Citation
Catégorie
Tag – étiquette
Auteur
Info



nb max de mots
nb min de mots
trier par
Dictionnaire analogique intriqué pour extraits. Recherche mots ou phrases tous azimuts. Aussi outil de précision sémantique et de réflexion communautaire. Voir la rubrique mode d'emploi. Jetez un oeil à la colonne "chaînes". ATTENTION, faire une REINITIALISATION après  une recherche complexe. Et utilisez le nuage de corrélats !!!!..... Lire la suite >>
Résultat(s): 366
Temps de recherche: 0.0601s

objet-concept

"Dans toutes les langues de l’Europe, au nord comme au sud, le mot chose, quelque forme qu’on lui donne, a pour origine ou racine le mot cause, puisé dans le judiciaire, le politique ou la critique en général. Comme si les objets eux-mêmes n’existaient que selon les débats d’une assemblée ou qu’après décision prononcée par un jury. Le langage veut que le monde ne vienne que de lui. Au moins le dit-il" (p. 111)*. "Ainsi la langue latine appelait res, la chose, d’où nous tirons la réalité, l’objet de la procédure judiciaire ou la cause elle-même, de sorte que, pour les Anciens, l’accusé portait le nom de reus parce que les magistrats le citaient. Comme si la seule réalité humaine venait des seuls tribunaux" (p. 307)*. "Là nous attendent le miracle et la résolution de l’ultime énigme. Le mot cause désigne la racine ou l’origine du mot chose : causa, cosa ; de même, thing ou Ding. […] Le tribunal met en scène l’identité de la cause et de la chose, du mot et de l’objet ou le passage substitutif des uns et des autres. Une chose émerge là" (p. 294)*.

Auteur: Latour Bruno

Info: Nous n'avons jamais été modernes. Essai d'anthropologie symétrique. P 54. *Serres M., Statues, Paris, François Bourin, 1987

[ induction consensus ] [ inférence collective ] [ étymologie ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par miguel

événement

Un soir de la veille de Noël, il y a longtemps de ça, la nouvelle qu’une bienfaitrice était arrivée au village se mit à circuler dans mon bistrot. Les clients s’exclamaient : "guaggliu è arrivata la grascia" (les gars, l’abondance est arrivée). L’abondance dont il était question c’était une femme des rues, une prostituée. En deux minutes mon local se vida et en moins d’un quart d’heure la nouvelle avait fait le tour du village. Je ne vais pas entrer dans la description des détails mais la confusion et les ferments furent importants. Il y avait ceux qui étaient sans argent, ou sans préservatif tandis que la pharmacie était fermée, ceux qui bien que mariés ne voulaient pas perdre l’occasion et ceux qui malgré sa timidité ne voulaient pas renoncer. La bienheureuse fut portée dans une grange et là elle reçut ses clients. Les chiens se mirent à aboyer, les moutons à bêler, les épouses à crier au scandale tandis que nous, les adolescents, nous riions en nous tenant le ventre tant il nous faisait mal. […] Nous nous considérions chanceux quand nous avions l’occasion de la voir marcher dans le village.

Auteur: Pasetta

Info: Dans "Pasetta racconta", pages 24-25

[ humour ] [ souvenir ] [ province ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Coli Masson

morale

Les écrivains qui se sont imposés depuis 1930 ont connu un monde où chacun se sent constamment menacé non seulement dans sa vie, mais dans tout son système de valeurs. Dans une telle ambiance, le détachement n’est pas possible. […] La littérature est devenue politique parce que tout autre choix aurait été entaché de malhonnêteté intellectuelle. […] Cette période d’une dizaine d’années, pendant laquelle la littérature, poésie comprise, s’est trouvée inextricablement liée à l’activité pamphlétaire, a rendu un grand service à la critique littéraire, dans la mesure où elle a ruiné l’illusion du pur esthétisme. Elle nous a rappelé que, sous une forme ou sous une autre, la propagande est tapie au cœur de chaque livre, que chaque œuvre d’art a un sens et une thèse – thèse politique, sociale ou religieuse –, que nos jugements esthétiques sont toujours affectés par nos croyances et nos préjugés. Elle a dévoilé la tromperie de l’art pour l’art. Mais jusqu’ici, elle nous a menés aussi dans une impasse, parce qu’elle a conduit d’innombrables jeunes écrivains à tenter de se plier à une discipline politique qui, s’ils y étaient parvenus, leur aurait interdit toute honnêteté intellectuelle.

Auteur: Orwell George

Info: Orwell, La frontière entre l’art et la propagande (1941), EAL-2, p. 161-162.

