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légende

Il [Saint François d’Assise] parvint à un endroit, près de Bevagna, où se trouvait assemblée une très grande multitude d’oiseaux d’espèces diverses : colombes, corneilles et d’autres qu’on appelle ordinairement des moineaux. En les voyant, le très bienheureux serviteur de Dieu François, en homme d’une très grande ferveur qui portait un grand sentiment de piété et de douceur même aux créatures inférieures et privée de raison, courut vers eux avec allégresse, laissant ses compagnons sur le chemin. Une fois qu’il fut assez près, voyant que les oiseaux l’attendaient, il les salua à sa manière habituelle. Mais voyant non sans étonnement que les oiseaux ne prenaient pas la fuite comme ils le font d’ordinaire, il fut rempli d’une joie immense et les pria humblement, disant qu’ils devaient écouter la parole de Dieu. Parmi les nombreuses choses qu’il leur dit, il ajouta encore celles-ci : "Mes frères les oiseaux, vous devez beaucoup louer votre Créateur et l’aimer toujours, lui qui vous a donné des plumes pour vous revêtir, des ailes pour voler et tout ce dont vous avez besoin. Dieu vous a rendus nobles parmi ses créatures et il vous a accordé d’habiter dans la pureté de l’air ; car comme vous ne semez ni ne moissonnez, lui-même ne vous en protège et ne gouverne pas moins, sans que vous vous en souciiez le moins du monde." A ces paroles, les petits oiseaux – à ce qu’il disait, lui et les frères qui se trouvaient avec lui – exultèrent de façon étonnante, selon leur nature : ils commencèrent à allonger le cou, à étendre leurs ailes, à ouvrir le bec et à regarder vers lui. Mais lui, passant au milieu d’eux, allait et venait, touchant leurs têtes et leurs corps de sa tunique. Enfin, il les bénit et, après avoir fait un signe de croix, il leur donna congé de s’envoler dans un autre lieu. Quant au bienheureux père, il allait avec ses compagnons, se réjouissant sur le chemin, et rendant grâce à Dieu que toutes les créatures vénèrent par une confession suppliante.

Auteur: Celano Thomas de

Info: Vita prima, 58

[ christianisme ] [ animaux ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

philosophe-sur-philosophe

C'était dans l'intimité une compagne charmante et pleine d'esprit : elle maniait la plaisanterie sans mauvais goût et l'ironie sans méchanceté. Son érudition extraordinaire et si profondément assimilée qu'on la distinguait à peine de l'expression de sa vie intérieure donnait à sa conversation un attrait inoubliable. Elle avait cependant un grave défaut (ou une rare qualité, suivant le plan où on se place) : c'était de refuser toute concession aux nécessités ou aux convenances de la vie sociale. Elle disait toujours toute sa pensée à tout le monde en toutes circonstances. Cette sincérité, qui procédait avant tout d'un profond respect des âmes, lui valut bien des mésaventures, amusante pour la plupart, mais dont certaines faillirent tourner au tragique à une époque où toute vérité n'était pas bonne à crier sur les toits. 

Il n'est pas question d'établir ici le bilan des sources historiques de sa pensée et des influences qu'elle a pu subir. Indépendamment de l'Evangile dont elle se nourrissait tous les jours, elle avait une profonde vénération pour les grands textes hindous et taoïstes, pour Homère, les tragiques grecs, et surtout Platon qu'elle interprétait dans un sens foncièrement chrétien. Elle haïssait par contre Aristote en qui elle voyait le premier fossoyeur de la grande tradition mystique. Saint Jean de la Croix dans l'ordre religieux, Shakespeare, certains poètes mystiques anglais et Racine dans l'ordre littéraire marquèrent également son esprit. Parmi les contemporains, je ne vois guère que Paul Valéry et Koestler dans le Testament espagnol dont elle m’ait parlé avec une admiration sans mélange. Ses préférences comme ses exclusions, étaient abruptes et sans appel. Elle croyait fermement que la création vraiment géniale exigeait un niveau supérieur de spiritualité et qu'il n'était pas possible d'atteindre à l'expression parfaite sans avoir traversé de sévères purifications intérieures. Ce souci de pureté, d'authenticité intimes la rendait impitoyable pour tous les auteurs en qui elle croyait déceler la moindre recherche de l'effet, le plus léger élément d'insincérité ou de boursouflure : Corneille, Hugo, Nietzsche. Seul comptait pour elle le style parfaitement dépouillé, traduction de la nudité de l'âme.

Auteur: Thibon Gustave

Info: Préface à "La pesanteur et la grâce" de Simone Weil, Librairie Plon, 1988, pages 9-10

[ description ] [ portrait ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

homme-machine

Frank Rosenblatt est surtout connu pour son Perceptron, un dispositif électronique construit selon des principes biologiques et doté d'une capacité d'apprentissage. Les perceptrons de Rosenblatt ont d'abord été simulés sur un ordinateur IBM 704 au Cornell Aeronautical Laboratory en 1957. Lorsqu'un triangle était placé devant l'œil du perceptron, celui-ci captait l'image et la transmettait le long d'une succession aléatoire de lignes aux unités de réponse, où l'image était enregistrée.

Il a développé et étendu cette approche dans de nombreux articles et dans un livre intitulé Principles of Neurodynamics : Perceptrons and the Theory of Brain Mechanisms, publié par Spartan Books en 1962. Le Perceptron lui a valu une reconnaissance internationale. Le New York Times l'a qualifié de révolution en titrant "New Navy Device Learns By Doing", et le New Yorker a également admiré l'avancée technologique.

Des recherches sur des dispositifs comparables étaient également menées dans d'autres endroits, comme le SRI, et de nombreux chercheurs attendaient beaucoup de ce qu'ils pourraient faire. L'enthousiasme initial s'est toutefois quelque peu estompé lorsqu'en 1969, Marvin Minsky et Seymour Papert ont publié le livre "Perceptrons", qui contenait une preuve mathématique des limites des perceptrons feed-forward à deux couches, ainsi que des affirmations non prouvées sur la difficulté d'entraîner des perceptrons à plusieurs couches. Le seul résultat prouvé du livre, à savoir que les fonctions linéaires ne peuvent pas modéliser les fonctions non linéaires, était trivial, mais le livre a néanmoins eu un effet prononcé sur le financement de la recherche et, par conséquent, sur la communauté. 

Avec le retour de la recherche sur les réseaux neuronaux dans les années 1980, de nouveaux chercheurs ont recommencé à étudier les travaux de Rosenblatt. Cette nouvelle vague d'études sur les réseaux neuronaux est interprétée par certains chercheurs comme une infirmation des hypothèses présentées dans le livre Perceptrons et une confirmation des attentes de Rosenblatt.

Le Mark I Perceptron, qui est généralement reconnu comme un précurseur de l'intelligence artificielle, se trouve actuellement au Smithsonian Institute à Washington D.C. Le MARK 1 était capable d'apprendre, de reconnaître des lettres et de résoudre des problèmes assez complexes.

Auteur: Internet

Info: Sur https://en.wikipedia.org/wiki/Frank_Rosenblatt

[ historique ] [ acquisition automatique ] [ machine learning ]

 

