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éloge

Ne craignez pas que je sois comme madame Miford, que je mette la couronne sur votre tête au moment le plus pathétique ; mais comme je ne puis vous comparer qu'à vous même, il faut que je vous dise, Talma, qu'hier vous avez surpassé la perfection et l'imagination même. Il y a dans cette pièce, toute défectueuse qu'elle est, un débris d'une tragédie plus forte que la nôtre, et votre talent m'est apparu dans ce rôle de Hamlet, comme le génie de Shakespeare, mais sans inégalités, sans les gestes familiers, devenus tout-à-coup ce qu'il y a de plus noble sur la terre.
Cette profondeur de nature, ces questions sur notre destinée à tous, en présence de cette foule qui mourra, et qui semblait vous écouter comme l'oracle du sort ; cette apparition du spectre, plus terrible dans vos regards que sous la forme la plus redoutable, cette profonde mélancolie, cette voix, ces regards qui révèlent des sentiments, un caractère au-dessus de toutes les proportions humaines ; c'est admirable, trois fois admirable; et mon amitié pour vous n'entre pour rien dans cette émotion la plus profonde que les arts m'aient fait ressentir depuis que je vis. Je vous aime, dans la chambre, dans les rôles où vous êtes encore votre pareil ; mais dans ce rôle d'Hamlet, vous m'inspirez un tel enthousiasme, que ce n'était plus vous, que ce n'était plus moi; c'était une poésie de regards, d'accents, de gestes à laquelle aucun écrivain ne s'est encore élevé. Adieu, pardonnez-moi de vous écrire, quand je Vous attends ce matin à une heure, et ce soir à huit ; mais si les convenances sociales ne devaient pas tout arrêter, je ne sais pas, hier, si je ne me serais pas fait fière d'aller moi-même vous donner cette couronne, qui est due à un tel talent plus qu'à tout autre ; car ce n'est pas un acteur que vous êtes, c'est un homme qui élève la nature humaine, en nous en donnant une idée nouvelle. Adieu ! à une heure. Ne me répondez pas, mais aimez-moi pour mon admiration.

Auteur: Staël Madame de Germaine Necker baronne de Staël-Holstein

Info: in Staëlliana de Cousin d'Avallon, Staël à Talma, Juillet 1809

[ théâtre ] [ comédien ]

 

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véhicule

Déjà, aux premiers temps de la civilisation, on avait remarqué combien les formes nouvelles des machines rompaient violemment avec les traditions artistiques du passé et rappelaient, au contraire, les créations de la nature.

L’automobile avait été le premier instrument d’usage courant donnant quelques indications en ce sens. Aux temps barbares on s’était imaginé de concevoir l’automobile un peu à la manière d’un temple grec ou d’un meuble Louis XV ; volontiers, on eût dissimulé ses parties mécaniques sous une carrosserie de style rappelant un navire romain ou une chaise à porteurs, et les projets les plus fantastiques furent alors réalisés. Il fallut l’intervention de la nécessité pour que l’on comprît combien cette conception était vieillotte et s’appliquait mal aux idées nouvelles.

Les voitures de course, aux prises avec les exigences immédiates de la vitesse, furent les premières à indiquer la voie qu’il fallait suivre ; les artistes les qualifièrent tout d’abord de monstres ; puis, petit à petit, se dégageant des préjugés anciens, ils en célébrèrent l’harmonie nouvelle et l’impérieuse beauté.

Et bientôt, lorsque l’automobile eut conquis sa forme nouvelle, grâce aux seules indications de l’empirisme, on comprit un beau jour, qu’elle réalisait tout simplement, sans que l’on y prît garde, la structure logique et complète d’un animal nouveau.

Depuis la tête, avec ses yeux, jusqu’à la noire évacuation de l’échappement, l’automobile se comportait comme un simple animal, avec les mêmes faiblesses, les mêmes défaillances, la même fièvre à certaines heures du jour, la même reprise de force à la tombée de la nuit, avec le cœur battant de ses soupapes, la colonne vertébrale de sa transmission, envoyant le mouvement aux pattes motrices d’arrière par l’intermédiaire d’un cardan en forme de bassin, tandis que les roues d’avant tâtaient le chemin. La circulation d’eau, la circulation d’huile, l’innervation électrique, autant de réseaux distincts, nécessités par la logique, indiqués impérieusement, comme si, dans toute construction, certaines lois naturelles exigeaient les mêmes formes, les mêmes procédés. L’être nouveau se distinguait des êtres naturels par l’idée de la roue et des engrenages, mais il ne s’en distinguait que par là.

