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écologie

La vie systématique, qui ne gêne en rien la liberté individuelle, n'existe encore nulle part et pour aucun peuple à la surface du globe. L'hygiène du genre humain n'est pas encore créée. Un jour on comprendra que tous les éléments dont le globe se compose, toutes les productions qu'il engendre, toutes les effluves [sic] qu'il rayonne, toutes les forces qu'il dégage doivent se mettre en équilibre avec la vie humaine et que le secret de la vie est là tout entier. C'est ce que l'avenir saura et verra.

Auteur: Hugo Victor

Info: Philosophie prose, Océan, Oeuvres complètes, Robert Laffont Bouquins 1989 <1852 p.62>

 

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orphelins

Près du lit où gisait la mère de famille,

Deux tout petits enfants, le garçon et la fille,

Dans le même berceau souriaient endormis.



La mère, se sentant mourir, leur avait mis

Sa mante sur les pieds et sur le corps sa robe,

Afin que, dans cette ombre où la mort nous dérobe,

Ils ne sentissent pas la tiédeur qui décroît,

Et pour qu'ils eussent chaud pendant qu'elle aurait froid.


Auteur: Hugo Victor

Info: Les pauvres gens, extrait

[ poème ] [ misère ]

 
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Ajouté à la BD par miguel

avarice

Dans ce siècle on fait des affaires, on joue à la bourse, on gagne de l'argent, et l'on est pingre. On soigne et on vernit sa surface ; on est tiré à quatre épingles, lavé, savonné, ratissé, rasé, peigné, ciré, lissé, frotté, brossé, nettoyé au dehors, irréprochable, poli comme un caillou, discret, propret, et, en même temps, vertu de ma mie ! On a au fond de la conscience des fumiers et des cloaques à faire reculer une vachère qui se mouche dans ses doigts. J'octroie à ce temps-ci cette devise : propreté sale.

Auteur: Hugo Victor

Info: Les Misérables

[ masque ]

 

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déclaration d'amour

Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,
Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m'attends.
J'irai par la forêt, j'irai par la montagne.
Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.

Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,
Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,
Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,
Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.

Je ne regarderai ni l'or du soir qui tombe,
Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur,
Et quand j'arriverai, je mettrai sur ta tombe
Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur.

Auteur: Hugo Victor

Info: Les contemplations

[ poème ]

 

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justice

Tous les gouvernements ont de tout temps violé tous les droits, à commencer par le droit des gens. Les canons s'appelaient l'ultima ratio. Qui a force a droit, voilà quelle était la maxime ; les petits états dévorés par les grands ; les poules mangées par les renards, les renards mangés par les loups, les loups mangés par les lions, voilà quelle était la pratique. Ce qui est une nouveauté, c'est le respect du droit. Ceci est l'honneur de la civilisation du XIXe siècle de vouloir que le faible soit respecté par le fort, et que la morale éternelle soit au-dessus des piques et des mousquets.

Auteur: Hugo Victor

Info: Choses vues, <p.682>

[ historique ] [ guerre ]

 

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analyse

Dans Shakespeare, les oiseaux chantent, les buissons verdissent, les coeurs aiment, les âmes souffrent, le nuage erre, il fait chaud, il fait froid, la nuit tombe, le temps passe, les forêts et les foules parlent, le vaste songe éternel flotte. La sève et le sang, toutes les formes du fait multiple, les actions et les idées, l'homme et l'humanité, les vivants et la vie, les solitudes, les villes, les religions, les diamants, les perles, les fumiers, les charniers, le flux et le reflux des êtres, le pas des allants et venants, tout cela est sur Shakespeare et dans Shakespeare, et, ce génie étant la terre, les morts en sortent.

Auteur: Hugo Victor

Info: William Shakespeare

[ théâtre ]

 

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déclaration d'amour

Tu me vois bon, charmant et doux, ô ma beauté ;
Mes défauts ne sont pas tournés de ton côté ;
C'est tout simple. L'amour, étant de la lumière,
Change en temple la grotte, en palais la chaumière,
La ronce en laurier-rose et l'homme en demi-dieu.
Tel que je suis, rêvant beaucoup et valant peu,
Je ne te déplais pas assez pour que ta bouche
Me refuse un baiser, ô ma belle farouche,
Et cela me suffit sous le ciel étoilé.
Comme Pétrarque Laure et comme Horace Églé,
Je t'aime. Sans l'amour l'homme n'existe guère.
Ah ! J'oublie à tes pieds la patrie et la guerre
Et je ne suis plus rien qu'un songeur éperdu.

Auteur: Hugo Victor

Info: Océan, 1874

[ poème ]

 

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introspection

Chose inouïe, c’est au dedans de soi qu’il faut regarder le dehors. Le profond miroir sombre est au fond de l’homme. Là est le clair-obscur terrible. La chose réfléchie par l’âme est plus vertigineuse que vue directement. C’est plus que l’image, c’est le simulacre, et dans le simulacre il y a du spectre. Ce reflet compliqué de l’Ombre, c’est pour le réel une augmentation. En nous penchant sur ce puits, notre esprit, nous y apercevons à une distance d’abîme, dans un cercle étroit, le monde immense. Le monde ainsi vu est surnaturel en même temps qu’humain, vrai en même temps que divin. Notre conscience semble apostée dans cette obscurité pour donner l’explication.
C’est là ce qu’on nomme l’intuition.

Auteur: Hugo Victor

Info: Proses philosophiques, Préface de mes œuvres et post-scriptum de ma vie

[ miroir ] [ mémoire ]

 

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morte saison

En hiver la terre pleure;

Le soleil froid, pâle et doux,

Vient tard, et part de bonne heure,

Ennuyé du rendez-vous.



Leurs idylles sont moroses.

- Soleil! aimons! - Essayons.

O terre, où donc sont tes roses?

- Astre, où donc sont tes rayons?



Il prend un prétexte, grêle,

Vent, nuage noir ou blanc,

Et dit : - C'est la nuit, ma belle! –

Et la fait en s'en allant;



Comme un amant qui retire

Chaque jour son coeur du noeud,

Et, ne sachant plus que dire,

S'en va le plus tôt qu'il peut.

Auteur: Hugo Victor

Info: En hiver la terre pleure

[ poème ]

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste

contamination

M Leuret, le médecin des fous, est en train de devenir fou. La contagion de la folie a ceci de remarquable que ne se communiquant pas par le toucher comme la peste, la rage, la vérole, etc., ne se communiquant pas par l'air respirable comme le typhus, le choléra, la fièvre jaune etc., la maladie se communique évidemment par l'imagination. Troisième agent morbide, troisième véhicule à contagion auquel les médecins n'avaient pas pensé. Plus on ira, plus on reconnaîtra que les maladies peuvent naître, empirer, guérir par l'imagination. Beaucoup de remèdes, beaucoup de systèmes médicaux sont efficaces par cela seul que le malade y croit. En médecine comme en autre chose, la foi sauve. Ceci n'est qu'une vue jetée de côté sur une immense question ; j'y reviendrai.

Auteur: Hugo Victor

Info: Choses vues, Histoire, OEuvres complètes, Laffont, Bouquins 1987 16 décembre 1847 p.657

[ placebo ] [ inquiétude ] [ suggestion ]

 

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