C'est un concept qui désigne un espace social structuré, relativement autonome, où s'affrontent différents agents et institutions pour le pouvoir et l'influence. Ce champ est organisé autour de relations de concurrence et de domination, et il est régi par des "lois" ou des "règles" spécifiques qui lui sont propres, que je nomme "noms du jeu".  Avec ces points principaux :

Un espace de relations sociales spécifiques. Cet espace politique est un sous-espace dans le champ social global. Il est constitué d'agents (hommes et femmes politiques, partis, mouvements sociaux, médias, etc.) qui occupent des positions différenciées en fonction de leur capital spécifique (capital politique, symbolique, social, etc.).

Autonomie relative. Ce terrain de jeu est relativement autonome, c'est-à-dire qu'il obéit à ses propres règles internes, tout en étant influencé par d'autres champs comme le champ économique ou médiatique.

Luttes pour le monopole de la représentation politique. Les agents politiques se disputent le droit de représenter et de définir les intérêts collectifs des groupes sociaux. Cela implique une lutte pour imposer leur vision légitime du monde social, c'est le pouvoir symbolique.

Habitus politiques :  Les acteurs politiques mobilisent des habitus, c'est-à-dire des dispositions socialement inculquées, qui influencent leurs prises de position et leurs pratiques dans le champ.

Rôle des dominants et des dominés. Comme dans d'autres champs, il existe une hiérarchie au sein de cet espace politique, où les agents dominants tentent de maintenir leur pouvoir, tandis que les dominés cherchent à le subvertir ou à y accéder.

Décalage entre ce champ et les attentes des dominés. Le terrain de jeu politique fonctionne souvent selon des logiques propres qui peuvent être éloignées des préoccupations des citoyens ordinaires. Cela peut entraîner un sentiment de désillusion ou de défiance envers le ou les pouvoirs.

C'est donc un microcosme social qui fonctionne selon ses propres règles, comme un "jeu" avec des enjeux spécifiques et des éléments clés, à savoir : 

Et donc une structure relationnelle, espace de positions et de relations entre différents agents (politiciens, partis, syndicats, etc.) qui luttent pour le pouvoir symbolique et matériel.

Ainsi que Des capitaux spécifiques comme : le capital politique (reconnaissance, légitimité), le capital social (réseaux, relations), le capital culturel (maîtrise du langage politique, compétences oratoires)

De plus, par un "effet de clôture", cet espace politique tend à se fermer sur lui-même, créant une séparation entre les "professionnels" de la politique et les "profanes". Cette séparation se manifeste notamment par : un langage spécialisé, des codes comportementaux spécifiques, des rituels et pratiques propres au milieu politique et des luttes de représentation. Les agents de cet espace politique se battent pour imposer leur vision du monde social et leur définition des problèmes politiques légitimes.

On parle donc d'un univers relativement autonome, avec ses propres règles du jeu, mais qui reste connecté aux autres champs sociaux (économique, médiatique, etc.).  Espace conflictuel dans lequel se joue la production et la légitimation des idées, des actions et des leaders politiques, et où les règles du jeu sont façonnées par des luttes de pouvoir.



 

En dehors de son domaine de spécialisation de plus en plus restreint, le scientifique est un profane. Ce que les membres d’une académie des sciences ont en commun, c’est une certaine forme de vie semi-parasitaire. 

Les maths pures sont proches de la philosophie

(Photo : La chercheuse a participé à un échange scolaire en France en 2006, alors qu’elle était au lycée. C’est ce qui l’a incitée à s’inscrire en classes prépas à Lyon.)

Elle travaille à l'Institut des hautes études scientifiques, à Bures-sur-Yvette (Essonne), au sud de Paris, depuis juin 2022. Née en Chine, elle rejoint la France à 15 ans – " un vrai choc culturel " – et intègre l'École normale supérieure de Paris, avant d'obtenir un doctorat de l'École polytechnique fédérale de Zurich (Suisse) sous la direction de Wendelin Werner, lauréat de la médaille Fields en 2006. Travaillant  à l'interface des probabilités, de l'analyse complexe et de la géométrie, elle sera présente au Paris-Saclay Summit, qu'organise Le Point les 12 et 13 février.

Le Point : - Quel est votre champ de recherche ?

Yilin W : - Imaginez un donut sur lequel une petite bille se déplace au hasard. Ce mouvement chaotique, qu'on appelle mouvement brownien, peut en réalité révéler des secrets sur la géométrie du donut. Par exemple, en étudiant ces déplacements, on peut deviner la longueur des " élastiques " imaginaires qui s'enroulent autour du donut, représentant les chemins les plus courts pour revenir au point de départ. Cette découverte relie le hasard pur à la géométrie, avec des applications allant des mathématiques pures à la physique et à la compréhension de systèmes complexes. (...)

Les mathématiciens prennent le temps de trouver une façon élégante et unique de comprendre quelque chose, de prouver des résultats qui resteront vrais pour l'éternité, et de transmettre cette compréhension. Pendant ce temps, l'intelligence artificielle se renouvelle sans cesse, fournissant des réponses en compilant les données. Cette différence permet une collaboration. (...)

Étant donné que les connaissances mathématiques disponibles aujourd'hui dépassent ce qu'un individu peut assimiler, l'intelligence artificielle pourrait être un outil précieux pour organiser ces connaissances et fournir des indications préliminaires. Cependant, elle est encore très loin de remplacer les mathématiciennes et mathématiciens. En fait, je ne vois pas comment elle pourrait un jour remplacer entièrement la créativité humaine. (...)

La compréhension humaine est mystérieuse. Un énoncé, avec exactement les mêmes mots, peut évoluer dans notre esprit avec le temps. Je serais stupéfaite si une intelligence artificielle parvenait à inventer le nombre imaginaire " i ", qui, au carré, donne – 1.   Aujourd'hui, nous savons que les nombres complexes sont fondamentaux dans l'ingénierie, la physique et les mathématiques. Si toutes les données qu'une IA a vues indiquent que les carrés des nombres sont positifs, quelle audace faudrait-il pour envisager un nombre dont le carré est négatif ? (...)

Les maths pures sont plus proches de la philosophie et de l'art, une lumière émanant de l'intellect humain, avec parfois une efficacité surprenante dans les applications. Des exemples notables sont la relativité générale et la cryptographie. D'un côté, ces applications ne peuvent pas être planifiées, et toute planification limite l'imagination et la créativité. D'un autre côté, il ne faut pas tracer une ligne trop nette entre mathématiques pures et mathématiques appliquées, car les premières inspirent les secondes, et vice versa.

Ce n’est pas ce que j’ai perdu mais ce que j’ai encore.

L’adversité ne crée pas de conséquences.

Je me lave tous les 6 mois. Sale ou pas sale.

La science est désormais un art de la manipulation, de la substitution et du détournement des forces de la nature. Ce que je vois venir, c'est un gigantesque abattoir, un Auschwitz... où de précieuses enzymes, hormones, etc. seront extraites à la place des dents en or.

Lorsque les soi-disant groupes de réflexion ( think tanks ) ont commencé à remplacer les processus de pensée des êtres humains, je les ai rapidement nommés " réservoirs stériles ". 

Nous manipulons la nature comme si nous gavions une oie alsacienne. Nous créons de nouvelles formes d'énergie, fabriquons de nouveaux éléments, détruisons des cultures, lavons des cerveaux. J'arrive même à les entendre aiguiser leurs lasers dans l'obscurité.

L'une des propriétés les plus insidieuses et les plus néfastes des modèles scientifiques est leur tendance à prendre le pas sur la réalité, et parfois même à la supplanter.