Mais il est bon que la conscience porte de larges plaies, elle n’en est que plus sensible aux morsures.
Il me semble d’ailleurs qu’on ne devrait lire que les livres qui vous mordent et vous piquent.
Si le livre que nous lisons ne nous réveille pas d’un coup de poing sur le crâne, à quoi bon le lire ?
Pour qu’il nous rende heureux, comme tu l’écris ?
Mon Dieu, nous serions tout aussi heureux si nous n’avions pas de livres, et des livres qui nous rendent heureux, nous pourrions à la rigueur en écrire nous-mêmes.
En revanche, nous avons besoin de livres qui agissent sur nous comme un malheur dont nous souffririons beaucoup, comme la mort de quelqu’un que nous aimerions plus que nous-mêmes, comme si nous étions proscrits, condamnés à vivre dans des forêts loin de tous les hommes, comme un suicide — un livre doit être la hache pour la mer gelée en nous.
Voilà ce que je crois.
Auteur:
Info: Lettre à Oskar Pollak, 27 janvier 1904, dans Œuvres complètes, trad. Claude Marthe, éd. Gallimard, 1984, t. 4, p. 575
Commentaires: 2
Coli Masson
20.04.2020
j'ai fait une recherche pourtant... b'zar
miguel
20.04.2020
l'était déjà mais en moins complète... je vire l'autre