Le plus merveilleux, c'est de t'allaiter adossée contre un arbre. Sentir ce jaillissement qui s'en va te fortifier. Le plus fabuleux c'est d'être un corps à manger, un corps nourrissant. Cette fuite du lait vers ta bouche adorable et vorace, c'est aussi la fuite du temps. Alors, je reste là, en pleine détresse, en pleine lumière, sachant bien que c'est aujourd'hui, l'éternité. Maintenant. Et tout de suite. En moi, tout se réconcilie. Tout s'apaise. J'aime le monde. La mort n'existe plus. La mort peut-elle avoir les seins gonflés de lait ? La mort peut-elle réchauffer un enfant ?
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Info: Le Petit Prince Cannibale, Actes Sud, 1990, p. 20
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