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finance

Selon le NY Times d'aujourd'hui les 30,522 employés de Goldman Sachs ont gagné une moyenne de $600,000 l'année passée, moyenne qui prend aussi en compte les secrétaires, mais pas les nettoyeuses.... ce qui fait grosso merdo 18 milliards de dollars de salaire en 2007. Tout ceci presque exclusivement pour des cols blancs qui se branlent les neurones dans des réunions de money managers, devant des colonnes de chiffres sur Internet et souvent au golf... multipliez ce nombre par les autres banques d'affaires spécialistes de l'argent virtuel (Lehman, Merryl, JP Morgan and so on ) puis multipliez ce chiffre par 15 (ans). Vous aurez ainsi une idée des revenus de la bande de joyeux lurons (d'autres diront gangsters... ) qui manipulent le pognon, principalement à NYC, Londres, Paris, Genève... Et maintenant les obligations d'Etat américaines, les bons du Trésor, seront probablement la prochaine bulle à éclater sur les marchés financiers, la confiance dans la capacité des Etats-Unis à rembourser leur immense dette est mise en doute.... Bref il se pourrait que dans peu de temps les bons du trésor US fassent tout exploser.

Auteur: MG

Info: 29 sept 2008

[ spéculation ]

 

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insurrection

Autant nous sommes redevables aux USA de nous avoir aidé lors de la seconde guerre mondiale autant l'urgence d'un soulèvement contre la domination financière et idéologique de ce pays devenu amoral et égoïste se fait sentir.
Pour faire très simple : nous sommes actuellement manipulés par une oligarchie financière mondiale, dont les officines apparentes sont aujourd'hui les agences de notations S&P, Moody, et Fitch. Ces agences sont le bras armé de la finance trans nationale, symbolisée par des organismes comme Goldman and Sachs, appuyées eux-mêmes sur le credo démocrate US (belle ironie du sort !!). Les politiques dominants d'Angleterre, l'AIPAC, les banques Suisses, George Soros... ainsi que des centaines d'autres institutions et personnes...
Ce message est un appel à tous les individus de bonne volonté qui désirent sortir de ce cauchemar capitaliste en se connectant les uns les autres (avec le moins d'usage possible du web et des portables) afin de créer rapidement un contre-pouvoir agissant et efficace.
Alternative libertaire mais aussi tous les mouvement de vraie gauche, anarchistes ou de droite libérale ouverte... seront des appuis à utiliser dans un premier temps... en attendant l'émergence de leaders crédibles et non pollués par les arguments pousse-à-jouir de la société de consommation.
Redevenons des hommes. N'ayons pas peur du désordre, il est nécessaire.
Ideal et self-contrôle personnel total de chacun.
La pauvreté se partage mieux que la richesse.

Auteur: Mg

Info: 13 mars 2010

[ révolte ]

 

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société

LA LOYAUTÉ, JE SAIS, C'ÉTAIT IL Y A LONGTEMPS, MAIS VOUS EN SOUVENEZ-VOUS ?
L'article de Der Spiegel révélant l'espionnage à grande échelle par les États-Unis des organes de décision des puissances européennes, leurs alliés les plus proches et les plus fidèles, rappelle étrangement l'attitude qui avait été celle de la banque d'investissement Goldman Sachs en 2008, tirant parti de la confiance que lui accordaient ses meilleurs clients pour leur vendre les produits financiers les plus avariés dont elle cherchait à se débarrasser.
La parole donnée, et la parole respectée, l'identification d'une personne - ou en l'occurrence, d'une nation - à ses engagements, la loyauté vis-à-vis de ses amis, et dans la mesure du possible vis-à-vis de chacun, sont indispensables à la vie en société : sans elles, c'est bien simple : le tissu social s'effrite, puis s'effondre sans espoir de retour.
Il est bien tard sans doute, mais il existe encore une chance ténue de restaurer la confiance trahie : interrompre immédiatement les pratiques condamnables, punir les responsables, et présenter des excuses sincères.
Lorsque Bradley Manning révéla le contenu des câbles du Département d'État expliquant aux diplomates américains que l'espionnage de la nation hôte faisait désormais partie de leurs attributions et de leurs devoirs, la traduction du soldat devant une cour martiale était loin de constituer la réponse appropriée. S'époumoner avec une véhémence allant toujours crescendo contre la traîtrise supposée du lanceur d'alerte Edward Snowden, constituerait une fois de plus une réponse parfaitement inappropriée et ferait, cette fois, désespérer de la capacité-même de cette nation à s'amender. Les pays européens trahis dans leur confiance devraient en tirer toutes les conséquences. Les justifications avancées seraient bien entendu qu'il existe des ennemis pires encore que de tels amis, mais la capacité-même à vivre en société, dont la parole donnée et la loyauté sont les piliers, constitue le dernier bastion : celui qui ne peut à aucun prix tomber.

Auteur: Jorion Paul

Info: 29 Juin 2013

[ guerre ] [ égoïsme ]

 

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complexe d'Œdipe

La découverte freudienne [...] nous montre la femme dans une position qui est, si l’on peut dire – puisque j’ai parlé d’ordonnance, d’ordre ou d’ordination symbolique – subordonnée. Le père est d’abord pour elle objet de son amour – c’est-à-dire objet du sentiment qui s’adresse à l’élément de manque dans l’objet, pour autant que c’est par la voie de ce manque qu’elle a été conduite à cet objet qui est le père. Cet objet d’amour devient ensuite celui qui donne l’objet de satisfaction, l’objet de la relation naturelle de l’enfantement. A partir de là, il ne s’en faut pour elle que d’un peu de patience pour qu’au père vienne enfin à se substituer celui qui remplira exactement le même rôle, le rôle du père, en lui donnant effectivement un enfant.

Ceci comporte un trait sur lequel nous reviendrons, et qui donne son style particulier au développement du surmoi féminin. Il y a chez elle une espèce de balance entre le renoncement au phallus et la prévalence de la relation narcissique, dont un Hanns Sachs a très bien vu l’importance dans le développement de la femme. En effet, ce renoncement une fois fait, le phallus est par elle abjuré comme appartenance, et devient de l’appartenance de celui auquel dès lors s’attache son amour, le père, dont elle attend effectivement l’enfant. Cette attente de ce qui dès lors n’est plus pour elle que ce qui doit lui être donné, la met dans une dépendance très particulière, qui fait naître paradoxalement à un moment donné [...] des fixations proprement narcissiques. Elle est en fait l’être le plus intolérant à une certaine frustration. [...]

La simple réduction de la situation à l’identification de l’objet de l’amour et de l’objet qui donne la satisfaction, explique d’ailleurs aussi bien le côté spécialement fixé, voire précocement arrêté, du développement de la femme par rapport au développement que l’on peut qualifier de normal. A certains tournants de ses écrits, Freud prend un ton singulièrement misogyne pour se plaindre amèrement de la grande difficulté qu’il y a, au moins pour certains sujets féminins, à les mobiliser, à les faire bouger d’une espèce de morale, dit-il, du potager et des boulettes, qui comporte de forts impérieuses exigences quant aux satisfactions à tirer, de l’analyse elle-même par exemple.

Auteur: Lacan Jacques

Info: dans le "Séminaire, Livre IV", "La relation d'objet", éditions du Seuil, 1994, pages 281-282

[ femmes-hommes ] [ simplettes ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

amphétamines

Pervitine, la drogue des nazis
En 1939, la pervitine était en libre-service en Allemagne. Tout le monde pouvait l’acheter, sous différentes formes, sous le nom de Pervitin. En cachet, en poudre, mais aussi dans du chocolat. En Allemagne, il existait déjà du chocolat au café, dans une petite boite ronde, mignonne et pratique. On raconte que les soldats de l’armée de l’air en consommaient beaucoup. Et puis, on décida d’y mettre ensuite de la pervitine. C’est le laboratoire Temmler qui produisait la drogue. L’idée était de concurrencer le Coca-cola qui était très présent en Allemagne. Les nazis et les Etats-Unis n'étaient pas super copains pendant la Seconde Guerre mondiale, alors on chercha une alternative bien allemande. Ce n’était pas (encore) considéré comme une drogue mais plutôt comme un énergisant, du coup tout le monde en prenait. La mère de famille fatiguée par ses gamins, l’ouvrier, le poète. Comme le guronsan, le redbull, l’ovomaltine ou le café, la pervitine trouvait des clients.
Les effets de la pervitine sont connus : coupe-faim, sensations d’euphorie et d’invulnérabilité. Ce qu’on aimait bien pendant la guerre. Le problème, c’est qu’on devient rapidement addict à la pervitime…
Une armée forte grâce à la pervitine
"L’idée était de transformer de simples soldats, marins et aviateurs, en pantins capables de performances surhumaines." Otto Rank, médecin militaire
En 1940, l’Allemagne décide de mettre les bouchées doubles. Elle veut conquérir l’Europe, et on peut quand même dire qu’elle s’en sort pas mal. Elle prend la Hollande, la Belgique, le Luxembourg et la France. Les soldats allemands sont comme des robots, ou transcendés. Ils marchent sans interruption jusqu’à 60 km par jour ou par nuit et peuvent passer plus de 72h sans dormir. Et pour cause, l’Allemagne a commandé plusieurs dizaines de millions de comprimés de pervitine avant de mener les grandes offensives (notamment contre la France). Les cachetons ont permis aux troupes allemandes de ne prendre aucun repos durant toute la durée de la campagne des Balkans au printemps 1941, soit 11 jours. Tout de même, ce n’est un secret pour personne, la presse en parle ouvertement. Mais n’oublions pas que l’armée est nombreuse, puissante et bien équipée également. J’veux dire, tu ne peux pas faire une guerre avec deux bolosses et trois junkys… Et la pervitine donne du courage, de la confiance et de l’énergie aux soldats, et aussi aux dirigeants qui travaillent sans relâche.
La drogue des nazis
A partir de 1941, le chef de la santé du Reich, Leonardo Conti estime que la Pervitine, c’est peut être un peu fort pour la ménagère, les adolescents et les hommes vieux. Alors la drogue n’est plus en vente libre, elle est délivrée seulement sous prescription pour les hommes. Sauf que les hommes sont tous (ou presque) à la guerre. Oui, on trouve légitime de continuer à distribuer la pervitine à des fins militaires. Faut dire que ça marche plutôt pas mal… On peut aussi se demander si cette nouvelle législation n’est pas tout simplement pour réserver la production de pervitine aux soldats. Plus ils en ont, plus la guerre avance. Tous les niveaux de l’armée ont droit à une distribution de Pervitine, et ils sont plus de 3 millions de soldats. Ça en fait des pilules.
En 1944, la drogue des soldats prend encore une autre ampleur. Il faut quelque chose de plus puissant, parce que la pervitine n’est plus suffisante. Qu’à cela ne tienne, on crée la D-IX. Il s’agit (accrochez-vous) de 5mg de cocaïne, 3mg de pervitine et 5mg d’Eukodal (antidouleur à base de morphine). Pour tester l’efficacité de ce cocktail de cheval, rien de tel que de faire des essais dans un camp de concentration. Ce sont les prisonniers de Sachsenhausen qui en sont victimes. Ils doivent porter des sacs de 20k sur 90 km sans s’arrêter et à allure plutôt vive.
Les effets pervers de la pervitine
La pervitine n’est pas sans danger. Les effets secondaires sont bien relous : vertiges, sueurs… Et peuvent aussi être graves : dépression, hallucinations. Des témoignages racontent que des soldats sont morts d’insuffisance cardiaque et d’autres se sont suicidés durant des phases psychotiques. Et évidemment, c’est addictif. Très addictif. Certains médecins se sont opposés à la prise systématique de pervitine par l’armée, mais les dirigeants ont refusé. C’est trop efficace et surtout, lorsqu’on prive les hommes de pervitine, ils font des crises de manque et ne sont plus capables de rien… En 1943, Heinrich Boell était sur le front et, avant de devenir un célèbre prix Nobel de littérature, il écrivait des lettres à ses parents en les suppliant de lui envoyer de la pervitine…
9 novembre 1939 : "C’est dur ici, et j’espère que vous comprendrez si je ne peux vous écrire qu’une fois tous les deux ou quatre jours dans les temps à venir. Aujourd’hui, je vous écris surtout pour vous demander du Pervitin (…). Je vous embrasse, Hein." Dans d’autres courriers, il explique que la pervitine le rend heureux pour quelques heures, le tient éveillé et que c’est plus efficace que des litres de café. Mais il lui en faut toujours plus, car lorsque les effets de la drogue nazie disparaissent, les soldats s’effondrent. Ils doivent dormir jusqu’à trois fois plus que la normale. En état de manque et face à la réalité de la guerre, les soldats tombent souvent en dépression et souffrent de graves psychoses…

Auteur: Gasc Marine

Info: décembre 2016

[ WW2 ]

 

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géopolitique

L’Allemagne était [au début du 16e siècle] un pays sans unité : voilà l’essentiel. Il y avait, nombreux, forts, actifs, des Allemands, beaucoup d’Allemands parlant des dialectes voisins les uns des autres, ayant dans une large mesure des mœurs, des usages, des façons d’être et de penser communes. Ces Allemands formaient une "nation" au sens médiéval du mot. Ils n’étaient point groupés, tous, solidement, dans un État bien unifié et centralisé, corps harmonieux aux mouvements commandés par un unique cerveau.

Dans une Europe qui, partout, s’organisait autour des rois, l’Allemagne restait sans souverain national. Il n’y avait pas de roi d’Allemagne, comme il y avait, et depuis bien longtemps, un roi de France, un roi d’Angleterre, riches, bien servis, prestigieux, et sachant rallier aux heures de crise toutes les énergies du pays autour de leur personne et de leur dynastie. Il y avait un empereur, qui n’était plus qu’un nom, et un Empire qui n’était plus qu’un cadre. Dans ce cadre démesuré, le nom, le trop grand nom écrasait de son poids un homme faible, un homme pauvre — parfois un pauvre homme — qu’un vote, disputé comme un marché de foire, élevait finalement à la dignité suprême, mais impuissante.

En un temps où se révélait la valeur de l’argent, au temps décrit dans le livre classique d’Ehrenberg, l’empereur en tant que tel était un indigent. De son Empire il ne tirait plus rien de substantiel. La valeur d’une noisette, disait Granvelle — moins que, de leur évêché, certains évêques allemands. Fondus, les immenses domaines impériaux qui avaient fait la force des Saxons et des Franconiens. Concédés, aliénés, usurpés les droits régaliens, les droits de collation, tout ce qui aurait pu nourrir un budget régulier. Et cependant, plus que tout autre souverain de son temps, le prince au titre retentissant mais à qui les diètes, s’ingéniant, refusaient tout subside, aurait eu pour agir besoin d’être riche. Car, titulaire d’une dignité éminente et qui ne se transmettait pas, comme un royaume, par hérédité ; né d’un vote en faveur d’un prince chrétien qui n’était pas plus obligatoirement allemand que le pape n’était forcément italien   — l’empereur, courbé sous le poids d’une couronne lourde d’un trop lourd passé, devait courir partout, et veiller au monde en même temps qu’à l’Allemagne. Si, dans ce pays, son autorité de jour en jour périclitait — c’est que sa grandeur même empêchait d’agir ce souverain d’un autre âge. Elle le tenait enchaîné devant les véritables maîtres des pays germaniques : les princes, les villes.

Les princes avaient sur l’empereur une grande supériorité. Ils étaient les hommes d’un seul dessein. Et d’une seule terre. Ils n’avaient pas de politique mondiale à suivre, eux — pas de politique "chrétienne" à conduire. L’Italie ne les sollicitait pas. Ils ne dédaignaient point, certes, d’y faire de temps à autre un voyage fructueux. Mais ils n’allaient point là-bas, comme les empereurs, poursuivre des chimères vieillies ou d’illusoires mirages. Tandis que les Césars fabriqués à Francfort par les soins diligents de quelques-uns d’entre eux, se ruinaient en de folles et stériles aventures, une seule chose tenait les princes en souci : la fortune de leur maison, la grandeur et la richesse de leur dynastie. Précisément, à la fin du XVe siècle, au début du XVIe siècle, on les voit opérer un peu partout, en Allemagne, un vigoureux effort de concentration politique et territoriale. Plusieurs d’entre eux, profitant de circonstances favorables, de hasards heureux, s’employaient à constituer des états solides, moins morcelés qu’auparavant. Dans le Palatinat, en Wurtemberg, en Bavière, en Hesse, dans le Brandebourg et le Mecklembourg, ailleurs encore, la plupart des maisons qui, à l’époque moderne, joueront dans l’histoire allemande un rôle de premier plan, affirment dès le début du XVIe siècle une vigueur nouvelle et unifient leurs forces pour de prochaines conquêtes.

On va donc vers une Allemagne princière. On y va seulement. N’ayant point à sa tête de chef souverain vraiment digne de ce nom, l’Allemagne paraît tendre à s’organiser sous huit ou dix chefs régionaux, en autant d’états solides, bien administrés, soumis à un vouloir unique. Mais cette organisation, elle n’existe point encore. Au-dessus des princes il y a toujours l’empereur. Ils ne sont souverains que sous sa souveraineté. Et au-dessous d’eux, ou plutôt, à côté d’eux, il y a (pour ne point parler des nobles indisciplinés et pillards), les villes.

Les villes allemandes au seuil du XVIe siècle : une splendeur. Et telle, que les étrangers ne voient qu’elles lorsqu’ils visitent l’Allemagne, comme si l’éclat des cités éblouissait leurs yeux. Vingt capitales, chacune possédant en propre ses institutions, ses industries, ses arts, ses costumes, son esprit. Celles du Sud : l’Augsbourg des Fugger, porte d’entrée et de sortie du trafic italo-germain, préface pittoresque avec ses maisons peintes à fresque, du monde ultramontain. Mieux encore, Nuremberg, la patrie de Durer, de Fischer, d’Hans Sachs, de Martin Behaim, assise au pied de son Burg à mi-chemin entre Main et Danube. Mais celles du Nord aussi : l’industrieuse et réa-iste Hambourg, légère de scrupules et commençant sa magnifique ascension ; Lübeck, reine déjà déclinante de la Hanse ; Stettin, la ville du blé, et, tout au loin, Dantzig, ses vastes édifices, ses grandes églises de brique, enseignes d’une propriété sans défaillance. Sur le front oriental, Francfort-sur-l’Oder, entrepôt du trafic polonais ; Breslau, porte naturelle de la Silésie. Et à l’Ouest, sur le grand fleuve fougueux, la brillante pléiade des villes rhénanes, de Cologne à Bâle ; par-derrière, l’énorme marché francfortois ; et par-derrière encore Leipzig, un carrefour, au vrai cœur de cette Allemagne multiple. 

[…] Implantées au milieu des domaines princiers, elles [les villes] les trouent, les déchiquettent, limitent leur expansion, les empêchent de se constituer fortement. Elles-mêmes, peuvent-elles s’étendre ? Non. Se fédérer ? Non plus. Autour de leurs murailles, le plat pays : des campagnes soumises à un droit dont le droit de la ville est la négation. Là, sous des maîtres avides, des paysans incultes et grossiers, parfois misérables, prêts à se révolter et grondant sous le joug, étrangers en tout cas à la culture urbaine, si particuliers que les artistes peintres et graveurs ne se lassent pas de décrire leurs aspects sauvages, leurs mœurs primitives. Les villes veulent-elles s’entendre, collaborer ? Ce ne peut être que par-dessus de larges étendues, de vastes territoires hétérogènes qui contrastent avec elles, vigoureusement, en tout. Ces civilisations urbaines, si prestigieuses : des civilisations d’oasis. Ces villes : des prisonnières, vouées à l’isolement, et que guettent les princes, et qui se guettent l’une l’autre.

Leurs ressources, leurs richesses, à quoi vont-elles ? Aux arsenaux dont elles s’enorgueillissent, mais qui les ruinent. Aux canonniers, techniciens exigeants, qu’il faut payer très cher. Aux remparts, aux bastions sans cesse à réparer, parfois à modifier de fond en comble... Et encore, ces ressources, elles vont aux ambassades, aux missions diplomatiques lointaines, aux courriers sans cesse sur les hauts chemins et pour quelles randonnées furieuses ! Villes libres, elles payent leur liberté : trop cher. Car malgré tous les sacrifices, elles sont faibles, à la merci du prince qui s’installe sur le fleuve, en amont, en aval, pour barrer le trafic ; à la merci du hobereau qui les détrousse et les nargue, du haut de son nid d’aigle imprenable pour des milices bourgeoises, à la merci de la cité rivale, qui, rompant les accords, se retourne contre la voisine jalousée.

Faiblesse, sous des apparences de prospérité ; surprenante faiblesse politique contrastant avec tant de puissance économique. Ces cités si brillantes et qui offusquent de leur éclat nos villes françaises du temps, comme leurs bourgeois sont loin de ce sens national, de ce sens politique qui, aux époques de crise, groupe autour du roi toutes les bonnes villes de France empressées à maintenir Louis XI contre les hommes du Bien public, ou, contre les princes, Charles VIII ! Parties d’un tout bien ordonné, les cités françaises d’où la culture rayonne sur les campagnes qu’elles "urbanisent" à leur image. Les villes allemandes : des égoïsmes furieux, en lutte sans répit contre d’autres égoïsmes.

D’une telle situation, si fiers de leurs fortunes, de leur sens des affaires, de leurs belles réussites, les Allemands souffraient. Ils souffraient de ne former qu’un pays divisé, fait de pièces et de morceaux, sans chef, sans tête : un amalgame confus de villes autonomes et de dynasties plus ou moins puissants.

Auteur: Febvre Lucien

Info: Un destin : Martin Luther, PUF, 1968, pages 64 à 67

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