langages

À Hambourg, où jamais elle ne prenait le train urbain sans avoir un auteur français avec elle, jamais Yuna ne serait posé la question de savoir pourquoi elle ne voulait pas apprendre le français. Cette vieille interrogation dont Yuna ne s'était jamais souciée se présenta à elle en gare de Bruxelles. Bruxelles, ce n'était pas le but de son trajet, ce n'était qu'un point d'interrogation sur le trajet. Elle avait une correspondance à y prendre et cette question à se poser : pourquoi n'ai-je pas voulu apprendre cette langue et pourquoi ne me suis-je jamais demandé à quoi cela tenait? Yuna regarda sa montre-bracelet comme si les chiffres du cadran pouvaient lui livrer réponse. Il restait encore du temps avant que n'arrive le train par lequel elle poursuivait son voyage jusqu'à Bordeaux. Elle alla dans un café à tables hautes de la gare et commanda un express. Elle s'y trouva environnée de voix parlant un français dont la mélodie lui sembla plus violemment étrangère que jamais. Fais attention! Quelque chose d'inconnu, peut-être même de dangereux, t'y attend. Cette mise en garde la secoua, son coeur battit plus nettement qu'auparavant, son sang circula plus vite, elle se mit à avoir chaud. Elle respira plus profondément, plus vite, se mit sans arrêt à changer de posture. Sa nervosité ressemblait à une sensation de bonheur. Peu après, un couple d'un certain âge se plaça près de Yuna, il parlait en néerlandais. Elle se sentit apaisée par la sonorité de cette langue qui lui donnait la sensation de ne pas être encore bien loin de chez elle. Bruxelles, est-ce loin ou près? Qui donc sait répondre à cette question embrouillée? Tour coeur est pris dans au moins un -sinon plusieurs- conflit de langues. Chaque tête contient une carte déformée de l'Europe. Sur la carte de Yuna, Bruxelles était partout sauf là où elle aurait dû se trouver. Il n'y avait qu'un trou. Un nom depuis longtemps oublié lui revint à l'esprit : Viviane. Au même instant, Yuna déchire si maladroitement le bâtonnet de sucre que de la poudre blanche se répandit sur le sol noir en ardoise. Elle essaya de balayer discrètement avec ses chaussures mais n'osa pas aller ensuite reprendre un sachet de sucre à la caisse. Le goût amer de l'express fit revenir Viviane, elle se tenait devant Yuna.

Auteur: Tawada Yoko

Info: Le voyage à Bordeaux

[ vieux continent ] [ idiomes ] [ sonorités ]

 

Commentaires: 3

Ajouté à la BD par miguel

Commentaires

Benslama, karim.benslama@orange.fr
2022-07-01 13:44
est-ce traduit par vous ?
il me semble qu'il y a quelques problèmes :
- Hambourg, ou jamais il n'y d'accent (où) ;
- les chiffres du cadran pouvaient lui livrer (une) réponse ;
- plus violemment (que) étrangère (que) jamais ;
- fais attention ! (j'essaie...) (là, c'est correct !)
:-)
- Peu Après, il y eut une majuscule inopinée ;
- Elle (se ?) dit (se sentit ?) apaisée ;
- un nom oublié lui revint du subjonctif au passé simple (sans chapeau) ,
- Yuna déchire (ou déchira ?)
(mes indications sont-elles suffisamment claires ?)
miguel, filsdelapensee@bluewin.ch
2022-07-02 13:25
Oui merci, corrections pertinentes selon moi, sauf la 2e et la dernière
miguel, filsdelapensee@bluewin.ch
2022-07-03 04:43
Non, pas traduit par moi