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rapports humains

Trente minutes dans la fosse aux lions : L'interview que Trump pensait maîtriser 

Il se passe quelque chose d'étrange lorsqu'on regarde l'intégralité de l'interview de trente minutes au lieu de la version tronquée qui circule sur Internet. Les angles s'adoucissent. Les masques tombent. Et l'on commence à percevoir la véritable dynamique de l'interaction : où se situe le pouvoir, où transparaît l'insécurité, où le ton change, où la vérité éclate par hasard. L'extrait viral donne l'impression d'un moment fugace. La réunion complète révèle une dynamique.

Ce n'était pas une confrontation. Ce n'était pas une humiliation. Ce n'était pas un triomphe pour l'un ou l'autre. C'était quelque chose de bien plus révélateur : une étude de cas sur le comportement d'un tyran lorsqu'il ne peut plus s'appuyer sur la peur, et sur la manière dont un homme politique de principes se comporte lorsqu'il refuse le rôle de victime.

La réunion commence comme toutes les réunions de Trump : dans le brouhaha. Les cinq premières minutes sont du pur Trump : des monologues déguisés en salutations, des chiffres gonflés à l'extrême, des souvenirs épars des années 80 comme si cette époque l'avait figé dans l'ambre. On croirait presque entendre son cerveau passer en revue ses plus grands succès, cherchant à imposer son style : " C'est mon espace. Ma chaise. Mon histoire. "

Mais Mamdani ne réagit à rien.

Et c'est le premier tournant de la réunion.

Un homme comme Trump a besoin de réactions émotionnelles pour fonctionner. La peur fonctionne. La flatterie fonctionne. Même la colère fonctionne. Mamdani ne lui en donne aucune. Il reste assis, imperturbable, refusant de laisser l'autre dicter le rythme émotionnel. C'est un détail, mais avec Trump, c'est suffisant pour briser le cycle.

Puis vient le changement – la phase du " Trump courtois ".

On confond souvent cela avec de la maturité ou de la diplomatie. Il n'en est rien. C'est un réflexe que Trump n'utilise que lorsqu'il ne parvient pas à dominer la situation. Le ton s'adoucit, les sourcils se lèvent, les compliments fusent, forcés et mielleux.

" Vous faites un excellent travail. "

" New York a de la chance de vous avoir. "

" Vous êtes très intelligent. "

Cela sonne comme un discours d'homme d'État, jusqu'à ce qu'on se souvienne que ce même homme l'avait traité de menace communiste deux semaines plus tôt. Ce qui se passe ici n'est pas du respect, mais de l'adaptation. Un caméléon qui tente de se fondre dans le décor.

Trump est courtois lorsque cela l'arrange.

Alors que Mamdani aborde les questions politiques, Trump se lance dans des récits autobiographiques. C'est le passage le plus révélateur : de la douzième à la dix-huitième minute. Mamdani essaie de parler comme un maire nouvellement élu :

transports en commun

logement

Rikers

coopération fédérale

protection des immigrants

Des problèmes concrets, des enjeux réels, une gouvernance réelle.

Trump répond en se réfugiant dans sa propre mythologie. Des statistiques criminelles sorties de mémoire et qui n'existent pas. Des griefs contre les procureurs. Des anecdotes du " vieux temps ". Des plaintes concernant le traitement injuste qu'il aurait subi.

Ce n'est pas du sabotage, c'est de l'incapacité.

Mamdani utilise un langage civique que Trump ne comprend pas. Ils ne parlent pas la même chose. Ils ne sont même pas sur le même continent.

Puis vient le moment que tout le monde analyse : la phrase " tendances fascistes ".

Et oui, cela s'est produit pendant la réunion, pas après. Mamdani n'instrumentalise pas le mot. Il n'en fait pas un titre à sensation. Il fait quelque chose de plus dangereux : il nomme analytiquement le schéma.

Rafles d'immigrants.

Représailles politiques.

Cibler la dissidence.

Érosion des contre-pouvoirs.

Menaces contre le pouvoir judiciaire.

Il expose les preuves et nomme le comportement : tendances fascistes. Trump hoche la tête et sourit comme quelqu'un à qui on dit qu'il a un excellent swing de golf. Ce n'est pas de la bravade. Ce n'est pas du déni.

C'est quelque chose de presque plus triste : il ne comprend le langage de la critique que lorsqu'elle est directe et émotionnelle. Mamdani a orienté la discussion vers l'analyse politique, un domaine où Trump n'a pas sa place. Alors il se contente de… l'accepter. Non pas parce qu'il est d'accord, mais parce qu'il est incapable de saisir le véritable sens des mots.

Les dix dernières minutes dressent le portrait le plus clair de la psyché de Trump.

Dès que Mamdani refuse de céder, Trump compense en flattant à outrance :

" Vous allez surprendre. "

" Je me sens très à l'aise avec vous. "

" Nous allons très bien nous entendre. "

C'est de la domination déguisée en bienveillance. Quand Trump ne parvient pas à conquérir, il tente de s'approprier. Il intègre l'autre à son récit : Nous sommes pareils. Nous sommes alliés. Vous m'approuvez. Je vous approuve. C'est une sorte de camouflage politique : digérer la menace en la flattant.

Mamdani ne mord pas à l'hameçon. Il ne se bat pas. Il ne flatte pas. Il continue simplement à parler franchement.

Ce qui place Trump dans la position qu'il déteste le plus : jouer la carte de la courtoisie devant un public qui n'est pas dupe.

Ce que la rencontre a vraiment révélé. L'interview complète ne porte pas sur Mamdani qualifiant Trump de fasciste. Il ne s'agit pas de Trump feignant la courtoisie. Il ne s'agit pas d'un maire progressiste rencontrant un président autoritaire.

Ce que la rencontre a révélé est plus simple et plus accablant :

Trump n'est puissant que lorsque l'auditoire le craint.

Dès que la peur disparaît, il devient étrangement doux, étrangement poli et totalement incapable de dominer la conversation.

On pense que les tyrans s'emportent parce qu'ils sont forts.

Mais la vérité est qu'ils ne se mettent en colère que lorsqu'ils savent que l'auditoire l'encaissera.

Mamdani ne l'a pas encaissée. Alors Trump ne s'est pas mis en colère. Il a cédé. Avec élégance. Avec discrétion. Comme un homme qui sait que les caméras le filment et qui ne veut pas que le monde voie son vrai visage lorsque le masque tombe. Et s'il y a une leçon à tirer pour le reste du pays, c'est celle-ci : La peur alimente l'autoritarisme.

Supprimez-la, et même un homme fort commence à avoir l'air d'un homme.



 

Auteur: Brissa Didier

Info:

[ antagonistes ] [ états-unis ] [ médiatisés ] [ scrutés ] [ hypocrisie ]

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste