Je suis fatigué jusqu’à l’indifférence de ceux qui médisent de la chair. Ou bien ils la fouettent et l’épuisent comme une bête de somme et, après lui avoir demandé ce qu’elle ne peut pas donner, ils gémissent sur son néant ; ou bien ils l’enchaînent comme une bête féroce qui guetterait l’esprit pour le dévorer, sans voir que le vrai combat est à l’intérieur même de cet esprit. Tout cela n’est que projection sur la chair de l’impureté de l’âme, transfert de responsabilité du coupable sur l’innocent et, pour tout dire, recherche d’un bouc émissaire.
En réalité, dans cette chose pourrie d’équivoques et de mensonges qu’est l’amour humain, l’étreinte charnelle accomplie dans sa spontanéité naturelle, sans inhibition ni recherche, sans frein et sans aiguillon, représente un élément plus vrai et plus pur que tous les raffinements de la sensibilité et du rêve, toutes les ramifications de l’amour-propre et de l’orgueil et tous les mécanismes sociaux qui s’interposent entre notre passion et son objet. Le côté animal de l’amour fait l’effet d’une source vierge par rapport aux marécages de son côté trop humain.
Auteur:
Info: Notre regard qui manque à la lumière, Librairie Arthème Fayard, 1970, page 142
Commentaires: 0