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contre-tradition

Nous avons déjà exposé ailleurs le rôle de la psychanalyse dans l’œuvre de subversion qui, succédant à la "solidification" matérialiste du monde, constitue la seconde phase de l’action antitraditionnelle caractéristique de l’époque moderne tout entière. Il nous faut encore revenir sur ce sujet, car, depuis quelque temps, nous constatons que l’offensive psychanalyste va toujours de plus en plus loin, en ce sens que, s’attaquant directement à la tradition sous prétexte de l’expliquer, elle tend maintenant à en déformer la notion même de la façon la plus dangereuse. À cet égard, il y a lieu de faire une distinction entre des variétés inégalement "avancées" de la psychanalyse : celle-ci, telle qu’elle avait été conçue tout d’abord par Freud, se trouvait encore limitée jusqu’à un certain point par l’attitude matérialiste qu’il entendit toujours garder ; bien entendu, elle n’en avait pas moins déjà un caractère nettement "satanique", mais du moins cela lui interdisait-il de prétendre aborder certains domaines, ou, même si elle le prétendait cependant, elle n’en atteignait en fait que des contrefaçons assez grossière, d’où des confusions qu’il était encore relativement facile de dissiper. Ainsi, quand Freud parlait de "symbolisme", ce qu’il désignait abusivement ainsi n’était en réalité qu’un simple produit de l’imagination humaine, variable d’un individu à l’autre, et n’ayant véritablement rien de commun avec l’authentique symbolisme traditionnel. Ce n’était là qu’une première étape, et il était réservé à d’autres psychanalystes de modifier les théories de leur "maître" dans le sens d’une fausse spiritualité afin de pouvoir, par une confusion beaucoup plus subtile, les appliquer à une interprétation du symbolisme traditionnel lui-même. Ce fut surtout le cas de C.G. Jung, dont les premières tentatives dans ce domaine datent d’assez longtemps déjà […].

Auteur: Guénon René

Info: Dans "Symboles de la science sacrée", page 45

[ critique ] [ spiritualité à rebours ]

 

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objet petit a

La notion de ce Ding, de ce Ding comme fremde, comme étranger, et même hostile à l’occasion, en tout cas comme le premier extérieur, c’est là ce autour de quoi s’oriente tout le cheminement qui, sans aucun doute, pour le sujet, est à tout instant cheminement de contrôle, cheminement de référence, par rapport à quoi ? Le monde de ses désirs ! […]

Cet objet, quand il sera là, quand toutes les conditions seront remplies, c’est-à-dire, au bout du compte, vous le savez bien... mais parce que, bien entendu, il est clair que ce qu’il s’agit de trouver ne peut pas être retrouvé, puisque c’est de sa nature que l’objet est perdu comme tel ...qu’il ne sera jamais retrouvé, que quelque chose qui est là en attendant mieux, ou en attendant pire, mais en attendant.

Le système du monde freudien, c’est-à-dire du monde de notre expérience, c’est que c’est cet objet, das Ding, en tant qu’Autre absolu du sujet, qu’il s’agit de retrouver. C’est l’état de le retrouver tout au plus comme regret. Ce n’est pas lui qu’on retrouve mais ses coordonnées de plaisir : cet état de le souhaiter et de l’attendre, dans lequel sera cherché, au nom du principe du plaisir, cette tension optima au-dessous de laquelle il n’y a plus bien sûr ni perception ni effort. Et si en fin de compte, il n’y a pas quelque chose qui l’hallucine en tant que système de référence, aucun monde de la perception n’arrive à s’ordonner, à se constituer d’une façon humaine, d’une façon valable. Ce monde de la perception nous étant donné comme corrélatif, comme dépendant, comme référence à cette hallucination fondamentale sans laquelle il n’y aurait aucune attention disponible.

