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dernières paroles

Ma chère maman,
De tous et de toutes, je sais que ce sera toi qui souffriras le plus et c'est vers toi qu'ira ma dernière pensée. Il ne faut en vouloir à personne de ma mort, car j'ai moi-même choisi mon destin.
Que puis-je t'écrire, car quoique j'ai l'esprit clair, je ne trouve pas mes mots. Je m'étais engagé dans l'Armée de la Libération et je meurs quand la victoire éclate... Je vais être fusillé tout à l'heure avec mes 23 camarades.
Après la guerre, tu pourras faire valoir tes droits de pension. La prison te fera parvenir mes affaires personnelles, je garde le maillot de papa pour que le froid ne me fasse pas trembler.
Ma chère soeur, il ne faut pas trop penser à moi, ne sois pas triste, marie-toi à un bon gars, et à tes enfants, tu leur parleras de cet oncle qu'ils n'ont pas connu.
Mon cher papa, il faut que tu sois fort, d'ailleurs, il est impossible que l'homme et la femme qui m'ont mis au monde ne soient pas forts.
Encore une fois, je vous dis adieu. Courage. Votre fils Spartaco.

Auteur: Fontano Spartaco

Info: Fresnes, le 21 février 1944

[ exécution ]

 

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guerre

Les scandales qui se révèlent en ce moment me donnent une jouissance intense. Enfin, il n'y a pas au monde que les imbéciles, je parle des deux côtés, qui se font trouer la peau. Il y a aussi les malins qui emplissent leurs poches. Quel beau pamphlet on pourrait écrire, cinglant, moqueur, joyeux, pitoyable, méprisant, comique, semblable à un grand éclat de rire, sur tout cela. D'un côté les imbéciles, les héros, comme on dit, le malheureux troupeau, parti ivre de grandes phrases, saoulé de mensonges, pour tuer et se faire tuer, leurs veuves plus ou moins plongées dans le chagrin. De l'autre, les grands coquins faisant superbement leurs affaires, tout en criant : La patrie avant tout, gloire aux héros. Ah ! il faudrait un grand talent, quel beau morceau ce serait. Pour moi, je jubile. Mieux, je jouis intellectuellement de cet admirable spectacle social. Je n'aime pas la bêtise, l'imbécillité servile, la jocrisserie. J'apprécie bien autrement les malins qui ont su faire leurs affaires, que les mille pauvres diables qui n'ont su que mourir pour de prétendus grands mots. Au moins, il y aura eu dans cette histoire quelques individus intelligents.

Auteur: Léautaud Paul

Info: 4 octobre 1917 I p.1025

[ spectacle ] [ ironie ]

 

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réfléchir

La pensée peut-elle exister sans langage ?

"On soutient parfois qu'il n'y a pas de pensée sans langage, mais je ne peux souscrire à ce point de vue : Je soutiens qu'il y a de la pensée, et même des croyances vraies et fausses, sans langage. Mais quoi qu'il en soit, on ne peut nier que toute pensée relativement élaborée nécessite des mots. 

Le langage sert non seulement à exprimer des pensées, mais aussi à rendre possibles des pensées qui ne pourraient pas exister sans lui. Je peux savoir, en un sens, que j'ai cinq doigts, sans connaître le mot "cinq", mais je ne peux pas savoir que la population de Londres est d'environ huit millions d'habitants sans avoir acquis le langage de l'arithmétique, ni avoir une pensée correspondant étroitement à ce qui est affirmé dans la phrase : "le rapport entre la circonférence d'un cercle et son diamètre est d'environ 3,14159". 

Le langage, une fois évolué, acquiert une sorte d'autonomie : nous pouvons savoir, surtout en mathématiques, qu'une phrase affirme quelque chose de vrai, bien que ce qu'elle affirme soit trop complexe pour être appréhendé même par les meilleurs esprits".

Auteur: Russell Bertrand

Info: Human Knowledge : Its Scope and Limits  (1948), Partie II. Le monde de la science, Ch.I : Les usages du langage, p.74. La philosophie du langage étudie la nature du langage et les relations entre les idiomes, leurs utilisateurs et le monde, à propos de la nature du sens, de l'intentionnalité, de la référence, de la constitution des phrases, des concepts, de l'apprentissage et de la pensée. Russel et Gottlob Frege furent les figures de proue de ce "virage linguistique". Ils furent suivis par Ludwig Wittgenstein (Tractatus Logico-Philosophicus), le Cercle de Vienne, les positivistes logiques et Willard Van Orman Quine. Ce qu'on nomme aussi "naissance de la philosophie analytique".

[ réflexion ] [ tiercités ] [ philosophie analytique ] [ épistémé ] [ historique ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

couple

La suite, c'est le quotidien qui vous rattrape — ses calmes plats, ses soubresauts, ses habitudes, son cours ordinaire. Louise avait commencé à travailler à l'hôpital. Le jour, la nuit, les week-ends, elle se tenait en alerte comme un soldat mobilisable à tout moment. On se croisait. Elle partait quand j'arrivais. Rentrait quand je partais. Souvent c'était un jour sur deux. Comme dans un amour alterné. Parfois j'avais l'impression que nous prenions un de ces tourniquets, à l'entrée des grands magasins. Nos vies disparaissaient dans la rotation de nos emplois du temps. Alors on s'écrivait. Pour elle une lettre sur la table. Pour moi un mot collé sur le frigo. Elle s'appliquait, je me contentais de griffonner. Je me cherchais des excuses en répétant que je ne savais pas trouver les mots. Elle ne me croyait pas. Pour elle, chacun de nous est poète. Le seul témoin de ce manège épistolaire s'appelait Apollinaire : le chat qui habitait avec nous. C'est elle qui avait choisi son nom. J'aurais préféré Sonny, pour Sonny Rollins, dont les microsillons tournaient sur ma platine, mais les calligrammes de l'auteur des lettres à Lou l'avaient emporté sur les notes du saxophoniste.


Auteur: Astolfi Christian

Info: De notre monde emporté. Le Bruit du monde, pp 31-32

[ désynchronisé ] [ routine ]

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste

champs de réflexion

[...] les sciences mathématiques ne s'occupent que de la cause formelle, à prendre cette cause formelle seulement dans l'ordre accidentel de la quantité, nombre ou étendue. Les sciences d'ordre expérimental s'occuperont, d'une certaine manière, de la cause matérielle et formelle ; mais non pas au sens essentiel de ces mots. Elles s'occupent des propriétés de l'être corporel, qui découlent de sa nature, plutôt que de cette nature elle-même : ou, si elles s'occupent de la substance elle-même, ce n'est point pour saisir ses principes essentiels ; ce n'est que pour découvrir les éléments ou les corps simples qui entrent dans la constitution du composé. De même, si elles s'occupent de la cause efficiente ou finale, ce n'est que dans la sphère ou les limites de tel être ou de telle catégorie, et encore pour autant qu'il s'agit de la cause immédiate qu'on pourra avoir à utiliser ou de la fin tout à fait prochaine, qui est, en quelque sorte, l'utilisation même de l'être corporel qu'on étudie. Seule, la philosophie a pour objet propre d'étudier toutes ces causes, et de les étudier selon toute l'étendue de leur sphère d'action eu égard à l'universalité de l'être mobile, comme tel, et même à l'universalité de l'être tout court.

Auteur: Pègues Thomas

Info: Dans "Aperçus de philosophie thomiste et de propédeutique", page 111

[ catégories de la pensée ] [ définies ] [ différences ] [ aristotélisme ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

vulgarisateur

À la fin des années 1930, la physique théorique apparaissait de plus en plus comme une construction formelle surplombant le langage, en principe impossible à transmettre hors du petit cercle des initiés. Pourtant, un jeune physicien du nom de George Gamow (prononcer Gam-off) entreprit de présenter au public les acquis révolutionnaires de la physique quantique et de la relativité, sans jamais laisser le lyrisme déborder sur les terres de la raison. Non, voulut-il démontrer, toute bardée de mathématiques qu’elle est, la physique ne vise pas l’éradication des mots. Comme toutes les entreprises humaines, elle exige une narration passant par la langue de tous les jours, un processus de diffusion qui la transporte par-delà son cercle d’origine. Il y a même urgence à réveiller la Belle au bois dormant. Mais comment procéder ? En trouvant des astuces, des détours, des analogies permettant de verbaliser – de baliser par le verbe – l’étrangeté de ses concepts. Il ne s’agit pas de photographier la physique, mais de la traduire, de la re-transcrire. Le "truc" de Gamow ? Mettre en scène les concepts, jouer avec, les sortir de leur contexte, les faire évoluer à l’air libre, dans la vie de tous les jours, plutôt qu’essayer de les expliquer d’une façon lourdement, tristement didactique.

Auteur: Klein Étienne

Info: Il était sept fois la révolution. Albert Einstein et les autres…

[ maths verbalisées ] [ double codage ]

 
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Ajouté à la BD par miguel

adieu

En supposant qu’il y ait quelqu’un pour t’écouter et que tu meures cette nuit ?

On m’entendrait mourir.

Pas de dernières paroles ?

Les dernières paroles ne sont que des mots.

Dis-les-moi, modèle de ta propre genèse sinistre qu’interprète une flamme sous une cloche de verre.

Je dirais que je n’ai pas été malheureux.

Tu ne possèdes rien.

Les derniers seront peut-être les premiers.

En es-tu sûr ?

Non.

De quoi es-tu sûr ?

Je suis sûr que le dernier comme le premier souffrent de la même manière. Pari passu.

De la même manière ?

Ce n’est pas seulement dans les ténèbres de la mort que toutes les âmes ne sont qu’une seule et même âme.

De quoi te repentirais-tu ?

De rien.

De rien ?

D’une chose ? J’ai parlé avec amertume de ma vie et j’ai dit que je prendrais ma propre défense contre l’infamie de l’oubli et contre sa monstrueuse absence de visage et que je dresserais une stèle dans le vide même sur laquelle tous liraient mon nom. Cette vanité je l’abjure tout entière.


