Une nouvelle "loi de la nature" qui englobe le vivant, les planètes et les étoiles
(Photo) Ammonite irisée trouvée près de Calgary, Canada. La diversité biologique (biodiversité) entraîne la diversité minérale, et vice versa.
Selon une équipe composée de scientifiques et de philosophes, la théorie de l'évolution formulée par Charles Darwin au 19e siècle n'est qu'un "cas particulier" d'une loi de la nature qui engloberait le vivant mais aussi les minéraux, les planètes et les étoiles. Attention, débats en perspective !
Et si l'évolution ne se limitait pas à la vie sur Terre ? C'est ce que suggère une équipe de neuf scientifiques et philosophes américains dirigés par la Carnegie Institution for Science, à travers un nouvel article publié dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences.
La publication énonce la "loi de l'augmentation de l'information fonctionnelle", selon laquelle tous les "systèmes naturels complexes" – qu'il s'agisse de la vie sur Terre ou des atomes, des minéraux, des planètes et des étoiles – évoluent vers des états "plus structurés, plus diversifiés et plus complexes".
Vivant, atomes, étoiles…
Concrètement, qu'est-ce que cela signifie ? Juste avant d'en venir aux exemples, il faut définir en quelques mots ce que les auteurs entendent par "évolution". Un terme qu'il faut ici comprendre comme "sélection pour la fonction". Restez concentré, c'est tout simple !
Si le naturaliste du 19e siècle Charles Darwin avait globalement assimilé la "fonction" à la survie des êtres, c'est-à-dire à la capacité de vivre assez longtemps pour produire une progéniture fertile, les auteurs vont plus loin en reconnaissant également comme fonctions la "stabilité" (capacité à perdurer) et la "nouveauté" (nouvelles configurations).
Pour illustrer la sélection de la "nouveauté", l'article évoque à la fois des cas qui concernent le vivant, à l'instar de la photosynthèse, de la vie multicellulaire (quand les cellules ont "appris" à coopérer jusqu'à ne former plus qu'un organisme) et des comportements animaux. Mais aussi des exemples au sein du règne minéral !
Ainsi, les minéraux de la Terre, qui étaient au nombre d'une vingtaine à l'aube de notre système solaire, sont aujourd'hui près de 6 000. Et c'est à partir de seulement deux éléments majeurs – l'hydrogène et l'hélium – que se sont constituées, peu après le big bang, les premières étoiles, au sein desquelles se sont ensuite formés une vingtaine d'éléments chimiques plus lourds, avant que la génération suivante d'étoiles ne s'appuie sur cette diversité initiale pour produire près d'une centaine d'autres éléments.
"L'évolution est partout"
"Charles Darwin a décrit avec éloquence la façon dont les plantes et les animaux évoluent par sélection naturelle, avec de nombreuses variations et caractéristiques des individus et de nombreuses configurations différentes. Nous soutenons que la théorie darwinienne n'est qu'un cas très particulier et très important au sein d'un phénomène naturel beaucoup plus vaste", résume dans un communiqué le Pr Robert M. Hazen, de Carnegie, qui a supervisé les travaux.
Et son collègue Michael L. Wong, astrobiologiste à Carnegie et premier auteur de l'étude, de compléter : "l'univers génère de nouvelles combinaisons d'atomes, de molécules, de cellules, etc. Les combinaisons qui sont stables et qui peuvent engendrer encore plus de nouveauté continueront à évoluer."
"C'est ce qui fait de la vie l'exemple le plus frappant de l'évolution, mais l'évolution est partout."
Cette nouvelle "loi de la nature" qui décrit une complexité croissante n'est pas sans en rappeler une autre : le deuxième principe de la thermodynamique. Celui-ci stipule en effet que "l'entropie" (autrement dit, le désordre) d'un système isolé augmente avec le temps – raison pour laquelle la chaleur circule toujours des objets les plus chauds vers les objets les plus froids.
Discussion ouverte
Forces et mouvement, gravité, électromagnétisme, énergie… La plupart des "lois de la nature", décrivant et expliquant les phénomènes observés en permanence dans le monde naturel, ont été énoncées il y a plus de 150 ans.
Nul doute que la nouvelle "loi de la nature" énoncée par l'équipe américaine – formée de trois philosophes des sciences, de deux astrobiologistes, d'un spécialiste des données, d'un minéralogiste et d'un physicien théorique – suscitera moult réactions au sein de la communauté scientifique.
"À ce stade du développement de ces idées, un peu comme les premiers concepts au milieu du 19e siècle pour comprendre "l'énergie" et "l'entropie", une discussion ouverte et large est maintenant essentielle", a d'ailleurs commenté dans le communiqué Stuart Kauffman, chercheur à l'Institut de biologie des systèmes (Seattle).
Pour rappel, une théorie n'est "scientifique" que si les principes qui la constituent conduisent à au moins une prédiction suffisamment précise pour pouvoir être testée par une expérience (ou une mesure) susceptible de la réfuter…
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Info: https://www.geo.fr, Nastasia Michaels, 16/10/2023
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