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big brother

Facebook a manipulé les émotions de ses utilisateurs pour une étude
Une recherche publiée récemment expliquant comment Facebook a manipulé des informations de près de 700'000 utilisateurs anglophones a suscité l'inquiétude d'internautes. Le réseau social voulait étudier "la contagion émotionnelle" dans les groupes d'utilisateurs.
Pendant une semaine, du 11 au 18 janvier 2012, Facebook et des scientifiques des Universités Cornell et de Californie à San Francisco ont utilisé le système d'algorithmes du réseau pour modifier le contenu des informations reçues par un groupe d'utilisateurs afin d'étudier l'impact sur leurs émotions.
La recherche a été publiée dans la revue scientifique américaine Comptes rendus de l'Académie nationale des sciences (PNAS), datée du 17 juin. Les auteurs cherchaient à savoir si le nombre de messages positifs ou négatifs lus par les utilisateurs influençait la teneur de ce qu'ils postaient eux-mêmes sur le site.
Ils ont constaté que les utilisateurs ciblés commençaient à utiliser davantage de mots négatifs ou positifs selon l'ampleur des contenus auxquels ils avaient été "exposés".
"Les états émotionnels sont communicatifs et peuvent se transmettre par un phénomène de contagion, conduisant les autres personnes à ressentir les mêmes émotions sans en être conscientes", écrivent les auteurs de cette recherche. Selon eux, "ces résultats montrent la réalité d'une contagion émotionnelle de masse via les réseaux sociaux."
L'étude suscite une attention grandissante sur la toile après des articles publiés samedi dans la revue en ligne Slate et sur les sites du magazine "The Atlantic" et de "Forbes".
Levée de boucliers
Certains internautes expriment "leur trouble profond" ou qualifient la méthode utilisée "d'alarmante" ou de "démoniaque". Susan Fiske de l'Université de Princeton, qui a édité la recherche, a indiqué à "The Atlantic" avoir contacté les auteurs pour leur faire part de ses préoccupations quant à leurs travaux.
Ils lui ont dit que les autorités de leurs universités avaient approuvé ces travaux "car Facebook, apparemment, manipule systématiquement le contenu des informations diffusées".
Interrogé par l'AFP, Facebook, plus grand réseau social avec plus d'un milliard d'utilisateurs, a rejeté ces accusations. "Cette recherche a été menée pendant seulement une semaine et aucune donnée utilisée n'était liée au compte d'une personne en particulier", indique une porte-parole, Isabel Hernandez, dans un courrier électronique.

Auteur: Internet

Info:

[ pouvoir ] [ influence ]

 

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monde matheux

Furieuse, la bête se tordit et agita ses intégrales itérées sous les coups polynomiaux du roi, s'effondra en une série infinie de termes indéterminés, puis se releva en s'élevant à la puissance n, mais le roi l'assomma tellement de différentielles et de dérivées partielles que ses coefficients de Fourier s'annulèrent tous (voir le lemme de Riemann), et dans la confusion qui s'ensuivit, les constructeurs perdirent complètement de vue à la fois le roi et la bête. Ils firent donc une pause, se dégourdirent les jambes, burent une gorgée de la cruche de Leyde pour reprendre des forces, puis se remirent au travail et recommencèrent depuis le début, en déployant cette fois tout leur arsenal de matrices tensorielles et de grands ensembles canoniques, attaquant le problème avec une telle ferveur que le papier même se mit à fumer. Le roi se précipita avec toutes ses coordonnées cruelles et ses valeurs moyennes, trébucha dans une sombre forêt de racines et de logarithmes, dut faire marche arrière, puis rencontra la bête sur un champ de nombres irrationnels (F1) et la frappa si durement qu'elle tomba de deux décimales et perdit un epsilon, mais la bête glissa autour d'une asymptote et se cacha dans un espace de phase orthogonal à n dimensions, subit une expansion et sortit, fumant de manière factorielle, et tomba sur le roi et lui causa une blessure cuisante. Mais le roi, sans se décourager, enfila sa cotte de mailles de Markov et tous ses paramètres imperméables, porta son incrément Δk à l'infini et asséna à la bête un véritable coup booléen, l'envoyant rouler à travers un axe des x et plusieurs parenthèses - mais la bête, préparée à cela, baissa ses cornes et... vlan ! -Les crayons volèrent comme des fous au travers des fonctions transcendantes et des transformations à double figure, et lorsqu'enfin la bête se rapprocha et que le roi fut à terre, les constructeurs se levèrent d'un bond, dansèrent une gigue, rirent et chantèrent en déchirant tous leurs papiers en lambeaux, à la grande surprise des espions perchés dans le lustre - perchés en vain, car ils n'étaient pas initiés aux subtilités des mathématiques supérieures et n'avaient donc aucune idée de la raison pour laquelle Trurl et Klapaucius criaient maintenant, encore et encore, "Hourra ! Victoire !!!"

Auteur: Lem Stanislaw

Info: La Cyberiade

[ incompréhensible ] [ humour ] [ littéraire ]

 

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cité imaginaire

Pour finir, le voyage conduit à la ville de Tamara. On y pénètre par des rues hérissées d’enseignes qui sortent des murs. L’œil ne voit pas des choses maisdes figures de choses qui signifient d’autres choses: la tenaille indique la maison de l’arracheur de dents, le pot la taverne, les hallebardes le corps de garde, la balance romaine le marchand de fruits et légumes. Statues et écussons représentent des lions, des dauphins, des tours, des étoiles : signes que quelque chose— qui sait quoi? — a pour signe un lion ou un dauphin ou une tour ou une étoile. D’autres signes avertissent de ce qui est quelque part défendu — entrer dans la ruelle avec des charrettes, uriner derrière le kiosque, pêcher à la ligne du haut du pont — et de ce qui est permis — faire boire les zèbres, jouer aux boules, brûler les cadavres de ses parents. Par la porte des temples on voit les statues des dieux, tous représentés avec leurs attributs: la corne d’abondance, le sablier, la méduse, par quoi le fidèle peut les reconnaître et leur adresser les prières qui conviennent. Si un édifice ne porte aucune enseigne ou figure, sa forme même et l’endroit qu’il occupe dans l’ordonnance de la ville suffisent à en indiquer la fonction : le château royal, la prison, l’hôtel de la monnaie, l’école pythagoricienne, le bordel. Même les marchandises que les commerçants disposent sur leurs étalages valent non pas pour elles-mêmes mais comme signes d’autrechose: le bandeau brodé pour le front veut dire élégance, la chaise à porteurs dorée pouvoir, les volumes d’Averroès sagesse, le collier de cheville volupté. Le regard parcourt les rues comme des pages écrites: laville dit tout ce que tu dois penser, elle te fait répéter son propre discours, et tandis que tu crois visiter Tamara tu ne fais qu’enregistrer les noms par lesquels elle se définit elle-même et dans toutes ses parties. Comment sous cette épaisse enveloppe de signes la ville est-elle en vérité, que contient-elle ou cache-t-elle, l’homme ressort de Tamara sans l’avoir appris. Au-dehors s’étend jusqu’à l’horizon la terre vide, s’ouvre le ciel où courent les nuages. Dans la forme que le hasard et le vent donnent aux nuages, l’homme déjà s’applique à reconnaître des figures: un voilier, une main, un éléphant.

Auteur: Calvino Italo

Info: Villes invisibles

[ pancartes ] [ panneaux ] [ langage ] [ reconnaissance des formes ] [ symboles ]

 

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saynète

Il gèle à pierre fendre en cette veille de Noël mais les quatre jeunes étudiants, gais et prêts à plaisanter sur tout et sur rien, ne sentent pas la morsure du froid. Bien qu’ils n’aient plus que quelques minutes jusqu’au départ du train pour le Nord du pays, ils ne se pressent pas, trop heureux d’avoir obtenu quelques jours de vacances entre Noël et le Jour de l’An. Chargés de sacoches et débordant d’une joie naturelle à leur âge, ils mettent le pied sur la dernière marche du wagon au moment où le train s’ébranle déjà. Ils s’installent dans le premier compartiment libre. Une seule personne s’y trouve : une petite vieille mince et effacée qui, à leur arrivée, se blottit dans son coin.

— Ne bougez pas, petite mère, nous avons de la place, lui lance Émile. Puis, les gars se mettent à plaisanter et à bavarder : les professeurs, les camarades et surtout les filles, rien n’échappe à leurs commentaires, à leurs imitations. Nos copains n’ont pas eu le temps de manger avant leur départ et ils mordent, à pleines dents, les " covrigi" -craquelins ronds qu’ils ont emportés. Ensuite ils ouvrent leurs sacoches et entament les oranges pour lesquelles ils se sont tant bousculés avant d’attraper le train !

Émile pèle son orange, la sépare en deux et se tourne vers l’ombre, immobile dans son coin :

— Tenez petite mère quelques tranches d’orange, vous avez peut-être soif ou bien l’odeur vous a-t-elle donné envie d’y goûter ! La veille femme esquisse un geste pour tendre la main, puis se recroqueville sur elle-même et chuchote d’une voix sourde :

— Merci, Monsieur mais vraiment, il ne faut pas.

— Prenez, petite mère, puisqu’il vous l’offre, car il ne vous la proposera pas une deuxième fois ! plaisante un des jeunes gens.

— Laissez, messieurs, ne vous dérangez pas. La vieille n’est pas habituée à ces bonnes choses. S’il vous reste quelques peaux d’orange, je vous remercie.

— Maman fait aussi des peaux d’orange confites pour les gâteaux, dit, l’eau à la bouche, le jeune homme grassouillet. Mais, celles-ci, nous pouvons les lui donner. Il ramasse avec soin les peaux, les met dans un sac en papier et les tend à la femme.

— Merci, Monsieur, Dieu vous les rendra, dit-elle en cachant, discrètement, le sac.

Auteur: Petrescu Cornelia

Info: Les Écorces d'orange, pp. 7-8

[ voyage ] [ nourriture ] [ recyclage ] [ récupération ]

 

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combat

Furieuse, la bête se cabra et a tortilla ses intégrales itérées sous les coups polynomiaux du roi, s'écroula en une série infinie de termes indéterminés, puis se releva, montant à la puissance n, mais le roi l'avait tellement abreuvée de différentielles et de dérivées partielles que ses coefficients de Fourier s'annulèrent tous (voir le lemme de Riemann), et dans la confusion qui s'en suivit, les constructeurs perdirent complètement de vue tant le roi que la bête. Ils firent donc une pause, se dégourdirent les jambes, burent une gorgée de la cruche de Leyde pour reprendre des forces, puis se remirent au travail et recommencèrent depuis le début, en déployant cette fois tout leur arsenal de matrices tensorielles et de grands ensembles canoniques, attaquant le problème avec une telle ferveur que le papier même se mit à fumer. Le roi, s'étant précipité avec toutes ses coordonnées cruelles et ses valeurs moyennes, trébucha dans une sombre forêt de racines et de logarithmes, et dut faire marche arrière, puis il rencontra la bête sur un champ de nombres irrationnels (F1) et la frappa si durement qu'elle perdit deux décimales et un epsilon, mais la bête avait glissé autour d'une asymptote pour se cacher dans un espace de phase orthogonal à n dimensions, puis, ayant subi une expansion elle en ressortit, fumante de manière factorielle, et elle tomba sur le roi pour le blesser de manière passagère. Mais le roi, sans se décourager, revêtit sa cotte de mailles de Markov et tous ses paramètres imperméables, puis porta son incrément Δk à l'infini et asséna à la bête un véritable uppercut booléen, la faisant tituber à travers un axe des x et plusieurs parenthèses - mais la bête, préparée à cela, a abaissé ses cornes et... VLAN ! - Les crayons s'éparpillèrent comme des fous à travers les fonctions transcendantes et les doubles transformations, et lorsque la bête se rapprocha enfin alors que le roi était mis à terre pour le compte, les constructeurs se levèrent d'un bond, dansèrent une gigue, en riant et chantant, déchirant tous leurs papiers en lambeaux, à la grande surprise des espions juchés dans le lustre - perchés là en vain, car ils n'étaient pas initiés aux subtilités des mathématiques supérieures et n'avaient donc aucune idée de la raison pour laquelle Trurl et Klapaucius criaient maintenant, encore et encore, "Hourra ! Victoire !!!"

Auteur: Lem Stanislaw

Info: The Cyberiad

[ monde mathématique ] [ humour ] [ complexité ]

 

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chronos

Je crois que le temps est immobile et que je me meus en lui parfois lentement, parfois à une vitesse foudroyante.

Depuis que Lynx est mort, je ressens cela très nettement. Je suis assise à ma table et le temps s'arrête. Je ne puis le voir ni le sentir ni l'entendre, pourtant il m'entoure de tous côtés. Son immobilité et son silence sont effrayants. Je me dresse d'un bond, je sors de la maison en courant et cherche à lui échapper. Je m'occupe, les choses prennent le devant et j'oublie le temps. Et puis brusquement, il est à nouveau autour de moi. Je suis devant la maison en train de regarder les corneilles, et le voilà encore, immatériel et immobile, nous maintenant fermement ensemble, prés,  corneilles et moi. Je serai obligée de m'habituer à lui, à son indifférence, à son omniprésence. Il s'étend à l'infini comme une toile d'araignée géante. Des milliards de petits cocons sont pris dans ses fils, un lézard couché au soleil, une maison en flammes, un soldat mourant, tout ce qui est mort et tout ce qui vit. Le temps est grand et il y a toujours place en lui pour de nouveaux cocons. Un filet gris et sans pitié dans lequel chaque seconde de ma vie est accrochée. Peut-être me paraît-il si terrible parce qu'il conserve tout et ne laisse rien vraiment finir. 

Mais si le temps n'existe que dans ma tête, et que je suis le dernier être humain, il se terminera avec ma mort. Cette pensée me réjouit. Je pourrais être en mesure de tuer le temps. Le grand maillage se déchirera et tombera dans l'oubli, avec son triste contenu. Je devrais en être remerciée, mais personne après ma mort ne saura que j'ai tué le temps. En réalité, ces pensées n'ont aucun sens. Les choses arrivent et, comme des millions de personnes avant moi, je leur cherche un sens, car ma vanité ne me permet pas d'admettre que toute la signification d'un événement repose dans l'événement lui-même. Pas un scarabée que je piétine négligemment ne verra dans cet événement, triste pour lui, un lien mystérieux de portée universelle, Il s'est retrouvé sous mon pied au mauvais moment ; le confort dans la lumière, une brève douleur stridente et le néant. Nous sommes les seuls à être condamnés à courir après un sens qui ne peut exister.

Auteur: Haushofer Marlen

Info: The Wall

[ illusion ] [ rationalisme ]

 

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diable

Satan, vieil Androgyne ! en Toi je reconnais
Un Satyre d’antan que, bien sûr, je croyais
Défunt depuis longtemps. Hélas ! les morts vont vite !
Mais je vois mon erreur et, puisqu’on m’y invite,
J’avouerai qu’à mes yeux ce terrible Satan
D’une étrange façon rappelle le Dieu Pan.
Effroi des bonnes gens, terreur du Moyen Age !
Sans nul doute, le temps t’a changé quelque peu,
Et cependant tes yeux gardent le même feu.
Tes cornes ont poussé et ta queue est plus longue ;
Mais je te reconnais avec ta face oblongue,
Ton front chauve et ridé (tu dois être si vieux !)
Ta solide mâchoire et ta barbe caprine.
Je te reconnais bien, et pourtant je devine
Qu’il a dû se passer certains événements
Qui ne t’ont point laissé sans peines ni tourments.
Qu’est-il donc arrivé ? Qu’y a-t-il qui t’oblige
A éviter le jour de même qu’une Stryge ?
Ton air s’est assombri, toi déjà si pensif
Qu’on voyait autrefois, solitaire et craintif,
Errer dans la campagne en jouant de la flûte
Ou garder tes troupeaux assis devant ta hutte.
Qui donc t’a déclaré la guerre sans merci ?
Qui donc t’a dénoncé comme notre ennemi ?
Je ne l’aurais pas cru, et tu n’y pensais guère
Lorsque tu méditais paisiblement naguère.
Cela est vrai pourtant, ou du moins on le dit,
Et l’on fait là-dessus maint horrible récit.
Traqué de toutes parts, le pauvre Lucifuge
Au porche de l’église a cherché un refuge.
Il faut bien convenir que tu n’es pas très beau,
Tel que je t’aperçois sur ce vieux chapiteau.
Te voilà devenu la hideuse gargouille
Que quelqu’un, ange ou saint, sous ses pieds écrabouille.
Le chrétien te maudit, et le prédicateur
Te montre à chaque instant pour exciter la peur ;
Il te dépeint hurlant, t’agitant dans les flammes,
Et sans cesse occupé à tourmenter les âmes.
L’auditoire frémit, et, tout rempli d’effroi,
Redoute de tomber quelque jour sous ta loi...
Aujourd’hui c’est bien pis, et avec impudence,
Ô comble de disgrâce ! on nie ton existence.
Toi qui épouvantais jadis les plus puissants,
Te voilà devenu un jouet pour enfants !
Quelque vieille dévote, à la piété insigne,
Seule te craint encore et à ton nom se signe.
Moi, je sais qui tu es et je ne te crains pas ;
Je te plains de tout cœur d’être tombé si bas !
Je n’éprouve pour toi ni colère ni haine,
J’implore en ta faveur la Bonté souveraine,
Et j’espère te voir, antique Révolté,
Las enfin et contrit, rentrer dans l’Unité !

Auteur: Guénon René

Info: "Les aspects de Satan", poème de jeunesse

[ poème ]

 

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