Auteur: Pawlowski Gaston de

Info: Voyage au pays de la quatrième dimension, Flatland éditeur, 2023, pages 241-242

[ anthropomorphisme ] [ organismes ] [ organique ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

romantisme psychiatrique

Les propagandistes de l’antipsychiatrie se complaisent fort souvent dans des situations ambigües. C’est ainsi que Laing voit dans la schizophrénie " une stratégie particulière qu’une personne inventerait pour supporter une situation insupportable " (Politique de l’expérience, p.80). Or il faut bien reconnaître que le schizophrène n’est nullement un stratège et qu’il n’invente rien du tout, car on ne devient pas schizophrène à volonté ; le mystère de la maladie mentale, comme celui de l’amour, c’est qu’il est toujours possible de lui trouver des causes, des motifs, des mobiles, mais que pourtant, pas plus qu’on ne décide de tomber amoureux de quelqu’un, pas davantage on ne décide de devenir un malade mental.

En outre, Laing et Cooper affirment que la société est folle, ce qui, hélas, est fort souvent incontestable ; mais Laing se souvenant des analyses de Hegel et de celles de Sartre sur l’être-pour-autrui affirme que le schizophrène est celui que la société force à devenir tel en le schizophrénant, en le chosifiant comme schizophrène et en se donnant ensuite le beau rôle de décréter : C’est un schizophrène. Mais on pourrait retourner cette argumentation contre Laing en lui faisant remarquer qu’il a commencé par chosifier la société comme société-repoussoir pour pouvoir affirmer ensuite qu’elle était effectivement folle et repoussante.

Enfin l’attitude de Laing à l’égard de la folie est des plus équivoques. D’un côté il reconnaît que la maladie mentale existe, qu’elle exige des soins, une mise en observation dans une clinique psychiatrique et qu’il faut tenter de réinsérer le malade dans la société (cf. R. D. Laing, Le moi divisé, p.25). Mais d’un autre côté, la maladie mentale le fascine et jouit à ses yeux d’un grand prestige ; il voit, en effet, en elle la possibilité d’un extraordinaire voyage et les premiers pas d’une initiation à l’inconnu. Il est ainsi tenté de s’embarquer sur la nef des fous car il trouve dans la folie une démarche de créativité proche de ce que le Zen appelle Satori. C’et pourquoi l’on peut lire, chez Laing, de nombreux récits et analyses de maladies-voyages (cf. La politique de l’expérience, p. 101).

Auteur: Brun Jean

Info: "Les vagabonds de l'occident", Desclée, Paris, 1976, page 105

[ critique ] [ ambivalence ]

 
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politique

Pas que je dise que le capitalisme ne serve à rien. Non. Le capitalisme sert justement à quelque chose et nous ne devrions pas l’oublier. C’est les choses qu’il fait qui ne servent à rien, mais ça c’est une toute autre affaire. C’est justement son problème.

Enfin, ce sur quoi il s’appuie - et c’est une grande force - devrait s’éclairer. Elle joue dans le même sens que celui que je vous disais tout à l’heure, elle va contre le pouvoir. Elle est d’une autre nature. Et elle donne au pouvoir de grands embarras.

Là aussi, c’est évidemment nachträglich, c’est après coup qu’il faut voir le sens de ce qui se passe. Le capitalisme a tout à fait changé les habitudes du pouvoir. Elles sont peut­-être devenues plus abusives, mais enfin, elles sont changées.

Le capitalisme a introduit ceci, qu’on n’avait jamais vu, ce qu’on appelle le pouvoir libéral.

Il y a des choses très simples dont après tout je ne peux parler que d’expérience très personnelle.

Observez ceci : de mémoire d’historien on n’a jamais entendu parler d’organe de gouvernement qu’on quitte en donnant sa démission.

Là où des pouvoirs authentiques, sérieux, subsistants, existent, on ne donne pas sa démission, parce que c’est très grave comme conséquence. Ou alors c’est une simple façon de s’exprimer, on donne sa démission, mais on vous abat à la sortie.

J’appelle ça des endroits où le pouvoir est sérieux. L’idée de considérer comme un progrès, et encore libéral, les institutions où, quand quelqu’un a bien saboté tout ce qu’il avait à faire pendant trois ou six mois et s’est révélé un incapable,

il n’a qu’à donner sa démission et il ne lui arrive rien.

Au contraire, on lui dit d’attendre pour qu’il revienne la prochaine fois : ça veut quand même dire quoi ?

On n’a jamais vu ça à Rome, enfin ! Aux endroits où c’était sérieux ! On n’a jamais vu un consul donner sa démission, ni un tribun du peuple ! C’est à proprement parler, inimaginable. Ça veut simplement dire que le pouvoir est ailleurs.

Auteur: Lacan Jacques

Info: 19 mars 1969

[ discours capitaliste ] [ nom-du-père ] [ ordre symbolique ] [ destitution ]

 

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sécularisation

Le xvie siècle fut un équinoxe historique, où l’Idéal bafoué par les giboulées du sensualisme s’abattit enfin, racines en l’air. Le spirituel christianisme, sabordé dans ses méninges, saigné au tronc des carotides, vidé de sa plus intime substance, ne mourut pas, hélas ! Il devint idiot et déliquescent dans sa gloire percée.

Ce fut une convulsion terrible pendant cent ans, accompagnée d’un infiniment inutile et lamentable rappel des âmes. Notre circulante sphère parut rouler au travers des autres planètes comme un arrosoir de sang. Mais le martyre même ayant perdu sa vertu, la vieille bourbe originelle fut réintégrée triomphalement, toutes les portes des étables furent arrachées de leurs gonds et l’universelle porcherie moderne commença son bréneux exode.

Le christianisme, qui n’avait su ni vaincre ni mourir, fit alors comme tous les conquis. Il reçut la loi et paya l’impôt. Pour subsister, il se fit agréable, huileux et tiède. Silencieusement, il se coula par le trou des serrures, s’infiltra dans les boiseries, obtint d’être utilisé comme essence onctueuse pour donner du jeu aux institutions et devint ainsi un condiment subalterne, que tout cuisinier politique put employer ou rejeter à sa convenance. On eut le spectacle inattendu et délicieux, d’un christianisme converti à l’idolâtrie païenne, esclave respectueux des conculcateurs du Pauvre, et souriant acolyte des phallophores.

Miraculeusement édulcoré, l’ascétisme ancien s’assimila tous les sucres et tous les onguents pour se faire pardonner de ne pas être précisément la volupté, et devint, dans une religion de tolérance, cette chose plausible qu’on pourrait nommer le catinisme de la piété. Saint François de Sales apparut, en ces temps-là, juste au bon moment, pour tout enduire. De la tête aux pieds, l’Église fut collée de son miel, aromatisée de ses séraphiques pommades. La Société de Jésus, épuisée de ses trois ou quatre premiers grands hommes et ne donnant déjà plus qu’une vomitive resucée de ses apostoliques débuts, accueillit avec joie cette parfumerie théologique, où la gloire de Dieu, définitivement, s’achalanda. Les bouquets spirituels du prince de Genève furent offerts par de caressantes mains sacerdotales aux explorateurs du Tendre, qui dilatèrent aussitôt leur géographie pour y faire entrer un aussi charmant catholicisme… Et l’héroïque Moyen Âge fut enterré à dix mille pieds !…

Auteur: Bloy Léon

Info: Dans "Le Désespéré", Livre de poche, 1962, pages 226-228

[ décadence ] [ religion traîtresse ]

 

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complexe d'Œdipe

La découverte freudienne [...] nous montre la femme dans une position qui est, si l’on peut dire – puisque j’ai parlé d’ordonnance, d’ordre ou d’ordination symbolique – subordonnée. Le père est d’abord pour elle objet de son amour – c’est-à-dire objet du sentiment qui s’adresse à l’élément de manque dans l’objet, pour autant que c’est par la voie de ce manque qu’elle a été conduite à cet objet qui est le père. Cet objet d’amour devient ensuite celui qui donne l’objet de satisfaction, l’objet de la relation naturelle de l’enfantement. A partir de là, il ne s’en faut pour elle que d’un peu de patience pour qu’au père vienne enfin à se substituer celui qui remplira exactement le même rôle, le rôle du père, en lui donnant effectivement un enfant.

