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antiféminisme

Le féminisme en demande beaucoup trop aux femmes. Le féminisme exige des femmes qu’elles sortent de la torpeur millénaire qui leur a toujours été accordée de grâce. Tout ça pour obtenir le droit d’aller voter à la grande foire démocratique et pour gagner cent euros de plus par mois, alors qu’on pourrait très bien rester une femme au foyer et se la couler douce toute la journée. J’aime pouvoir profiter des avantages que me confère le sexe faible. Pouvoir cultiver un gros cul plein de graisse, pouvoir pécho même si je ressemble à un gros thon rien que parce que la plupart des hommes sont prêts à tout pour niquer, pouvoir dire que j’ai la migraine le soir au moment d’aller me pieuter sans qu’on remette en cause ma féminité, rater ma vie professionnelle sans en faire une question personnelle, avoir des occupations ménagères toutes trouvées les dimanches pluvieux, être capable de faire l’amour plusieurs fois par jour sans fatigue (avec des hommes différents de préférence), aller préparer le repas du soir plutôt que de me faire chier devant la télé. Et si je n’ai aucune ambition, pas besoin d’en trouver une : il me suffit de pondre un gosse ou deux pour qu’on me foute la paix tout le reste de mon existence. Seulement voilà, depuis quelques temps, des mecs qui veulent nous foutre dans la même merde qu’eux ouvrent leur grande gueule de bâtards pour nous dire ce que nous, les femmes, nous devrions devenir. Ils nous disent : vous pourriez devenir tellement d’autres choses. Vous pourriez devenir des hommes, par exemple.

Auteur: Colimasson

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sublimation parodique

Michelet voit percer en tout cas au fond du tunnel une lumière : c’est la montée, annonce-t-il, de ce qu’il appelle la "jouissance du vrai". […] Tout en observant avec une délectation obsessionnelle la transformation progressive du catholicisme en déchet. Fascination qui va le pousser, il faut relire son Journal dans ce sens, à se pencher vers la fin de sa vie quotidiennement sur la cuvette des cabinets pour y contempler avec un trouble délicieux et bien entendu intégralement religieux les cacas de sa jeune femme, comme s’il avait enfin découvert le bon déchet de remplacement, organique, délicatement fumant, toxiquement vivant, rond, supplantant définitivement le mauvais déchet catholique.
Déjà, constatant la mort de l’Eglise et annonçant qu’il y avait enfin place dans le genre humain pour la "jouissance du vrai", il désignait un nouvel instrument majeur du prochain sacerdoce : "le ventre de la femme est pour l’homme le foyer de l’inspiration"… […] Dans L’Amour, Michelet contemple, la lèvre inférieure palpitante avec cette espèce d’ombre de gâtisme sur le visage qui donne la vraie ferveur incurable, une planche anatomique représentant dans tous ses détails l’exaltante matrice féminine. […]
Ce qui est obscène dans cette espèce de branlage religieux autour du cul, ce n’est ni le cul ni le branlage mais bien sûr leur enveloppement religieux, le bain de vapeur piétiste où il amollit sa propre pornographie frénétique. Sa cagoterie sensuelle. Ses tremblotes de félicité tartufière autour d’un pauvre étron qui nage. Son air béat d’avoir découvert au fond des chiottes la nouvelle hostie des temps futurs. La boule de cristal new-look de l’avenir améliorable…

Auteur: Muray Philippe

Info: Dans "Le 19e siècle à travers les âges", pages 458-459

[ pruderie ] [ déplacement ] [ vacheries ]

 

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épave

Ici, dans la forêt, je me trouve enfin à la place qui me convient. Je n’en veux plus aux fabricants d’autos, ils ont depuis longtemps perdu tout intérêt. Mais comme ils m’ont torturée avec des choses qui me répugnaient ! je n’avais que cette petite vie et ils ne m’ont pas laissé vivre en paix. Maintenant que les hommes n’existent plus, les conduites de gaz, les centrales électriques et les oléoducs montrent leur vrai visage lamentable. On en avait fait des dieux au lieu de s’en servir comme objets d’usage. Moi aussi je possède un objet de ce genre au milieu de la forêt : la Mercedes noire de Hugo. Quand nous sommes arrivés avec, elle était presque neuve. Aujourd’hui, recouverte d’herbe, elle sert de nids aux souris et aux oiseaux. Quand la clématite fleurit au mois de juin, elle devient très belle et se met à ressembler à un gigantesque bouquet de mariée. Elle est belle aussi en hiver lorsqu’elle est brillante de givre ou se couronne d’une coiffe blanche. Au printemps et à l’automne, je distingue entre les tiges brunes le jaune passé de ses coussins jonchés de feuilles de hêtre, mêlées à des petits morceaux de caoutchouc mousse et de crin, arraché et déchiqueté par des dents minuscules. La Mercedes d’Hugo est devenue un foyer confortable, chaud et abrité du vent. On devrait placer des voitures dans les forêts, elles font de bons nichoirs. Sur les routes, à travers tout le pays, il doit y en avoir des milliers recouvertes de lierre, d’orties et de buissons. Mais celle-là sont entièrement vide et sans habitants.

Auteur: Haushofer Marlen

Info: Le Mur invisible, p. 258

[ automobile ] [ nature ]

 

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humanité

Personne, littéralement personne, ne peut jouer le rôle impossible de l'Anthropocène, et c'est là tout l'intérêt de la notion. Parler de l'origine anthropique du réchauffement climatique global n'a aucun sens, en effet, si l'on entend par "anthropique" quelque chose comme "l'espèce humaine". Qui peut prétendre parler de l'humain en général, sans susciter aussitôt mille protestations ? Des voix indignées vont s'élever pour dire qu'elles ne s'estiment en aucune manière responsables de ces actions à l'échelle géologique - et elles auront raison ! Les nations indiennes au coeur de la forêt amazonienne n'ont rien à voir avec "l'origine anthropique" du changement climatique - du moins tant que des politiciens en campagne électorale ne leur ont pas distribué des tronçonneuses. Pas plus que les pauvres des bidonvilles de Bombay qui ne peuvent que rêver d'avoir une empreinte carbone plus importante que celle laissée par la suie émise par leurs foyers de fortune. Pas plus que l'ouvrière obligée de faire de longs trajets en voiture parce qu'elle n'a pas pu trouver un logement abordable près de l'usine où elle travaille: qui oserait lui faire honte de sa trace carbone ? C'est pourquoi l'Anthropocène, malgré son nom, n'est pas une extension immodérée de l'anthropocentrisme. [...] C'est bien plutôt l'humain comme agent unifié, comme simple entité politique virtuelle, comme concept universel, qui doit être décomposé en plusieurs peuples distincts, dotés d'intérêts contradictoires, et convoqués sous les auspices d'entités en guerre - pour ne pas dire de divinités en guerre. L'anthropos de l'anthropocène ? C'est Babel après la chute de la tour géante. Enfin l'humain n'est plus unifiable ! Enfin il n'est plus hors-sol ! Enfin il n'est plus hors de l'histoire terrestre !

Auteur: Latour Bruno

Info: Face à Gaïa. Huit conférences sur le nouveau régime climatique

[ calorifère ] [ civilisation ]

 

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éloge

Léon Bloy est mort. Ce volcan d'imprécations éclatantes, cet Etna d'immondices embrasés, sans cesse en déflagrations pyrotechniques éblouissantes, ce foyer lumineux d'éruptions fulminatoires s'est éteint et refroidi, après avoir vomi sa lave de lapidaires anathèmes sur deux générations de ses contemporains.

On pouvait ne pas aimer l'homme, déplorer son caractère qui participait de l'orgueil titanesque et de l'inconsciente envie ; on doit condamner ses procédés de catapulte offensive qui ne s'appuyaient sur aucune plate-forme critique déterminée ; mais il nous faut bien reconnaître la maîtrise surprenante de l'écrivain lapideur qui taillait avec tant d'art ses projectiles et semblait un Géryon polygame qui aurait épousé cyniquement à la fois Tisiphone, Alecto, Mégère, les furieuses Erinnyes de la fable. 

Y eut-il jamais dans notre doux pays, sous notre joli ciel de tempérance, pamphlétaire aussi tumultueux, excessif et inexorable que cet exécuteur des hautes œuvres qui se servait du pal, qu'il avait occidentalisé et qui, né démolisseur, fusait ou plutôt mésusait du marmitage de ses torpilles multilobées et pourvues parfois de gaz hilarants pour anéantir toutes les statues en pain d'épice de notre Foire du Trône aux vanités.

Celui qui intitulait un recueil de portraits satiriques de certains hommes en vue : Causeries sur quelques charognes, et qui nommait le livre de la Bonne Souffrance, par François Coppée un Lavement rendu, n'avait pas, à vrai dire, l'esprit parisien ou la verve intellectuelle ironique d'un Chamfort. Il était de mœurs apaches, dédaignait les subtiles élégances des luttes au fleuret ou à l'épée et préférait assommer, avec une lourde matraque d'or stylisé qu'il maniait terriblement, comme un dégringoleur de pentes, terreur des barrières mal famées.

Auteur: Uzanne Octave

Info: Un Diogène Théocrate. Léon Bloy est mort. Article publié dans La Dépêche du samedi 17 novembre 1917, http://www.octaveuzanne.com/2020/05/un-diogene-theocrate-leon-bloy-est-mort.html

[ hommage ] [ hyperbolique ] [ trickster ]

 

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civilisation

Le plus ancien four trouvé en Grèce. Les archéologues ont découvert les plus anciennes "cheminées" en argile faites par des humains lors de fouilles en Grèce méridionale. Ces structures établissent le lien entre les foyers de pierre et ce qui devint des fours. Ces foyers ont environ 30.000 ans d'âge et ont été presque certainement employés par les habitants préhistoriques pour faire cuire des aliments. Les chercheurs ont trouvé des restes de cendre de bois et les tests en laboratoire on démontré que l'argile des foyers avait longuement brûlé.
Cette découverte permet de comprendre le lien entre les foyers de pierre construits à l'époque les fours à argile connus pour avoir été employé il y a -28.000 à -26.000 ans à Dolni Vestonice en République Tchèque. Ces nouveaux foyers d'argile ont été excavés par une équipe Européo-Israélienne à la caverne de Klisoura située dans une gorge du nord-ouest du Péloponnèse. Les gens qui ont fait ces foyers ont probablement amené l'argile d'un dépôt alluvionnaire fluvial jusqu'à la caverne de Klisoura pour, après mouillage, les mouler sur place. A Dolni Vestonice, les foyers sont aussi faits d'argile rapporté à partir d'un dépôt alluvionnaire fluvial. Les archéologues ont trouvé là l'évidence de chasseur-ramasseurs préhistoriques qui utilisaient des fours utilisant l'argile réfractaire. Les os d'animaux brûlés associés aux structures d'argile incluent des restes de cerfs communs, de lièvres, de perdrix et du grand busard. On a également trouvé des graines comestibles brûlées bien qu'il n'ait pas été possible de dire si celles-ci avaient été cuites délibérément. Jusqu'ici, il n'y avait pas d'évidence de la transition des foyers en pierre du Paléolithique moyen à cette façon plus sophistiquée utilisée en Europe centrale il y a près de 28.000 ans.

Auteur: Scholarly journal Antiquity

Info: octobre 2004

 

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cobaye

Avant cela, j'ai eu un autre ami. Un artiste. Il peignait. Nous voulions également nous marier. Tout allait bien jusqu'au jour où je l'ai entendu, par hasard, parler au téléphone avec un ami. Je suis entrée dans son atelier alors qu'il criait dans le combiné: "Quelle chance! Tu ne te rends même pas compte de la chance que tu as!" C'était surprenant de le voir aussi agité, lui qui était tellement calme et flegmatique d'habitude. J'ai vite compris ce qui motivait son enthousiasme. Son copain habitait dans un foyer d'étudiants et, dans une pièce voisine, il venait de voir une jeune fille qui s'était pendue. Il l'avait décrochée. Et mon ami me racontait cela avec des trémolos d'excitation dans la voix: "Tu ne peux pas t'imaginer ce qu'il a vu! Ce qu'il a vécu! Il l'a portée dans ses bras! Il a touché son visage... Elle avait de l'écume aux lèvres... Viens! Viens vite, on arrivera peut-être à temps pour la voir!" Il n'a pas eu la moindre compassion pour la fille morte. Il voulait juste la voir et la graver dans sa mémoire pour la dessiner... Je me suis aussitôt rappelé les questions qu'il me posait: quelles étaient les couleurs de l'incendie de la centrale, si j'avais vu des chiens et des chats abattus, dans les rues, comment les gens pleuraient, si j'en avais vu mourir... Après cela, je n'ai pas pu rester avec lui... (Après un silence.) Je ne sais pas si je serai d'accord pour vous revoir. Il me semble que vous me percevez de la même manière que lui. Que vous m'observez, tout simplement. Que vous essayez de garder mon image, comme pour une expérience... Je ne peux pas me défaire de cette impression. Je ne le pourrai plus...

Auteur: anonyme

Info: Témoignage de Katia P. recueilli par Svetlana Alexievitch dans La Supplication, Tchernobyl, chronique du monde après l'apocalypse

[ froideur ]

 

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passe-temps

Un jour Zakhar Pavlovitch chercha longtemps le boulon qu'il lui fallait pour refaire le filetage d'un écrou forcé. Il parcourait le dépôt et demandait si personne n'avait de boulon de 8, pour refaire un filetage. On lui répondit qu'il n'y en avait pas, quoique tout le monde eût ce genre de boulon. C'est qu'en fait les ouvriers s'ennuyaient, ils se distrayaient en se compliquant mutuellement les soucis du travail. Zakhar Pavlovitch ignorait encore cet amusement sournois, caché, qu'on trouve dans tout atelier. Cette dérision discrète permettait aux autres ouvriers d'avoir raison de la longueur de la journée de travail et de la langueur d'un labeur répétitif. En vertu de ce divertissement cher à ses voisins Zakhar Pavlovitch fit bien des choses pour rien. Il allait chercher des chiffons au dépôt alors qu'il y en avait des monceaux au bureau ; il fabriquait des échelles en bois ou des bidons pour l'huile, dont le dépôt regorgeait ; incité par quelqu'un, il fut même sur le point de changer par ses propres moyens les bouchons-témoins dans le foyer de la locomotive, mais fut prévenu à temps par un chauffeur qui se trouvait là, sans quoi Zakhar Pavlovitch aurait été congédié sans aucun commentaire.
Zakhar Pavlovitch, ne trouvant pas cette fois le boulon convenable, entreprit d'adapter un pivot à la réalisation d'un filetage et il y serait parvenu, car il ne perdait jamais patience, mais on lui dit :
- Eh, 8 pour un filetage, viens donc prendre ton boulon !
Depuis lors Zakhar Pavlovitch eut pour sobriquet "8 pour un filetage", mais on le dupa désormais moins souvent lorsqu'il eut un besoin urgent d'outils.
Ensuite personne ne sut que Zakhar Pavlovitch préférait ce sobriquet à son nom de baptême : il rappelait une partie importante de toute machine et semblait intégrer corporellement Zakhar Pavlovitch à cette patrie authentique où les pouces de métal triomphent des verstes de terre."

Auteur: Platonov Andrej Platonovic

Info: Tchevengour

[ ennui ] [ atelier ] [ usine ] [ sidérurgie ]

 

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insatisfaction

Joakim, exaspéré :
- Toi, tu parles de gratter d’un bout de l’année à l’autre ? Tu n’as pas honte ? C’est toi qui grattes le pays d’un bout à l’autre et ne t’arrêtes nulle part !
Edevart fit dévier la discussion.
- Tu peux dire que je cours tout le temps d’un endroit à l’autre. Mais vaut-il donc mieux rester ici à pourrir dans la baie, comme vous le faites, Ezra et toi ?
- Ezra ! … Es-tu fou ? s’écria Joakim. Sais-tu qu’Ezra, avec le temps, deviendra propriétaire de la plus grande ferme du pays ?
- Oui. Quand il se sera éreinté à défricher et à bêcher sa ferme !
- Quoi ? Il ne devrait pas travailler, peut-être ?
- Et quand Hosea s’éreinte aussi comme une esclave pour ses vaches et ses champs ! poursuivit Edevart. Elle fait peine à voir.
- Tu es trop bête, grommela Joakim. Tu ne vois donc pas comme ils sont contents tous les deux ?
Une réminiscence passa par l’esprit d’Edevart et il dit :
- Ça vient de ce qu’ils ne connaissent rien de mieux.
- Qu’est-ce qu’il y a de mieux ? Ils se donnent du mal avec ce qu’ils ont ; mais ça fait leur joie et ils ne souhaitent pas autre chose.
- Et avec tout le mal qu’ils se donnent, ils ont tout juste de quoi manger.
- Non. Ils ont commencé les mains vides ; mais maintenant, ils ont une maison et un foyer, ils ont des champs, ils ont trois vaches, et bientôt ils auront un cheval.
- Cause toujours ! railla Edevart.
- En outre, ils vivent en paix. Et toi pas ! ils se couchent le soir et ils dorment.
- Je ne dis pas non.
- Mais c’est ce que tu ne fais pas, toi qui cours partout du Nord au Sud, et t’imagines faire beaucoup mieux ! Je t’ai déjà entendu la nuit : tu te tortilles comme un ver avant de t’endormir ; et quand tu ronfles, à la fin, tu geins dans ton sommeil, à propos de ta chute d’eau, et d’August, et de la Floride en Amérique, et de ta ferme. C’est comme ça que tu te reposes la nuit ! Je ne voudrais pas changer avec toi !

Auteur: Hamsun Knut

Info: Dans "Vagabonds", édition Pochothèque, trad. J. Petithuguenin, page 1172

[ simplicité ] [ fuite en avant ] [ dialogue ]

 

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labeur

J'ai travaillé pas mal. On travaille, ou bien on regarde. C'est l'un ou l'autre. Mais si vous travaillez, vous ne faites pas autre chose. Maintenant, on ne sait plus ce que c'est, le travail. C'est encore un truc que j'ai comme ça, parce que je ne suis pas d'une génération où l'on rigolait. Ça n'existait pas. Les distractions, c'était des choses de gens riches. Quand on était pauvre, on travaillait jusqu'à crever. C'était le destin. Mais je vois maintenant qu'ils ne travaillent plus. Alors ils ne savent rien. Oh, ils ont tous une petite envie, comme ça, de s'exprimer. Mais quand vous les mettez devant une feuille de papier, devant un pinceau ou un instrument, on voit surtout la débilité, l'insignifiance. Du jour où l'on s'est mis à apprendre sans douleur, le latin sans thème, le grec en dormant, on ne sait plus rien. C'est la facilité qui tue tout. La facilité et la publicité. C'est fini. Il n'y a plus rien. Il manque quelque chose: l'effort.
Ce qu'il faut: faire un effort. Mais ils ne veulent pas, les cochons ! Ils ne veulent pas et puis, ils ne sont pas en état. Ils aiment trop la vie ; ils sont bien, dans la vie ! Vous comprenez, le jour où l'on a fermé les monastères, on a fermé la patience, on a tout fermé. L'homme court après sa queue et son verre, et c'est fini ! Ah, pour le confort de votre foyer, que feriez-vous Madame ? Voilà, c'est tout. La radio, ça ne s'adresse pas aux milliardaires, ça s'adresse à des gens bien ordinaires. Et qu'est ce qu'on entend ? "Ah ! Du confort ? Ce serait tellement mieux du violet garanti machin autour de votre pièce avec des ampoules Untel". Il n'est question que de ça. Je ne parle pas de maladies, il n'y en a plus. La vie est éternelle, la vie commence à 40 ans. Boniments ! J'ai pratiqué en Amérique ; je connais tout ça, je connais l'anglais aussi. Nous avons hérité tout notre côté dégueulasse des Anglo-Saxons. Avec leur politique d'optimisme. Et puis, nous avons conservé les vices du chrétien. Nous sommes des repus. Sauf évidemment la masse qui crève. Mais enfin, ils boivent. Et nous sommes aussi le peuple le plus alcoolique du monde. Alors... Ce qui tue aussi tous les médecins d'ailleurs. Le bavardage et l'alcool.

Auteur: Céline Louis-Ferdinand

Info: Propos enregistrés à Meudon en 1961 par Jacques d'Arribehaude. Dans" L'année Céline 1995". Page 63/64

[ décadence ] [ sexe ] [ boisson ]

 

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