référendum

Depuis qu'à intervalles réguliers on offre à l'électeur l'occasion de se prononcer sur la construction européenne, je m'en vais, certains dimanches, outrager l'avenir dans les écoles maternelles. Le temps de mettre un bulletin " non" dans l'urne adéquate et le tour est joué, l'avenir bafoué, le futur giflé, le rêve européen abreuvé des plus noires offenses.

Auteur: Muray Philippe

Info: Dans "Moderne contre moderne", 2005

[ droit de vote ] [ cynisme ] [ opposition ]

 

Commentaires: 1

Ajouté à la BD par Coli Masson

Commentaires

Coli Masson, colimasson@live.fr
2022-02-24 12:27
La suite est des plus savoureuses, à rajouter :

Depuis qu'à intervalles réguliers on offre à l'électeur l'occasion de se prononcer sur la construction européenne, je m'en vais, certains dimanches, outrager l'avenir dans les écoles maternelles. Le temps de mettre un bulletin " non" dans l'urne adéquate et le tour est joué, l'avenir bafoué, le futur giflé, le rêve européen abreuvé des plus noires offenses.
Ce qui ne serait qu’un piètre exploit (mais tout de même plaisant) si cela ne se déroulait à chaque fois dans une école maternelle, c’est-à-dire dans un de ces endroits où gronde et rage le Bien sous sa forme hyperterroriste pure. Je me suis toujours demandé comment on pouvait trouver la force d’âme de voter non, c’est-à-dire mal, c’est-à-dire adulte, dans de tels sanctuaires où le Bien sort et sue littéralement des murs par tous ces dessins d’enfants qui y sont accrochés et qui, eux, votent oui avec une férocité unanime et sans équivoque.
Une école maternelle est un monde sans nom. Un bureau de vote implanté dans une école maternelle fait par définition campagne pour l’avenir radieux. Il n’y existe aucune place pour le vote hostile, dubitatif ou réactif.


info : Dans "Exorcismes spirituels, tome 4", Les Belles Lettres, Paris, 2010, page 1605