Auteur: McCarthy Cormac

Info: Suttree p 542

[ confession ] [ épitaphe ] [ disparition ]

 

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Ajouté à la BD par Plouin

conseils

Je voudrais te parler sérieusement : ce n'est pas drôle d'être comme tout le monde, du moins faut-il en profiter. Si tu as mal aux dents, ne va pas t'imaginer que les autres n'ont jamais mal aux dents. Si chacun, dans son coin, n'avait eu les mêmes expériences, le langage serait flou, les mots seraient des jurons.

Hier nous avons mangé des palourdes. Avant-hier, tu ne connaissais pas ce mot. C'est parfait, mais tout ne se mange pas, surtout parmi les verbes. Pouvoir, par exemple, ne se mange pas. L'un fera l'expérience du pouvoir parce qu'il en détient une parcelle, l'autre parce qu'il a aura reçu un coup de pied. C'est la même idée, le même sens.

Prends l'habitude de séparer, dans ta tête, les mots que tu connais bien, à titre personnel, et les autres. Je te dis cela parce que ton père n'était pas au clair avec son langage. Il aimait trop les mots. Il était heureux d'en connaître, chaque jour, un peu plus. Si bien qu'il disposait d'une foule de mots dont il n'avait pas éprouvé le sens. Il ne savait plus rien : s'il avait faim, s'il avait soif, s'il aimait. Etre attiré par les mots, c'est déjà passer le pont. Méfie-toi.

Auteur: Dumayet Pierre

Info: in "La nonchalance", éd. Verdier, p. 87-88

[ vocabulaire ] [ ancrage dans le vécu ] [ idiome hors-sol ]

 

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Ajouté à la BD par Benslama

médium

Le mari traça quelques lignes en l’air, jusqu’à ce qu’elle se mette à trembler et que ses yeux se ferment. Puis il ressortit. Elle se saisit immédiatement de ma main droite et commença à parler, sans attendre mes questions, d’une voix tremblante, mais l’élocution étonnamment fluide. Je ne pus malheureusement pas retenir grand-chose, ni rien noter. Elle dit, que j’avais beaucoup à lutter, que souvent le sol se dérobait sous mes pieds, que bien des gens se mettaient en travers de mes projets ; que j’étais trop bon, trop désintéressé. Mais que je devais rester ferme et continuer comme j’avais commencé ; qu’il y avait des gens qui m’aidaient, pas avec de l’argent, mais avec des mots. Qu’à la fin, je me frayerais un passage, comme un héros, "pas tout à fait dans ce domaine", "quelques changements seront encore nécessaires". Que tout ce que je pourrais, c’est subvenir à mes besoins, "me maintenir à flot", mais que je ne deviendrais pas riche ; la satisfaction de la reconnaissance ne se ferait pas attendre longtemps, etc. Puis elle s’arrêta soudain de parler.

Ces phrases beaucoup trop générales semblent toutefois avoir éveillé en moi certains affects (de nature infantile) ; je ressentais une sorte de saisissement auquel, du reste, je me laissai aller ensuite, intentionnellement, voulant ainsi favoriser l’expérience. 

Auteur: Ferenczi Sándor

Info: Dans "Correspondance Freud-Ferenczi 1908-1914", trad. par le groupe de traduction du Coq-Héron, composé de Suzanne Achache-Wiznitzer, Judith Dupont, Suzanne Hommel, Christine Knoll-Froissart, Pierre Sabourin, Françoise Samson, Pierre Thèves, Bernard This, Calmann-Lévy, 1992, lettre du 20 novembre 1909

[ prophétie ] [ avenir ] [ analyse ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

hommes-par-femme

— Vous non plus, vous n'aimez pas les hommes. Et vous ne pouvez pas savoir : rien que penser à eux m'épuise. Vous dites qu'ils sont trop animaux. Mais ce n'est pas vrai, mère ! L'animal qui était en eux s'est perverti, humilié ; il est devenu servile, domestique, comme un chien. Je ne connais pas un homme qui ait la fierté d'un animal. À croire qu'ils ont cessé de penser. C'est ce qui arrive quand la dernière petite parcelle d'animalité sauvage meurt en eux.

— Mais nous avons un esprit…

— Nous n'avons plus d'esprit une fois que nous sommes apprivoisés, mère. Les hommes sont tous des femmes et ne font que tricoter des mots.

— Je ne peux pas être d'accord, vous le savez très bien, Louise.

— Oui, bien sûr, vous aimez les hommes intelligents. Mais le plus souvent, les hommes intelligents sont des animaux si déplaisants ! Chez des hommes comme Rico, l'animal s'est abîmé, dénaturé. Et chez ces jeunes gens élégants que vous aimiez tant pendant la guerre, il n'y a plus rien de l'animal sauvage. Ce sont tous des chiens dressés, même lorsqu'ils ont du courage et de la classe. Des chiens dressés par des maîtres humains. Il n'y a plus aucun mystère en eux.

Auteur: Lawrence David Herbert

Info: L'étalon

[ bridés ] [ formatés ]

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste