin d'une certaine action que les autres ne feront pas aussi bien. Il est clair que l'écolier ne trouve pas de ces raisons d'agir ; pour une version mal faite rien ne manquera au monde. Voilà sans doute pourquoi c'est dans la partie la plus active, la plus remuante, la plus infatigable, qui est l'enfance, que l'on trouve le plus de flemmards.

Auteur: Alain

Info: Les idées et les âges/Les Passions et la Sagesse/la Pléiade/Gallimard 1960 <p.104>

 

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personnalité

Avoir du caractère n'est point le même qu'avoir un caractère. Mais le double sens du mot doit nous avertir. Avoir du caractère, c'est accepter sa propre apparence et s'en faire une arme. Comme de bégayer, ou d'avoir la vue basse, ou d'un grand nez faire commandement ; aussi bien d'un petit. On fait autorité d'une voix forte, mais d'une voix faible aussi, d'un nasillement. Un boiteux peut être péremptoire ; on attend qu'il le soit. Le ridicule n'est que l'absence d'une pensée derrière ces signes impérieux. Toutefois si l'on se trouvait pourvu d'équilibre, et de bel aspect, sans aucun ridicule, il ne faudrait pas encore désespérer. Socrate usait indiscrètement de ce nez camus ; le beau Platon dut chercher d'autres moyens. Un orateur ne cache point ses défauts ; il les jette devant lui. J'ai souvenir d'un avocat sifflotant, et tout à fait ridicule ; mais il était redouté. Ses adversaires se moquaient de lui, et, par cela même, l'admiraient. On ne cite guère d'hommes puissants et libres qui n'aient conservé et composé ces mouvements de nature, de façon à s'ouvrir d'abord un chemin parmi les sots. Il n'y a qu'affectation au monde ; et cela est ridicule si l'on imite ; puissant au contraire, et respecté, et redouté, celui qui affecte selon sa nature. "Il t'est naturel d'être simple, disait quelqu'un, et tu affectes d'être simple. C'est très fort."

Auteur: Alain

Info: Les idées et les âges/Les Passions et la Sagesse/la Pléiade/Gallimard 1960<p.269>

 

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flatterie

Sterne, dans son Voyage sentimental, raconte qu'il voulut, une soirée, essayer jusqu'où on pouvait louer quelqu'un sans cesser de lui plaire. Il fit l'épreuve sur trois personnes qui n'étaient pas sans mérite ; il commença par les écouter, ce qui est une flatterie très agréable ; ensuite il en redemanda ; et enfin il les reconnus supérieurs comme ils voulaient l'être, sans restriction, disant par exemple au diplomate : "J'ai entendu souvent parler de politique extérieure ; mais je ne soupçonnais même pas cette solidité de doctrine, cette profondeur de vues, cette connaissance des hommes que vous venez de me montrer." Naturellement ces éloges furent savourés ; il essaya de les forcer ; mais plus il exagérait, plus l'autre y trouvait de plaisir. Le flatteur reçut en échange quelques compliments qu'il n'attendait point, qu'il s'efforça de mépriser, mais qui trouvèrent tout de même asile au plus profond de son coeur. Bref, pour avoir été trois fois flatteur dans cette soirée, et impudemment flatteur, il se fit trois amis, trois vrais et fidèles amis, qui ne l'oublièrent jamais et lui rendirent mille services sans qu'il le demandât. Voilà de ces terribles histoires, dont le sel est bien anglais ; cette froide plaisanterie glace comme une douche, et laisse une trace brûlante. Leurs clowns grands et petits sont comme leurs épices ; quand on en a goûté, tout le reste paraît fade.

Auteur: Alain

Info: Propos I, la Pléiade, nrf Gallimard 1956<15 novembre 1907 p.23>

[ malentendu ]

 

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grégaire

L'humanisme a pour fin la liberté dans le sens plein du mot, laquelle dépend avant tout d'un jugement hardi contre les apparences et prestiges. Et l'humanisme s'accorde au socialisme, autant que l'extrême inégalité des biens entraîne l'ignorance et l'abrutissement des pauvres, et par là fortifie les pouvoirs. Mais il dépasse le socialisme lorsqu'il décide que la justice dans les choses n'assure aucune liberté réelle du jugement ni aucune puissance contre les entraînements humains mais au contraire tend à découronner l'homme par la prépondérance accordée aux conditions inférieures du bien-être, ce qui engendre l'ennui socialiste, suprême espoir de l'ambitieux. L'humanisme vise donc toujours à augmenter la puissance réelle en chacun, par la culture la plus étendue, scientifique, esthétique, morale. Et l'humaniste ne connaît de précieux au monde que la culture humaine, par les oeuvres éminentes de tous les temps, en tous, d'après cette idée que la participation réelle à l'humanité l'emporte de loin sur ce qu'on peut attendre des aptitudes de chacun développées seulement au contact des choses et des hommes selon l'empirisme pur. Ici apparaît un genre d'égalité qui vit de respect, et s'accorde avec toutes les différences possibles, sans aucune idolâtrie à l'égard de ce qui est nombre, collection ou troupeau. Individualisme, donc, mais corrigé par cette idée que l'individu reste animal sous la forme humaine sans le culte des grands morts. La force de l'humanisme est dans cette foule immortelle.

Auteur: Alain

Info: Mars ou la guerre jugée, Les Passions et la Sagesse, la Pléiade, nrf Gallimard 1960, p.626

[ hellénisme ] [ sagesse ]

 

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grimace

Le sourire est la perfection du rire. Car il y a toujours de l'inquiétude dans le rire, quoique aussitôt calmée ; mais dans le sourire tout se détend, sans aucune inquiétude ni défense. On peut donc dire que l'enfant sourit mieux encore à sa mère que sa mère ne lui sourit ; ainsi l'enfance est toujours la plus belle. Mais dans tout sourire il y a de l'enfance ; c'est un oubli et un recommencement. Tous les muscles prennent leur repos et leur aisance, principalement ces muscles puissants des joues et des mâchoires, si naturellement contractés dans la colère, et déjà dans l'attention. Le sourire ne fait pas attention ; les yeux embrassent tout autour de leur centre. En même temps la respiration et le coeur travaillent largement et sans gêne, d'où cette couleur de vie et cet air de santé. Comme la défiance éveille la défiance, ainsi le sourire appelle le sourire ; il rassure l'autre sur soi et toutes choses autour. C'est pourquoi ceux qui sont heureux disent bien que tout leur sourit. Et l'on peut, d'un sourire, guérir les peines de quelqu'un qu'on ne connaît pas. C'est pourquoi le sourire est l'arme du sage, contre ses propres passions et contre celles d'autrui. Il les touche là dans leur centre et dans leur force, qui n'est jamais dans les idées ni dans les événements, mais dans cette colère armée qui ne peut sourire.

Auteur: Alain

Info: 81 chapitres sur l'esprit et les passions, Les Passions et la Sagesse/la Pléiade, 1960<p.1218>

 

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mythologie grecque

Que la fonction de cet être suprême en méchanceté qu’est le surmoi soit de déchaîner ce qui est enchaîné par le symbolique pour jouir de ce que devient le corps quand, cessant d’être symbolisé, d’être bien dit, il choit comme objet mal dit, maudit, est ce qui s’exprime à travers la malédiction d’Œdipe, qui voue les restes de son fils à rester sans sépulture dans le réel. 

[...] avec elle [Antigone] s’interrompt la répétition funeste par laquelle Œdipe a repris à son compte la malédiction dont il a été victime : n’est-elle pas celle qui, ayant été témoin silencieux de la malédiction proférée par son père sur son frère, va être amenée à s’élever contre cette malédiction qui voue Polynice à mourir sans tombeau ? [...]

Dans une telle interprétation, le désir d’Antigone ne se comprend pas comme désir incestueux pour le frère mort, mais comme désir d’un sujet qui ne veut pas survivre à n’importe quel prix : son désir de mort ne signifie pas qu’elle désire "la" mort mais qu’elle désire, par sa mort, rendre transmissible que le prix qu’elle accorde au fait de redonner vie au symbolique qui a été mis à mort par son père outrepasse son désir de donner la vie à une descendance familiale. Voilà pourquoi, d’Œdipe à Antigone, il n’y a pas répétition mais dépassement par la fille de l’impasse du père, transmutation par laquelle cette pierre de rebut qu’est Œdipe est devenue pierre d’angle du désir d’Antigone pour le symbolique.

Auteur: Didier-Weill Alain

Info: "Les trois temps de la loi", éditions du Seuil, 1995, pages 101-102

[ psychanalyse ] [ répétition-reprise ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

impartialité

Les mathématiques ont donc constitué très tôt, dès la Grèce ancienne, un univers dans lequel des choses considérées comme vraies, démontrées, circulent sous condition de leur validation et de leur acceptation par la communauté des gens qui "s'y connaissent", et pas par le simple fait d'autorité résultant de ce que le mathématicien s'appelle "mathématicien". Le mathématicien, au contraire, est celui qui introduit pour la première fois une universalité, totalement affranchie de toute présupposition mythologique ou religieuse, et qui ne prend plus la forme du récit, mais celle de la preuve. La vérité fondée sur le récit est la "vérité" traditionnelle, de type mythologique, ou révélée. Les mathématiques ébranlent tous les récits traditionnels?: la preuve se présente comme ne dépendant que de la démonstration rationnelle, exposée à tous et réfutable dans son principe même, si bien que celui qui a affirmé un énoncé finalement démontré comme faux doit s'incliner. En ce sens, les mathématiques participent de la pensée démocratique, qui apparaît du reste en Grèce en même temps qu'elles. Et la philosophie n'a pu se constituer dans son autonomie  - d'ailleurs toujours menacée - par rapport au récit religieux qu'avec cet appui formel, qui sans doute concernait un domaine limité de l'action intellectuelle, mais un domaine qui avait des normes totalement indépendantes, des normes explicites, que tout un chacun pouvait connaître. Une preuve avait à être une preuve et c'est tout. Il est donc vrai qu'il y a dès l'origine partie liée entre les mathématiques, la démocratie (au sens de la modernité opposée aux autorités traditionnelles) et la philosophie.



Éloge des mathématiques

Auteur: Badiou Alain

Info: Éloge des mathématiques, pp 30–31

[ raisonnement ] [ réfléchir ] [ langage ] [ rationalisme ] [ historique ] [ suffrage universel ]

 

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désir charnel

Elle avait des yeux d’un bleu d’orage, d’un bleu si dense que je l’imaginais, pleurant, faire des trous de ciel dans son mouchoir. Mais sa bouche, plus encore, me décramponnait, une bouche de vin hors d’âge, hors de portée, à boire fou, et debout. Cette bouche, j’avais envie d’y approcher ma main, d’en caresser du pouce la courbe humide et le velours, de la voir frémir, trembler d’attente et de soif, envie d’elle, l’ouvrir au souffle, lentement l’écarter, qu’elle s’ourle, haletée, pour cueillir le fruit rapide de sa langue que je voyais rosir sous la syllabe et sucer le caillou des sons. J’avais une envie tanguante de croquer dans ses lèvres, d’en crever le rouge bai, d’en avaler le jus jusqu’à la gorge et de laisser ma main faire, qu’elle cueille au creux ses seins, les enveloppe… Les tétons faire saillir, durcir en quête… La coucher sur les planches du pont, dures, elle souple par contraste, prendre sa bouche, tenir dans ma main sa nuque, que la tête ne bute, dans l’autre son sein glissant. Et laisser le chat fou sous sa robe marine sinuer jusqu’au fondant, jusqu’à la succulence… La sentir alors, tout entière – lâcher – se distendre comme un cordage qui trempe, tandis que flottent ses couleurs au-dessus d’une terre de planches. Sentir son odeur de femme, la lécher, écarlate, l’ouvrir, la laper farouche comme un vin de banquet, mordre dans l’abricot de ses seins, dans son omoplate nue. Puis entrer en elle, à un signe bleu, sur un sourire qui consent. La pénétrer, elle, à cru. Éprouver à quel point elle m’accepte, lent balancement, pluie du sang, fusion.

Auteur: Damasio Alain

Info: La Horde du Contrevent

[ baise ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

génocide

(...) Victoire Abraham, femme Pichot (25 ans), demeurant à la Sécherie, près Nantes, est entendue. Je déclare, dit ce témoin, avoir vu, du 18 au 20 brumaire [8 au 10 novembre], des charpentiers faire des trous à une sapine, ou gabarre, et le lendemain j'appris qu'on avait noyé des prêtres. [...]
Lorsqu'on effectuait une noyade, on faisait descendre de la galiote dans un chaland (espèce de bateau) ceux qu'on voulait expédier. Ces chalands avaient des trous pratiqués exprès, par lesquels l'eau s'introduisait et faisait couler le vaisseau. J'en ai vu plusieurs submergés de cette manière : il fallait un chaland pour chaque noyade. On a noyé à Nantes pendant deux mois.
Je vis un jour amener des prisonniers sur des charrettes. Ils venaient de l'Entrepôt : on les disposa dans une galiote où on les oublia pendant 48 heures. On avait eu la précaution de fermer le pont. Lorsqu'il fut ouvert, on trouva soixante malheureux étouffés. On les fit enlever par d'autres prisonniers qu'on venait d'amener. Robin, le sabre à la main, fit jeter ces cadavres dans la Loire. Cette opération finie, il fait mettre à nu tous les prisonniers, hommes, femmes et enfants, on leur lie les mains derrière le dos, on les fait entrer dans un chaland, où ils sont noyés.
Le président dit au témoin. Cette noyade s'est-elle faite de jour ou de nuit ?
Le témoin. Elle s'est faite en plein jour. J'observe que les noyeurs se rendaient très familiers avec les femmes, qu'ils les faisaient même servir à leurs plaisirs, lorsqu'elles leur plaisaient, et ces femmes, pour récompense de leurs complaisances, obtenaient l'avantage précieux d'être exceptées de la noyade."

Auteur: Gérard Alain

Info: Vendée, Les Archives de l'extermination, Bull. du Trib. révol., séance du 25 octobre 1794

[ historique ] [ Gaule ]

 

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