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télévision

Il regarda l’heure sur l’horloge Coke du kiosque. Sa mère devait être rentrée de Boston, désormais, forcément, sans quoi elle manquerait une de ses séries préférées. Un nouveau trou dans la tête. Elle était folle, de toute façon, il ne s’agissait pas d’un problème dû à la prise installée avant la naissance de son fils, mais elle se plaignait depuis des années de parasites, de défauts de résolution et de contamination sensorielle, et elle avait fini par économiser assez de crédits pour se rendre à Boston en vue d’un remplacement au rabais. Dans le genre d’endroits où l’on n’avait même pas besoin d’un rendez-vous pour une opération. On se pointait et ils vous prenaient direct... Il savait comment elle était, ça oui, à peine la porte passée avec une bouteille sous le bras, sans même retirer son manteau, elle fonçait se brancher au Hitachi et se vidait le cerveau avec ses séries pendant six heures d’affilée. Ses yeux restaient dans le vague et parfois, s’il s’agissait d’un très bon épisode, elle bavait un peu. Toutes les vingt minutes, elle parvenait à se rappeler de boire une petite gorgée de sa bouteille.

Elle avait toujours été comme ça, pour autant qu’il s’en souvienne, et n’avait cessé de s’enfoncer un peu plus dans sa demi-douzaine de merdes synthétiques, fantasmes stimstim à suivre dont Bobby avait entendu parler toute son existence. Il avait encore la sensation désagréable que certains des personnages dont elle lui racontait la vie étaient des parents à lui, des oncles et des tantes charmants et fortunés qui débarqueraient peut-être un jour si seulement il ne se comportait pas autant comme une merde.

Auteur: Gibson William

Info: Dans "Comte zéro", trad. Laurent Queyssi, éd. Au diable vauvert, 2022, pages 68-69

[ addiction ] [ déréalisation ] [ perte des liens ] [ fantômes ]

 

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couchant

Pirate et Osbie Feel sont étendus sur le toit de l'immeuble, un magnifique coucher de soleil traverse et dessine la rivière sinueuse, impérial serpent, une multitude d'usines, d'appartements, de parcs, de tours et de façades enfumées, un ciel incandescent qui se déverse sur les kilomètres de rues profondes, l'encombrement des toits et les ondulations de la Tamise, y mettant une tension drastique d'orange brûlée pour rappeler au visiteur sa fugacité mortelle, pour sceller ou cacher toutes portes et fenêtres visibles à ses yeux, qui ne cherchent qu'un peu de compagnie, un mot ou deux dans la rue avant de monter vers l'odeur de savon de la chambre louée et les carrés corail du coucher de soleil sur le plancher - une lumière antique, intériorisée, combustible consommé dans l'holocauste hivernal programmé, les formes plus lointaines parmi les brins ou les feuilles de fumée sont maintenant elles-mêmes de parfaites ruines carbonisées, les fenêtres plus proches, frappées un instant par le soleil, ne réfléchissent plus rien mais contiennent la même lumière destructrice,  intense décoloration qui ne permet aucune promesse de retour, une lumière qui rouille les voitures du gouvernement sur les trottoirs, qui vernit les derniers visages se pressant devant les magasins dans le froid comme si une vaste sirène avait finalement retenti,  une lumière qui fait que les innombrables rues se transforment en canaux froids déserts, et qui, avec les étourneaux de Londres, emplit tout, les oiseaux convergent par millions vers des piédestaux de pierre embrumés, vers les endroits qui se vident et vers un grand sommeil collectif. Ils convergent en anneaux, des anneaux concentriques sur les écrans radar. Les opérateurs les appellent des "anges".  

Auteur: Pynchon Thomas

Info: Gravity's Rainbow, trad Mg

[ soir ] [ cépuscule ]

 
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psychologie

La régression du point de vue jungien se confond parfois avec la dépression dont il faut rappeler l’étymologie deprimere ("presser de haut en bas") pour mieux comprendre le rapprochement. Dans les deux cas, il y a bien un mouvement de descente, de reflux vers la source. La dépression se produit lorsque la libido, c’est-à-dire l’énergie psychique de l’âme, se détourne du conscient pour se réfugier vers l’inconscient. Elle perd son intérêt pour le monde extérieur et se replie dans l’obscurité de l’âme.
Selon Jung, la dépression se produit lors d’un déséquilibre psychique prolongé causé par l’unilatéralité du fonctionnement conscient, par son refus de prendre en compte les manifestations que lui adresse l’inconscient. Ce mouvement irait croissant chez l’homme occidental qui, après deux millénaires de christianisme et plusieurs siècles de capitalisme, de scientisme et d’industrialisation, continue à nourrir le mythe d’une richesse de l’avoir plutôt que de l’être, de l’extériorité plutôt que de l’intériorité (Jung considère que le socle chrétien sur lequel s’est constituée notre société repose sur des principes qui réfèrent au type de l’extraversion - la relation du sujet avec l’objet est primordiale - alors que les sociétés fondées sur le socle hindouiste par exemple reposent sur des principes qui sont plus majoritairement ceux de l’introversion - exclure la relation du sujet avec le monde pour éviter la souffrance et le malheur). Seul le conscient est reconnu d’autorité, le conscient qui calcule, qui prévoit et qui organise. "La conscience est impensable sans un moi"*, pense l’esprit occidental ; il n’empêche que la dynamique inconsciente de la psyché n’en existe pas moins mais elle est projetée sur un dieu extérieur dont la forme varie au cours du temps.

Auteur: Arcé Alexandra

Info: Expérience de mort imminente : L'approche jungienne, pp 44,45. *JUNG C. G., Psychologie et orientalisme, trad. Par Paul Kessler, Josette Rigal, Rainer Rochlitz, Paris, Albin Michel, 1984, p. 140.

[ Asie-Occident ]

 

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actualisation des enjeux psychanalytiques

La société postmoderne est ainsi [...] structurée par les enjeux du surmoi archaïque de la jouissance, et de son corollaire le moi-idéal de la puissance infantile. Les récits qui ordonnent le lien social prônent comme objectif idéal celui de la réalisation totale de la toute-puissance. Le sujet pris dans cette construction discursive se heurte alors, non aux effets de l’interdit qui s’origine toujours dans un grand Autre incarné qui empêche la jouissance, mais aux effets de l’impossible qui est le lot du réel vivant.

Les effets de ces transformations sont patents dans la clinique quotidienne. Les "états à la limite" et les troubles narcissiques sont devenus les formes classiques de l’expression de souffrance subjective. [...] A la différence des névroses classiques, ces souffrances sont l’expression d’une impossibilité pour le sujet de pouvoir situer le manque et le désir à une place fixe, de pouvoir construire une limite organisée au champ du désir dans son rapport aux autres. [...] C’est bien la limite du corps, en sa surface entre le dedans et le dehors ou dans la mort, qui semble aujourd’hui pour les sujets postmodernes devenir le seul lien possible pour tester, trouver, inscrire une limite.

La question qui sous-tend, en son fond, ces différentes formes d’expressions pathologiques liées aux changements de références idéales, est bien celle du repérage de la différence, de la construction des différenciations entre le sujet et l’objet, entre moi et l’autre. Qu’un ministre puisse rappeler en parlant du président de la République que "Moi c’est moi, et lui c’est lui" nous signale amplement cette panne dans le repérage des différences qui structure le rapport des sujets postmodernes entre eux : la différence n’est que narcissique, et non plus structurale.

Auteur: Lesourd Serge

Info: Dans "Comment taire le sujet ?", éditions Érès, 2010, pages 82-83

 
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délaissement égotique

Refusant l’obéissance à la règle et aux lois de Dieu et de l’Église, ils [les Frères du Libre Esprit] trahissent la mission la plus élevée de l’existence humaine, celle-là même pour laquelle Dieu l’a créée : ils refusent à Dieu la possibilité d’expérimenter la finitude et la relativité, et ce refus est véritablement satanique : ils rejettent la finitude et la limite que Dieu a voulues comme l’ordre même de l’existence créée. Ils croient ainsi les dépasser : illusion et tromperie qui se trompe elle-même [...]. Concluons donc que le seul dépassement possible de la finitude, pour l’être créé, c’est son acceptation. 

[...]

La solution libertaire est une impasse, puisqu’elle soumet la créature à la dictature de ses désirs, et une contradiction puisqu’elle nie la réalité relative de cette créature. Au contraire, la désappropriation de la volonté [...] réalise la liberté de la volonté et accomplit la raison d’être de l’état de créature, la justifie d’être ce qu’elle est, puisqu’elle devient alors le lieu sans lequel Dieu ne peut opérer. [...]

Ainsi, tout véritable ami de Dieu est appelé, à l’imitation de Jésus-Christ, à offrir son humanité pour qu’elle devienne le lieu de l’opération divine. C’est là le secret de l’homme déifié et l’enseignement le plus profond de la Theologia teutsch

[...]

Voilà ce que l’Anonyme Francfortois entend nous rappeler. Il nous enseigne que le oui est plus profondément libérateur que le non, que le consentement à la limite est plus grand et vient de plus haut que la révolte contre la règle et le refus de la finitude. Car d’où peut surgir, en effet, la puissance de ce consentement, sinon de l’Infini ? Seul le Plus "peut" le moins. Briser les formes, c’est perdre l’essence ; s’y soumettre est œuvre d’amour.

Auteur: Borella Jean

Info: Dans "Lumières de la théologie mystique", éditions L'Harmattan, Paris, 2015, pages 175 à 179

[ réceptivité ] [ sophisme de la liberté ] [ réfutation ]

 

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pouvoir

Bernays cherche une justification ( à prétention ) scientifique de la finalité politique du travail accompli par le conseiller en relation publique... Il la trouve dans l'adhésion de quelques théoriciens des sciences sociales de l'époque qui lui confirment que : la masse est incapable de juger correctement des affaires publiques et que les individus qui la composent sont inaptes à exercer le rôle de citoyen en puissance qu'une démocratie exige de chacun d'eux, bref, que le public, au fond, constitue pour la gouvernance de la société un obstacle à contourner et une menace à écarter.
Bernays rejoint un important courant antidémocratique présent dans la pensée politique américaine et selon lequel "la grande bête ( le peuple ) doit être domptée". Ce courant assurait que le "véritable pouvoir, celui que procure la richesse de la nation" doit demeurer entre les mains des "êtres les plus capables" et que la première et principale responsabilité du gouvernement est de "maintenir la minorité fortunée à l'abri de la majorité".
(...)
Il est crucial de rappeler combien ce qui est proposé ici contredit l'idéal démocratique moderne, celui que les Lumières nous ont légué, de rappeler à quel point Bernays, comme l'industrie qu'il a façonnée, doit faire preuve d'une étonnante aptitude à la duplicité mentale pour simultanément proclamer son souci de la vérité et de la libre discussion et accepter que la vérité sera énoncée par un client au début d'une campagne, laquelle devra mettre tout en oeuvre - y compris, s'il le faut absolument, la vérité elle-même - pour susciter une adhésion à une thèse ou des comportement chez des gens dont on a postulé par avance qu'ils sont incapables de comprendre réellement ce qui est en jeu et auxquels on ne sent donc en droit de servir ce que Platon appelait de "pieux mensonges".

Auteur: Baillargeon Normand

Info: Préface de Propaganda : Comment manipuler l'opinion en démocratie Edward L. Bernays

[ cénacle ] [ élitiste ] [ conservation ] [ mépris ] [ publicité ]

 

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vacherie

Il faut se rappeler que la plupart des critiques sont des hommes qui n'ont pas eu beaucoup de chance et qui, au moment où ils allaient désespérer, ont trouvé une petite place tranquille de gardien de cimetière. Dieu sait si les cimetières sont paisibles?: il n'en est pas de plus riant qu'une bibliothèque. Les morts sont là?: ils n'ont fait qu'écrire, ils sont lavés depuis longtemps du péché de vivre et d'ailleurs on ne connaît leur vie que par de petits cercueils qu'on range sur des planches, le long des murs, comme les urnes d'un columbarium. Le critique vit mal, sa femme ne l'apprécie pas comme il faudrait, ses fils sont ingrats, les fins de mois difficiles. Mais il lui est toujours possible d'entrer dans sa bibliothèque, de prendre un livre sur un rayon et de l'ouvrir. Il s'en échappe une légère odeur de cave et une opération étrange commence, qu'il a décidé de nommer la lecture. [...] C'est tout un monde désincarné qui l'entoure où les affections humaines, parce qu'elles ne touchent plus, sont passées au rang d'affections exemplaires, et pour tout dire, de valeurs. Aussi se persuade-t-il d'être entré en commerce avec un monde intelligible qui est comme la vérité de ses souffrances quotidiennes et leur raison d'être. [...] Et, pendant le temps qu'il lit, sa vie de tous les jours devient une apparence. [...] C'est une fête pour lui quand les auteurs contemporains lui font la grâce de mourir?: leurs livres, trop crus, trop vivants, trop pressants passent de l'autre bord, ils touchent de moins en moins et deviennent de plus en plus beaux?; [...] Quant aux écrivains qui s'obstinent à vivre, on leur demande seulement de ne pas trop remuer et de s'appliquer à ressembler dès maintenant aux morts qu'ils seront.

Auteur: Sartre Jean-Paul

Info: Qu'est-ce que la littérature ?

[ analyste ]

 

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sensualité

"Écoute-moi, garde les yeux ouverts", me murmurait Lestat, ses lèvres remuant contre mon cou. Je me souviens qu'à ce contact tous mes poils se sont hérissés, m'envoyant à travers tout le corps une décharge sensuelle, qui n'était pas sans me rappeler les plaisirs de la chair...

L'air songeur, il porta la main droite à son menton et le caressa légèrement de l'index. Puis il reprit : À la suite de quoi, en quelques minutes, je me suis retrouvé si faible que j'en étais paralysé. Pris de panique, je me suis aperçu que je ne parvenais même pas à parler. Lestat me tenait encore, bien sûr, et son bras me semblait aussi lourd qu'une barre d'acier. J'ai senti ses dents se retirer avec une telle violence que les deux plaies qu'elles m'avaient infligées me parurent béantes et la douleur insoutenable. Ensuite, il s'est penché au-dessus de ma tête inerte et, soulevant le bras qui me ceignait, s'est mordu le poignet. Quand le sang a goutté sur ma chemise et mon manteau, il l'a contemplé les yeux brillants, à peine ouverts. Ce moment m'a paru durer une éternité, le halo de lumière désormais en suspens derrière sa tête m'évoquant une apparition. Je crois que je savais ce qu'il s'apprêtait à faire avant même qu'il agisse, et je suis resté là, impuissant, comme si cela faisait des années que j'attendais ce moment. Il a pressé son poignet ensanglanté contre ma bouche et a dit d'un ton ferme et quelque peu impatient : "Bois, Louis." Et j'ai obéi. Il a chuchoté : "Doucement Louis", puis : "Plus vite" à plusieurs reprises. J'ai bu, aspirant le sang par les deux plaies, retrouvant pour la première fois depuis ma petite enfance le plaisir particulier de la tétée, corps et esprit s'abreuvant tous deux à cette source de vie lumineuse.

Auteur: Rice Anne

Info: Les Chroniques des Vampires, tome 1 : Entretien avec un vampire

[ suceur de sang ] [ stryge ]

 

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cité imaginaire

Au-delà de six fleuves et trois chaînes de montagnes surgit Zora, ville que ne peut oublier celui qui l’a vue une fois. Mais ce n’est pas qu’elle laisse dans le souvenir comme d’autres villes mémorables une image hors du commun. Zora a la propriété de rester dans la mémoire endroit après endroit, dans la succession de ses rues, et des maisons le long des rues, et des portes et fenêtres des maisons, bien qu’elle n’y déploie aucune beauté ou rareté particulière. Son secret est dans la façon dont la vue court sur des figures qui se suivent comme dans une partition musicale, où l’on ne peut modifier ou déplacer aucune note. L’homme qui sait de mémoire comment Zora est faite, la nuit quand il ne peut dormir il imagine qu’il marche dans ses rues et il se rappelle l’ordre dans lequel se suivent l’horloge de cuivre, l’auvent rayé du barbier, la fontaine aux sept jets d’eau, la tour de verre de l’astronome, le kiosque du marchand de pastèques, la statue de l’ermite et du lion, le bain turc, le café du coin, la traverse qui conduit au port. Cette ville qui ne s’efface pas de l’esprit est comme une charpente ou un réticule dans les cases duquel chacun peut disposer ce qu’il veut se rappeler: noms d’hommes illustres, vertus, nombres, classifications végétales et minérales, dates de batailles, constellations, parties du discours. On pourra, entre chaque notion et chaque point de l’itinéraire, établir un lien d’affinité ou de contraste, qui serve à la mémoire de rappel instantané. Si bien que les hommes les plus savants du monde sont ceux qui savent Zora par cœur. Mais c’est inutilement que je me suis mis à voyager pour visiter la ville: contrainte de demeurer immobile et égale à elle-même pour qu’on s’en souvienne mieux, Zora languit, s’est défaite, a disparu. La Terre l’a oubliée.

Auteur: Calvino Italo

Info: Villes invisibles

[ arcanes ] [ aide-mémoire ] [ mnémotechnique ]

 

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christianisme

On reproche à la morale catholique et à la morale chrétienne, chose grave à une époque comme la nôtre, d’être en opposition avec la nature et avec les instincts naturels, d’être une morale mystique, ou encore une morale ascétique, quelques-uns disent une morale monastique. Nous voilà bien loin de la morale relâchée de tout à l’heure. Accusation plus grave encore et d’autant plus redoutable qu’elle est plus spécieuse, on va répétant, autour de nous, que la morale religieuse est une morale égoïste, une morale antisociale, qui donne pour but, à la vie de l’homme, son salut personnel.

En effet, le catholicisme, les Eglises chrétiennes en général, pour ne pas dire toutes les religions, avec l’islam et le bouddhisme, donnent comme but, à l’activité et à la piété du croyant, son salut personnel. Il se peut que, par là même, cette morale religieuse se trouve, à vos yeux, entachée d’une sorte d’égoïsme ; mais, faut-il le rappeler ? l’esprit humain n’est pas d’une logique telle que, dans ses actes, le chrétien en soit toujours à considérer la récompense qu’il espère obtenir. Cette morale religieuse qui s’inspire de la charité, non moins que de l’espérance, sommes-nous, vraiment, en droit de la déclarer inférieure ? Sommes-nous certains qu’elle soit moins efficace que la morale sans sanction de tels de nos philosophes ?

[…] Pouvons-nous soutenir que les âmes pieuses sont, moralement, inférieures aux autres ? Il se trouve, sans doute, parmi vous, plus d’une personne qui, ayant reçu une éducation religieuse, et ayant eu pleine foi dans sa religion, a été prise, plus tard, de l’esprit de doute. Je fais appel à leur conscience, et je leur demande si, le jour où elles ont cessé d’espérer en la vie éternelle, leur moralité inférieure en est devenue plus forte ou plus délicate.

Je poserai la même question, sous une autre forme : sommes-nous certains que, dans les écoles ou dans les familles où l’on a renoncé à transmettre à l’enfant la notion d’un Dieu invisible, partout présent, qui sait tout et qui voit tout, on ait élevé le niveau de la moralité de l’enfant ?

Auteur: Leroy-Beaulieu Anatole

Info: " Les doctrines de haine ", éditions Payot et Rivages, Paris, 2022, pages 203-204

[ critiques ] [ réfutation ] [ comparaison ]

 

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