RUBEK : Non, te dis-je, ce ne sont pas de vrais portraits.
MAJA : Qu'est-ce donc ?
RUBEK : Il y a dans ces bustes et derrière ces bustes quelque chose de suspect… quelque chose qui s'y dérobe, qui s'y cache sournoisement, et que les hommes ne peuvent distinguer.
MAJA : Vraiment ?
RUBEK : Je suis seul à le voir. Et je m'en amuse en secret. Extérieurement, on y remarque cette "ressemblance frappante" dont les gens s'ébahissent, s'émerveillent… Mais là, bien au fond, se dissimule tantôt une brave et honnête moue de cheval, tantôt le mufle d'un âne entêté, ou une tête de chien au front plat, aux oreilles pendantes, ou bien encore un groin de porc bouffi, parfois aussi l'image d'un taureau stupide et brutal.
MAJA : En un mot, tous nos bons animaux domestiques.
RUBEK : Oui, Maja, rien que nos bons animaux domestiques… ceux que les hommes ont défigurés et qui les ont défigurés à leur tour.
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Info: Quand nous nous réveillons d'entre les morts. Acte I.
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