Ceci comporte un trait sur lequel nous reviendrons, et qui donne son style particulier au développement du surmoi féminin. Il y a chez elle une espèce de balance entre le renoncement au phallus et la prévalence de la relation narcissique, dont un Hanns Sachs a très bien vu l’importance dans le développement de la femme. En effet, ce renoncement une fois fait, le phallus est par elle abjuré comme appartenance, et devient de l’appartenance de celui auquel dès lors s’attache son amour, le père, dont elle attend effectivement l’enfant. Cette attente de ce qui dès lors n’est plus pour elle que ce qui doit lui être donné, la met dans une dépendance très particulière, qui fait naître paradoxalement à un moment donné [...] des fixations proprement narcissiques. Elle est en fait l’être le plus intolérant à une certaine frustration. [...]

La simple réduction de la situation à l’identification de l’objet de l’amour et de l’objet qui donne la satisfaction, explique d’ailleurs aussi bien le côté spécialement fixé, voire précocement arrêté, du développement de la femme par rapport au développement que l’on peut qualifier de normal. A certains tournants de ses écrits, Freud prend un ton singulièrement misogyne pour se plaindre amèrement de la grande difficulté qu’il y a, au moins pour certains sujets féminins, à les mobiliser, à les faire bouger d’une espèce de morale, dit-il, du potager et des boulettes, qui comporte de forts impérieuses exigences quant aux satisfactions à tirer, de l’analyse elle-même par exemple.

Auteur: Lacan Jacques

Info: dans le "Séminaire, Livre IV", "La relation d'objet", éditions du Seuil, 1994, pages 281-282

[ femmes-hommes ] [ simplettes ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

musique

(L'auteur se retrouve dans un salon, curieux de rencontrer Richard Wagner)
Après les salutations d'usage, je pris place à mon tour au milieu de quelques fidèles qui m'avaient précédés. - La conversation reprit son cours, que ma venue avait évidemment interrompu ; parmi les visiteurs se trouvait un jeune Italien très bavard, et dont la spécialité me sembla être, comme on dit vulgairement, de faire des gaffes. - Dans le but probablement louable, de m'instruire, il demanda au Maître ce qu'il pensait de la Danse macabre, de Saint-Saëns.
Wagner allant parler, j'étais toutes oreilles.
"La Danse macabre, fit-il avec son disgracieux accent allemand, la Danse macabre ! Ma chère Cosima, n'est-ce pas cette machine où des os se battent ? Qu'il nous a fait entendre à Bade ? Oui, très gentil, très gentil !"
L'Italien, voyant qu'il avait fait fausse route, ne se découragea pas :
- "Et Rossini ? Notre grand Rossini ? Quelle est celle de ces oeuvres que vous préférez ?"
- "Oh ! Rossini, il avait certainement l'étoffe d'un musicien ; et je me souviens qu'étant à Paris, un jour que j'allais le voir, il voulut bien reconnaître devant moi son insuffisante éducation musicale, et avec une franchise qui lui fait honneur, il me dit : Cher maître, si au lieu d'être né italien, j'avais eu le bonheur de naître votre compatriote, je crois que j'aurais fait quelque chose. - Il faut pourtant avouer qu'il a fait trois mesures bonnes dans sa vie."
Et donnant l'exemple à l'appui, il ébaucha trois mesures du Barbier sur le piano. Après cette courte et bienveillante appréciation sur l'auteur de Guillaume Tell, il y eut un moment de silence, après quoi, toujours à l'instigation du jeune Italien, le maître exécuta une série d'autres musiciens, que dans ma naïveté je croyais gens de valeur ; et comme conclusion :
"Non, voyez-vous, à notre époque il n'y en a qu'un : c'est Offenbach."
Je me sentais étouffer dans cette atmosphère haineuse, et j'avais hâte de revoir le soleil, de contempler la nature, si radieuse dans ce beau pays de Naples. Je regrettais presque d'avoir approché et pu juger cet homme, si dieu par son génie, si piètrement humain par sa vanité. Ce fut la seule fois que j'eus l'honneur d'être admis dans l'intimité de Wagner, et plus que jamais j'ai été à même d'apprécier cette véridique parole : il ne faut pas voir les grands hommes de trop près.

Auteur: Godebski Cyprien

Info: Mémoires d'un artiste, texte violemment attaqué comme étant un faux par Willy

[ polémique ] [ critique ] [ vacherie ]

 

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imposteur

Le faux parleur choisit, pour leur tenir ses discours, des gens qui ne savent pas de quoi il parle. Il connaît bien ce regard perplexe, ce clignement d’yeux désemparé, quand il s’adresse à quelqu’un, et il ne se lance dans son discours que lorsque le désarroi de l’autre est complet. Alors, des idées lui viennent à ne plus savoir qu’en faire, des arguments auxquels il n’aurait jamais songé se présentent à foison ; il se sent capable d’embrouiller n’importe quoi, il s’exalte jusqu’au plus sombre enthousiasme, autour de lui, il y a de la vaticination dans l’air.

Mais malheur si, sur le visage de l’interlocuteur, quelque chose tressaille, comme une lueur subite de compréhension – alors le faux parleur s’effondre, s’embrouille, bafouille, reste court, essaie de tout recommencer en se donnant un mal presque gênant, et quand il remarque que rien n’y fait, que l’autre comprend et qu’il est bien décidé à s’obstiner dans sa compréhension, il renonce, se tait et tourne les talons.

Mais de telles défaites ne sont pas fréquentes. La plupart du temps, le faux parleur réussit à rester incompris. Il a de l’expérience et il sait choisir les gens, il ne s’adresse pas à n’importe qui. Il connaît trop cette engeance qui souscrit à n’importe quoi. Comme si on pouvait deviner de quoi il veut parler ! Lui-même ne le sait pas à l’avance ; nulle part, et pas même dans les astres, n’est écrit ce qu’il va dire, comment un autre pourrait-il le savoir ? Le faux parleur pressent que l’inspiration est aveugle, et que seul le néant lui permet de s’enflammer. Il serait trop facile de partir des égarements où des natures plus faibles se complaisent. Il porte en lui le monde à l’état de chaos. En lui le chaos est inné, une seule fois par siècle, le chaos élit un porteur : et c’est lui.

On pourrait croire que pour lui l’idéal suprême serait de s’arranger tout seul avec son chaos. On s’imagine le faux parleur ne se parlant qu’à lui-même. Mais c’est une impardonnable erreur. Le faux parleur ne peut s’enflammer qu’au contact de l’incompréhension butée des autres. Dans cette ville à forte densité de peuplement, il va, il vient et tourne en rond, s’arrête devant un tel, ou tel autre, jette une amorce anodine, observe son effet, et c’est seulement lorsqu’il constate la perplexité désirée qu’il se lance et s’élève jusqu’à son chaos.

Auteur: Canetti Elias

Info: Le témoin auriculaire traduit de l’allemand par Jean-Claude Hémery

[ créateur ] [ vacillement de l'esprit ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

Usages potentiels de l'application FLP

- Je pratique la lecture réflexive (je suis d'accord, ou pas, ou partiellement... avec la citation et/ou l'étiquetage.)

- Je participe et développe une réflexion communautaire avec mes inserts, mes commentaires sur les tags, mes chaines, etc. 

- J'enrichis une base de données orthogonale collective en coopérant avec une entreprise qui veut sans cesse préciser les mots, les phrases, la sémantique, le sens, la signification des textes... en allant au plus bref, c'est à dire à l'essentiel. 

- Je développe et intègre mon esprit critique et mon idiosynchrasie en rencontrant des avis différents ou opposés.

- Je soulage - ou me soulage - psychologiquement en trouvant certaines formulations qui, ne m'étant pas venues à l'esprit, dévoilent un pan de réalité. Je peux aussi pratiquer  l'écriture thérapie.  De ce fait je communique mieux aussi, via la reformulation d'idées concepts, puisqu'elles sont dès lors mieux comprises/intégrées

- Je m'auto-analyse, non perturbé par la curiosité prédatrice du spécialiste qui m'observe, et retrouve une liberté véritable, dans les mots. (Merci à ceux qui nous apporterons des pistes) Balise de vie. Développer et stocker les extraits vus comme importants pour soi. (développement de sa personnalité virtuelle réflexive) Evasions, ouvertures, portes de sorties, refuges.

- Je suis écolo : parce que par la Lecture FLPienne - je m'évade, je passe le temps, etc...  sans consommer de biens tangibles, sans polluer... ou très peu. Je justifie aussi ma paresse et ma posture écolo-responsable avec des slogans comme :

"Pour occuper mon temps sans dépenser de pognon : je vais sur FLP."

