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diachronie

Mais Rabelais et ses contemporains ?

Ils vivaient avant Descartes et se nourrissaient de scolastique et de théologie. C’est assez dire que l’homme, pour eux, n’était pas une pensée qui se pense. C’était l’union de deux éléments, d’origine, de nature, de destinée dissemblables : un corps matériel, et, dans ce corps, "comme hoste" une âme composite, plus qu’à demi matérielle, localement présente dans ce corps et coétendue à lui. [...] La mort, dès lors, c’est la rupture de cette union. Un phénomène "naturel", non pas. Une opération de Dieu. Un partage.

En d’autres termes, le corps, au moment fixé par la sagesse du Tout-Puissant, subit un anéantissement complet. Les hommes de ce temps n’ont pas encore l’idée qu’exprimera Voltaire deux cents ans plus tard dans le texte du Micromégas qui marque l’avènement de notre conception moderne, scientifique et naturelle, de la mort : "rendre son corps aux éléments et ranimer la nature sous une autre forme", c’est là, dit-il, "ce qu’il appelle mourir". Pour les contemporains de Rabelais qui ne savaient s’appuyer sur un ensemble constitué de doctrines chimiques, le corps était conçu comme s’anéantissant. Sa destruction libérait l’âme. Plus exactement, elle obligeait à s’en aller la partie la plus subtile et pour ainsi dire l’essence spirituelle de l’âme dont les autres parties suivaient le destin du corps. Et c’était là la mort : dissolution d’un composé, l’homme. Et une telle mort ne pouvait être que "totale".

Auteur: Febvre Lucien

Info: "Le problème de l'incroyance au 16e siècle", éditions Albin Michel, Paris, 1968, page 182

[ définition ] [ signification ] [ historique ] [ christianisme ]

 
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déclaration d'amour

O mon jardin d’eau fraîche et d’ombre
Ma danse d’être mon cœur sombre
Mon ciel des étoiles sans nombre
Ma barque au loin douce à ramer
Heureux celui qui devient sourd
Au chant s’il n’est de son amour
Aveugle au jour d’après son jour
Ses yeux sur toi seule fermés
Heureux celui qui meurt d’aimer
Heureux celui qui meurt d’aimer

D’aimer si fort ses lèvres closes
Qu’il n’ait besoin de nulle chose
Hormis le souvenir des roses
A jamais de toi parfumées
Celui qui meurt même à douleur
A qui sans toi le monde est leurre
Et n’en retient que tes couleurs
Il lui suffit qu’il t’ait nommée

Heureux celui qui meurt d’aimer
Heureux celui qui meurt d’aimer

Mon enfant dit-il ma chère âme
Le temps de te connaître ô femme
L’éternité n’est qu’une pâme
Au feu dont je suis consumé
Il a dit ô femme et qu’il taise
Le nom qui ressemble à la braise
A la bouche rouge à la fraise
A jamais dans ses dents formée

Heureux celui qui meurt d’aimer
Heureux celui qui meurt d’aimer

Il a dit ô femme et s’achève
Ainsi la vie, ainsi le rêve
Et soit sur la place de grève
Ou dans le lit accoutumé
Jeunes amants vous dont c’est l’âge
Entre la ronde et le voyage
Fou s’épargnant qui se croit sage
Criez à qui vous veut blâmer

Heureux celui qui meurt d’aimer
Heureux celui qui meurt d’aimer

Auteur: Aragon Louis

Info:

[ couple ] [ poème ]

 

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métaphysique

Je me trouvai sur une côte éclairée de ce jour sans soleil, et je vis un vieillard qui cultivait la terre. Je le reconnus pour le même qui m’avait parlé par la voix de l’oiseau, et, soit qu’il me parlât, soit que je le comprisse en moi-même, il devenait clair pour moi que les aïeux prenaient la forme de certains animaux pour nous visiter sur la terre, et qu’ils assistaient ainsi, muets observateurs, aux phases de notre existence.

— Eh quoi ! dis-je, la terre pourrait mourir, et nous serions envahis par le néant ?

— Le néant, dit-il, n’existe pas dans le sens qu’on l’entend ; mais la terre est elle-même un corps matériel dont la somme des esprits est l’âme. La matière ne peut pas plus périr que l’esprit, mais elle peut se modifier selon le bien et selon le mal. Notre passé et notre avenir sont solidaires. Nous vivons dans notre race, et notre race vit en nous.

Cette idée me devint aussitôt sensible, et, comme si les murs de la salle se fussent ouverts sur des perspectives infinies, il me semblait voir une chaîne non interrompue d’hommes et de femmes en qui j’étais et qui étaient moi-même ; les costumes de tous les peuples, les images de tous les pays apparaissaient distinctement à la fois, comme si mes facultés d’attention s’étaient multipliées sans se confondre, par un phénomène d’espace analogue à celui du temps qui concentre un siècle d’action dans une minute de rêve.

Auteur: Nerval Gérard de Labrunie

Info: Aurélia

[ illumination ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

séparation

Père ! dis-je. Chacun suit son destin, mon petit ; les hommes n’y peuvent rien changer. Tes oncles ont étudié. Moi –mais je te l’ai déjà dit : je te l’ai dit, si tu te souviens quand tu es parti pour Conakry…moi, je n’ai pas eu la chance et moins encore la tienne…mais maintenant que cette chance est devant toi, je veux que tu la saisisses ; tu as su saisir la précédente, saisis celle-ci aussi, saisis-la bien ! Il reste dans notre pays tant de choses à faire…Oui, je veux que tu ailles en France ; je le veux aujourd’hui autant que toi-même : on aura besoin ici sous peu d’hommes comme toi…Puisses-tu ne pas nous quitter pour trop longtemps ! Nous demeurâmes un long bout de temps sous la véranda, sans mot dire et à regarder la nuit ; et puis soudain mon père dit d’une voix cassée : promets-moi qu’un jour tu reviendras ? Je reviendrai ! dis-je. Ces pays lointains…dit-il lentement. Il laissa sa phrase inachevée ; il continuait de regarder la nuit. Je le voyais, à la lueur de la lampe-tempête, regarder comme un point dans la nuit, et il fronçait les sourcils comme s’il était mécontent ou inquiet de ce qu’il y découvrait. Que regardes-tu ? dis-je. Garde-toi de jamais tromper personne, dit-il ; sois droit dans ta pensée et dans tes actes ; et Dieu demeurera avec toi. Puis il eut comme un geste de découragement et il cessa de regarder la nuit.

Auteur: Laye Camara

Info: L'enfant noir

[ voyages ] [ afrique ] [ douleur ] [ espoir ] [ dernières paroles ]

 

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génotypage

Le big data génétique aurait comblé Galton, le cousin eugéniste de Darwin. Obsédé par la mesure mathématique — des mensurations, comportements et caractères transmis — il est le créateur de la biométrie et de la "psychométrie". C’est en étudiant les statistiques sur les lignées qu’il veut perfectionner la sélection artificielle, préfigurant ainsi la génétique des populations. Avec l’eugénisme, il élabore une théorie biologique, mais aussi une méthode de gestion centralisée du cheptel humain par l’exploitation des données. Après lui en 1904, le biologiste américain Davenport, financé par la Carnegie Institution, poursuit la recherche sur l’eugénisme en dépouillant des millions de fiches sur les Américains stockées dans le laboratoire de Cold Spring Harbor.

Un siècle plus tard, les données sont numérisées, elles incluent des millions de génomes séquencés et leur traitement s’opère avec les moyens de l’intelligence artificielle.

Un outil performant, assurent les fondateurs de Genomic Prediction, pour la sélection d’embryons selon la taille, le poids, la couleur de peau, la prédisposition à certaines pathologies, voire le QI. D’après la revue du Massachusetts Institute of Technology, cette start up américaine est financée par des magnats transhumanistes de la Silicon Valley et son patron, le bio-informaticien danois Laurent Tellier, s’inspire du film Bienvenue à Gattaca. Son associé, Stephen Hsu, compte sur les "milliardaires et les types de la Silicon Valley" pour utiliser sa technologie et "faire des FIV même quand ils n’ont pas besoin de FIV". Ensuite, dit-il, le reste de la société suivra. Ceux qui en auront les moyens.

Auteur: PMO Pièces et main-d'oeuvre

Info: Dans "Alertez les bébés ! ", éditions Service compris, 2020, pages 39-40

[ séquençage ] [ création de la demande ]

 

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rencontre

"Dormons.

— Il est encore trop tôt. Nous n’en sommes pas encore au clou de la soirée, le moment où tu me montres une photo de ta légitime en me disant que c’est une femme du tonnerre, que tu ne sais pas ce qui t’a pris, les aurores boréales, peut-être, ou encore l’alcool, mais qu’il ne faut jamais que je t’écrive ou que je téléphone chez toi, merci ma jolie.

— Je ne suis pas marié.

— C’est difficile à comprendre. Un boute-en-train comme toi, dit-elle, le faisant rire pour la première fois.

— Tu es gentille, dit-il.

— Retiens-toi, je te prie. Je risque de prendre la grosse tête.

— Belle ?

— J’ai trente ans, quand même.

— Je ne suis pas marié, moi, mais je suis sûr qu’une fille comme toi…

— Aussi intelligente et talentueuse que toi…

— … a un petit ami.

— Par ici, les hommes ont peur des femmes, surtout de celles qui parlent beaucoup. Ils aiment chasser, pêcher, regarder le hockey à la télévision et dire des cochonneries sur nous au Trapline, dit-elle en l’attirant vers elle.

— J’ai bien peur d’avoir trop bu pour t’être utile ce soir.

— Je ne te fais pas passer un examen, Moses. Détends-toi. Laisse-toi aller."

À son réveil, il la trouva qui lisait au lit "Cent Ans de solitude" en édition de poche. "Surprise, surprise, dit-elle. Je ne suis pas seulement le coup du siècle."

Auteur: Richler Mordecai

Info: Solomon Gursky

[ couple ] [ post coïtum ]

 

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création

Maintenant, dans tout ce qu'il a fait, Amos Tutuola n'est pas sui generis. Il n'est pas grammatical ? Certes. Mais James Joyce est moins grammatical que Tutuola. Ezekiel Mphahlelele a souvent dit et écrit que les écrivains africains font violence à l'anglais. Violence ? Joyce n'a-t-il pas fait plus de violence que ça à la langue anglaise ? Le Huckleberry Finn de Mark Twain est écrit en sept dialectes, nous dit-il. Il est maintenant reconnu comme un classique. Nous l'acceptons, oublions qu'il n'a pas de "grammaire", et allons de l'avant pour apprendre sa "grammaire" et ce qu'il a à nous dire. Laissons Tutuola écrire "pas de grammaire" et grogner avec les hyènes et les chacals. Laisse Gabriel Okara écrire un Okolo "sans grammaire". Ce sont des mamans. Pourquoi ?... L'éducation chasse de l'esprit la superstition, le rêve, la construction de châteaux dans les airs, la culture des histoires, et les remplace par un esprit rationnel et pratique, presque dépourvu d'imagination. Certains de ces esprits n'ayant pas réussi à écrire des histoires imaginatives, se tournent vers ce type de critique aristocratique qui magnifie les trivialités au-delà de leur taille réelle. Ils ne parviennent pas à ressentir d'autres vertus dans une œuvre parce qu'ils n'ont pas l'imagination pour percevoir ses mystères. L'art est arbitraire. N'importe qui peut créer son propre style. Ayant commencé arbitrairement, s'il persiste à produire via ce mode particulier, il peut l'agrandir et l'élever vers quelque chose de permanent, quelque chose que d'autres artistes viendront apprendre et copier, quelque chose que les critiques se mettront sous la dent pour l'apprécier.

Auteur: Taban Lo Liyong Mokotiyang Rekenet

Info:

[ liberté ] [ singularité ]

 

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biologiste

- Et qu'est-ce qui a provoqué la rencontre, demandai-je, entre la mouche domestique et vous?
Extrayant quelques arêtes de poisson de sa barbe, Orlik me raconta qu'il avait consacré trente ans de sa vie à étudier certains aspects du mammouth laineux, ce travail l'ayant conduit jusqu'aux toundras de Sibérie où l'on trouve parfois des mammouths congelés dans le permafrost. Ses recherches - bien que généralement sa modestie l'empêchât de le mentionner - avaient vu leur aboutissement dans son article magistral : "Le mammouth et ses parasites." Mais à peine l'avait-il publié qu'il ressentit le besoin d'orienter ses travaux vers quelque créature inférieure.
"J'ai décidé, dit-il, à étudier Musca domestica dans la zone urbaine de Prague."
Tout comme son ami M. Utz pouvait dire au premier coup d'oeil si une pièce de porcelaine de Saxe avait été fabriquée à partir de l'argile blanche de Colditz ou de celle des Erzgebirge, les monts Métallifères, lui, Orlik, après avoir examiné sous un microscope la membrane irisée d'une aile de mouche, affirmait savoir si l'insecte venait de Mala Strana, de Zidovské Mesto ou de l'une des décharges qui entouraient la nouvelle cité-jardin.
Il avoua être ravi de la vitalité de la mouche. Il était de bon ton chez ses collègues entomologistes - tout particulièrement chez les membres du parti - de s'émerveiller devant le comportement des insectes sociaux, les fourmis, les abeilles, les guêpes et les autres espèces d'hyménoptères qui s'organisaient en communautés enrégimentées.
"Mais la mouche, dit Orlik, est une anarchiste.
- Chut! dit Utz. Ne prononcez pas ce mot!

Auteur: Chatwin Bruce

Info: Utz

[ insectes ]

 

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couple

Observateurs très attentifs, les Jung furent tout deux frappés par "certaines étrangetés" dans le comportement de la famille Freud. A leur arrivée à Vienne, Freud était venu les accueillir à l’hôtel et avait offert à Emma un bouquet de fleurs somptueux en s’excusant de ne pouvoir les inviter chez lui, car, dit-il, "il n’avait pas autre chose à leur proposer qu’une modeste demeure et une maîtresse de maison qui n’[était] plus toute jeune." [CGJ, Entretiens avec Kurt Eissler] Emma trouva cette réflexion d’autant plus choquante qu’il les invita dans la foulée à venir déjeuner chez lui. Par la suite, elle confia à Carl que Martha Freud était "une dame charmante". Carl en convint, bien qu’il la trouvât "complètement éteinte". Le rôle de Martha Freud était manifestement celui d’une superintendante. Contrôlant tous les détails de la vie quotidienne, elle avait opur première mission de préserver son époux de toute perturbation dans son travail. Freud et leurs enfants se montraient plein de déférence à son égard, et, en tant que maîtresse de maison, elle avait le droit à la place d’honneur à table, juste en face de son mari. Néanmoins, toutes ces marques de politesse ne parvenaient pas à cacher qu’on ne lui adressait la parole que pour des questions d’emploi du temps, d’heures de rendez-vous ou de permissions à donner (pour les enfants).

La véritable compagne de Freud, son interlocutrice privilégiée sur le plan intellectuel, était sa belle-sœur, Minna Bernays. Elle seule connaissait tous les aspects de son œuvre, et elle seule osait en parler à table. 

Auteur: Bair Deirdre

Info: Dans "Jung", trad. de l’anglais par Martine Devillers-Argouarc’h, éd. Flammarion, Paris, 2007, pages 187-188

[ rôles ]

 

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philosophie

Je veux dire qu’il m’est, autant qu’à tout le monde, permis de relever que, dans la traduction latine que DESCARTES donne du Discours de la Méthode, très précisément en 1644, apparaît, comme traduction du "Je pense, donc je suis" : "Ergo sum sive existo". Et d’autre part dans les Méditations, dans la deuxième Méditation et juste après qu’il se sent quelque enthousiasme, il compare au point d’ARCHIMÈDE, ce point dont on peut tellement attendre, nous dit-il :

"Si je n’ai touché, je n’ai inventé (invenero), que celui-ci, minimum, qui comporte quelque chose de certain et d’inébranlable (certum sit & inconcussum)"

["Nihil nisi punctum petebat Archimedes, quod esset firmum & immobile, ut integram terram loco dimoveret ; magna quoque speranda sunt, si vel minimum quid invenero quod certum sit & inconcussum." Meditatio II, 3]

…que c’est dans le même texte qu’il formule cette formule qui n’est pas absolument identique : Ego sum, ego existo.

[ Haud dubie igitur ego etiam sum, si me fallit ; & fallat quantum potest, nunquam tamen efficiet, ut nihil sim quamdiu me aliquid esse cogitabo. Adeo ut, omnibus satis superque pensitatis, denique statuendum sit hoc pronuntiatum, Ego sum, ego existo, quoties a me profertur, vel mente concipitur, necessario esse verum. Meditatio II, 3 ]

Et qu’enfin dans les Principes de la recherche de la vérité par la lumière naturelle, c’est "dubito ergo sum", ce qui pour le psychanalyste, a une tout autre résonance, mais une résonnance où je n’essaierai pas aujourd’hui de m’engager, c’est un terrain trop glissant…

Auteur: Lacan Jacques

Info: 14 décembre 1966, La logique du fantasme

[ cogito cartésien ] [ traduction ] [ variantes ]

 

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