[ éthique ] [ beaux-arts ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par miguel

unité vivante

[Vladimir] Vernadsky s'est distingué des autres théoriciens par son refus constant d'ériger une catégorie spéciale pour la vie. Rétrospectivement, nous pouvons voir la valeur de ce point de vue ; parce que la vie est effectivement devenue une catégorie, les théoriciens de la vie ont cherché à concrétiser quelque chose qui n'existe pas en elle-même. La référence de Vernadsky à la "matière vivante" n'était pas un subterfuge rhétorique. En une attaque verbale habile, Vernadsky a coupé court à des siècles de fatras mystique attaché au mot "vie". Il a tout fait pour considérer la vie comme une partie d'autres processus physiques et a utilisé invariablement le gérondif "vivant" pour souligner le fait que la vie était moins une chose qu'un événement, un processus. Les organismes, pour Vernadsky, sont des formes spéciales, décentralisées de minéral commun et d'eau. L'eau animée, la vie dans toute son humidité, montre un pouvoir de mouvement surpassant celui du calcaire, du silicate, et même de l'air. Elle façonne la surface de la Terre. Soulignant la continuité de la vie liquide et des roches, […] Vernadsky a noté la façon dont ces couches apparemment inertes sont des "traces du passé des biosphères".

Auteur: Margulis Lynn

Info: Dans "What is life ?" avec Dorion Sagan

[ interaction ] [ mouvante ] [ panpsychisme ] [ synéchisme ] [ abiogenèse ]

 
Mis dans la chaine

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Coli Masson

ésotérisme

[…] chaque Nom réfère au Dieu qui se montre à et par l’Imagination théophanique. S’arrêter à la pluralité, c’est être avec les Noms divins et avec les Noms du monde. S’arrêter à l’unité du Dénommé, c’est être avec l’Être divin sous l’aspect de son Soi (dhât) indépendant du monde et des relations de ses Noms avec les Noms du monde. Mais les deux stations sont également nécessaires et conditionnées l’une pour l’autre. Refuser la première, c’est oublier que l’Être divin ne se révèle à nous que sous les configurations de l’Imagination théophanique, laquelle donne une réalité effective à ces Noms divins dont la tristesse aspirait à des êtres concrets en qui investir leur activité, et qu’ils feraient être ce qu’ils étaient, êtres grâce auxquels et pour lesquels ces Noms figureraient alors comme autant d’hypostases, écloses au pluriel qui les désigne comme "les Seigneurs". Mais manquer la seconde des deux stations, c’est ne plus percevoir l’unité dans la pluralité. En revanche s’arrêter simultanément aux deux, c’est être enfin équidistant du polythéisme et du monothéisme monolithique, abstrait et unilatéral. Reconnaître la pluralité qui s’attache à l’Imagination, ce n’est ni la dévaloriser ni prétendre l’annuler, mais au contraire la fonder.

Auteur: Corbin Henry

Info: Dans "L'imagination créatrice dans le soufisme d'Ibn'Arabî", page 207

[ création récurrente ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Coli Masson

impossible

Socrate affirme […] le savoir interne au jeu du signifiant. Il pose en même temps que ce savoir entièrement transparent à lui-même est ce qui en constitue la vérité. 

[…] Le pas sans doute essentiel de Socrate assure l’autonomie de la loi du signifiant, et prépare pour nous ce champ du verbe qui lui aura permis de critiquer tout le savoir humain comme tel. Mais la nouveauté de l’analyse, si tant est que ce que je vous enseigne concernant la révolution freudienne soit correct, c’est justement ceci, que quelque chose peut se sustenter dans la loi du signifiant, non seulement sans que cela comporte un savoir, mais en l’excluant expressément, en se constituant comme inconscient, c’est-à-dire comme nécessitant à son niveau l’éclipse du sujet, pour subsister comme chaîne inconsciente, comme constituant ce qu’il y a d’irréductible, en son fond, dans le rapport du sujet au signifiant.

C’est pour cette raison que nous sommes les premiers, sinon les seuls, à ne pas être forcément étonnés que le discours proprement socratique, celui de l’épistémè, du savoir transparent à lui-même, ne puisse pas se poursuivre au-delà d’une certaine limite concernant tel objet, quand cet objet […] est l’amour.

Auteur: Lacan Jacques

Info: Dans le "Séminaire, livre VIII - Le transfert" page 145

[ psychanalyse ] [ dépassement ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Coli Masson

naïveté enfantine

Ainsi donc, pensa Ulrich lorsqu’il se retrouva seul, ils avaient été vraiment, dans un temps pas si lointain, deux jeunes hommes dont l’esprit bénéficiait des plus hautes révélations non seulement avant tous les autres, mais encore, chose étrange, simultanément ; il suffisait en effet, que l’un des deux ouvrit la bouche dans l’intention de proférer quelque grande nouveauté, pour que l’autre fît aussitôt la même extraordinaire découverte. Les amitiés d’enfance sont chose bizarre ; elles ressemblent à un œuf qui pressent déjà dans le jaune son splendide avenir d’oiseau, mais ne montre encore au monde qu’un ovale assez inexpressif, impossible à distinguer d’aucun autre. […]

Il cherchait à se rappeler ces conversations avec Walter. Mais c’était comme des rêves dont on attrape juste les ultimes pensées au moment du réveil. Et il pensa, non sans surprise : "Alors, quand nous soutenions telle ou telle affirmation, nous ne nous souciions pas tellement qu’elles fussent justes, mais bien qu’elles servissent à nous affirmer !" Tant le besoin de luire soi-même, chez les jeunes gens, est plus fort que celui de voir dans la lumière ; et le souvenir de ce sentiment qu’on avait de flotter sur des rayons, Ulrich l’éprouvait comme une perte douloureuse. 

Auteur: Musil Robert

Info: Dans "L'homme sans qualités", tome 1, trad. Philippe Jaccottet, éditions du Seuil, 1957, pages 89-90

[ remémoration ] [ construction identitaire ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Coli Masson

tue l'amour

Je ne sais plus par quel détour la conversation en vint à l’attentat contre les Twin Towers, mais quand j’entendis la jeune femme qui m’accompagnait au Café Romand soutenir que le Président Bush en était l’initiateur, je fus surpris. Quand elle tenta de nous prouver l’implication de la CIA et du Mossad dans ce complot, je pressentis que le pire allait venir et que cette soirée serait notre dernière soirée. […] Cette jeune femme, universitaire de surcroît, était d’ordinaire réservée. Je ne sais pas quel vent mauvais l’emportait, mais il me fut difficile de ne pas réagir, l’invitant à ne pas entrer dans un délire antisémite, ce qu’elle récusa aussitôt, prétendant que des experts australiens – rien n’est plus farfelu que l’arrivée d’experts australiens dans un débat – avaient établi les faits. Son visage s’empourprait et elle perdait tout charme à mes yeux. Je ne parvenais plus à comprendre la séduction que cette ravissante helléniste avait exercée sur moi.

Face aux objections qui fusaient, elle se réfugia derrière les films de Michael Moore. L’erreur dans le jugement s’accompagnait d’une faute esthétique. J’étais consterné. Jamais je n’aurais soupçonné que cette sylphide se gavait de la démagogie infecte de ce bateleur obèse.

Auteur: Jaccard Roland

Info: Dans "Ma vie et autres trahisons", éd. Grasset & Fasquelle, 2013, pages 175-176

[ femme-par-homme ] [ collapsus ] [ débandage ]

 
Commentaires: 5
Ajouté à la BD par Coli Masson

métissage

[…] Je supporterais aussi peu l'Europe que toi l'Asie. Restons ici, à Bakou, où l'Asie et l'Europe s'interpénètrent insensiblement. Je ne peux pas aller à Paris, il n'y a pas de mosquée là-bas et pas de Seyd Moustafa. Il faut que je puisse de temps à autre me délecter de l'âme asiatique pour supporter tous ces étrangers qui viennent chez nous. À Paris, je te haïrais comme tu m'as haï après la fête de Moharrem. Pas tout de suite, mais à un moment quelconque, après un carnaval ou après un bal, je commencerais soudain à te haïr à cause du monde étranger dans lequel tu voudrais me forcer à entrer. C'est pourquoi je reste ici, quoi qu'il puisse arriver. Je suis né dans ce pays et je veux y vivre et y mourir.

Elle se tut pendant tout ce temps. Lorsque j'eus fini, elle se pencha vers moi et sa main caressa mes cheveux.

- Pardonne à ta Nino, Ali khan. J'étais très sotte. Je ne sais pas pourquoi je pensais que tu pourrais changer plus vite que moi. Nous restons ici et nous ne parlons plus de Paris. Tu conserveras ta ville asiatique et moi, la maison européenne.

Auteur: Kurban Saïd

Info: Ali et Nino, pp. 319-320

[ couple ]

 
Commentaires: 2
Ajouté à la BD par miguel

judaïsme

Lorsque nous examinons les reproches adressés par les antisémites à ce qu’ils appellent le capitalisme juif, une chose nous frappe : c’est que l’antisémitisme aboutit à une sorte d’anticapitalisme, et par suite à une sorte de socialisme. Sur ce terrain, les antisémites donnent la main aux socialistes ; ils arrivent à la même conclusion, avec cette différence que les socialistes, plus logiques, étendent leurs attaques contre le capitalisme à tous les capitalistes, tandis que l’inconséquence des antisémites s’en prend seulement aux juifs, aux protestants, qu’ils regardent comme des demi-juifs, ou à ceux des catholiques qu’ils désignent du nom singulièrement élastique de judaïsants.

L’antisémitisme aboutit ainsi au socialisme, socialisme de droite, si vous le voulez, socialisme soi-disant conservateur ; mais socialisme illogique, socialisme bâtard, socialisme sans idéal, socialisme qui n’est même pas nimbé d’une auréole de fraternité. Ce socialisme antisémite est celui des hommes qui n’ont pas réussi dans leurs affaires […]. Pour les hommes mécontents de leur sort, pour ceux qui trouvent que la fortune n’a pas répondu à leurs espérances, pour tous ceux dont les revenus sont inférieurs aux appétits, il est précieux d’avoir, comme cible vivante, un groupe restreint sur lequel on puisse diriger, avec ses rancunes et ses jalousies, les colères des masses.

Auteur: Leroy-Beaulieu Anatole

Info: " Les doctrines de haine ", éditions Payot et Rivages, Paris, 2022, pages 138-139

[ critiques ] [ limites ] [ envie ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Coli Masson