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absence

Je ne vois personne. Je ne lis rien. je ne sais pas. Je ne dis rien non plus. Ma vie est finie Lucie, je ne débute pas, je termine dans la littérature, c’est bien différent. 

Auteur: Céline Louis-Ferdinand

Info: Lettre à une amie, 1933, peu de temps après la publication de Voyage au bout de la nuit

[ dépression ] [ dévitalisation ] [ post-partum littéraire ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

langage performatif

Croyez-moi: s'il ne se trouvait pas d'esprits intelligents pour désigner à l'humanité les divers maux dont elle souffre, elle ne s'en apercevrait même pas. Et les êtres doués de sensibilité font souffrir les autres, par pure sympathie.

Auteur: Pessoa Fernando (Alv. de Campos)

Info:

[ comble de l'ironie ] [ empathie ] [ dévitalisation ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

épuisement moral

[…] ce n’est pas par complaisance mais par désespoir que les gens s’absorbent en eux-mêmes, et […] ce désespoir n’est pas l’apanage de la seule classe moyenne. […] L’effondrement de la vie personnelle ne provient pas de tourments spirituels réservés aux riches, mais de la guerre de tous contre tous, qui a toujours fait rage dans les couches inférieures de la population, et qui s’étend à présent au reste de la société. 

Auteur: Lasch Christopher

Info: Dans "La culture du narcissisme", trad. Michel L. Landa, éd. Flammarion, Paris, 2018, pages 53-54

[ social-privé ] [ dévitalisation générale ] [ perte de sens ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

féminisation

Ce qu'on cherche à émouvoir en nous, ce n'est pas ce qui est noble, généreux, viril, ce sont au contraire nos nerfs, nos pleurnicheries, notre crédulité, notre niaiserie.

Nous sommes tous heureux d'être si bons, si émus, si touchés aux entrailles que nous ne percevons pas que le flux de ces bons sentiments a fini par donner à presque tous les peuples d'Occident une sensibilité et une tournure d'esprit typiquement féminines.

Devenus des réceptacles d'une pensée étrangère, nous sommes à la fois ouverts, disponibles, tendres, et en même temps dévirilisés, sans ressort, sans personnalité et nous nous laissons souiller de toutes les immondices dont il est utile, à quelque moment de nous remplir.

Auteur: Bardèche Maurice

Info: Sparte et les Sudistes

[ déséquilibre ] [ dévitalisation ] [ sentimentalisme ] [ culture de l'émotion ] [ culte de l'émoi ]

 

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anti-communisme

Le système mis en place par Lénine est un régime totalitaire conduisant une partie de son peuple à la déportation, l’extermination ou la famine. Soljenitsyne déclarera des années plus tard que ceux qui ont mis en place ce système ne sont pas des Russes. […] Lénine instaure un régime de terreur. Les usines sont militarisées. Les ouvriers n’ont plus de droits syndicaux. Le blé est réquisitionné, entraînant une première famine en Ukraine et le développement du cannibalisme. Malgré les difficultés qu’il rencontre, Lénine a toujours pour but de déclencher une révolution mondiale. En plein XXe siècle, une idéologie dite communiste se voulant émancipatrice et libératrice des peuples devient dès son origine un système totalitaire, centralisé autour d’un homme et d’un petit groupe de révolutionnaires. Étrangement, ce régime totalitaire se maintiendra jusqu’en 1991 et connut un certain soutien en Occident.

Auteur: Anonyme

Info: Dans "Les magiciens du nouveau siècle" page 711

[ guerre larvée ] [ pion ] [ dévitalisation intérieure ] [ collectivisme mégalomane ]

 

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archimagie

Lentement, au cours du XVIIIe siècle, l’alchimie a péri par sa propre obscurité. Sa méthode d’explication : "obscurum per obscurius, ignotum per ignotius" (l’obscur par le plus obscur, l’inconnu par le plus inconnu) était incompatible avec l’esprit de recherche de l’ère des lumières, et plus particulièrement avec l’apparition d’une chimie à caractère scientifique. Cependant, ces deux forces intellectuelles nouvelles ne firent que lui donner le coup de grâce. Sa décomposition intérieure avait déjà commencé un siècle plus tôt, à l’époque de Jakob Boehme, lorsqu’un grand nombre d’alchimistes abandonnèrent leurs alambics et leurs creusets pour se consacrer à la philosophie (hermétique). C’est alors que le chimiste et le philosophe se séparèrent. La chimie devint une science de la nature, cependant que la philosophie hermétique abandonnait ses bases empiriques et se perdait dans des allégories et des spéculations aussi ampoulées que vides de tout contenu et qui ne reposaient que sur le souvenir d’un temps meilleurs.

Auteur: Jung Carl Gustav

Info: Dans "Psychologie et alchimie", éd. Buchet-Chastel, 2014, trad. par Henry Pernet et Roland Cahen, page 319

[ scission ] [ dévitalisation ] [ historique ]

 
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effondrement civilisationnel

Le point de départ de ma réflexion est la rupture anthropologique que constitua la révolution industrielle qui mit fin à plus de dix mille ans de civilisation néolithique. Le management et la technologie (qui prend aujourd’hui la forme de "l’accélération digitale") sont les fers de lance de cette société industrielle qui en toute matière cherche à atteindre l’efficience. L’extension de ce régime à l’ensemble de la planète me semble compromettre l’avenir de l’humanité : beaucoup parlent d’un accident nucléaire, d’autres d’un virus destructeur, certains de la pollution de l’eau, les derniers d’une météorite, etc. ; pour ma part, je m’inquiète de l’effet de l’industrialisation sur la structure démographique des pays dits "développés", et j’observe qu’ils ne parviennent pas à se maintenir au-delà des seuils de renouvellement des générations, sauf à recourir à l’immigration. Bref, je formule l’hypothèse que la société industrielle ne fournit aucune raison de vivre légitime et que cet effondrement des croyances fondamentales mène à une dangereuse impasse.

Auteur: Rappin Baptiste

Info: https://frblogs.timesofisrael.com/abecedaire-de-la-deconstruction-ressourcement-ou-liquidation/

[ dévitalisation ] [ dénatalité ] [ résumé ] [ pessimisme ] [ rationalisme dégénératif ]

 
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pauvreté moderne

Sans doute peut-on reconnaître les Nouveaux Pauvres, comme on les appelle. Le tout, c’est de savoir comment. Et il y a de quoi être déconcerté quand on voit qu’ils portent des vêtements propres et toute une quincaillerie, pratique, certes, et en abondance, mais qui sera dépassée l’année d’après. Et maintenant, vous voyez qui ils sont ?
On les reconnaît au fait qu’ils ne dépensent pas, qu’ils ne peuvent pas dépenser d’argent pour ce qui aide à tenir le coup. Ils mangent de la viande produite en masse par des animaux engraissés artificiellement. Vous aussi, mais vous prenez des comprimés de protéines et de vitamines B12. Ils boivent du lait pasteurisé-imputrescible. Vous aussi, mais vous prenez des comprimés de vitamine D. Ils mangent des œufs produits industriellement. Vous aussi, mais vous prenez de la vitamine A. En plus, vous prenez probablement de la Vigilone, des fortifiants, des tranquillisants, de l’acide nicotinique, de la riboflavine, de l’acide ascorbique ; j’ai visité l’armoire à pharmacie d’un ami, ils y sont tous.

Auteur: Brunner John

Info: Dans "Tous à Zanzibar", trad. Didier Merle, Librairie Générale Française, 1995, pages 399-400

[ forcenés ] [ société de consommation ] [ compléments alimentaires ] [ dévitalisation ]

 

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divertissement télévisé

Pour Reed Hastings, patron de Netflix, la télévision et son modèle linéaire sont obsolètes. Le temps passé à attendre d’un épisode à l’autre est un temps perdu. Un temps qui dévie le spectateur de la plateforme, qui le libère de ses programmes et l’autorise à penser ailleurs, à penser tout court. Lui, Reed Hastings, croit au contraire qu’il faut retenir le spectateur, saisir son regard, l’arrimer sans cesse à la plateforme – l’aliéner. Il reste en cela fidèle à la religion du capitalisme attentionnel, qui a fait de nos cerveaux “l’or gris” des temps modernes, une ressource dont il est possible de tirer profit via la revente de nos data ou le conditionnement à la publicité.

La force de Netflix est d’avoir adapté cette nécessité économique en offre culturelle, en reproduisant avec son "binge watching" l’exact business model de la dématérialisation. Notre attention est un vaste marché, qui se convertit pour son service en gain de popularité, en abonnements et cotation boursière. Nous avons, planquée là, entre les heures de travail et celles consacrées à la famille, une quantité de temps disponible que cherchent à capter le patron de Netflix et ses coreligionnaires de Twitter ou Facebook.

En marge d’une conférence de presse organisée en 2017 au siège de la plateforme, Reed Hastings avait résumé l’affaire par cette formule habile : “Notre seul concurrent dans cette industrie, c’est le sommeil.” Il faut relire cette phrase pour en mesurer toute la monstruosité. Une entreprise californienne s’estime en concurrence avec notre sommeil. Notre temps diurne ne suffit plus : elle veut pénétrer nos nuits et nos inconscients.

Auteur: Blondeau Romain

Info: "Netflix, l’aliénation en série", Seuil, 2022

[ streaming ] [ vidéo à la demande ] [ abondance ] [ overdose ] [ dévitalisation ] [ captage de l'attention ]

 
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littérature prolétaire

tous ceux-là,

ventres mous des lettres

enseignant l’anglais à l’université

qui écrivent

de la poésie

sans jambes

sans tête

sans nombril



qui savent où postuler pour obtenir des

bourses

encore des bourses et

toujours plus de bourses

auxquels on doit toujours plus

de poésie

sans mains

sans cheveux

sans yeux

tous ceux-là,

ventres mous des lettres

ont trouvé une bonne planque

parvenant même à ce que des femmes

s’attachent à leurs âmes

d’andouilles



ceux-là,

font des voyages tous frais payés

dans les îles

en Europe

à Paris

le monde entier

dans le but

soit-disant

de rassembler

du matériau

(Mexico, ils s’y rendent juste à titre privé)



pendant que les prisons débordent

d’innocents égarés

pendant que les gros bras descendent

à la mine

pendant que les fils de pauvres

se font virer de boulots

ceux-là

ne se saliront ni les mains ni

leurs âmes

ceux-là,

ventres mous des lettres

intègrent des universités

se lisent leurs poèmes

entre eux

infligent leurs poèmes à

leurs étudiants



ceux-là

prétendent que la sagesse et

l’immortalité

contrôlent les rotatives



gras du bide

tandis qu’en prison se forment les rangs pour des moitiés de repas

pendant que 34 armoires à glace sont coincés dans une mine



ceux-là



embarquent sur un bateau pour une île de la mer du sud

afin d’assembler une anthologie

de petits poèmes

entre amis



et/ou



se pointent à des manifestations contre la guerre

sans même savoir

de quelle guerre

il s’agit



ventres mous des lettres

ils dressent une cartographie de notre

culture –

une division de zéro,

une multiplication de

grâce

dépourvue de sens



"Robert Hunkerford enseigne l’anglais à

S.U. Marié. 2 enfants, un chien.

il s’agit de son premier recueil de

vers. Il travaille actuellement à la

traduction des poèmes de

Vallejo. M. Hunkerford a été récompensé

l’année dernière par un prix Sol Stein."



ceux-là,

ventres mous des lettres

enseignant l’anglais à l’université

qui écrivent

de la poésie

sans cou

sans mains

sans couilles



voilà la manière, la méthode

et la raison pour laquelle les gens

ne comprennent pas

les rues

les vers

la guerre

ou

leurs mains sur la

table



notre culture se cache dans les rêves à dentelles de

nos classes d’anglais

dans les robes à dentelles de nos classes

d’anglais



Ce qu'il nous faut c'est

des cours de langue américaine

et des poètes sortis tout droit

des mines

des docks

des usines

des hôpitaux

des prisons

des bars

des bateaux

et des aciéries

des poètes américains,

déserteurs des armées

échappés des asiles de fous

déserteurs de femmes et de vies étouffantes ;

des poètes américains :

marchands de glace, commerciaux en cravate, distributeurs de journaux, manutentionnaires, chauffeurs-livreurs, maquereaux, liftiers, plombiers, dentistes, clowns, promeneurs de chevaux, meurtriers (on a entendu parler des victimes), barbiers, mécaniciens, garçons de café, groom, passeurs de drogue, boxeurs, barmen, des autres, des autres,

des autres



Tant que ceux-là n'arriveront pas

notre pays restera

mort en honteux.

Auteur: Bukowski Charles

Info: Dans "Tempête pour les morts et les vivants", au diable vauvert, trad. Romain Monnery, 2019, "ventres mous des lettres"

[ entre-soi ] [ dévitalisation ] [ excès de confort ]

 
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