[…] l’elkasaïsme provient de la révélation qui aurait été transmise par un ange à Elxaï, révélation portant sur le moyen d’être délivré des péchés commis après le baptême. […]

L’elkasaïsme se distingua par le caractère précis de ses observances, son austérité et son ascétisme rigoureux, en particulier à l’égard de la chair, comparable en cela aux esséniens qui condamnaient la concupiscence et cultivaient volontiers la virginité, la sexualité étant considérée comme appartenant au principe mauvais subsistant en l’homme depuis la faute originelle. […]

Chose toutefois extrêmement surprenante, et malgré des positions théologiques peu compatibles avec celle des premiers chrétiens, et alors que l’ébionisme était foncièrement antitrinitaire, l’elkasïsme professait quant à lui une théologie trinitaire, représentant, à bien des égards, une authentique "scission à l’intérieur de la communauté judéo-chrétienne orthodoxe" [Daniélou, L’Eglise des premiers temps, page 98], permettant donc de penser que l’elkasaïsme, de manière certes paradoxale, n’est peut-être pas si éloigné que cela d’une théologie orthodoxe, et finalement étranger aux spéculations gnostiques franchement dualistes […].

Le substantif "ésotérisme" n’est apparu que récemment, puisque "ésotérisme" en tant que tel, mais non le concept auquel il réfère et qu’il convient de distinguer, se signale en 1828 sous la plume de Jacques Matter (1791-1864) quoique ce fût le socialiste Pierre Leroux (1797-1871) qui en répandit véritablement l’usage en 1840 par son ouvrage De l’humanité, dans lequel il qualifiait, sous cette désignation, la doctrine pythagoricienne. […] Le contexte dans lequel va surgir et prospérer la notion d’ésotérisme au XIXe siècle fut donc celui du romantisme socialisant, qui fournira à la révolution de 1848 certaines de ses thématiques émancipatrices. Cependant, cet éclairage sur le substantif ne saurait faire oublier que l’adjectif ésotérikos, lui, possède une histoire vénérable et pluriséculaire, puisqu’on en repère l’emploi dans le milieu philosophique, principalement aristotélicien, dès le Ier siècle (l’adjectif ésotériko, composé de trois éléments : ésô – ter – ikos, est formé d’une préposition adverbiale "éso" soit "au-dedans", d’un suffixe "ter" qui est un comparatif, et de la terminaison "ikos", l’ensemble évoquant donc, dans sa traduction générale, "ce qui se trouve à l’intérieur".