Auteur: Lacan Jacques

Info: 9 décembre 1959, L'éthique

[ la chose ] [ concept psychanalytique ]

 

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portrait

Quand la nature l’a créé, elle lui a donné une dose généreuse de force physique et de santé, et elle l’a étayé, pour ainsi dire, de toutes parts à grand renfort de respect et de confiance – afin qu’il puisse vivre comme un enfant ses trois fois vingt ans plus dix. Il avait environ 28 ans ; il était massif et lent, avec un cou trapu et charnu brûlé par le soleil, des cheveux noirs en broussailles et des yeux bleu terne, assoupis et calmes ; il respirait fort et avait l’odeur de son travail. Il portait une casquette aplatie en tissu gris, un grand manteau miteux couleur laine qui enveloppait et cachait son corps, et des bottes en cuir. Il était très musclé et c’était un gros consommateur de viande, qui emportait généralement son repas à l’endroit où il travaillait – à quelques miles de ma maison -, dans un seau en étain – des repas froids – souvent des marmottes froides que son chien avait capturées, et du café dans une bouteille en pierre qui se balançait au bout d’une corde, et il m’offrait parfois à boire. […]
Si d’autres avaient cultivé des facultés intellectuelles qui le laissaient pantois, son endurance et sa satisfaction physiques, comme le cousin pour le pin et le roc, les laissaient tout aussi pantois. Je lui ai demandé un jour s’il n’était pas fatigué le soir après avoir travaillé toute la journée, et il me répondit, l’air sincère et sérieux, tout à fait authentique : "Tudieu, je n’ai jamais été fatigué dans ma vie !" Cela sonnait comme le triomphe de l’homme physique. Cela montrait ce qu’un entraînement rigoureux et authentique pouvait accomplir chez tout le monde.

Auteur: Thoreau Henry David

Info: Dans "Histoire de moi-même", pages 141-142

[ bûcheron ] [ admiration ]

 
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idéologies

- Voulez-vous que je vous dise exactement, mon oncle, quel homme est Bazarov ?

-Je t'en prie, mon chère neveu.

-Il est nihiliste.

-Comment ? demandant Nicola Petrovitch [...]

-Il est nihiliste, répéta Arkadi.

-Nihiliste, dit Nicola Pétrovitch, cela vient du latin 'nihil',' rien', autant que je puis en juger; donc ce mot désignerait un homme qui...qui ne veut rien reconnaître ?

-Dis plutôt : qui ne respecte rien, rectifia Paul Petrovitch [...]

-Qui envisage tout d'un point de vu critique, précisa Arkadi.

-N'est-ce pas la même chose ? demanda Paul Petrovitch

-Non, pas du tout. Un nihiliste, c'est un homme qui ne s'incline devant aucune autorité, qui ne fait d'aucun principe un article de foi, quel que soit le respect dont ce principe est auréolé.

-Et l’on s’en trouve bien ? l’interrompit Paul Pétrovitch.

-Tout dépend de l’individu, mon oncle. Certains s’en trouvent bien, et d’autres très mal.

-Tiens donc. Allons, cela n’est pas de notre ressort, à ce que je vois. Nous autres, gens de l’ancien temps, nous estimons que sans principes […] reconnus comme des articles de foi, pour reprendre ton expression, il est impossible de faire un pas, impossible de respirer. Vous avez changé tout cela, Dieu vous le rende et vous donne le grade de général ; nous nous contenterons de vous admirer, messieurs les…comment, déjà ?

-Nihilistes, articula distinctement Arcade.

-Oui. Nous avons eu les hégélistes, voici maintenant les nihilistes. On verra bien comment vous subsisterez dans le désert, dans le vide absolu ; pour le moment, sonne donc, s’il te plaît, Nicolas Pétrovitch, mon frère ; c’est l’heure de mon cacao.

Auteur: Tourguéniev Ivan

Info: Pères et fils, traduction de Françoise Flamant, éditions Gallimard, 1982, pages 54-55

[ affrontement générationnel ] [ description ] [ nihilisme ]

 

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essai

Mais enfin je vais partir, puisqu’il faut bien faire une transition, je vais partir d’une question idiote qui m’a été posée.

Ce que j’appelle une question idiote n’est pas ce qu’on pourrait croire, je veux dire : quelque chose qui d’aucune façon me déplairait – j’adore les questions idiotes – j’adore aussi les idiotes, j’adore aussi les idiots d’ailleurs, ce n’est pas un privilège du sexe. Pour tout dire, ce que j’appelle idiot, est quelque chose, à l’occasion, de tout simplement naturel et propre. Un idiotisme c’est quelque chose qu’on confond trop vite avec la singularité, c’est quelque chose de naturel, de simple, et pour tout dire, de très souvent lié à la situation. La personne en question, par exemple, n’avait pas ouvert mon livre, elle m’a posé la question suivante :

"Quel est le lien entre vos Écrits ?"

Je dois dire que c’est une question qui ne me serait pas venue à l’idée, à moi tout seul. Bien sûr, je dois dire aussi que c’est une question dont il ne pouvait pas me venir à l’idée qu’elle viendrait à l’idée de personne. Mais c’est une question très intéressante à la vérité, à laquelle j’ai fait tous mes efforts pour répondre. Et répondre, eh bien mon Dieu, comme elle m’était posée.

[…] pour dire les choses de façon qu’elles résonnent, le départ, et qui reste un lien jusqu’au terme de ce recueil, est bien ce quelque chose de profondément discuté, c’est le moins qu’on puisse dire, tout au long de ces Écrits et qui s’exprime sous cette formule, qui vient à tous et qui s’y maintient, je dois dire, avec une regrettable certitude, et qui s’exprime ainsi : "moi, je suis moi" !

Auteur: Lacan Jacques

Info: 14 décembre 1966, La logique du fantasme

[ résumé ] [ thème ] [ idiotie ]

 

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nanotechnologie

Les puces sous-cutanées, ces minuscules objets que l’on implante sous la peau humaine pour pister ou identifier des gens, ce n’est pas de la science-fiction. Alors demain, tous tracés ?

[…]

Une expérience a été menée dans une discothèque de bord de mer, à Barcelone, où une vingtaine de personne se sont fait greffer une puce dans le bras gauche, à hauteur de biceps, juste sous l’épiderme !

Cette puce à microfréquence est un minuscule objet en verre, de la taille d’un grain de riz, à l’intérieur duquel se trouve une petite mémoire où on peut stocker des informations... Les clients se sont fait greffer cet "Alien" sur une idée du patron de la discothèque.
La puce renferme leurs noms, leurs numéros d’identification ainsi que le crédit dont ils disposent dans l’établissement.

Autrement dit, elle joue à la fois le rôle de la carte d’identité et celui de portefeuille. Vous prenez une boisson au bar ? Hop, le coût en est débité sur votre compte directement, grâce à un scanner que l’on vous passe sur le bras et qui active la puce !

Est-ce que ça fait mal ? Paraît-il, pas plus qu’un vaccin. Trois petites piqûres anesthésiantes dans le bras avant de l’implanter lentement sous l’épiderme au moyen d’une seringue jetable...
Apparemment, ça a beaucoup plu (en plein dans la mode des modifications corporelles) et d’autres établissements s’apprêtent à lancer le même système. Mais cette puce n’est pas vouée à rester dans le monde de la nuit. Elle est déjà utilisée dans des applications autrement moins futiles et peut être plus inquiétantes.

Cette puce minuscule marche par fréquences radios. Dès qu’elle est sollicitée, elle émet un signal depuis sa position sous la peau pour indiquer, via un ordinateur, où se trouve la personne implantée.

Auteur: PMO Pièces et main-d'oeuvre

Info: Dans "Aujourd'hui le nanomonde", pages 278-279

[ traçage ] [ popularisation ] [ campagne de communication ] [ fun ]

 
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supports de communication

[…] pour certains, tandis que le mythe est un récit présentant un autre sens que celui que les mots qui le composent expriment directement et littéralement, le symbole serait essentiellement une représentation figurative de certaines idées par un schéma géométrique ou par un dessin quelconque ; le symbole serait donc proprement un mode graphique d’expression, et le mythe un mode verbal. Suivant ce que nous avons expliqué précédemment, il y a là, en ce qui concerne la signification donnée au symbole, une restriction tout à fait inacceptable, car toute image qui est prise pour représenter une idée, pour l’exprimer ou la suggérer d’une façon quelconque et à quelque degré que ce soit, est par là même un signe ou, ce qui revient au même, un symbole de cette idée ; peu importe qu’il s’agisse d’une image visuelle ou de toute autre sorte d’image, car cela n’introduit ici aucune différence essentielle et ne change absolument rien au principe même du symbolisme. Celui-ci, dans tous les cas, se base toujours sur un rapport d’analogie ou de correspondance entre l’idée qu’il s’agit d’exprimer et l’image, graphique, verbale ou autre, par laquelle on l’exprime ; à ce point de vue tout à fait général, les mots eux-mêmes, comme nous l’avons déjà dit, ne sont et ne peuvent être autre chose que des symboles. On pourrait même, au lieu de parler d’une idée et d’une image comme nous venons de le faire, parler plus généralement encore de deux réalités quelconques, d’ordres différents, entre lesquelles il existe une correspondance ayant son fondement à la fois dans la nature de l’une et de l’autre : dans ces conditions, une réalité d’un certain ordre peut être représentée par une réalité d’un autre ordre, et celle-ci est alors un symbole de celle-là.

Auteur: Guénon René

Info: Dans "Aperçus sur l'initiation", Éditions Traditionnelles, 1964, page 121

[ caractéristiques ] [ manifestation ] [ définis ] [ texte-image ]

 

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philosophe

Thomas Hobbes fut un homme admirable en ce sens que, le premier de tous, il osa écrire, en 1654, en tête de son introduction au Léviathan, que si la nature est ce monde que Dieu construit et gouverne par son art divin, l’homme, de son côté, par industrie, produit en imitation un animal artificiel, et cet animal formidable, ce Léviathan, c’est la société, c’est l’État.

[…]

Ce fut certainement ce que l’on conçut de plus fort, de plus précis, pour établir la théorie matérialiste de l’Etat. Pour Hobbes, il n’est rien dans l’intelligence qui n’ait son origine dans la sensation. Nos idées générales ne sont qu’une addition ou une soustraction d’images de corps existant au dehors et la connaissance ne peut être incorporelle.

L’Etat également n’est qu’une collection d’individus, mais groupés par les sensations sociales qui sont l’égoïsme et la peur. Dans l’état de nature, l’homme est un loup pour l’homme, suivant le mot de Plaute, car les hommes étant égaux, la guerre et l’anarchie sont leurs conditions normales, puisque rien ne borne leurs appétits et leurs désirs. C’est par besoin de sécurité que les hommes renoncent à leurs forces individuelles au profit d’une force unique et ce contrat social artificiel crée la souveraineté absolue.

Quant à la religion, elle est fille de l’imagination et de la peur. Elle n’est que basse superstition lorsque l’imagination peureuse est individuelle ; elle est un moyen de gouvernement utile lorsque cette imagination et cette peur sont collectives.

Au temps où vivait Hobbes, cette assimilation matérialiste du corps social au corps humain n’était guère qu’une image littéraire destinée à frapper les esprits ; au dix-neuvième et au vingtième siècle, elle prit avec le développement scientifique des théories évolutionnistes une importance singulière.

Auteur: Pawlowski Gaston de

Info: Voyage au pays de la quatrième dimension, Flatland éditeur, 2023, pages 107-108

[ résumé ] [ explication ]

 

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théorie économique

Dans son étude de l’économie capitaliste et des cycles qui l’animent, Kondratieff affirme que le système évolue par périodes de soixante ans. Il distingue quatre phases au sein d’un cycle complet, qui correspondent aux quatre saisons du calendrier :
-Le printemps est la période d’expansion robuste de l’économie, accompagnée d’une inflation soutenue. Plusieurs effets bénéfiques se font sentir pendant le printemps : baisse du chômage, hausse des salaires, diffusion de la prospérité, réduction de la pauvreté. Si l’on cherche à repérer cette phase au cours du cycle le plus récent, c’est la période des Trente Glorieuses, entre 1945 et 1974.
-L’été qui s’ensuit est une première période de stagnation d’une dizaine d’années, avec à la fois un chômage croissant et une inflation persistante. Dans le cycle récent, il s’agit de l’après-choc pétrolier, entre 1975 et 1984.
-L’automne, qui dure une quinzaine d’années, voit un retour de la croissance, mais accompagnée de la déflation et d’un développement de la consommation grâce à l’expansion de l’endettement. Dans notre histoire moderne, cette saison ressemble furieusement à la période 1985-2008, laquelle eut une durée de vingt-trois ans, donc sensiblement plus longue que l’automne que Kondratieff avait calculé dans sa théorie.
-Enfin, l’hiver voit l’éclatement d’une crise qui résulte de toutes les tensions accumulées dans l’économie […]. Les richesses artificielles nées de l’excès d’endettement sont détruites, la déflation et le chômage s’installent, dépression et récession règnent. Dans la théorie originale de Kondratieff, la durée de l’hiver est de cinq ans. En ce qui concerne la période actuelle, la crise a éclaté en 2008 et le monde capitaliste n’en sortira probablement pas avant quelques années encore : pour beaucoup de raisons structurelles et conjoncturelles, aucune perspective de reprise sérieuse de la croissance ne semble se dessiner avant les années 2020-2025.

Auteur: Bouchard Jean-François

Info: Dans "L'éternelle truanderie capitaliste", pages 133-134

[ exemple ] [ théorie-pratique ]

 

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ordre discursif

Sa gerbe n'était point avare, ni haineuse - Victor Hugo. Voilà une métaphore. […] Il n'y a pas comparaison, mais identification. [...]

La métaphore suppose qu’une signification est la donnée qui domine, et qu’elle infléchit, commande l’usage du signifiant, si bien que toute espèce de connexion préétablie, je dirais lexicale, se trouve dénouée. [...] il est clair que l’usage de la langue n’est susceptible de signification qu’à partir du moment où on peut dire Sa gerbe n’était point avare, ni haineuse, c’est-à-dire où la signification arrache le signifiant à ses connexions lexicales.

C’est là l’ambiguïté du signifiant et du signifié. Sans la structure signifiante, c’est-à-dire sans l'articulation prédicative, sans la distance maintenue entre le sujet et ses attributs, on ne pourrait qualifier la gerbe d'avare et de haineuse. C'est parce qu'il y a une syntaxe, un ordre primordial de signifiant, que le sujet est maintenu séparé, comme différent de ses qualités.

[…] Cette phase du symbolisme qui s'exprime dans la métaphore suppose la similarité, laquelle est manifestée uniquement par la position. C'est par le fait que la gerbe est le sujet de avare et de haineuse, qu'elle peut être identifiée à Booz dans son manque d'avarice et sa générosité. C’est par la similarité de position que la gerbe est littéralement identique au sujet Booz. Sa dimension de similarité est assurément ce qu’il y a de plus saisissant dans l’usage significatif du langage, qui domine tellement l’appréhension du jeu du symbolisme que cela nous masque l’existence de l’autre dimension, la syntaxique. Pourtant, cette phrase perdrait toute espèce de sens si nous brouillions les mots dans leur ordre.

Voilà ce qu’on néglige quand on parle de symbolisme – la dimension liée à l’existence du signifiant, l’organisation du signifiant.

Auteur: Lacan Jacques

Info: Dans le "Séminaire, Livre III", "Les psychoses", éditions du Seuil, 1981, pages 345 à 347

[ grammaire ] [ alignement ] [ équivalence ] [ agencement des mots ]

 

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