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rapidité

La vitesse tue la forme. D'un paysage vu à cinq cents à l'heure, que reste t-il ? Rien ; les premiers et les seconds plans sont supprimés ; au delà du 300éme de seconde, les appareils photographiques eux-mêmes défaillent. Notre oeil ne prend pas plaisir à la trajectoire d'un obus puisqu'il ne la voit plus. Le mouvement ne "déplace pas les lignes", il les anéantit. La terre perd sa variété ; en avion, il n'y a plus, sous nos pieds, de peupliers ou de châtaigniers ; il y a l'arbre... La vitesse pour les Orientaux, équivaut à la démocratie. La très grande vitesse ressemble au communisme en ce qu'elle tue l'individuel. Elle appelle et exige l'anonymat. Nous parvenons au règne du symbole. La vitesse habitue l'esprit, par la succession infinie des images, à des nouvelles synthèses. Le sociologue s'en réjouira peut-être, mais non l'artiste. L'artiste est un aristocrate , (même quand il croit faire de l'art pour le peuple) il travaille lentement. La vitesse tue la couleur : le gyroscope, quand il tourne au plus vite, fait du gris ! Regardons la peinture moderne : gris, vert-de-gris, gris-noir, Barque, Picasso, Juan Gris, Derain, Vlaminck : couleurs de torpilleur, de trains de blindé, de châssis.

Auteur: Morand Paul

Info: éloge du repos (1937, 125 p., éditions Arléa) p.118, 119

[ vélocité néfaste ] [ progrès ] [ modernité ] [ esthétique ] [ transition nocive ]

 
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envie du pénal

[...] la victime di[t] qu’elle "se bat", qu’elle "va se battre". Contre quoi et qui, puisque tout le monde est d’accord avec elle, que les médias lui tendent leurs micros, que le gouvernement est prêt dans la demi-heure à inventer une nouvelle loi particulière adaptée à son cas, et que les juges rendront leur verdict sous sa dictée ? 

La victime est une figure post-historique dans la mesure où son "combat" est intransitivé, autonomisé, et disproportionné de toute façon par rapport au responsable, au méchant, au coupable contre lequel elle "se bat" et qui ne fera jamais le poids face à son malheur célibataire, qui ne le comblera jamais assez (d’où aussi le sentiment de "frustration" rituellement exprimé par la victime lorsqu’elle juge, au sortir d’un procès, que le jugement n’est pas assez sévère, et il ne l’est jamais). L’activisme de la victime, par définition, ne peut plus s’arrêter parce que rien ne serait suffisant pour le rassasier (il en va de même de la rébellion du rebelle, de l’iconoclastie de l’iconoclaste, de la colère des catégories de population en colère, de la dérangeance des artistes dérangeants et de tant d’autres foutaises modernitaires). Après la libération, pour résumer, plus personne ne supporte la liberté.

Auteur: Muray Philippe

Info: Dans "Exorcismes spirituels, tome 4", Les Belles Lettres, Paris, 2010, page 1511

[ mise en scène ] [ culpabilité ] [ dédouanement politique ] [ expression ] [ prêt-à-penser ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

beaux-arts

La peinture est le moins exigeant, le plus commode de tous les arts : le moins exigeant, parce qu'en raison des moyens qu'elle emploie et de l'objet qu'elle représente, lors même qu'elle n'est qu'une oeuvre manuelle, et à peine un art, elle se fait encore bien venir et nous plaît ; ensuite, parce qu'une exécution technique, bien que dépourvue de talent, excite l'admiration des hommes d'un esprit cultivé comme des ignorants, de sorte qu'il suffit d'approcher jusqu'à un certain point de l'art pour être bien accueilli dans une sphère supérieure. La vérité dans les couleurs, dans le dessin, dans la perspective, nous fait déjà plaisir ; et comme l'oeil d'ailleurs est habitué à tout voir, il n'est pas blessé par une forme laide ou même par une image hideuse, comme l'oreille est choquée par un son faux. On tolère les plus mauvaises peintures parce qu'on est accoutumé à voir des objets plus difformes encore. Il suffit donc au peintre d'être artiste seulement jusqu'à un certain degré, pour trouver un public plus nombreux que le musicien qui a un talent égal. Au moins, le peintre médiocre peut toujours travailler seul, au lieu que le musicien faible est obligé de s'associer à d'autres musiciens pour produire quelque effet par l'ensemble.

Auteur: Goethe Johann Wolfgang von

Info: Maximes et réflexions, Première partie, trad. Sigismond Sklower, p.12, Brockhaus et Avenarius, 1842

[ art pictural ]

 

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cinéma

En tout cas c’est l’esprit moderne tel que Shakespeare, suivant Montaigne, l’a orienté et tout illumine d’aurore : l’homme dansant, ivre d’intelligence, sur les cimes du désespoir. Il y a bien une différence. Le langage, chez Charlot, n’est plus de convention, le mot est supprimé, et le symbole, et le son même. C’est avec ses pieds qu’il danse. [...] Chacun de ces pieds, si douloureux et si burlesques, représente pour nous l’un des deux pôles de l’esprit. L’un se nomme la connaissance, et l’autre le désir. Et c’est en bondissant de l’un sur l’autre qu’il cherche ce centre de gravité de l’âme que nous ne trouvons jamais que pour le perdre aussitôt. Cette recherche est tout son art, comme elle est l’art de tous les hauts penseurs, de tous les hauts artistes et, en dernière analyse, de tous ceux qui, même sans s’exprimer, veulent vivre en profondeur. Si la danse est si près de Dieu, j’imagine, c’est qu’elle symbolise pour nous dans le geste le plus direct et l’instinct le plus invincible le vertige de la pensée qui ne peut réaliser son équilibre qu’à la condition redoutable de tournoyer sans relâche autour du point instable qu’il habite, et de poursuivre le repos dans le drame du mouvement.

Auteur: Faure Elie

Info: Charlot, op. cit., ici p. 48-49 - Charlie Chaplin

[ ballet ] [ continuité ] [ évolution ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

création réconfort

Il se disait que lui-même, comme tous les hommes, s'écoulait, se transformait sans cesse pour se dissoudre enfin, tandis que son image créée par l'artiste resterait immuablement la même et pour toujours.

Peut-être, pensait-il, la source de tout art et sans doute aussi de toute pensée est-elle la crainte de la mort. Nous la craignons, nous frissonnons en présence de l'instabilité des choses, nous voyons avec tristesse les fleurs se faner, les feuilles tomber chaque année, et nous sentons manifestement dans notre propre cœur que nous sommes, nous aussi, éphémères et que nous fanerons bientôt. Lorsque, comme artistes, nous créons des formes ou bien, comme penseurs, cherchons des lois ou formulons des idées, nous le faisons pour arriver tout de même à sauver quelque chose de la grande danse macabre, pour fixer quelque chose qui ait plus de durée que nous-mêmes. La femme d'après laquelle le maître a sculpté sa madone est peut-être déjà fanée ou morte et bientôt il sera mort lui-même, d'autres habiteront sa maison, mangeront à sa table, mais son œuvre restera, dans la silencieuse église du cloître elle brillera encore au bout de cent ans et bien au-delà et demeurera toujours belle, souriant toujours du même sourire triste dans son éternelle jeunesse. 

Auteur: Hesse Hermann

Info: Narcisse et Goldmund, Chapitre X

[ sans point fixe ] [ exister ] [ postérité ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

énergies

Pour Marsile Ficin, les images agissent sur l’homme dans un espace médian. C’est le Monde de l’Ame, situé entre le Ciel des Idées et la Terre des Corps. Et le Monde de l’Ame contient les raisons séminales correspondantes aux idées et inductibles dans les corps. De ces raisons séminales, les artistes peuvent tirer leurs images ; et si l’adéquation entre les idées et les corps est partout tractable, elle peut être captée d’autant plus aisément qu’un réceptacle sensible aura été prévu à cet effet. Ce réceptacle sensible, c’est le symbole, et sa magie naturelle est particulièrement destinée aux intellectuels qui risquent, par leurs incessantes recherches, dont la nature les assujettit à l’influence de la planète Saturne, de sombrer dans la dépression. Pour éviter celle-ci, les jeunes intellectuels doivent se nourrir et s’entourer de figures correspondant aux planètes de Vénus et de Jupiter. Et, toujours selon Ficin, c’est au croisement de ces trois puissances planétaires que l’art peut déployer sa dimension à la fois thérapeutique et initiatique. Sentiment de la toute-puissance de la fatalité, la mélancolie risque toujours de conduire à la soumission à l’ordre des choses existant. C’est pourquoi l’innocence érotique comme le sentiment de la justice doivent s’y associer pour produire une vision à la fois tragique et dynamique de l’humanité.

Auteur: Thiellement Pacôme

Info: Dans "Trois essais sur Twin Peaks", pages 50-51

[ équilibre ] [ complémentarité ] [ tiercités ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

priméité

Un jour des années 1950, à la sortie d’un cours de Roland Barthes, j’ai noté ceci : “Mon matériau, le seul possible, c’est mon présent. Le présent, c’est ce qui colle à moi. Le nez sur le miroir”. Mais il faut s’entendre sur ce qu’on entend par “présent” ou “actualité”. A la source de mon travail, il y a aussi cette photographie qui montre deux objets préhistoriques trouvés en région souabe, près du Danube, et qui seraient vieux de 30 000 ans. Ce sont de petits objets, une tête de cheval, un oiseau, et je me dis qu’on n’a jamais fait mieux dans le rapport à l’actualité que ces artistes-là : ils donnaient une figuration à ce qui les entourait dans l’immédiat de leur vie.

