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visionnaire

Ceux qui mettent au jour quelque proposition nouvelle sont d'abord appelés hérétiques.

Auteur: Montesquieu Charles de

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[ rejeté ]

 

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hiérarchie implicite

Le plus malheureux des invités était Jacob Finkelstein, docteur en sciences sociales, un petit famélique, correspondant peu rémunéré d’une agence de presse juive. Benedetti l’invitait aussi une fois par an pour ne pas se mettre à dos les sionistes dont, comme tout antisémite, il s’éxagérait morbidement l’influence aux Etats-Unis. A chaque cocktail, Benedetti invitait ainsi un impossible qu’on ne revoyait qu’un an plus tard. De cette manière dilués, les impossibles ne nuisaient pas à ce que Benedetti, qui se piquait de littérature, appelait le climat de son cocktail.

Nul invité ne parlait à Finkelstein, zéro social qui ne pouvait être utile à personne et, plus grave encore, qui ne pouvait nuire à personne. Pas dangereux, donc pas intéressant, pas à ménager, pas à aimer ou à feindre d’aimer. Les quatre parias de la fenêtre tenaient eux-mêmes à distance ce bas de caste dégradant. Ignoré de tous et dépourvu de congénères, le pauvre lépreux faisait alors le pressé pour se donner une contenance, sa participation au cocktail consistant à fendre bravement, à intervalles réguliers, la jacassante cohue. La tête baissée, comme alourdie par son nez, il traversait en hâte et d’un bout à l’autre l’immense salon, heurtant parfois des invités et sans nul résultat s’excusant. Faisant ainsi de foudroyantes diagonales, il camouflait son isolement en feignant d’avoir à rejoindre d’urgence une connaissance qui l’attendait là-bas, à l’autre extrémité. Son manège ne trompait d’ailleurs personne. 

Auteur: Cohen Albert

Info: Belle du Seigneur, éditions Gallimard, 1968, pages 310-311

[ mondanités ] [ rejeté ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

conversation de vieux couple

- Je crois que Papi m’appelle. Une seconde, chéri, je reviens.

Dans le corridor, elle leva la tête vers son mari penché sur la rampe de l’escalier, lui demanda avec une douceur mortelle ce qu’il désirait.

- Ecoute, Bicette, ze regrette de déranzer. Ze suis d’accord que tu ne me dises pas le menu pour avoir la surprise ce soir, mais il y a quand même une çose que z’aimerais savor, est-ce qu’il y aura de la soupe pour commencer ?

- Non. On ne sert pas de soupe à un dîner prié. (Elle avait appris cette expression la veille au cours d’un entretien avec Adrien qui l’avait lui-même récemment péchée chez les Kanakis.) Ecoute, j’ai encore des choses importantes à discuter avec Didi et j’ai besoin de calme, à cause de mes terribles fatigues de tête. Tu n’as pas d’autres questions à me poser ?

- Non, merci, répondit tristement M. Deume.

- Alors, monte chez toi et tâche de t’occuper à quelque chose d’utile.

Le petit père gravit lentement l’escalier et s’en fut chercher du réconfort au water-closet du premier étage. Assis sans nul autre but sur le siège molletonné, il plia à petites fronces parallèles une feuille de papier hygiénique, en fit un éventail japonais qu’il agita devant son visage, tout en remâchant son humiliation. Enfin, il haussa les épaules, se leva et sortit en faisant le salut fasciste. 

Auteur: Cohen Albert

Info: Belle du Seigneur, éditions Gallimard, 1968, pages 166-167

[ infantilisation ] [ mépris ] [ rejeté ] [ laissé pour compte ] [ snobisme ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

vieillards

Pourtant, quand il réfléchissait à sa condition actuelle, le vieil homme était saisi du sentiment d'avoir été injustement condamné à la réclusion à perpétuité, pour une chose sur laquelle il n'avait aucune emprise. Le crime qu'il expiait ici était simplement d'être devenu vieux et improductif, aussi obsolète que le Minitel, aussi utile qu'un flacon de shampoing dans une prise d'otages. Ce que la communauté attendait des encombrants de sa génération, c'était qu'ils eussent la sagesse élémentaire de se retirer de la circulation et de se mettre sur une voie de garage, où ils ne gêneraient personne... De se ranger pudiquement et sans esclandre, si ce n’était pas trop leur demander et tant qu’ils conservaient un peu de dignité, à l’abri des regards. On épargnait le triste spectacle des vieux aux plus jeunes, comme on regroupait autrefois les ladres dans des léproseries. Ils étaient la poussière qu'on dissimulait sous le tapis, les scories et l'écume laissées sur le bord du monde par une société en ébullition permanente. Telle était la norme et, depuis toujours, Martial se pliait à ce que toutes les normes, les règles, les lois, exigeaient de lui. Martial Chaînard aurait été du genre à continuer de traverser les routes par les passages piétons après une apocalypse nucléaire. Il était comme ça. C'était quelqu'un d’accommodant, la docilité incarnée, et il avait longtemps cru qu'on l'appréciait pour cela, pour sa faculté à épouser la forme des moules, à se fondre dans le décor sans faire de vagues.

Auteur: Soulier Frédéric

Info: Epilogue

[ rejetés ] [ exclus ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

isolement

un homme qui n'arrive pas à s'adapter à la société est appelé 

psychotique, et le jeune dans la tour du Texas

qui a tiré sur 49 personnes et en a tué 15 en était un,

bien que le corps des Marines l'ait accepté

dans ses rangs - tout est dans la manière dont on s'habille

du moment que la ruche déclare que le projet

protège la Reine, les pneus Goodyear et ainsi de

suite,

mais tel que je vois les choses depuis cette fenêtre,

son action n'a rien eu d'extraordinaire ou 

d'inattendu et les psychiatres sont juste les menteurs 

rétribués

d'un désordre social

continuel.  



et je me lève bientôt de ma chaise

et fais les cent pas

et si j’allume la radio

et par chance tombe sur Chostakovitch ou Mahler

ou m’assois pour taper une lettre au président,

les voix commencent à s’élever autour de moi :

"EH ! CA SUFFIT MAINTENANT !"

"ESPECE DE FILS DE PUTE ! ON VA APPELER LES FLICS !"



de chaque côté de chez moi il y a des appartements de luxe

la nuit des choses s’éclairent de lumières bleues et vertes

et ils ont des piscines mais les résidents ont

trop de classe pour s’y baigner

le loyer est très élevé

et ils restent là à regarder leurs murs

décorés de portraits de gens à la tête coupée

en attendant de repartir au 

TRAVAIL,

pendant ce temps, ils sentent que mes bruits ne sont pas leurs bruits –

66 personnes de chaque côté de ma tête

amoureux des Bérets verts et des piranhas :

"PANIQUEZ PAS, BON SANG !"



ceux-là je ne peux pas les voir par ma fenêtre

et j’en suis heureux

mon estomac est dans un triste état à cause de la vinasse que je

m’enfile,

et donc pour eux

je me fais silencieux

j’écoute leurs bruits-

leurs matches de base-ball, leurs films comiques, leurs jeux télévisés,

leurs baisers secs, leur sécurité étincelante,

leurs corps durs agglomérés dans les murs et assassinés,

et je vais m’attabler,

m’empare de mes crayons de fou

et commence à les dessiner sur mes murs

tous-

aimant, baisant, mangeant, chiant,

effrayés par le Christ, effrayés par la pauvreté,

effrayés par la vie,

ils se déplacent sur mes murs comme des cafards 

et je dessine des soleils entre eux

et des haches et des flingues et des tours et des bébés

et des chiens, des chats, des animaux, et cela devient

difficile de distinguer un animal

d’un autre, et tout mon corps sue, empeste,

tandis que je tremble comme un menteur sous le poids de la vérité,

alors je bois de l’eau, retire mes vêtements et me mets au lit

où je ne trouverai pas le sommeil

d’abord baisser tous les stores

puis attendre 3 heures de l’après-midi

mes filles mes femmes mon heure

sans que rien ne se passe, sans rien qui entre

ni sorte, pas de cathédrales, de musées d’art et 

de montagnes pour moi, seulement le sel de moi-même,

des fourmis,

des vieux journaux, ma honte, ma honte

de ne pas avoir

tué

(rasoir, accident de la route, essence, gaz)

(bon travail, mariage, placements boursiers)

ce qui reste de

moi-même.

Auteur: Bukowski Charles

Info: "ces fenêtres enragées qui goûtent à la vie et me coupent si je passe à travers" dans Les jours s'en vont comme des chevaux sauvages dans les collines, traduit de l’anglais par Thierry Beauchamp, éditions du Rocher, 2008

[ poème ] [ barbarie ] [ rejeté ] [ bourgeois ] [ spectateur ] [ hors du monde ] [ folie ] [ haine ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

vieillesse

Avec le faible sourire du malheur, elle considérait la valise qu'elle venait de remplir au hasard, comme en rêve, la même avec laquelle elle était partie le rejoindre à Paris, trois ans auparavant, au début de leur liaison, partie avec tant de joie. Allons, debout, fermer la valise maintenant. Elle n'y parvint pas, eut de petits sanglots impuissants de malade, s'assit sur la valise pour la boucler. Lorsqu'elle y réussit, elle n'eut pas la force de se lever, resta assise, mains pendantes. Apercevant une déchirure au bas gauche, elle haussa les épaules. Tant pis, pas le courage.

Devant cette vieille dans la glace, cette vieille Isolde qu'on avait voulu garder par pitié mais qu'on ne touchait plus, elle fit une grimace, déboutonna le haut de sa robe, tira sur le soutien-gorge dont les bretelles craquèrent. Eh oui, usés les pauvres. Elle se reput de leur relâchement, appuya les mains sur eux pour en accentuer la chute. Eh oui, moins fermes et c'était fini. Ils avaient baissé de trois ou quatre centimètres, fini, plus d'amour. Ramollis, plus d'amour. Elle ôta ses mains pour s'assurer de leur déchéance, remua son torse pour les voir s'en aller de part et d'autre, s'en amusa de désespoir. Tous les soirs pendant des années elle l'avait attendu, sans savoir s'il viendrait, tous les soirs habillée pour lui, sans savoir s'il viendrait, tous les soirs la villa impeccable pour lui, sans savoir s'il viendrait, tous les soirs à la fenêtre l'avoir attendu, sans savoir s'il viendrait. Et voilà, fini maintenant. Et pourquoi ? Parce que ces deux bourses en haut étaient moins enflées que celles de cette femme. Et lorsqu'il avait été malade, les nuits passées à le veiller, couchée par terre, sur le tapis, tout près du lit. Saurait-elle le soigner, l'autre ? Lui téléphoner, à cette femme, l'avertir de cette allergie au pyramidon et à l'antipyrin? Tant pis, qu'ils se débrouillent. Bien sûr, il avait de la tendresse pour elle, il faisait de son mieux les rares fois où il venait, il la complimentait de son élégance, s'intéressait à ses robes, lui parlait de ses beaux yeux. Toutes les vieilles avaient de beaux yeux, c'était leur spécialité. De temps à autre, des baisers sur la joue ou même sur l'épaule, à travers la robe. Une étoffe, ce n'était pas dégoûtant. Des baisers pour vieilles. Des caresses pour vieilles. En somme, elle le dégoûtait. Pauvre, si gêné lorsqu'il lui avait bien fallu avouer cette autre, si triste de lui faire mal. Triste, mais de vrais baisers le soir même, à l'autre.

De nouveau, devant la glace, elle remua ses seins. Hop à droite, hop à gauche ! Balancez-vous, vieillards ! Née trop tôt, voilà. Trop pressé, son père. Et puis les poches sous les yeux, la peau flasque sous le menton, les cheveux secs, la cellulite, et toutes les autres preuves de la bonté de Dieu. Elle reboutonna le haut de la robe, se rassit sur la valise, sourit à la fillette qu'elle avait été, sans cellulite, toute neuve, un peu peureuse, effrayée par une image d'un livre de prix, un nègre qui guettait derrière un arbre. Le soir, dans son petit lit, lorsqu’elle arrivait au nègre, elle fermait les yeux et tournait vite la page. Elle ne savait pas, la petite fille, ce qui l’attendait. En somme, ce qui lui arrivait maintenant avait existé d’avance, l’attendait dans le futur.

De ses deux mains en coupe, elle souleva ses seins. Voilà, ils étaient ainsi autrefois. Elle les laissa retomber, leur sourit. Les pauvres, murmura-t-elle. Le stylo qu'elle lui avait donné, il s'en servirait pour écrire à cette femme. Ariane mon unique. Bien sûr, son unique puisque glandes mammaires en bon état. Ton tour viendra, ma petite. Saleté de vieux corps, elle en était dégoutée aussi. Au cimetière, dans un trou, ce vieux dégoutant ! Sale vieille, dit-elle à la glace, pourquoi est-ce que tu es vieille, dis, sale vieille ? Tes cheveux teints ne trompent personne ! Elle se moucha, éprouva une sorte de satisfaction à se regarder dans la glace, déshonorée, assise sur une valise, en train de se moucher. Allons, se lever, faire des gestes de vie, téléphoner. 

Auteur: Cohen Albert

Info: Belle du Seigneur, éditions Gallimard, 1968, pages 524-526

[ départ ] [ enlaidissement ] [ indésirable ] [ dépréciation ] [ désamour ] [ rejetée ] [ rivalité féminine ] [ description physique ]

 

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