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sentiment

[…] la jalousie, une véritable douleur de voir qu’un être qui nous remplit reste en même temps en dehors. Un cauchemar en plein jour. La jalousie a moins à faire qu’il ne semble avec l’amour des sexes ; c’est le gouffre entre le monde et l’illusion, la jalousie au sens le plus restreint n’est qu’une note en bas de page, un choc : le monde coïncide avec mon partenaire, pas avec moi, l’amour ne m’a uni qu’à mon illusion.

Auteur: Frisch Max

Info: Dans "Le désert des miroirs", page 282

[ unité impossible ] [ frustration ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

consumérisme

Notre tourisme, notre télévision, nos changements de mode, notre alcoolisme, notre toxicomanie et notre sexisme, notre avidité de consommation sous un feu roulant de réclames, etc., témoignent de l'ennui gigantesque qui affecte notre société. Qu'est-ce qui nous a amenés là ? Une société qui, certes, produit de la mort comme jamais, mais de la mort sans transcendance et sans transcendance, il n'y a que le temps présent, ou plus précisément : l'instantanéité de notre existence, sous forme de vide avant la mort.

Auteur: Frisch Max

Info: Esquisses pour un troisième journal

[ fuite ] [ sans issue ]

 

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sage superficialité

DON JUAN : […] Ne sois pas comme moi, Rodrigue, ne sois pas curieux ! Si nous refusons le mensonge étincelant de la surface des choses, si nous voulons voir dans ce monde plus que le miroir de nos vœux, si nous voulons savoir qui nous sommes, alors Rodrigue, notre chute ne cesse plus, et le sifflement à nos oreilles est tel que nous ne savons plus où Dieu habite. Ne plonge pas ton regard dans ton âme, Rodrigue, ni dans celle d’un autre, mais effleure seulement la surface azurée du miroir, comme une ronde de moustiques sur l’eau de l’étang – afin de vivre longuement, amen. 

Auteur: Frisch Max

Info: Don Juan ou L'Amour de la géométrie

[ . ]

 
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Ajouté à la BD par miguel

femmes-par-homme

La différence naturelle entre l’homme et la femme, qu’aucune égalité de droits n’effacera, consiste en ce que c’est toujours l’homme qui agit dans l’étreinte. Il reste lui-même et la femme le sait ; elle le connaît. Elle ne veut pas savoir ce qu’elle peut deviner. A l’inverse, l’homme ignore totalement comment est la femme dans son étreinte avec un autre : il ne peut absolument pas le deviner. La femme est monstrueuse par sa faculté d’adaptation presque sans limites et, quand elle revient de chez un autre, elle n’est pas la même : quand cela dure un peu, tout en est pénétré, ses préoccupations intellectuelles, ses façons de voir, ses jugements.

Auteur: Frisch Max

Info: Le Désert des miroirs

[ possédées ] [ objet du fantasme ] [ caméléon ] [ baise ]

 
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Ajouté à la BD par miguel

incertitude

Mathématiquement parlant, le probable (que sur 6.000.000.000 jets d'un dé régulier à six faces on aura approximativement 1,000,000,000 de résultats par face) et l'improbable (que pour six jets avec le même dé le un sortira environ six fois) ne sont pas différents en nature, mais seulement en fréquence, où le plus fréquent apparaît a priori plus probable.
Mais l'occurrence occasionnelle de l'improbable n'implique pas l'intervention d'une puissance supérieure, quelque chose de la nature du miracle, comme le profane est si prêt à accepter. Le terme "probabilité" implique l'improbabilité aux limites extrêmes de la probabilité, et quand l'improbable se produit il n'est jamais cause de surprise, de perplexité ou de mystification.

Auteur: Frisch Max

Info: Homo Faber, Cf. Ernst Mally's Probability and Law, Hans Reichenbach The theory Probability, Whitehead and Russell's Principia Mathematica, von Mises Probability, Statistics and Truth

[ omniprésente ] [ hasard ]

 

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amplification

Gantenbein l’aveugle se rappelle divers rouges. Un rouge saumon lui irait bien, explique-t-il, même un rouge tuile un peu sec, peut-être aussi un rouge foncé comme celui des roses qui se flétrissent, un rouge braise ou approchant. Il aime le rouge. Il se rappelle un seul rouge qui ne lui irait pas : plat, frelaté, chimique, un rouge limonade. Un silence. Il se rappelle : rouge est le sang, rouge la couleur des signaux d’alarme, par exemple le drapeau pour les explosions, rouge la bouche des poissons, la lune et le soleil au levant et au couchant, rouge le feu, le fer dans le feu, parfois rouge la terre et la lumière derrière les paupières closes, rouges les lèvres, rouge un foulard dans les paysages brun et gri et verts de Corot, rouge les blessures, le pavot, la honte et la colère, beaucoup de choses sont rouges, la peluche au théâtre, les églantiers, le pape, les capes lors des courses de taureaux, le diable, dit-on, est rouge et le rouge vit du vert, oui le rouge est la couleur entre toutes les couleurs – pour Gantenbein.

Auteur: Frisch Max

Info: Dans "Le désert des miroirs", pages 106-107

[ symbolique ] [ écarlate ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

évolution

Vous habitez donc là. Appartement ou maison, arrangé comme ceci ou comme cela, vraisemblablement antico-moderne, avec la lampe habituelle de confection japonaise, en tout cas il y a une salle de bains commune, la vue quotidienne d’ustensiles pour les oins différents de deux corps, un de femme, un d’homme. Il vous arrive d’y être pris de nostalgie. Aucun d’entre vous n’a personne de plus proche, non, pas même en souvenir ; pas même en espérance. Peut-on être plus unis que vous l’êtes ? On ne peut pas. Mais parfois, vous avez donc une nostalgie. De quoi ? Vous en avez le frisson. Quel frisson ? Vous voilà vivant, plein d’amour, les années infinies et éphémères, un vrai couple, tendre, sans le montrer aux invités, car vous l’êtes vraiment, un vrai couple aux corps morts d’amour qui ne se recherchent plus que rarement. Après un voyage peut-être, une séparation de la durée d’un congrès, il arrive qu’en plein jour, peu après l’arrivée, avant de défaire les valises et de raconter le minimum, vous avez une étreinte. Qu’ont à y voir les autres ? Cela rafraîchit, mais ne mérite pas un aveu. Vous avez de nouveau, comme autrefois, une journée où les heures ne comptent pas, en robe de chambre et avec les disques. Puis de nouveau la douce disparition de toute curiosité de part et d’autre, inexprimée, à peine indiquée, camouflée seulement derrière les exigences de la journée.

Auteur: Frisch Max

Info: Dans "Le désert des miroirs", page 147

[ quotidien ] [ vie à deux ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

femmes-par-homme

Ce qui asservit les hommes : leur mépris de la femme, qu’ils ne s’avouent pas à eux-mêmes ; de là pour eux l’obligation de glorifier et de s’aveugler ; quand la réalité les éclaire, ils courent à la suivante, comme si la suivante n’était pas une femme aussi et ils ne peuvent se passer de leur rêve… Ce qu’on méprise : leur passivité, leur coquetterie même là où il s’agit de tout autre chose, la permanence de leur attitude de femme-à-homme, toutes leurs autres préoccupations se révèlent prétextes ou camouflages ou intermèdes, leur soif inétanchable d’amour, leur habitude de se faire servir (allumettes) et d’avoir toujours le droit d’être déçues, en général leur penchant aux reproches (le reproche doit d’ailleurs être deviné), leur pouvoir de silence, elles veulent et peuvent rester opaques à elles-mêmes, leur capacité à tout supporter, leur truc d’être la victime, en outre leur effrayante facilité à être consolées à tout moment, leur aptitude au flirt en plein bonheur, toujours prêtes dans leur ruse à laisser à l’homme la responsabilité de ce qui arrive, et quand l’homme, pour pouvoir agir, voudrait savoir où il en est, de leur art de laisser les portes ouvertes, elles lui abandonnent la décision et du même coup la responsabilité dès le départ, leur fragilité en général, leur besoin de protection et de sécurité, et avec cela leur versatilité fantastique, bref, leur charme… L’homme accentue d’autant plus son attitude chevaleresque qu’il a plus de mépris à dissimuler…

Auteur: Frisch Max

Info: Dans "Le désert des miroirs", page 222

[ différences ] [ personnalité ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson