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écriture

Ecrire, c’est se susciter un partenaire. La plupart des textes ne deviennent pas de la littérature parce qu’ils demeurent dans la solitude du monologue. Parce qu’on sent qu’aucune figure n’est née au fur et à mesure que les phrases montaient. Ecrire, c’est savoir s’inventer un interlocuteur. Incarner quelqu’un.

Auteur: Muray Philippe

Info: Ultima Necat, tome 1, Les Belles Lettres, 2015, 8 avril 1985

[ grand Autre ] [ adresse ] [ style ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

genre littéraire

La poésie qu’on croit l’expression brute du génie humain en est la décadence lamentable. Le roman est la possibilité d’éviter la poésie comme la peste. La poésie, c’est l’ensemble des métastases historiques du genre narratif. La poésie "au début" n’existait pas, il n’y avait que l’épopée qui était un roman chanté, la poésie est l’affaiblissement de l’épopée. Le roman à intrigue solide lutte contre la menace de métastase poétique… Pour toutes ces raisons d’ailleurs Breton détestait les romans. Il faudrait faire un panorama des haïsseurs du roman (Michelet, etc.) … On pourrait dresser leur portrait-robot : le type philosophique-poétique-socialiste (Tolstoï…) (Blanchot dépeupleur ; Duras et Blanchot héritage collabo ; Robbe-Grillet). La poésie est par principe socialiste parce qu’elle arrache au roman sa possibilité politique anti-progressiste : la narration. Baudelaire poète n’est pas un poète (c’est-à-dire pas un progressiste, philosophe, etc.) parce que ses poésies sont prélevées sur le désir douloureusement frustré d’écrire des romans (facile à prouver : ses notes intimes).

Auteur: Muray Philippe

Info: Ultima Necat, tome 1, Les Belles Lettres, 2015, 6 mars 1985

[ surestimée ] [ critique ] [ comparaison ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

patronyme

La peur de voir son nom s’éteindre… Après moi, en effet, il n’y aura plus de "Muray" … Comme si je ne savais pas que mon nom, précisément parce que j’ai fait autre chose que des enfants, ne s’éteindra pas !

Auteur: Muray Philippe

Info: Ultima Necat, tome 1, Les Belles Lettres, 2015, 25 février 1985

[ postérité ] [ célébrité ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

épiphanies

Comment notre cerveau crée des moments 'Ahaaa' et pourquoi ils restent 

L'instant d'illumination, ce soudain éclat de compréhension que l'on nomme communément " moment aha " ou " eureka ", fascine par sa capacité à bouleverser subitement notre perception et à ancrer profondément le savoir nouveau. Ce phénomène si humain — illustré par Archimède se découvrant dans son bain ou Newton face à la chute de la pomme — ne se limite pas aux génies, mais survient au quotidien dans la résolution furtive d'énigmes ou de problèmes.​

Pour percer le mystère neuronal de cette révélation fulgurante, Maxi Becker et son équipe à l'Université Humboldt de Berlin ont conçu une expérience simple : l'observation de la reconnaissance soudaine d'images abstraites et déformées, dites " images de Mooney ", où des objets usuels cachés dans un fort contraste noir et blanc deviennent progressivement identifiables. En réunissant les participants dans un scanner IRMf, ils enregistrèrent l'activité cérébrale lors de ces moments d'" aha ".​

L'étude révèle que ces éclaircies cognitives correspondent à une réorganisation nette de l'activité au sein d'un réseau cérébral central sur trois régions principales : le cortex occipito-temporal ventral, chargé de la reconnaissance visuelle, l'amygdale, lieu de traitement des émotions, et surtout l'hippocampe, maître de la mémoire et détecteur des écarts entre attente et réalité. Plus l'" aha " est vif et certain, plus ces zones s'activent intensément, soulignant la transformation d'une image auparavant dépourvue de sens en un objet clairement reconnu.​

Cette activation conjointe influence directement la mémorisation : les participants se souvenaient bien mieux des images associées à un fort sentiment d'" aha ", même cinq jours après l'expérience. L'ampleur de l'activité de l'hippocampe et du cortex visuel pendant ce moment contribue à sceller durablement la trace mémorielle, rendant ces intuitions plus robustes et accessibles à long terme. Toutefois, le sentiment d'illumination n'est pas gage de vérité absolue : des fausses prises de conscience sont également présentes, mais avec une moindre intensité émotionnelle et cognitive.​

