N'attrapes-tu que ce que lance ta propre main,
tout n'est encore qu'adresse et gain véniel -
mais as-tu repris la balle soudain
qu'une partenaire éternelle
a lancé à ton centre, l'élan bien
mesuré, selon telle courbe empruntée
au dieu qui sait bâtir les ponts,
c'est alors seulement que reprendre est mérite,
le tien non, mais celui d'un monde. Et si, bien mieux,
tu avais la force, le coeur de relancer,
ou si, miracle ! oubliant force et coeur,
tu avais relancé déjà (comme l'année
les oiseaux lance, les essaims de migrateurs
qu'une chaleur ancienne par-dessus les mers
jette à une plus jeune), alors, et dans ce risque
seul, tu serais un vrai partenaire.
Alors tu ne t'allèges plus, ni ne t'aggrave
le lancer. Le météore échappé de tes mains
vole vers son espace...
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Info: In "Poèmes épars", éd. du Seuil, p. 105 - trad. Ph. Jaccottet
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