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bien-pensance

Ce qu’il y a de fondant, à Cordicopolis, ce sont toutes ces âmes idylliques qui s’imaginent qu’on pourrait avoir le Bien sans Mal, le tigre sans ses griffes, la langue française sans ses buissons d’épineuses incohérences, le soleil sans la pluie, des voitures sans pollution, une "bonne" télé sans ses pubs, la littérature sans son revers de crime par lequel elle s’immortalise, les loisirs de masse sans le béton, la chimie industrielle sans les pluies acides. Le beurre sans l’argent pour le payer. Midi à quatorze heures comme toujours. Autant rêver Céline sans ses Bagatelles. Un "Céline qui penserait juste", ainsi que je l’ai lu quelque part. La réconciliation des contraires. Le Paradis sans la Chute. Le Trémolo enfin reconnu, établi dans tous ses droits, et sans aucune contrepartie. Voilà l’utopie des bien-pensants, l’idéal de l’Ultra-Doux planétaire, plus de matières grasses, plus de colorants, rien que des objectifs super-light sous les déguisements de la Vertu. Déjà ces saynètes en chambre qu’on appelle "débats politiques" ne sont plus organisées qu’entre représentants de tendances parfaitement interchangeables, entre démocrates-ouverts-antiétatiques-humanistes, par exemple, et républicains-modérés-centralisateurs-humanistes. C’est un régal de les voir discuter, faire semblant de se contredire, alors que ce qu’ils veulent, comme tout le monde, c’est consolider le terrain commun, celui de la confusion générale, la seule garantie de "vérité". À la fin, comme ne le disait pas Staline, c’est toujours le Consensus qui gagne.

Auteur: Muray Philippe

Info: Dans "L'empire du bien"

[ déni sociétal ] [ auto-persuasion ] [ naïveté ] [ société édulcorée ]

 

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linguistique

Les énigmes étymologiques sont innombrables. En anglais par exemple : comment sommes-nous passés de "man" à "woman ? Ou de "gate" signifiant "porte" à "gate", qui veut dire "scandale" ? La réponse est que pour tout signifiant nous ne partons PAS de quelque part. Aucun terme n'a d'autre sens que celui que nous lui donnons. Si nous convenons que "tourner" signifie "manger du fromage au petit déjeuner", ou que "précarité" veut dire "chat orange", c'est vraiment ce que ces mots signifient, sans autre raison que "c'est parce que nous le disons ainsi". C'est un consensus temporaire. Pour revenir au mot émergence, souvent perçu vu comme un processus lent (l'émergence des mammifères, ou celle d'un escargot qui sorte de sa coquille)... Voilà ti pas qu'on le retrouve sous forme d'"emergency", grande urgence, en anglais. Rien de ce genre en français - mais on s'en fiche. Ici l'idée d'urgence, de vitesse, qui différencie les deux interprétations ci-dessus, se retrouve dans les conjugaisons latines : "emergency" est issu du participe présent d'"emergo", "emergens", qui en latin, signifie action contemporaine ou en cours. Ainsi, "urgence" est l'idée liée à ce qu'il est en train de se produire. C'est donc l'inflexion grammaticale, et non pas le sens de base de "se produire", qui apporte le sentiment d'urgence. Alors qu'"emerge" (en anglais toujours) est un emprunt plus direct, qui conserve plus ou moins intacte la sémantique de base du verbe latin, ce qui en fait un terme plus neutre qui se réfère à "se produire", physiquement ou métaphoriquement. Sans notion de rapidité.

Auteur: Mg

Info: 18 fév. 2010

[ translangues ] [ relativité ] [ contextualisation nécessaire ]

 
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inconscient

Préalablement à toute symbolisation - cette antériorité n'est pas chronologique, mais logique - il y a une étape, les psychoses le démontrent, où il se peut qu'une part de la symbolisation ne se fasse pas. Cette étape première précède toute la dialectique névrotique qui tient à ce que la névrose est une parole qui s'articule, pour autant que le refoulé et le retour du refoulé sont une seule et même chose. Il peut ainsi se faire que quelque chose de primordial quant à l’être du sujet n’entre pas dans la symbolisation, et soit, non pas refoulé, mais rejeté.

Ce n’est pas démontré. Ce n’est pas non plus une hypothèse. C’est une articulation du problème. La première étape n’est pas une étape que vous ayez à situer quelque part dans la genèse. [...] ne vous laissez pas fasciner par ce moment génétique. Le jeune enfant que vous voyez jouer à faire disparaître et revenir un objet, et qui s’exerce par là à l’appréhension du symbole, vous masque, si vous vous laissez fasciner par lui, le fait que le symbole est déjà là, énorme, l’englobant de toute part, que le langage existe, qu’il remplit les bibliothèques, qu’il en déborde, qu’il encercle toutes vos actions, qu’il les guide, qu’il les suscite, que vous êtes engagés, qu’il peut vous requérir à tout instant de vous déplacer, et vous mener quelque part. Tout cela, vous l’oubliez devant l’enfant en train de s’introduire dans la dimension symbolique. Donc, plaçons-nous au niveau de l’existence du symbole comme tel, en tant que nous y sommes immergés.

Auteur: Lacan Jacques

Info: Dans le "Séminaire, Livre III", "Les psychoses", éditions du Seuil, 1981, pages 131-132

[ forclusion ] [ origine du référentiel humain ]

 

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structures incorporées du langage

Si effectivement, l’action spécifique qui vise à l’expérience de satisfaction, est une action dont la fin est de reproduire l’état, de retrouver das Ding, l’objet, nous comprendrons bien des modes de ce qui est le comportement névrotique, de la conduite de l’hystérique, si tant est qu’il s’agit, dans la conduite de l’hystérique, de recréer un état centré par l’objet en tant que cet objet, das Ding, est le centre et le support d’une aversion comme FREUD l’écrit quelque part.

C’est en tant que l’objet premier est objet d’insatisfaction que s’ordonne, s’organise l’Erlebnis spécifique de l’hystérique. Et c’est aussi pour autant que par une différence, une distinction, une opposition que FREUD a vue, la première, et qui n’a pas lieu d’être abandonnée que dans la névrose obsessionnelle, cet objet, das Ding, par rapport à quoi s’organise l’expérience de fond, l’expérience de plaisir, est un objet - FREUD l’a très bien perçu, cela a été sa première aperception de la névrose obsessionnelle - un objet qui littéralement apporte trop de plaisir.

Si vous regardez dans ses cheminements divers, dans tous ses ruisselets le comportement de l’obsessionnel : ce qu’il indique et ce qu’il signifie, ce comme quoi il apparaît sujet lui-même, c’est toujours ce quelque chose qui se règle pour éviter en fin de compte ce qu’il voit souvent assez clairement comme étant le but et la fin de son désir. Et pour l’éviter d’une façon dont la motivation est somme toute extraordinairement radicale, puisque effectivement le principe du plaisir nous est donné pour avoir un mode de fonctionnement qui est justement d’éviter cet excès, ce trop de plaisir.

Auteur: Lacan Jacques

Info: 9 décembre 1959, L'éthique

[ définition ] [ hystérie ] [ choix de la névrose ]

 

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USA

En 1991, ma génération, la génération MTV, les tire-au-flanc, shin jin rui, la génération X, atteint son zénith en matière de création. Vous avez Slacker, le film de Richard Linklater, et Génération X, le roman de Douglas Coupland, deux oeuvres phares, sorties, respectivement, en juillet et en mars. Bret Easton Ellis publie American Psycho. La série Seinfield atteint son rythme de croisière. En septembre, le mouvement grunge fait son apparition avec Nevermind de Nirvana. (Enfin ! Divertissez-nous !) Trois ans plus tard, Kurt Cobain se butait - notre Altamont à nous. (Oh bon, tant pis, peu importe.)
Les oeuvres susmentionnées sont celles qui illustrent le mieux le zeitgeist X, ce que l'on a appelé la sous-culture des tire-au-flanc, dans laquelle les experts de la génération du baby-boom ont vu à tort de l'indifférence, alors qu'il s'agissait en fait d'un manque d'enthousiasme pour ce à quoi on nous proposait de prendre part. Nous étions une génération de "Bartleby le copiste" : nous préférions ne pas. Les anti-héros de Coupland, qui gâchent délibérément leurs années d'études en tenant un bar à Palm Springs. Extrait de Slacker : "Se mettre en retrait parce qu'on est dégoûté et être apathique sont deux choses différentes." Les pom-pom girls du clip de Smells Like Teen Spirit : vêtues de noir, défoncées, faisant tous les gestes habituels, encourageant l'équipe, mais sans l'encourager vraiment ; un encouragement ironique. L'ironie, plus que toute autre chose, était notre caractéristique principale. L'interprétation sarcastique de l'hymne des sixties, Everybody Get Together, sur Nevermind (l'intro du titre n°7), résume le sentiment collectif de cette époque : Nous tournons en dérision votre idéalisme hypocrite, espèces d'enfoirés du baby-boom. Comment s'étonner que le Prozac ait été si répandu ?

Auteur: Olear Greg

Info: Totally killer

[ progrès ] [ révolte ] [ vingtième siècle ] [ jeunesse ]

 

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généalogie

La propre source, c’est ce que chaque femme et chaque homme au monde reçoit en héritage par sa naissance, avec son nom propre, sans l’avoir en commun avec qui que ce soit d’autre. Qui que vous soyez, vous êtes né quelque part, de parents nés eux aussi quelque part. Ce quelque part n’est pas seulement un lieu géographique ni une histoire familiale : c’est une langue, une provenance spirituelle, une sagesse ascendante. Que vous le sachiez ou pas, qui que vous soyez votre origine est royale. La femme de ménage algérienne la plus démunie a sa propre source royale. L’ouvrier breton le plus harassé aussi. Le petit commerçant chinois endetté aussi. La prostituée albanaise aussi, comme l’Inuit alcoolisé, le Tibétain exilé, le Malais esclavagisé, le mendiant roumain, le Corse anachorète, le Juif haineux de soi…



Accéder à sa propre source n’est pas compliqué en soi. La méthode en est d’autant plus simple qu’elle n’a pas varié depuis des siècles. Commencez par méditer votre histoire familiale. Elle a été refoulée, occultée, envenimée ? Vos propres parents furent des monstres qui cherchèrent à vous détruire parce qu’eux-mêmes aussitôt nés furent écrabouillés ? Remontez plus haut, toujours plus haut, écoutez, parlez, questionnez, lisez surtout, partez à la recherche de  d’où vous venez, ce là qui est moins un lieu qu’un lien, un invisible ombilic tramé de mots, ce là où vos ancêtres vous attendent pour vous rajeunir.



Cela n’est pas compliqué, mais cela n’est pas facile. Ressusciter en pensée ne va pas de soi. Les obstacles se dressent avec autant de pugnacité que les portes dérobées s’ouvrent sans prévenir. Puis, une fois retrouvée votre propre source, rien ne peut vous empêcher de vous pâmer dans l’onde du fleuve jusque vers la mer que chérissent les hommes libres, de vous intéresser à toutes les autres cultures, d’apprendre tous les autres savoirs.

Auteur: Zagdanski Stéphane

Info: 17 janvier 2022 https://lundi.am/A-quoi-comparer-cela

[ interrogation ] [ rencontre ] [ singularités ]

 

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archétypes narratifs

Si tous les contes merveilleux sont aussi uniformes, cela ne signifie-t-il pas qu’ils proviennent tous de la même source ? […] il semble en effet qu’il en soit ainsi. Cependant, le problème des sources ne doit pas être posé de façon étroitement géographique. Dire "une source unique" ne signifie pas forcément que les contes ont pour origine, par exemple, l’Inde, et qu’à partir de là ils se sont répandus dans le monde entier, prenant au cours de leurs voyages des formes différentes, – selon ce que certains admettent. La source unique peut-être, aussi bien, psychologique, sous un aspect historico-social. […]

Enfin, la source unique peut se trouver dans la réalité. Entre la réalité et le conte, il existe certains points de passage : la réalité se reflète indirectement dans les contes. Un de ces points de passage est constitué par les croyances qui se sont développées à un certain niveau de l’évolution culturelle ; il est très possible qu’il y ait un lien, régi par des lois, entre les formes archaïques de la culture et la religion d’une part, et entre la religion et les contes d’autre part. Une culture meurt, une religion meurt, et leur contenu se transforme en conte. Les traces des représentations religieuses archaïques que conservent les contes sont si évidentes qu’on peut les isoler avant toute étude historique, comme nous l’avons déjà indiqué plus haut. Mais étant donné qu’il est plus facile d’expliquer une telle hypothèse historiquement, nous établirons, en guise d’exemple, un bref parallèle entre contes et croyances. Les contes présentent les transporteurs aériens d’Ivan sous trois formes fondamentales : le cheval volant, les oiseaux, le bateau volant. Ces formes représentent justement les porteurs de l’âme des morts, le cheval dominant chez les peuples pasteurs et agriculteurs, l’aigle chez les peuples chasseurs, et le bateau chez ceux qui vivent au bord de la mer. On peut donc penser qu’un des principaux fondements structurels des contes, le voyage, est le reflet de certaines représentations sur les voyages de l’âme dans l’autre monde.

Auteur: Propp Vadimir

Info: Morphologie du conte, À l'origine des contes, p. 131

[ réel-imaginaire ] [ historique ] [ psychopompes ]

 

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principes individuels

[…] ainsi, afin que je ne demeurasse point irrésolu en mes actions pendant que la raison m’obligerait de l’être en mes jugements, et que je ne laissasse pas de vivre dès lors le plus heureusement que je pourrais, je me formai une morale par provision qui ne consistait qu’en trois ou quatre maximes, dont je veux bien vous faire part.

La première était d’obéir aux lois et aux coutumes de mon pays, retenant constamment la religion en laquelle Dieu m’a fait la grâce d’être instruit dès mon enfance, et me gouvernant en toute autre chose suivant les opinions les plus modérées et les plus éloignées de l’excès qui fussent communément reçues en pratique par les mieux sensés de ceux avec lesquels j’aurais à vivre. […]

Ma seconde maxime était d’être le plus ferme et le plus résolu en mes actions que je pourrais, et de ne suivre pas moins constamment les opinions les plus douteuses, lorsque je m’y serais une fois déterminé, que si elles eussent été très assurées. […]

Ma troisième maxime était de tâcher toujours plutôt à me vaincre que la fortune, et à changer mes désirs que l’ordre du monde : et généralement de m’accoutumer à croire qu’il n’y a rien qui soit entièrement en notre pouvoir que nos pensées, en sorte qu’après que nous avons fait notre mieux touchant les choses qui nous sont extérieures, tout ce qui manque de nous réussir est au regard de nous absolument impossible. […]

Enfin pour conclusion de cette morale, je m’avisai de faire une revue sur les diverses occupations qu’ont les hommes en cette vie, pour tâcher à faire choix de la meilleure, et sans que je veuille rien dire de celles des autres, je pensai que je ne pouvais mieux que de continuer en celle-là même où je me trouvais, c’est-à-dire que d’employer toute ma vie à cultiver ma raison, et m’avancer autant que je pourrais en la connaissance de la vérité suivant la méthode que je m’étais prescrite.

Auteur: Descartes René

Info: Le discours de la méthode, Librairie générale française, 1973, page 118 à 121

 

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outils asservissants

A ces approches technocritiques, la Silicon Valley oppose souvent ce cliché qu'il convient de fusiller sans sommation et à bout portant. Il s'énonce ainsi : " la technologie est neutre, son impact ne dépend au fond que du bon ou mauvais usage qu'on en fait. "

C'est une idée courte, et même une idée stupide, quadruplement stupide. Il n'est jamais inutile de redire pourquoi :

1° Parce que la technique porte en elle une valeur latente : l'efficacité. Autrement formulé : la possibilité d'agir sur nos environnements de façon forte. Toute machine prédétermine l'utilisateur à faire de l'efficacité la valeur de son action, avant tout choix de sa part. [...]

2° Parce qu'en amont, l'innovation technologique dépend de la Recherche qui dépend elle-même des crédits de recherche ou du capital-risque investi, et donc déjà d'une forte présélection des découvertes, produits et services et qu'on juge a priori " utiles " à développer car lucratifs. La machine reste donc toujours " sociale avant d'être technique " (Deleuze), c'est-à-dire qu'elle présuppose en univers capitaliste, pour être finalement fabriquée, une attente du marché et une rentabilité. [...]

3° Parce qu'en aval, une technologie induit une multitude d'effets, souvent difficiles à anticiper : elle réinvente des pratiques et reformate des comportements, elle enfante parfois une culture entière (le jeu massivement multijoueur, les danses internet, les animatiques) juste par les interactions nouvelles qu'elle offre. S'en servir c'est déjà transformée ses rapports à soi et ses relations aux autres, se ménager de nouvelles prises et consentir à de futures emprises en mutilant d'anciennes capacités qu'on sous-traite à l'appli. [...]

4° Enfin parce que toute technologie porte en elle un nouveau rapport au monde. On croit utiliser un frigo quand c'est notre façon de nous nourrir qui est révolutionnée par le stockage des aliments frais. La machine situe notre liberté et notre liberté s'exerce face à elle, en elle. Nous sommes libres de nos usages de la machine, libres même de ne pas l'utiliser, parfois. Mais c'est une liberté en situation, déjà située, un libre-arbitre qui s'exerce à l'intérieur d'un monde transformé et repotentialisé par la machine où il devient impossible de se comporter comme si elle n'existait pas. [...]

À cette quadruple aune, croire encore en la neutralité des technologies qu'on nous propose n'est même plus de la naïveté. C'est une faute politique.

Auteur: Damasio Alain

Info: Vallée du silicium, pp. 207-210

[ dépendance ]

 

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secondéités sémantiques

"Je ne sais pas ce que je dis".

Je ne sais pas quoi ?

Je ne sais pas que ce que je dis est un signifiant et comme tel ne s’adresse pas au parlant, mais à un autre signifiant.

Il s’adresse à l’Autre.

Je parle, j’émets des sons, je construis des sens, mais le dit, lui, m’échappe.

Il m’échappe parce qu’il n’est pas du pouvoir du sujet de savoir avec quel autre dit, ce dit va se lier.

"Le signifiant s’adresse à l’Autre" veut dire qu’il va se lier à un autre signifiant, ailleurs, à côté, après...

Donc, je ne sais pas quoi ?

L’effet de ma parole sur vous, sur l’Autre.

Et de ne pas savoir ce que je dis, je dis plus que je ne voudrais.

En un mot, je ne sais pas ce que je dis parce que mon dit va ailleurs :

– à mon insu, il s’adresse à l’Autre,

– et à mon insu aussi, il me vient de l’Autre.

Il vient de l’Autre et il s’adresse à l’Autre, il part de l’Autre.

Il existe encore une raison à ce "Je ne sais pas ce que je dis", c’est que le sujet qui énonce son dit... j’insiste : "le sujet qui énonce..." n’est pas le même lorsque le message, ou dit, peut lui revenir.

Nous ne sommes plus le même parce que dans l’acte de dire, je change.

L’expression "sujet effet du signifiant" veut dire justement que le sujet change avec l’acte de dire (...)

En somme vous avez :

– d’une part le sujet fixé, suspendu à un signifiant, celui de son acte de dire,

– d’autre part les signifiants se succédant l’un derrière l’autre, le sujet, en fait, n’est nulle part.

Je répète, car c’est la conclusion à laquelle je voulais aboutir : le sujet est dans l’acte, son acte d’énoncer le dit, mais étant donné que celui-ci vient de l’Autre et s’adresse à l’Autre, que tout se passe entre des dits, le sujet reste suspendu, perdu, effacé dans l'ensemble ouvert des signifiants enchaînés :

– nous sommes le sujet de l’acte et avec cet acte, cependant nous disparaissons.

– nous sommes le sujet de l’acte et nous ne sommes pas.

Voilà ce qu’on pourrait appeler l’antinomie du sujet.

Auteur: Nasio Juan David

Info: intervention au Séminaire de Lacan du 15 mai 1979

[ éphémères ] [ perdues ]

 
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