Au-delà des énigmes simples, cette compréhension ouvre des perspectives larges, notamment pédagogiques. Encourager la survenue de ces moments d'insight dans l'enseignement pourrait grandement améliorer la motivation des élèves et la pérennité des apprentissages. De même, l'équipe souhaite désormais étendre la recherche aux domaines plus complexes de la créativité humaine, de la psychothérapie, de la méditation, voire des états modifiés de conscience, afin de mieux saisir les mécanismes profonds de la pensée créative et transformatrice.​

En somme, le " moment aha " est un événement neuronal où un réseau cérébral coordonné déclenche une reconfiguration soudaine de la perception, assortie d'une charge émotionnelle positive, qui favorise la consolidation mnésique. Cette dualité émotion-cognition inscrit cette lumière subite non seulement comme clé de la compréhension, mais aussi comme pilier de la mémoire durable et de la créativité.​


Auteur: Internet

Info: Quanta Magazine, Nora Bradford, 5 novembre 2025

[ lucidité soudaine ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

concept psychanalytique

[…] l’objet phallus, n’est pas la simple spécification, l’homologue, l’homonyme du petit(a) imaginaire où déchoit la plénitude de l’Autre, du grand A. Ce n’est pas une spécification enfin venue au jour de ce qui aurait été auparavant l’objet oral, puis l’objet anal.

[…] c’est un objet privilégié dans le champ de l’Autre. C’est un objet qui vient en déduction du statut de l’Autre, du grand Autre comme tel.

En d’autres termes, le petit(a) […] c’est le A moins phi [phallus imaginaire] : (a) = A – φ.

En d’autres termes, c’est par ce biais que le φ (phi) vient à symboliser ce qui manque à l’A pour être l’A noétique, l’A de plein exercice, l’Autre en tant qu’on peut faire foi à sa réponse à la demande. De cet Autre noétique, le désir est une énigme, et cette énigme est nouée avec le fondement structural de sa castration. C’est ici que va s’inaugurer toute la dialectique de la castration.

Faites attention maintenant de ne pas confondre non plus cet objet phallique avec ce même signe qui serait le signe au niveau de l’Autre de son manque de réponse, le manque dont il s’agit ici, est le manque du désir de l’Autre. La fonction que va prendre ce phallus en tant qu’il est rencontré dans le champ de l’imaginaire, c’est non pas d’être identique à l’Autre comme désigné par le manque d’un signifiant, mais d’être la racine de ce manque.

C’est l’Autre qui se constitue dans une relation, privilégiée certes à cet objet φ, mais dans une relation complexe.

C’est ici que nous allons trouver la pointe de ce qui constitue l’impasse et le problème de l’amour, c’est que le sujet ne peut satisfaire la demande de l’Autre qu’à le rabaisser, qu’à le faire lui, cet autre, l’objet de son désir. 

Auteur: Lacan Jacques

Info: 22 mars 1961

[ définition ] [ mathème ]

 

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néoténie

Ce qu’il [l’enfant] n’a pas, ce dont il n’a pas la disposition, à ce point de naissance, de révélation du désir génital, ce n’est rien d’autre que son acte. Il n’a rien qu’une traite sur l’avenir. Il institue l’acte dans le champ du projet.

Et je vous prierai ici de remarquer la force des déterminations linguistiques par quoi, de même que le désir a pris dans la conjonction des langues romanes cette connotation de desiderium, de deuil et de regret, ça n’est pas rien que les formes primitives du futur soient abandonnées pour une référence à "l’avoir". "Je chanterai", c’est exactement ce que vous voyez écrit : "Je chanter-ai", effectivement ceci vient de cantare habeo. La langue romaine décadente a trouvé la voie la plus sûre de retrouver le vrai sens du futur : je baiserai plus tard, j’ai le baiser à l’état de traite sur l’avenir : je "désirer-ai".

Et aussi bien cet habeo introduit au debeo de la dette symbolique, à un habeo destitué. Et c’est au futur que se conjugue cette dette quand elle prend la forme de commandement : "Tes père et mère honoreras", etc.

Auteur: Lacan Jacques

Info: 22 mars 1961

[ imaginaire ] [ étymologie ] [ devoir ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

mère-fils

La mère du petit Hans, et aussi bien toutes les mères - "j’en appelle à toutes les mères", comme disait l’autre - distingue sa position en ceci qu’elle marque, pour ce qui commence d’apparaître de petit frétillement, de petit frémissement non douteux dans le premier éveil d’une sexualité génitale comme telle chez Hans : "c’est tout à fait cochon ça", c’est dégoûtant le désir, ce désir dont il ne peut dire ce que c’est.

Mais ceci est strictement corrélatif d’un intérêt non moins douteux pour quelque chose qui est ici l’objet, celui auquel nous avons appris à donner toute son importance, à savoir le phallus. D’une façon sans doute allusive mais non ambiguë, combien de mères - toutes les mères - devant le petit robinet du petit Hans, ou de quelque autre, devant le "Wiwimacher", le "fait-pipi", de quelque façon qu’on l’appelle, feront des réflexions comme : "il est fort bien doué mon petit", ou bien : "tu auras beaucoup d’enfants". Bref, l’appréciation en tant que portée sur l’objet, lui, bel et bien partiel encore ici, est quelque chose qui contraste avec le refus du désir.   

Ici, au moment même de la rencontre avec ce qui sollicite le sujet dans le mystère du désir, la division s’instaure entre cet objet qui devient la marque d’un intérêt privilégié, cet objet qui devient l’ἄγαλμα [agalma], la perle au sein de l’individu qui ici tremble autour du point pivot de son avènement à la plénitude vivante, et en même temps d’un ravalement du sujet.

Il est apprécié comme objet, il est déprécié comme désir. Et c’est là autour, que va tourner cette instauration du registre de "l’avoir", que vont jouer les comptes. 

Auteur: Lacan Jacques

Info: 22 mars 1961

[ culpabilité ] [ censure ] [ refoulement ] [ division subjective ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

concept psychanalytique

[…] la demande anale […] se caractérise par un renversement complet [de la demande orale] au bénéfice de l’autre, de l’initiative.

Et que c’est proprement là que gît - c’est-à-dire à un stade pas si évidemment avancé ni sûr dans notre idéologie normative - la source de la discipline, je n’ai pas dit le devoir, la discipline comme on dit, de la propreté où la langue française marque si joliment l’oscillation avec la propriété, avec ce qui appartient en propre, l’éducation, les bonnes manières si je puis dire.

Ici la demande est extérieure, et au niveau de l’autre, et se pose articulée comme telle. L’étrange est qu’il nous faut voir là et reconnaître, dans ce qui a toujours été dit, et dont il semble que personne n’ait vraiment traité la portée, que là naît à proprement parler l’objet de don comme tel, et que ce que le sujet peut donner dans cette métaphore est exactement lié à ce qu’il peut retenir, à savoir son propre déchet, son excrément. Il est impossible de ne pas voir quelque chose d’exemplaire, quelque chose qui est à proprement parler indispensable à désigner comme le point radical où se décide la projection du désir du sujet dans l’autre.

Il est un point de la phase, où le désir s’articule et se constitue, où l’autre en est à proprement parler le dépotoir. Et l’on n’est pas étonné de voir que les idéalistes de la thématique d’une "hominisation" du cosmos, ou comme ils sont forcés de s’exprimer de nos jours : de la planète, une des phases manifeste depuis toujours de l’hominisation de la planète, c’est que l’animal–homme en fait à proprement parler un dépotoir, un dépôt d’ordures. Le témoignage le plus ancien que nous ayons d’agglomérations humaines comme telles, ce sont d’énormes pyramides de débris de coquillages, ça a un nom scandinave [Kjökkenmödding].

Ce n’est pas pour rien que les choses sont ainsi. Bien plus il semble que s’il faut quelque jour échafauder le mode par où l’homme s’est introduit au champ du signifiant, c’est dans ces premiers amas qu’il conviendra de le désigner. Ici le sujet se désigne dans l’objet évacué comme tel. Ici est, si je puis dire, le point zéro du désir. Il repose tout entier sur l’effet de la demande de l’Autre. L’Autre en décide, et c’est bien où nous trouvons la racine de cette dépendance du névrosé. Là est le point sensible, la note sensible par quoi le désir du névrosé se caractérise comme prégénital.

C’est pour autant qu’il dépend tellement de la demande de l’Autre, que ce que le névrosé demande à l’Autre, dans sa demande d’amour de névrosé, c’est qu’on lui laisse faire quelque chose de cette place du désir, que c’est cette place du désir qui reste manifestement, jusqu’à un certain degré dans la dépendance de la demande de l’Autre. Car le seul sens que nous puissions donner au stade génital pour autant qu’à cette place du désir reparaîtrait quelque chose qui aurait droit à s’appeler un désir naturel - encore que, vu ses nobles antécédents, il ne puisse jamais l’être - c’est que le désir devrait bien un jour apparaître comme ce qui ne se demande pas, comme viser ce qu’on ne demande pas.

Et puis ne vous précipitez pas pour dire que c’est ce qu’on prend, par exemple, parce que tout ce que vous dites ne fera jamais que vous faire retomber dans la petite mécanique de la demande. Le désir naturel a - à proprement parler - cette dimension de ne pouvoir se dire d’aucune façon, et c’est bien pour ça que vous n’aurez jamais aucun désir naturel, parce que l’Autre est déjà installé dans la place, l’Autre avec un grand A, comme celui où repose le signe. Et le signe suffit à instaurer la question : "Che vuoi ?", "Que veux-tu ?" à laquelle d’abord le sujet ne peut rien répondre, toujours retardé par la question dans la réponse qu’elle postule. 

Auteur: Lacan Jacques

Info: 22 mars 1961

[ différence ] [ oblativité ] [ merde ] [ aliénation ] [ après-coup ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

ethnologie

Quelqu’un de connu - notre ami Henri EY - a retenu son regard sur ce sujet des perversions animales, qui vont plus loin après tout que tout ce que l’imagination humaine a pu inventer. Je crois qu’il en a fait même dans l’Évolution psychiatrique un numéro.

Pris sous ce registre, ne nous voilà-t-il pas ramenés à la vue aristotélicienne d’une sorte de champ externe au champ humain du fondement du désir pervers ? C’est là que je vous arrêterai un instant en vous priant de considérer ce que nous faisons quand nous nous arrêtons à ce fantasme de "la perversion naturelle". Je ne méconnais pas, en vous priant de me suivre sur ce terrain, ce que peut paraître avoir de pointilleux, de spéculatif une telle réflexion, mais je crois qu’elle est nécessaire pour décanter ce qu’il y a à la fois de fondé et d’infondé dans cette référence.

Et aussi bien, par là allons-nous - vous allez le voir tout de suite - nous trouver rejoindre ce que je désigne comme fondamental dans la subjectivation, comme moment essentiel de toute instauration de la dialectique du désir.

Subjectiver la mante religieuse en cette occasion, c’est lui supposer - ce qui n’a rien d’excessif - une jouissance sexuelle.

Et après tout nous n’en savons rien, la mante religieuse est peut-être, comme DESCARTES n’hésiterait pas à dire, une pure et simple machine - "machine" : dans son langage à lui - qui suppose justement l’élimination de toute subjectivité. Nous n’avons nul besoin, quant à nous, de nous tenir à ces positions minimales : nous lui accordons cette jouissance. Mais cette jouissance - c’est là le pas suivant - est-elle jouissance de quelque chose en tant qu’elle le détruit ? Car c’est seulement à partir de là qu’elle peut nous indiquer les intentions de la nature.

[…]

Il n’est pas douteux que, pas seulement dans ce qui nous fascine nous, mais dans ce qui fascine le mâle de la mante religieuse, il y a cette érection d’une forme fascinante, ce déploiement, cette attitude d’où pour nous elle tire son nom : "la mante religieuse", c’est singulièrement de cette position - non sans doute sans prêter pour nous à je ne sais quel retour vacillant - qui se présente à nos yeux comme celle de la prière. Nous constatons que c’est devant ce fantasme, ce fantasme incarné, que le mâle cède, qu’il est pris, appelé, aspiré, captivé dans l’étreinte qui sera pour lui mortelle. Il est clair que l’image de "l’autre imaginaire" comme tel est là présente dans le phénomène, qu’il n’est pas excessif de supposer que quelque chose se révèle là de cette image de l’autre.

Mais est-ce pour autant dire qu’il y a là déjà quelque préfigure, une sorte de calque inversé de ce qui se présenterait donc chez l’homme comme une sorte de reste, de séquelle, d’une définie possibilité des variations du jeu des tendances naturelles ? Et si nous devons accorder quelque valeur à cet exemple, monstrueux à proprement parler, nous ne pouvons tout de même pas faire autrement que remarquer que la différence avec ce qui se présente dans la fantasmatique humaine - celle où nous pouvons partir avec certitude du sujet, là où seulement nous en sommes assurés, à savoir en tant qu’il est le support de la chaîne signifiante - nous n’y pouvons donc pas ne pas remarquer que dans ce que nous présente la nature il y a, de l’acte à son excès, à ce qui le déborde et l’accompagne, à ce surplus dévorateur qui le signale pour nous comme exemple d’une autre structure instinctuelle, qu’il y a là synchronie : c’est que c’est au moment de l’acte que s’exerce ce complément pour nous exemplifiant la forme paradoxale de l’instinct.

Dès lors, est-ce qu’ici ne se dessine pas une limite qui nous permet de définir strictement en quoi ce qui est exemplifié nous sert, mais ne nous sert qu’à nous donner la forme de ce que nous voulons dire quand nous parlons d’un désir. Si nous parlons de la jouissance de cet autre qu’est la mante religieuse, si elle nous intéresse en cette occasion, c’est que, ou bien elle jouit là où est l’organe du mâle, et aussi elle jouit ailleurs, mais où qu’elle jouisse - ce dont nous ne saurons jamais rien, peu importe - qu’elle jouisse ailleurs ne prend son sens que du fait qu’elle jouisse - ou ne jouisse pas, peu importe - . Qu’elle jouisse où ça lui chante, ceci n’a de sens, dans la valeur que prend cette image, que du rapport à un "là" d’un jouir virtuel.

Mais en fin de compte dans la synchronie - de quoi que ce soit qu’il s’agisse - ce ne sera jamais après tout, même détournée, qu’une jouissance copulatoire. […] 

Cette préférence de la jouissance à toute référence à l’autre se découvre comme la dimension de polarité essentielle de la nature. Il n’est que trop visible que ce sens moral, c’est nous qui l’apportons, mais que nous l’apportons dans la mesure où nous découvrons le sens du désir comme ce rapport à quelque chose qui, dans l’autre, choisit cet objet partiel.

Faisons ici encore un peu plus attention. Cet exemple est-il pleinement valable pour nous illustrer cette préférence de la partie par rapport au tout, jugement illustrable dans la valeur érotique de cette extrémité mamelonnaire dont je parlais tout à l’heure ? Je n’en suis pas si sûr, pour autant que c’est moins, dans cette image de la mante religieuse, la partie qui serait préférée au tout - de la façon la plus horrible, nous permettant déjà de court-circuiter la fonction de la métonymie - que plutôt le tout qui est préféré à la partie.

N’omettons pas en effet que, même dans une structure animale aussi éloignée de nous en apparence que l’est celle de l’insecte, la valeur de concentration, de réflexion, de totalité, représentée quelque part dans l’extrémité céphalique, assurément fonctionne, et qu’en tout cas, dans le fantasme, dans l’image qui nous attache, joue avec son accentuation particulière, cette acéphalisation du partenaire telle qu’elle nous est présentée ici. 

Auteur: Lacan Jacques

Info: 22 mars 1961

[ psychanalyse ] [ animaux-par-hommes ] [ diachronie ] [ temporalité ] [ différence ] [ grand Autre ] [ objet a ]

 

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objet partiel

[…] l’objet qu’on appelle le nipple en anglais, le "bout de sein", le mamelon prend à terme, dans l’érotisme humain, sa valeur d’ἄγαλμα [agalma], de merveille, d’objet précieux, devenant le support de cette volupté, de ce plaisir d’un mordillement où se perpétue ce que nous pouvons bien appeler une "voracité sublimée" en tant qu’elle prend ce Lust, ce plaisir et aussi bien ces Lüste, ces désirs - vous savez l’équivoque que conserve en lui le terme allemand qui s’exprime dans ce glissement de signification produit du passage du singulier au pluriel - donc son plaisir et ses désirs, sa convoitise, cet objet oral les prend d’ailleurs.

C’est en ça que, par une inversion de l’usage du terme de "sublimation", j’ai le droit de dire qu’ici nous voyons cette déviation quant au but en sens inverse de l’objet d’un besoin. En effet, ce n’est pas de la faim primitive que la valeur érotique de cet objet privilégié prend ici sa substance, l’ÉROS qui l’habite vient nachträglich, par rétroaction, seulement après-coup, et c’est dans la demande orale que s’est creusée la place de ce désir. S’il n’y avait pas la demande, avec l’au-delà d’amour qu’elle projette, il n’y aurait pas cette place en deçà : du désir, qui se constitue autour d’un objet privilégié. La phase orale de la libido sexuelle exige cette place creusée par la demande. 

Auteur: Lacan Jacques

Info: 22 mars 1961

[ stade ] [ pulsion ] [ satisfaction ]

 

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