En même temps, ce ne sont pas un cheval et un oiseau : ce sont des objets d’art, c’est-à-dire des formes. Il y a là une concentration de ce qui est à la fois le mystère et le défi de la représentation. C’est le passage de l’informe à la forme qui m’intéresse. Quelle est la relation de l’événement actuel, immédiat, avec la forme que doit prendre un écrit et notamment un écrit de théâtre ? Je n’ai pas la réponse, mais c’est ce après quoi je cours depuis toujours.

Auteur: Vinaver Michel Grinberg

Info:

[ sculptures ] [ fond-forme ] [ question ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

doute

Nous autres, civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles.

[…]

L’espoir n’est que la méfiance de l’être à l’égard des prévisions précises de son esprit. Il suggère que toute conclusion défavorable à l’être doit être une erreur de son esprit. Les faits, pourtant, sont clairs et impitoyables. Il y a des milliers de jeunes écrivains et de jeunes artistes qui sont morts. Il y a l’illusion perdue d’une culture européenne et la démonstration de l’impuissance de la connaissance à sauver quoi que ce soit ; il y a la science, atteinte mortellement dans ses ambitions morales, et comme déshonorée par la cruauté de ses applications ; il y a l’idéalisme, difficilement vainqueur, profondément meurtri, responsable de ses rêves ; le réalisme déçu, battu, accablé de crimes et de fautes ; la convoitise et le renoncement également bafoués ; les croyances confondues dans les camps, croix contre croix, croissant contre croissant ; il y a les sceptiques eux-mêmes désarçonnés par des événements si soudains, si violents, si émouvants, et qui jouent avec nos pensées comme le chat avec la souris, — les sceptiques perdent leurs doutes, les retrouvent, les reperdent, et ne savent plus se servir des mouvements de leur esprit.

L’oscillation du navire a été si forte que les lampes les mieux suspendues se sont à la fin renversées.

Auteur: Valéry Paul

Info: La crise de l’esprit in: Variété (Pléiade Œuvres I) pp 988 et 991

[ progrès ] [ savoir ] [ éthique ] [ désespérantes dubitations ]

 
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Ajouté à la BD par Plouin

conservatisme

- Je viens d'une famille qui, le lendemain de l'élection de Mitterrand, a fait construire dans sa cave un putain de garde-manger qu'elle a entièrement rempli de bouffe au cas où les rouges reviendraient. Je viens d'une famille catho tellement arriérée que deux mille ans après elle en veut toujours aux juifs d'avoir dézingué leur idole. Je viens d'une famille qui pense que la musique s'est arrêtée au XVIIIe siècle et la littérature juste un siècle plus tard. Je viens d'une famille qui pense que le chômage est le refuge des assistés, et la Sécurité sociale un vaste trou creusé par des politiciens irresponsables, des millions d'Arabes et autant de nègres. Je viens d'une famille qui, d'une manière assez systématique, ne croit pas que la différence soit une très bonne chose et pense qu'il vaut mieux avoir un enfant leucémique que pédé parce que au moins, un cancéreux, on peut toujours espérer qu'il sera possible de le sauver un jour. Alors, présenter mon petit copain artiste peintre spécialisé dans des oeuvres crypto-pédé à tendance préraphaélite qui écoute Barbara à longueur de journée et qui veut monter un journal homo pour combattre les préjugés ignobles de gens précisément comme eux, non, je ne pense pas en effet que ce soit la meilleure des idées que tu aies eues ces derniers temps.

Auteur: Roux François

Info: Le Bonheur National Brut, P. 325, Le Livre de Poche, 2016

[ bourgeoisie française ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

ermite

La vie solitaire d'un penseur, d'un artiste, d'un ermite est un engagement, jamais une solution. L'expérience de solitude s'avère indispensable à tout être qui veut conquérir ou sauvegarder sa liberté; en ces heures privilégiées, l'individu n'est plus cet homme moyen, mécanique ou "neuronal", cible facile des sondages, de la mode et des médias; il s'éprouve être unique, oiseau rare. Il se distingue. De là on qualifiera de pensée aristocratique toute célébration de la solitude alors que celle-ci est bien moins dédaigneuse qu'exigeante, dénotant une vigilance rebelle. Résister à la facilité comme à la résignation, demeurer discret sinon secret, ce sont là de beaux titres de noblesse. Il faut un courage constant, une passion tenue, comme on dit d'une note ou d'un pari, pour oser être soi, pour ne pas renier ses valeurs ni ses rêves.
Le besoin de reconnaissance apparaît bien comme le talon d'Achille de tout individu. Il explique que, pour se sentir compris ou acceptés, la plupart des hommes préfèrent renoncer à leur liberté, à leur singularité. Le véritable solitaire ne cherche ni à plaire ni à être réconforté. Sa grande force vient de ce qu'il n'est point troublé par les agissements et les opinions du monde: quand on vit seul, on ne donne pas prise, on ne se situe plus par rapport au général mais par rapport à l'absolu.

Auteur: Kelen Jacqueline

Info: L'esprit de solitude

[ indépendance ]

 

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