abdiquer
Quand tu entendras, à l’heure de minuit, une troupe invisible passer avec des musiques exquises et des voix, ne pleure pas vainement ta Fortune qui déserte enfin, tes œuvres échouées, tes projets qui tous s’avérèrent illusoires. Comme un homme courageux qui serait prêt depuis longtemps, salue Alexandrie qui s’en va. Surtout ne commets pas cette faute : ne dis pas que ton ouïe t’a trompé ou que ce n’était qu’un songe. Dédaigne cette vaine espérance… Approche-toi de la fenêtre d’un pas ferme, comme un homme courageux qui serait prêt depuis longtemps ; tu te le dois, ayant été jugé digne d’une telle ville… Ému, mais sans t’abandonner aux prières et aux supplications des lâches, prends un dernier plaisir à écouter les sons des instruments exquis de la troupe divine, et salue Alexandrie que tu perds.
Auteur:
Cavafis Constantin
Années: 1863 - 1933
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: poète, journaliste, courtier
Continent – Pays: Europe - Grèce
Info:
Dans "Les dieux désertent Antoine", traduction de Yourcenar in Poèmes, Gallimard
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humilité
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