femmes-hommes

Quand nous parlions de la femme du boucher Lopez. Ses filles allaient à l’école avec moi. Elle l’a accusé de viol. Depuis longtemps, en plus de la frapper, il abusait d’elle sexuellement. J’avais douze ans et cette nouvelle m’avait profondément marquée. Comment pouvait-elle se faire violer par son mari ? Les violeurs étaient toujours des hommes inconnus qui attrapaient une femme et l’emmenaient dans un terrain vague, ou alors qui pénétraient chez elle en forçant la porte. Depuis notre plus jeune âge, on nous apprenait que nous ne devions pas parler à des inconnus et que nous devions faire attention au Satyre. Le Satyre était une entité aussi fantastique que, dans la petite enfance, le farfadet qu’on nomma la Salopa ou encore l’Ogre au Sac. C’était l’être qui pouvait te violer si tu étais toute seule à une heure indue ou si tu t’aventurais dans des coins déserts. Celui qui pouvait surgir soudain et te traîner de force sur un chantier. Personne ne nous avait dit qu’on pouvait se faire violer par son propre mari, par son père, par son frère, son cousin, son voisin, son grand-père, son instituteur. Par un homme en qui on avait confiance.

Auteur: Selva Almada

Info: Les jeunes mortes

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