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question

L’aïeul interrogea le chien. Il dit, l’aveugle, quand tu étais jeune, combien de chiennes as-tu connues ?

Le chien le regardait sans comprendre.

Il dit, dis la vérité, l’aveugle, il n’y a personne d’autre que toi et moi ici, tout est tranquille.

Le chien continuait à le regarder sans comprendre.

Tu ne veux pas parler, tant pis. L’homme poussa un soupir. Un peu déprimé, il alluma sa pipe. Face à l’obscurité, il dit, comme c’est bon d’être jeune, d’avoir un corps fort et une femme la nuit. Si la femme est intelligente, au retour du champ, elle t’apporte de l’eau, et si ton visage est en sueur, elle te passe un éventail. Les jours de neige, elle te chauffe le lit. Si durant la nuit vous vous êtes retrouvés, et que tu te lèves tôt le matin pour aller au champ, elle te dit de te reposer encore un moment. Vivre de cette façon, il inspira énergiquement une bouffée de sa pipe, puis expira longuement, caressa le chien et poursuivit, vivre de cette façon, c’est vivre comme les immortels.

Il demanda, tu as eu ce genre de vie toi, l’aveugle ?

Le chien demeura silencieux.

Il dit, qu’en dis-tu, l’aveugle, est-ce que ce n’est pas pour ce genre de vie que les hommes viennent au monde ?

Auteur: Lianke Yan

Info: Les jours, les mois, les années

[ vie à deux ] [ couple ] [ homme-animal ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

évolution

Vous habitez donc là. Appartement ou maison, arrangé comme ceci ou comme cela, vraisemblablement antico-moderne, avec la lampe habituelle de confection japonaise, en tout cas il y a une salle de bains commune, la vue quotidienne d’ustensiles pour les oins différents de deux corps, un de femme, un d’homme. Il vous arrive d’y être pris de nostalgie. Aucun d’entre vous n’a personne de plus proche, non, pas même en souvenir ; pas même en espérance. Peut-on être plus unis que vous l’êtes ? On ne peut pas. Mais parfois, vous avez donc une nostalgie. De quoi ? Vous en avez le frisson. Quel frisson ? Vous voilà vivant, plein d’amour, les années infinies et éphémères, un vrai couple, tendre, sans le montrer aux invités, car vous l’êtes vraiment, un vrai couple aux corps morts d’amour qui ne se recherchent plus que rarement. Après un voyage peut-être, une séparation de la durée d’un congrès, il arrive qu’en plein jour, peu après l’arrivée, avant de défaire les valises et de raconter le minimum, vous avez une étreinte. Qu’ont à y voir les autres ? Cela rafraîchit, mais ne mérite pas un aveu. Vous avez de nouveau, comme autrefois, une journée où les heures ne comptent pas, en robe de chambre et avec les disques. Puis de nouveau la douce disparition de toute curiosité de part et d’autre, inexprimée, à peine indiquée, camouflée seulement derrière les exigences de la journée.

Auteur: Frisch Max

Info: Dans "Le désert des miroirs", page 147

[ quotidien ] [ vie à deux ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson