homme-machine

La mécanisation du monde est entrée dans une phase d’hypertension périlleuse à l’extrême. La face même de la Terre, avec ses plantes, ses animaux et ses hommes, n’est plus la même. En quelques décennies à peine la plupart des grandes forêts ont disparu, volatilisées en papier journal, et des changements climatiques ont été amorcés ainsi, mettant en péril l’économie rurale de populations toute entières. D’innombrables espèces animales se sont éteintes, ou à peu près, comme le bison, par le fait de l’homme ; et des races humaines entières ont été systématiquement exterminées jusqu’à presque l’extinction totale, tels les Indiens de l’Amérique du Nord ou les aborigènes d’Australie.

Toutes les choses vivantes agonisent dans l’étau de l’organisation. Un monde artificiel pénètre le monde naturel et l’empoisonne. La civilisation est elle-même devenue une machine faisant ou essayant de tout faire mécaniquement. Nous ne pensons plus désormais qu’en termes de "chevaux-vapeur". Nous ne pouvons regarder une cascade sans la transformer mentalement en énergie électrique. Nous sommes incapables de contempler le bétail paissant dans les champs, sans qu’il nous fasse penser à l’idée de son rendement pour la boucherie. Nous ne savons plus admirer la beauté des ouvrages faits à la main par les peuples encore simples, sans vouloir immédiatement leur substituer des procédés techniques modernes. Notre pensée technique doit absolument se réaliser dans la pratique, judicieusement ou absurdement. Le luxe machiniste est la conséquence d’une nécessité mentale.

En dernière analyse, la machine est un symbole, tout comme son idéal secret, le mouvement perpétuel ; nécessité spirituelle et intellectuelle, mais vitale.

Auteur: Spengler Oswald

Info: L'Homme et la Technique, pp. 161-163

[ écologie ] [ manie rationaliste ]

 

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