maladie professionnelle
Avant d’être l’avant-poste du capitalisme climatique, d’où le président Macron réconcilie industriels et écologistes en 2020, l’usine SAFT de Nersac fabriqua des batteries au cadmium entre 1974 et 2013. Des salariés ont travaillé sans protection pendant trente ans, en dépit des alertes de l’OMS. Certains en sont morts, mais on ne saura jamais combien, et leurs familles survivront sans dédommagement. En 2006, les élus du Comité d’hygiène de Nersac s’aperçoivent que le seuil de cadmium autorisé dans leur sang est deux fois plus élevé que chez leurs collègues de Bordeaux (10 μg/g contre 5 μg/g). Leur enquête interne les amène à suspecter "la coopération très active du médecin du travail alors en poste et d’un spécialiste du cadmium mondialement connu : le Professeur Alfred Bernard." Ce toxicologue, réputé en Belgique, est le récipiendaire de leurs analyses sanguines et urinaires. Bien qu’il préconise dans ses articles scientifiques un seuil limite de 5 μg/g, il autorise des taux de cadmium de 10 μg/g dans le sang des ouvriers, avec l’assentiment de la hiérarchie de l’usine. Qu’en conclure d’un point de vue scientifique ? Que les ouvriers sont d’utiles cobayes pour l’industrie électrique ?
Quand la SAFT entend se débarrasser d’eux en 2013, les 532 salariés craignent qu’elle ne se défausse de ses responsabilités. 90 sont déjà inaptes au travail et un premier collègue vient de mourir d’un cancer. Ils engagent une procédure pour mise en danger d’autrui et activités toxiques sans respect des règles de sécurité. Ils gagnent en première instance en 2016, mais perdent en appel en 2017. L’affaire traîne si bien qu’ils attendent toujours une date d’audience quand Macron vient chez eux en 2020 pérorer sur l’industrie verte. La cour d’appel de Bordeaux blanchit la SAFT le 19 avril 2022 : ni condamnation des dirigeants, ni indemnisations des familles. La justice française – comment la nommer autrement que justice de classe ? – est invariablement clémente avec la Société des Accumulateurs Fixes et de Tractions depuis sa fondation en 1918. La puissance technocratique efface ses crimes écologiques et sanitaires comme hier ses fautes morales.
Auteur:
PMO Pièces et main-d'oeuvre
Années: 20??
Epoque – Courant religieux: postmodernité
Sexe: R
Profession et précisions: groupe anti industriel, critique radical du progrès techno. De Grenoble
Continent – Pays: Europe - France
Info:
https://www.piecesetmaindoeuvre.com/IMG/pdf/au_nord_de_l_e_nergie_4.pdf
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