Le rythme, cette puissance qui ordonnance à nouveau tous les atomes de la phrase, qui enjoint de choisir les mots et colore à neuf la pensée, la rendant plus obscure, plus étrange, plus lointaine ...? car on avait remarqué qu'un vers se retient mieux qu'une phrase de prose ; on pensait également, grâce au tic-tac rythmique, se faire entendre de plus loin ...? Mais surtout : on voulait se donner le bénéfice de contrainte élémentaire, de cet effet d'attaque brusquée que la musique révèle à l'homme : le rythme est une contrainte ; il engendre une irrésistible envie de céder, de faire écho ; ce ne sont pas seulement les pieds qui suivent la cadence de la mesure, l'âme aussi.
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Info: Le gai savoir, Gallimard, Collection Folio essais n°17, 1985, p.118
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