ordre initiatique

Nous devons maintenant ajouter que le symbolisme de la "Terre sainte" a un double sens : qu’il soit rapporté au Centre suprême ou à un centre subordonné, il représente non seulement ce centre lui-même, mais aussi, par une association qui est d’ailleurs toute naturelle, la tradition qui en émane ou qui y est conservée, c’est-à-dire, dans le premier cas, la Tradition primordiale, et, dans le second, une certaine forme traditionnelle particulière. Ce double sens se retrouve pareillement, et d’une façon très nette, dans le symbolisme du "Saint Graal" qui est à la fois un vase (grasale) et un livre (gradale ou graduale) ; ce dernier aspect désigne manifestement la tradition tandis que l’autre concerne plus directement l’état correspondant à la possession effective de cette tradition, c’est-à-dire l’"état édénique" s’il s’agit de la Tradition primordiale ; et celui qui est parvenu à cet état est, par là même, réintégré dans le Pardes, de telle sorte qu’on peut dire que sa demeure est désormais dans le "Centre du Monde". Ce n’est pas sans motif que nous rapprochons ici ces deux symbolismes, car leur étroite similitude montre que, lorsqu’on parle de la "chevalerie du Saint Graal" ou des "gardiens de la Terre sainte", ce qu’on doit entendre par ces deux expressions est exactement la même chose ; il nous reste à expliquer dans la mesure du possible, en quoi consiste proprement la fonction de ces "gardiens", fonction qui fut en particulier celle des Templiers.

[…] nous dirons que les "gardiens" se tiennent à la limite du centre spirituel, pris dans son sens le plus étendu, ou à la dernière enceinte, celle par laquelle ce centre est à la fois séparé du "monde extérieur" et mis en rapport avec celui-ci. Par conséquent, ces "gardiens" ont une double fonction : d’une part, ils sont proprement les défenseurs de la "Terre sainte", en ce sens qu’ils en interdisent l’accès à ceux qui ne possèdent pas les qualifications requises pour y pénétrer, et ils constituent ce que nous avons appelé sa "couverture extérieure", c’est-à-dire qu’ils la cachent aux regards profanes ; d’autre part, ils assurent pourtant aussi certaines relations régulières avec le dehors, ainsi que nous l’expliquerons par la suite.

Auteur: Guénon René

Info: Aperçus sur l'ésotérisme chrétien, Omnia Veritas, 2017, pages 72 à 76

[ symboles sacrés ] [ signification ]

 

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