Tout le premier je suis prêt à certifier que parmi ces martyrs, dans le milieu le moins instruit, le plus abject, j’ai trouvé des traces d’un développement moral. Ainsi, dans notre maison de force, il y avait des hommes que je connaissais depuis plusieurs années, que je croyais être des bêtes sauvages et que je méprisais comme tels ; tout à coup, au moment le plus inattendu, leur âme s’épanchait involontairement à l’extérieur avec une telle richesse de sentiment et de cordialité, avec une compréhension si vive des souffrances d’autrui et des leurs, qu’il semblait que les écailles vous tombassent des yeux ; au premier instant, la stupéfaction était telle qu’on hésitait à croire ce qu’on avait vu et entendu. Le contraire arrivait aussi : l’homme cultivé se signalait quelquefois par une barbarie, par un cynisme à donner des nausées ; avec la meilleure volonté du monde, on ne trouvait ni excuse ni justification en sa faveur.
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Info: Souvenirs de la maison des morts
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