Que Barthes s'en soit pris à Voltaire en dit long sur la profondeur des racines catholiques en France, ainsi que la lourdeur inertique des habitudes d'un endroit. L'immobilisme d'un conformisme qui ne se reconnaît pas. On préfère d'interminables volutes littéraires au simple pragmatisme qui régit la réalité. Beaucoup de mots peuvent être appliqués sur ce genre de mécanisme : conservatisme inconscient, bêtise, malhonnêteté intellectuelle, orthodoxie, prestige littéraire, académisme, défense d'une image acquise dans un biotope donné, panurgisme, égoïsme dans les arguments afin d'asseoir et de consolider sa position...
Bref dans cette affaire l'image de Barthes en prend plein les dents. Depuis Voltaire rien n'a changé : le centralisme intellectuel jacobin, le "parisianisme", cette pensée qui s'articule principalement sur le style et la mode de l'instant, n'est pas près de changer.
Qu'on m'excuse ici d'y voir une analogie avec l'arrivée de la dualité onde-particule au début du vingtième siècle. Ici aussi les conformismes, des habitudes et du langage, heurtés de plein fouet, montrèrent une immense - et mieux compréhensible - inertie. Ce qu'on appelle faussement "indéterminisme d'Heisenberg" n'était que réaction incrédule devant un fait tout bête si on y réfléchit : l'apparition d'une propriété inconnue de la matière devant les yeux ébahis de singes savants qui, s' imaginant tout savoir installé dans leur prétention de mammifères dominants, se retrouve désarmé devant une nouveauté radicale, nouveauté qui remet en cause jusqu'à leur langage. Comme si découvrez l'incroyable souplesse de la matière et des particules qui sous-tendent un univers et une vie dans laquelle nous ne comprenons rien ne pouvait avoir quelque chose d'étonnant.
Je crois même pouvoir avancer qu'ici l'homme se découvre surtout lui-même et que s'il existe un "phénomène quantique" on pourra permettre de considérer qu'il s'agit surtout d'un effet miroir, qui lui parle surtout du fonctionnement de sa propre intellection... Et que la logique booléenne qui a sous-tendu jusqu'ici tous ses raisonnements est beaucoup trop grossière pour pouvoir appréhender-manipuler cette idée de superposition ou d'intrication. Les phénomènes épigénétiques ne lui disent pas autre chose non plus.
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Info: En 2019, après lecture de l'article de Jean Dagen sur Barthes et Voltaire. Dernier paragraphe ajouté en 2023
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