L’objet dont il s’agit dans la relation d’objet analytique est un objet que nous devons repérer, faire surgir, situer, au point le plus radical où se pose la question du sujet quant à son rapport au signifiant. Le rapport au signifiant est en effet tel que si nous n’avons affaire, au niveau de la chaîne inconsciente, qu’à des signes, et si c’est d’une chaîne de signes qu’il s’agit, la conséquence est qu’il n’y a aucun arrêt dans le renvoi de chacun de ces signes à celui qui lui succède. Car le propre de la communication par signes est de faire de cet autre même à qui je m’adresse - pour l’inciter à viser de la même façon que moi l’objet auquel se rapporte ce signe - un signe.
L’imposition du signifiant au sujet le fige dans la position propre du signifiant. Ce dont il s’agit, c’est bien de trouver le garant de cette chaîne, qui de transfert de sens de signe en signe, doit s’arrêter quelque part, ce qui nous donne le signe que nous sommes en droit d’opérer avec des signes. C’est là que surgit le privilège de Φ [grand phi] dans tous les signifiants. Et peut-être vous paraîtra-t-il trop simple, presque enfantin de souligner ce dont il s’agit à l’occasion de ce signifiant-là.
[…] Ce phallus, dont nous ne pouvons pas dire qu’il ne joue pas même avant toute exploration analytique quelque rôle dans l’imagination humaine, il est donc de nos représentations fabriquées, faites signifiantes, le plus souvent élidé. Qu’est-ce à dire ? C’est qu’après tout, de tous les signes possibles, est-ce que ce n’est pas celui qui réunit en lui-même le signe, à savoir à la fois le signe et le moyen d’action et la présence même, du désir comme tel. C’est-à-dire qu’à le laisser venir au jour dans cette présence réelle, est-ce que ce n’est pas justement ce qui est de nature, non seulement à arrêter tout ce renvoi dans la chaîne des signes, mais même à les faire entrer dans je ne sais quelle ombre de néant.
Du désir, il n’y a sans doute pas de signe plus sûr, à condition qu’il n’y ait plus rien que le désir. Entre ce signifiant du désir et toute la chaîne signifiante s’établit un rapport d’"ou bien... ou bien". La PSYCHÉ était bienheureuse dans ce certain rapport avec ce qui n’était point un signifiant, ce qui était la réalité de son amour avec ÉROS. Mais voilà ! C’est PSYCHÉ et elle veut savoir.
Elle se pose la question parce que le langage existe déjà et qu’on ne passe pas seulement sa vie à faire l’amour mais aussi à papoter avec ses sœurs. À papoter avec ses sœurs elle veut posséder son bonheur. Ce n’est pas une chose si simple. Une fois qu’on est entré dans l’ordre du langage, posséder son bonheur c’est pouvoir le montrer, c’est pouvoir en rendre compte, c’est arranger ses fleurs, c’est s’égaler à ses sœurs en montrant qu’elle a mieux qu’elles et pas seulement autre chose.
Et c’est pour ça que PSYCHÉ surgit dans la nuit, avec sa lumière et aussi son petit tranchoir. Elle n’aura absolument rien à trancher - je vous l’ai dit, parce que c’est déjà fait. Elle n’aura rien à couper, si je puis dire, si ce n’est - ce qu’elle ferait bien de faire au plus tôt - le courant, à savoir qu’elle ne voit rien d’autre qu’un grand éblouissement de lumière et que ce qui va se produire c’est, bien contre son gré, un retour prompt aux ténèbres dont elle ferait mieux de reprendre l’initiative avant que son objet se perde définitivement, qu’ÉROS en reste malade et pour longtemps, et ne doive se retrouver qu’à la suite d’une longue chaîne d’épreuves.
Années: 1901 - 1981
Epoque – Courant religieux: récent et libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: psychanalyste
Continent – Pays: Europe - France