"Tu as une pulsion pour aller au mac-donald.... prends plutôt un verre d'eau et passe une heure sur FLP"

"La société te répugne, les infos resassées, surrenchères émotives, crimes médiatisés et autres effets de loupes te fatiguent... Viens te dépayser sur FLP et rencontre des pensées qui correspondent - ou pas - à tes états d'âme."

"Je développe mon langage en me distrayant avec ces jeux.

- Je demande à Chatgpt4 (ou un autre agent dialoguant) d'étiqueter une citation afin d'avoir un avis "lissé" par cet intéressant compendium informatique (qui est aussi une sorte de dictionnaire intriqué), ce qui permet de confronter ma subjectivité avec une certaine objectivité des métadonnées traitée par apprentissage automatique. Ceci en donnant ces instructions au chatbot :  

En cours de développement

Auteur: Mg

Info: 25 novembre 2018. [a http ]mot[/a] 2024

[ outil numérique ] [ propagande ] [ homme-machine ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

codage du réel

Dans La Naissance de la Conscience dans l’effondrement de l’esprit, le psychologue américain Julian Jaynes soutient que la conscience réflexive, proprement humaine, est permise par un processus métaphorique enraciné dans le mode de perception visuelle. Jaynes met en place une nouvelle terminologie pour étudier le phénomène métaphorique d'un point de vue phénoménologique et cognitif. Pour lui, à la base de tout langage existe la perception brute, qui est le mode de compréhension premier du monde : il s'agit ensuite de parvenir à une métaphore de cette chose, en lui substituant quelque chose qui nous soit plus familier.

Le travail métaphorique de la compréhension implique :

- des métaphrandes (les choses à décrire) ;

- des métapheurs (les choses aidant à décrire les précédentes) ;

- des parapheurs (les mots associés aux métapheurs, sèmes en quelque sorte contenus dans la connotation) ;

- des paraphrandes (les mots associés aux choses à décrire et que la langue possède).

Pour Jaynes, tout découle de ce processus et même les modèles les plus complexes et abstraits : "Une théorie est donc une métaphore entre un modèle et des données" dit-il. Le langage lui-même vient de la métaphore. En cela Jaynes réalise un point de vue révolutionnaire de la conception couramment admise : la métaphore peut en effet se figer, et former le vocabulaire qui peu à peu perd toute référence à l'analogie première (exemple : les "ailes" de l'avion, ou encore le verbe "être", qui vient du sanscrit bhu ("pousser" ou "faire pousser"), renvoyant à la métaphore d'une action réelle s'appliquant à un élément mental). L'étymologie est ainsi pour Jaynes résultat de métaphores. Le langage a peu à peu, du concret à l'abstrait, monté "les marches qu'étaient les métaphores" et a permis ainsi de spatialiser en conscience le Réel :

"Le lexique du langage, donc, est un ensemble fini de termes qui, par le biais de la métaphore, peut s'étendre sur un ensemble infini de situations, allant même jusqu'à en créer ainsi de nouvelles."

La conscience s'entend pour Julian Jaynes avant tout comme un espace mental métaphorique, que l'expérience agrandit à chaque nouvelle prise de conscience. Le processus corollaire de la narratisation vient ensuite lier ces expériences en un tout logique donnant la réflexivité. Jaynes distingue ainsi plusieurs procédés de métaphorisation

" Il y a donc toujours deux termes dans la métaphore: la chose à décrire, que j'appellerai le métaphrande, et la chose ou le rapport utilisé pour l'élucider, que j'appellerai le métapheur. Une métaphore est toujours un métapheur connu s'appliquant à un métaphrande moins connu. j'ai inventé ces termes hybrides par simple référence à la multiplication où un multiplicande* opère sur un multiplicateur*."

Auteur: Internet

Info: https://fr.wikipedia.org/wiki/Julian_Jaynes. A propos "La Naissance de la Conscience dans l'effondrement de l'esprit bicaméral". *Dans une multiplication, celui des facteurs qui est énoncé le premier.

[ symbolisation ] [ mise en concepts ] [ catachrèses ] [ paréidolie ] [ sémantique ] [ préhension intellectuelle ] [ tétravalence ] [ imagination ] [ priméité-tiercité ]

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste