amour
Qui aime est toujours très esclave, mais ne se soumet jamais vraiment.
Auteur:
Guimaraes Rosa Joao
Années: 1908 - 1967
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: H
Profession et précisions: diplomate et écrivain brésilien.
Continent – Pays: Amérique du Sud - Brésil
Info:
Diadorim, Albin Michel 2006
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liberté
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matin
On se recroquevillait dans le froid, on entendait la rosée, le bois plein de senteurs, le crépitement des étoiles, la présence des grillons et le poids des cavaliers. L'aube pointait, cette entre-lueur de l'aurore, quand le ciel blanchit. Et à mesure que l'air devenait gris, les contours des cavaliers, ce flou, se précisaient. Et pardonnez-moi de m'attarder à tant de détails. Mais aujourd'hui encore j'ai cette heure dans les yeux, tout cela si bon ; et, ce que c'est, c'est de la nostalgie.
Auteur:
Guimaraes Rosa Joao
Années: 1908 - 1967
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: H
Profession et précisions: diplomate et écrivain brésilien.
Continent – Pays: Amérique du Sud - Brésil
Info:
Diadorim, pp 112-113, Albin Michel 2006
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point du jour
]
raconter sa vie
Le souvenir de sa vie, on le conserve en morceaux séparés, chacun avec sa marque et son cachet. Je crois pas qu'ils peuvent se mélanger. Faut tout raconter à la file, cousu à gros points, même si c'est des choses peu importantes. Quand aujourd'hui je regarde les événements que j'ai réellement vécus, grandes joies ou tristesses, je vois que je suis une autre personne. ça vient en désordre. Je raconte tout comme ça se présente. Monsieur est bien bon de m'écouter. Y a des moments anciens qui sont beaucoup plus près de vous que des récents. Monsieur sait bien.
Auteur:
Guimaraes Rosa Joao
Années: 1908 - 1967
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: H
Profession et précisions: diplomate et écrivain brésilien.
Continent – Pays: Amérique du Sud - Brésil
Info:
Diadorim, trad Jean-Jacques Villard
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existence mémorisée
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relativité
]
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discontinuité
]
prédestination
En réalité, je le sais depuis toujours. Je n’ai jamais désiré qu’une chose et je me suis de tout temps acharné à la retrouver, la seule chose – celle entière – dont la signification et la révélation entraperçue ont depuis toujours été en moi. Et c'était que : il existe une ordonnance, une modalité de chemin ajusté, resserré, à vivre pour chaque personne - et ce plan, chacun a le sien propre – mais que le commun des hommes ne sait pas le trouver ; et comment une personne toute seule pourrait-elle, de par elle-même, arriver à le trouver et à savoir ? Ce nord pourtant existe. Il se doit d’exister. Sinon, la vie de tout un chacun ne serait jamais autre chose qu’un brouillon dans l’insanité de ce qui est. Étant donné que : chaque jour, à chaque heure, il n'existe, parmi toutes celles possibles, qu'une seule action qui réussisse à être la bonne. Elle s’y cache bien; mais en dehors de cette occurrence, quoi que je fasse, quoi que vous fassiez, quoi que fassent Pierre ou Paul, quoi que tout le monde veuille bien faire ou se garder de faire, tout résulte faux, se révèle erroné. Car telle est l’autre loi - cachée et testable quoique introuvable - du vivre véritable : que pour chacun de nous, notre déroulé a été projeté, comme au théâtre, où ce qui revient à chaque interprète – sa part, a déjà été inventé, tracé sur un papier…
Idem, traduit par Maryvonne Lapouge-Pettorelli (depuis : Et c'était)
En réalité, je le sais depuis toujours. Je n’ai jamais désiré qu’une chose et je me suis de tout temps acharné à la retrouver, la seule chose – celle entière – dont la signification et la révélation entraperçue ont depuis toujours été en moi. Et c'était : qu'il existe une norme, la recette d'un chemin sûr, étroit, que chaque personne doit vivre - et ce mémento, chacun a le sien - mais tel qu'on est, dans la vie courante, on ne sait pas le trouver ; et comment une personne pourrait-elle, toute seule, d'elle-même, arriver à trouver, à savoir ? Mais, ce nord existe. Il faut qu'il existe. Sinon, la vie de chacun ne pourrait que rester à jamais la confusion de cette folie qu'elle est. Vu que : chaque jour, à chaque heure, parmi toutes nos actions éventuelles, il n'y en a qu'une qui réussisse à être la bonne. Le secret en est bien dissimulé ; mais, en dehors de cette conséquence, quoi que je fasse, quoi que vous fassiez, quoi que fassent Pierre et Paul, quoi que tout le monde fasse, ou se garde de faire, tout devient faux, et c'est la méprise. Car elle est autre la loi - cachée et visible, mais introuvable - du vivre véritable : pour chaque personne, nos lendemains ont déjà été projetés, comme ce qui au théâtre, pour chaque exécutant - son rôle déjà tout inventé - est écrit sur un papier...
Auteur:
Guimaraes Rosa Joao
Années: 1908 - 1967
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: H
Profession et précisions: diplomate et écrivain brésilien.
Continent – Pays: Amérique du Sud - Brésil
Info:
Diadorim, version originale, "Grande Sertão: Veredas" - São Paulo, Companhia das Letras, 2019, trad Jean-Jacques Villard
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prédétermination
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