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cité imaginaire

C’est selon l’humeur de celui qui la regarde que Zemrude prend sa forme. Si tu y passes en sifflotant, le nez au vent, conduit par ce que tu siffles, tu la connaîtras de bas en haut : balcons, rideaux qui s’envolent, jets d’eau. Si tu marches le menton sur la poitrine, les ongles enfoncés dans la paume de la main, ton regard ira se perdre à ras de terre, dans les ruisseaux, les bouches d’égout, les restes de poisson, les papiers sales. Tu ne peux pas dire que l’un des aspects de la ville est plus réel que l’autre, pourtant tu entends parler de la Zemrude d’en-haut surtout par ceux qui se la rappellent pour s’être enfoncés dans la Zemrude d’en-bas, parcourant tous les jours les mêmes morceaux de rue et retrouvant le matin la mauvaise humeur de la veille collée au pied des murs. Pour tous, vient tôt ou tard le jour où ils abaissent le regard en suivant les gouttières et ne parviennent plus à le détacher du pavé. Le cas opposé n’est pas exclu, mais il est plus rare : c’est pourquoi nous continuons à tourner dans les rues de Zemrude avec des yeux qui désormais fouillent plus bas que les caves, jusque dans les fondations et les puits.

Auteur: Calvino Italo

Info: Villes invisibles

[ pessimiste pesanteur ]

 

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peinture

Le 30 mars 1852, Vincent Willem Van Gogh meurt. Il est enterré dans le cimetière de la petite ville de Groot-Zundert, aux Pays-Bas, où vit le couple Van Gogh. Exactement un an après, le 30 mars 1853, un autre petit garçon naît. Les parents, Théodorus et Anna Cornelia Van Gogh, nomment cet enfant exactement comme leur tout premier, celui qui est mort-né, Vincent Willem. Voilà dans quel contexte viendra au monde et grandira Vincent Van Gogh, qui deviendra plus tard le grand peintre: une enfance où ce premier fils réapparaît régulièrement. L'anniversaire de Vincent, c'est aussi l'anniversaire de la mort du premier enfant. La famille entière fait une promenade au cimetière. Elle se rend sur la tombe de l'aîné que l'on pleure toujours. Comment grandit-on quand son double existe encore alors qu'il est décédé? Nous sommes au XIXe siècle, la psychanalyse n'existe pas, on parle peu aux enfants, on ne les écoute pas toujours. Vincent grandit en portant le nom d'un absent et avec cette impression d'être un fils de remplacement. Porter ce prénom, c'est comme bâtir sa vie sur une pierre mal taillée. Tout commence un peu de guingois. Il lui manque une réponse. Qui est-il? Toute sa vie, il sera en quête et essaiera de trouver sa place.

Auteur: Cortey Anne

Info: Comment parler de Vincent Van Gogh aux enfants ?

[ mort ] [ famille ] [ heimatlos ]

 

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conservatismes

Mais, désolé Ulysse, c'est une idée foncièrement tordue. C'est croire que ce qui auparavant a été considéré comme amour, à savoir, pour le dire gentiment, le "partenariat domestique", était un amour pur. C'est comme parler du bon vieux temps des colonies, et c'est s'imaginer que le monde de jadis était préservé de la violence par l'existence de hiérarchies tangibles qui conservaient les hommes à leur place. Rien que le fait d'attribuer ces propos à Ulysse ou à Achille ridiculise déjà cette idée, et montre des hommes d'un passé mythique eux-mêmes regretter le passé, et les individus d'une société réglée vivre celle-ci comme un chaos et déplorer la disparition d'une époque encore antérieure où les règles auraient été mieux respectées. En réalité, on arrive à l'ultime piège de ce monde, qui est d'attribuer à l'absence de règles l'incurie que les règles elles-mêmes ont produites. On retrouve cette tentation à chaque époque et chaque époque, présentant une incurie qui lui est propre, elle produit son opposition qui regrette l'incurie de l'époque précédente sans comprendre que la sienne n'est que la conséquence, sinon la perpétuation, de la précédente. La confusion vécue par l'amoureux peut expliquer cette nostalgie, mais celle-ci ne doit pas nous faire illusion et exige qu'on la perçoive comme une confusion seconde.

Auteur: Thiellement Pacôme

Info: Sycomore, Sickamour, p. 91 Puf

[ trans-époques ] [ anarchie immanente ] [ paradis perdu ]

 
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Ajouté à la BD par miguel

disparu en mer

Pouvoir se recueillir sur une tombe, y emmener les enfants et leur parler de leur père devant la dalle qui porte son nom, laisser vagabonder ses pensées en enlevant les mauvaises herbes ou peut-être se laisser aller une conversation chuchotée avec le mort sous terre, c'est une grâce qui n'est pas accordée à une veuve de marin . Elle reçoit un bout de papier officiel qui lui notifie que le bateau où son mari était embarqué ou qu'il commandait et possédait lui-même a sombré "corps et biens" - comme on dit avec cette sobriété qui, impersonnelle et implacable, met tous les êtres sur le même plan -, tel et tel jour, à tel et tel endroit, le plus souvent en pleine mer où il n'y a aucune chance de sauvetage. Avec les poissons pour seuls témoins. Il ne reste plus qu'à remiser ce papier au fond d'un tiroir. Voilà à quoi se résume l'enterrement d'un noyé.

Certes, elle peut se recueillir devant la commode. C'est la seule pierre tombale où elle puisse se rendre. Elle détient au moins ce certificat et, avec lui, une certitude, un point final, et aussi un commencement.

Car la vie n'est pas comme les livres. Il n'y a jamais de point final. 

Auteur: Jensen Carsten

Info: Nous, les noyés

 

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Ajouté à la BD par miguel

vie quotidienne

Lorsqu’un homme a exercé la même profession pendant des années, il a perdu la notion du temps. Même si sa journée de travail se limite à huit heures de présence, elle ne s’achève pas quand la maîtrise siffle l’heure de la sortie. Il faut encore y ajouter la durée du trajet entre sa boîte et chez soi, sans oublier les longues minutes qu’on va devoir consacrer à manger, à se laver, à s’acheter de nouveaux vêtements, ou une voiture, à remplacer ses pneus, ou sa batterie, à payer ses impôts, à copuler, à recevoir des amis, à se soigner, à se remettre d’un accident, à faire sa lessive, à éviter de se faire voler, à s’inquiéter de la météo, à dormir, à faire des insomnies, et je laisse de côté toutes ces choses dont la décence nous interdit de parler, BREF l’être humain n’aura au bout du bout que TRES PEU DE TEMPS à se consacrer. Il arrive même que les heures supplémentaires le privent de quelques-unes de ces tâches de première nécessité, comme de baiser. Bordel de merde ! Et ce genre d’existence vous bouffe six jours de la semaine et, comme le dimanche, vous êtes censé fréquenter l’église ou manger en famille, parfois les deux, parlez d’un rêve éveillé !

Auteur: Bukowski Charles

Info: Dans "Un carnet taché de vin", page 212

[ salariat ] [ collectif-personnel ] [ routine ]

 

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marchandises

Nous sommes à la fin de la production. Cette forme coïncide en Occident avec l’énonciation de la loi marchande de la valeur, c’est-à-dire avec le règne de l’économie politique. Auparavant, rien n’est produit à proprement parler : tout se déduit, par voie de grâce (Dieu), ou de gratification (la nature) d’une instance qui livre ou refuse ses richesses. La valeur émane du règne des qualités divines ou naturelles (elles se confondent pour nous rétrospectivement). C’est encore ainsi que les Physiocrates voient le cycle de la terre et du travail : celui-ci n’a pas de valeur propre. On peut se demander s’il y a alors une véritable loi de la valeur, puisque celle-ci est dispensée sans que son expression puisse devenir rationnelle. Sa forme n’est pas dégagée, puisqu’elle est liée à une substance référentielle inépuisable. Si loi il y a, c’est, par opposition à la loi marchande, une loi naturelle de la valeur.

Une mutation bouscule cet édifice – celui d’une distribution ou d’une dispense naturelle des richesses – dès lors que la valeur devient produite, sa référence le travail, sa loi d’équivalence généralisée de tous les travaux. La valeur est désormais assignée à l’opération distincte et rationnelle du travail humain (du travail social). Elle est mesurable, et du coup aussi la plus-value.

Auteur: Baudrillard Jean

Info: Dans "L'échange symbolique et la mort", éditions Gallimard, 1976, page 23

[ historique ] [ ordre quantitatif ] [ transcendance-immanence ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

déclic

Maintenant, je dois te parler d'une expérience étrange qui portera ses fruits plus avant dans ma vie. ...Nous avions eu une vague de froid plus sèche que jamais. Les gens qui marchaient dans la neige laissaient derrière eux comme une traînée lumineuse et une boule de neige jetée contre un obstacle produisait un éclat de lumière comme un pain de sucre frappé avec un couteau. Et puis, alors que je caressais le dos de Mačak, apparut comme une une nappe de lumière et ma main produisit une série d'étincelles. (...) Mon père me fit remarquer que ce n'était rien d'autre que de l'électricité, du même genre que ce que l'on voit sur les arbres lors d'une tempête. Ma mère était un peu inquiète. Arrête de jouer avec le chat, dit-elle, il pourrait mettre le feu. Je me mis alors à songer. La nature est-elle un chat ? Si oui, qui lui caresse le dos ? Ce ne peut être que Dieu, concluais-je...

Je ne veux pas exagérer l'effet de ce merveilleux spectacle sur mon imaginaire d'enfant. Mais jour après jour, je me suis demandé ce qu'était l'électricité, et je ne trouvais pas de réponse. Quatre-vingts ans se sont écoulés depuis et je pose toujours la même question, sans plus de réponse.

Auteur: Tesla Nikola

Info: Lettre à Pola Fotitch, "Une histoire de jeunesse racontée avec l'âge" (1939). In Tesla Said (1984), Dans John Ratzlaff, éditeur,  283-84. Cité dans Marc J. Seifer, Wizard : The Life and Times of Nikola Tesla (1998), 5.

[ enfance ] [ amorce ] [ quête ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

méthode

Le but du jeu de la mise en scène est d'atteindre le centre de la pièce, d'atteindre son noeud. Je me souviens d'un cours de philosophie sur Kant. Tous les professeurs, traditionnellement, donnaient une bibliographie sur Kant, excepté un. A une élève surprise par sa méthode, ce professeur répondit : "Lisez Kant !" Pourquoi ne pas aller plus souvent au centre de l'objet plutôt que de tourner autour ? Plutôt que le commenter ? Plutôt que d'en parler ? L'air du temps veut qu'au lieu d'aller vers le centre de l'objet, on aille à la périphérie. C'est la mode. On fait des films sur le tournage d'un film, des spectacles sur la façon de faire des spectacles, au lieu de faire des films et des spectacles. Je suis de ceux qui pensent que tout a déjà été dit. Il n'y a pas de thèmes nouveaux. Les médias, la presse pensent qu'il en existe. Mais le poète se désintéresse des thèmes, il se préoccupe de la forme. Il va au centre. Et le centre, c'est la langue. Le poète se demande comment une pièce est construite. Plus la pièce a de force, plus il est difficile d'en atteindre le centre. Et lorsqu'on croit l'avoir atteint, alors on peut reconstruire, redéplier, redéployer une idée, des images, du sens.

Auteur: Lagarce Jean-Luc

Info: Extrait d'un entretien avec Jean-Michel Potiron, dans la revue Europe janvier-février 2010.

[ analyse ] [ scénographie ] [ fond-forme ]

 
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autiste savant

Charles Dirac venait de Saint-Maurice en Suisse. Avec ses enfants ils étaient officiellement ressortissants helvètes jusqu'à leur naturalisation en 1919. Le père de Dirac était strict et autoritaire, tout en désapprouvant les châtiments corporels. Paul Dirac avait une relation tendue avec son père, à tel point qu'après sa mort il écrira : "Je me sens beaucoup plus libre maintenant, me voilà mon propre maitre". Charles obligeait ses enfants à lui parler uniquement en français pour apprendre la langue. Lorsque Dirac se rendit compte qu'il ne pouvait  exprimer ce qu'il voulait dire en français, il décida  de se taire.

Une connaissance, physicien de profession, m'a conté une parmi les nombreuses anecdotes à son sujet.

Un jour, désespéré de n'avoir pu résoudre une question mathématique, un des étudiants de Dirac se suicida. Ce dernier vint aux obsèques et prononça une courte allocution.  Au cours de laquelle il commentera : "Cette équation n'était pourtant pas très difficile".  

Considéré comme un des grands mathématiciens du vingtième siècle, Dirac, diagnostiqué a posteriori par certains comme atteint du syndrome Asperger, se coupait systématiquement de ses amis. Albert Einstein écrivit à son propos : "J'ai des problèmes avec Dirac. Cet équilibre sur le chemin vertigineux entre le génie et la folie est horrible."

Auteur: Internet

Info: Traduit/compilé par MG

[ personnage ] [ éléments biographiques ] [ insensibilité ] [ indifférence ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

rupture épistémique

[…] le lien établi entre les concepts de fréquence et d’énergie était totalement inconnu dans la physique classique et lui aurait semblé irrationnel. (Je me rappelle encore très bien le choc émotionnel qu’ont provoqué en moi cette découverte et ses conséquences alors que j’étais encore étudiant. Il en a été de même pour la plupart des physiciens de ma génération et de la génération antérieure.) La science a eu besoin de pas moins de 27 ans pour élaborer un système conceptuel adapté à cette réalité paradoxale et cependant non contradictoire. Il s’est révélé que la source des contradictions auxquelles on se retrouve confronté quand on établit un lien entre l’énergie et la fréquence sans avoir aucunement recours à des images concrètes réside dans l’hypothèse suivante : l’énergie aurait à chaque instant précis une valeur bien déterminée. En fait, il est visiblement absurde de parler de la valeur d’une période temporelle en liaison avec une durée qui est elle-même inférieure à la période. Plus la durée disponible pour définir une période est longue, plus sa valeur est définie précisément. Une période parfaitement définie correspond au cas limite de sa validité au cours d’un intervalle de temps infiniment long. La découverte de la physique quantique est de monter qu’il en est exactement de même pour l’énergie.

Auteur: Pauli Wolfgang

Info: "Appendice 3 : essai non publié de Pauli" in "Correspondance 1932-1958", trad. Françoise Périgaut, éd. Michel Albin, Paris, 2000, page 267

[ résumé ] [ implications ] [ paradoxe source ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson