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éducation

Je l'ai contemplée. Sheila était ma fille - la fille que je voulais - et que je voulais garder. Mais il ne servait à rien de se faire des illusions sur elle. Sheila était une menteuse et le serait probablement toujours. C'était sa façon de se battre pour sa survie - le déni facile et rapide. C'était l'arme d'un enfant, et elle s'en servirait probablement toujours. Si je voulais Sheila, je devais l'accepter telle qu'elle était, c'est-à-dire qu'elle soit à portée de main pour que je puisse soutenir ses points faibles. Nous avons tous nos points faibles. Les miens étaient différents de ceux de Sheila, il fallait faire avec.

Auteur: Christie Agatha

Info:

[ discernement ] [ inconditionnalité ]

 

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littérature

Toute la littérature théorique sur le roman policier d'énigme est dominée par un principe de dissimulation qu'Agatha Christie semble avoir porté à sa perfection, principe que se décompose en deux règles. La première est que la vérité doit être cachée pendant l'ensemble du livre. Le roman policier n'a de sens que si la vérité n'est pas révélée avant la fin du texte et, si possible, avant les toutes dernières pages. Cette dimension ludique est essentielle à la constitution même de l'aveuglement, qui prend d'autant plus de force qu'il est tardivement dissipé.

Second aspect du même principe : tout en étant cachée, cette vérité doit être accessible au lecteur, et même placée en évidence.

Auteur: Bayard Pierre

Info: Qui a tué Roger Ackroyd ?

[ polar ] [ recette ]

 

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femmes-hommes

[...] Entre vingt et quarante ans, les femmes sont absorbées par leur corps, et c’est bien normal. Leurs soucis tournent autour des enfants, des époux, des amants, bref des rapports personnels. Ou alors elles subliment tout cela, et se lancent dans une carrière en un élan tout féminin. Mais le second épanouissement naturel est celui de l’esprit, de l’intelligence, et il se produit au moment de la maturité. Les femmes prennent un intérêt plus grand à tout ce qui n’est pas personnel, l’âge venant. Les intérêts des hommes se réduisent, ceux des femmes s’étendent. Un homme arrivé à la soixantaine se répète, en général, comme un disque, tandis qu’une femme, si elle a la moindre personnalité, devient au même âge quelqu’un d’intéressant.

Auteur: Christie Agatha

Info: Ainsi vont les filles

[ femmes-par-femmes ]

 

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femmes-par-femme

[...] il m’était difficile de contredire un homme venant de perdre une épouse bien-aimée et de lui jeter à la face que cette femme n’était qu’une vulgaire menteuse et qu’elle avait failli le faire devenir fou d’inquiétude pour satisfaire ses instincts de comédienne. Il serait en effet imprudent de révéler à un mari la vérité sur les agissements de sa femme ! Le plus drôle, c’est que je n’hésiterais nullement à dénoncer les torts du mari devant une épouse. Une femme reconnaît volontiers qu’un homme est un propre à rien, un escroc, un opiomane, un coquin et même un ignoble pourceau sans que pour autant ces accusations diminuent d’un iota son affection envers le coupable. Les femmes sont des réalistes en diable !

Auteur: Christie Agatha

Info: Meurtre en Mésopotamie

[ hommes-par-femme ]

 

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langage

Toilette de mots !

Les versions françaises d’Agatha Christie vont être révisées pour supprimer les termes offensants ou racistes

Les traductions françaises de l’œuvre d’Agatha Christie s’alignent ainsi sur les autres éditions internationales, selon les éditions du Masque. Au cours de l’hiver, un comité de lecture britannique a réécrit certains passages d’Hercule Poirot et de Miss Marple.

Les éditions du Masque ont annoncé que les traductions françaises d’Agatha Christie allaient faire l’objet de "révisions", notamment la suppression de termes jugés offensants sur le physique ou l’origine de personnages, "s’alignant ainsi sur les autres éditions internationales".

"Les traductions françaises de l’œuvre d’Agatha Christie font l’objet de révisions habituelles et intègrent au fil des années les corrections demandées par Agatha Christie Limited (la société qui gère l’œuvre de l’autrice, ndlr), s’alignant ainsi sur les autres éditions internationales", a précisé lundi l’éditeur, qui fait partie du groupe Hachette.

Fin mars, le quotidien britannique "The Telegraph" avait rapporté que plusieurs passages des romans racontant les enquêtes d’Hercule Poirot et Miss Marple, initialement publiés entre 1920 et 1976, avaient été récrits après examen par un comité de lecture.

Auteur: Internet

Info: journal Libération, 18 avril 2023

[ censure douce ] [ lissage sémantique ] [ wokisme ]

 

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biologie

La découverte d'une interaction entre les quatre hèmes a rendu évident le fait qu'ils devaient se toucher, mais en science, ce qui est évident n'est pas nécessairement vrai. Lorsque la structure de l'hémoglobine fut finalement été résolue, on a découvert que les hèmes se trouvaient dans des poches isolées à la surface des sous-unités. Sans contact entre eux, comment l'un d'entre eux pourrait-il savoir si les autres se sont combinés à l'oxygène ? Et comment un ensemble aussi hétérogène d'agents chimiques que les protons, les ions chlorure, le dioxyde de carbone et le diphosphoglycérate pouvait-il influencer la courbe d'équilibre de l'oxygène de la même manière ? Il ne semblait pas plausible que l'un d'entre eux puisse se lier directement aux hèmes ou qu'ils puissent tous se lier à un autre site commun, mais là encore, il s'est avéré que nous nous trompions. Pour ajouter au mystère, aucun de ces agents n'affectait l'équilibre en oxygène de la myoglobine ou de sous-unités isolées d'hémoglobine. Nous savons maintenant que tous les effets coopératifs disparaissent si la molécule d'hémoglobine est simplement divisée en deux, mais cet indice vital nous a échappé. Comme Agatha Christie, la nature a gardé cet indice jusqu'à la fin pour rendre l'histoire plus excitante. En science, il y a deux façons de sortir d'une impasse : expérimenter ou réfléchir. Par tempérament, peut-être, j'expérimente, alors que Jacques Monod pense.

Auteur: Perutz Max Ferdinand

Info: In l'essai "Le deuxième secret de la vie", recueilli dans I Wish I'd Made You Angry Earlier (1998), 263-5.

[ métalloprotéines ] [ macromolécules ] [ théorie-pratique ]

 

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bizarreries

Pour en revenir à l'abondance des manies chez les créateurs et pour n'en citer que quelques unes en guise d'apéritif, je dirai que Kafka, en plus de mâcher 32 fois chaque bouchée, faisait de la gymnastique nu devant la fenêtre ouverte par un froid de canard ; Socrate portait toujours le même vêtement, marchait nu-pieds et dansait tout seul ; Proust s'est mis un jour au lit et n'en est plus sorti (et Valle-Inclan et l'Uruguayen Juan Carlos Onetti, parmi bien d'autres, ont fait la même chose) ; Agatha Christie écrivait dans sa baignoire; Rousseau était masochiste et exhibitionniste; Freud avait peur des trains; Hitchcock, des oeufs; Napoléon, des chats; et la jeune écrivaien colombienne Amalia Andrade, chez qui j'ai pris les trois derniers exemples de phobie, avait peur dans son enfance que des arbres lui poussent à l'intérieur du corps si elle avalait une graine. (...) Rudyard Kipling ne pouvait écrire qu'avec de l'encre très noire, au point que le noir bleuté lui semblait déjà une " aberration". Schiller mettait des pommes gâtées dans le tiroir de son bureau, car il avait besoin de humer la nourriture pour écrire*. Dans ses vieux jours Isaak Dinesen mangeait uniquement des huitres et du raisin blanc avec quelques asperges. Stefan Zweig collectionnait compulsivement les autographe et envoyait trois ou quatre lettres par jour à ses personnalités favorites pour leur demander une signature...

Auteur: Montero Rosa

Info: Le danger de ne pas être folle, pp 15,16. *Amélie Nothomb a une marotte similaire (note de mg)

[ insolites ] [ écrivains ]

 

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fille-père

Il nous a fait balancer doucement, le regard fixé sur le ciel d’orage. Il y avait des choses chez mon père qui commençaient à s’écailler, comme une peinture qui vieillit. Quand je lisais les livres que j’empruntais à la bibliothèque, je pensais que mon père – comme les histoires que ces livres racontaient – était né de l’esprit de ces écrivains. Je croyais que le Grand Créateur avait expédié ces écrivains sur la lune, portés par les ailes d’oiseaux-tonnerre, et leur avait dit de m’écrire un père. Des écrivains tels que Mary Shelley, qui avait donné à papa une compréhension gothique pour la tendresse de tous les monstres.

Agatha Christie avait créé le mystère qui l'habitait et Edgar Allan Poe avait conçu pour lui l’obscurité de manière à ce qu’il puisse s’élever jusqu’au vol du corbeau. William Shakespeare avait écrit pour lui un coeur de Roméo en même temps que Susan Fenimore Cooper lui avait imaginé une proximité avec la nature et le désir d’un paradis à retrouver.

Emily Dickinson avait partagé sa sensibilité de poète pour que mon père sache que le texte le plus sacré se lit dans la façon dont les êtres humains riment ou ne riment pas les uns avec les autres, laissant à John Steinbeck le soin de mettre dans le coeur de mon père une boussole afin qu’il puisse toujours vérifier qu’il était bien à l’est d’Éden et légèrement au sud du paradis. Pour ne pas être en reste, Sophia Alice Callahan s’était assurée qu’une partie de papa resterait à jamais un enfant de la forêt, tandis que Louisa May Alcott avait mis en mots toute la loyauté et l’espoir que contenait son âme. C’était Theodore Dreiser qu’était revenue la tâche d’écrire pour mon père la tragédie américaine qui devait être son destin, non sans que Shirley Jackson l’ait d’abord préparé aux horreurs qui devaient accompagner cette tragédie.

Auteur: McDaniel Tiffany

Info: Betty

[ composite ]

 

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littérature

Les 19 lois du bon polar, selon Borges.

Le grand écrivain argentin s'était amusé à codifier la narration policière. En partenariat avec le magazine BoOks.

Dans son article "Lois de la narration policière" (1), de 1933, Jorge Luis Borges propose quelques règles élémentaires, ou "commandements", pour le récit policier classique. Ces conventions, comme il le remarque avec esprit, "ne visent pas à éluder les difficultés, mais plutôt à les imposer". Borges énonce explicitement les six règles suivantes:

1 : Une limite facultative de ses personnages

Les personnages doivent être peu nombreux et bien définis, de façon que lecteur puisse les connaître et les distinguer. "La téméraire infraction à cette loi est responsable de la confusion et de l'ennui fastidieux de tous les films policiers."

2 : Exposition de toutes les données du problème

On doit mettre toutes les cartes sur la table, sans as sortis de la manche à la dernière minute. À partir d'un certain point, le lecteur devra disposer de toutes les pistes nécessaires pour trouver lui-même la solution. "L'infraction répétée de cette deuxième loi est le défaut préféré de Conan Doyle. Il s'agit parfois de quelques imperceptibles particules de cendre, ramassées dans le dos du lecteur par ce privilégié d'Holmes. Parfois l'escamotage est plus grave. Il s'agit du coupable, terriblement démasqué au dernier moment, qui s'avère être un inconnu : une insipide et maladroite interpolation."

3 : Avare économie de moyens

Qu'un personnage se dédouble, on peut l'admettre, dit Borges. Mais que deux individus en contrefassent un troisième pour lui conférer un don d'ubiquité "court le risque incontestable de paraître une surcharge". La solution doit être la plus claire et nette possible, sans lourdeurs techniques, artifices improbables ou déploiements accablants de mouvements et de détails. La solution doit aussi pouvoir se déduire des ressources déjà mises en jeu, comme réorganisation des éléments connus.

4 : Primauté du comment sur le qui

Le véritable mystère d'un bon whodunit(2) n'est pas le nom de celui qui a commis le crime, mais ce que sera le nouvel ordre logique, plus subtil, la vérité souterraine qui éclaire le récit d'un nouveau jour.

5 : Pudeur de la mort

À la différence des thrillers du cinéma contemporain, où l'imagination cherche à concevoir des crimes de plus en plus sanglants et des cadavres de plus en plus choquants, dans le récit policier classique, la mort est comme une ouverture au jeu d'échecs et n'a pas en soi beaucoup d'importance. "Les pompes de la mort n'ont pas leur place dans la narration policière dont les muses glaciales sont l'hygiène, l'imposture et l'ordre", écrit Borges.

On trouve une transgression exemplaire de cette loi dans "le Noël d'Hercule Poirot"(3), d'Agatha Christie. Ce roman, comme on le comprend dans la dédicace, est conçu comme un défi, son beau-frère lui ayant reproché d'éviter le sang dans ses crimes. "Vous y déploriez que mes meurtres deviennent trop épurés - exsangues, pour parler net. Vous y réclamiez un de ces bons vieux meurtres bien saignants. Un meurtre qui, sans l'ombre d'un doute, en soit bien un." Le plus remarquable est peut-être que, dans ce crime esthétiquement opposé aux précédents, Agatha Christie reste elle-même: le cri terrifiant, la scène brutale du meurtre, le sang abondamment répandu sont des clés de l'élucidation finale.

6 : Nécessité et merveilleux dans la solution

"La première implique que le problème soit un problème précis susceptible d'une seule réponse, l'autre requiert que cette réponse puisse émerveiller le lecteur." Cette sensation de merveilleux, précise Borges, ne doit pas faire appel au surnaturel. La solution d'une énigme policière doit être comme la démonstration d'un théorème complexe: difficile à imaginer à partir des prémisses, mais dont la nécessité s'impose par la rigueur d'une explication parfaitement logique. En plus de ces six axiomes déclarés, Borges en postule indirectement certains autres dans son article: Le véritable récit policier repousse - ai-je besoin de le préciser - avec le même dédain les risques physiques et la justice distributive. Il fait abstraction, avec sérénité, des cachots, des escaliers secrets, des remords, de la voltige, des barbes postiches, de l'escrime, des chauves-souris, de Charles Baudelaire et même du hasard. Il découle de ce passage trois règles supplémentaires :

7 : Dédain des risques physiques

Dans ce dédain des risques physiques réside l'une des principales différences avec le roman noir ou le thriller cinématographique. Borges observe que, dans les premiers exemples du genre, "l'histoire se limite à la discussion et à la résolution abstraite d'un crime, parfois à cent lieues de l'événement ou bien éloignée dans le temps". Isidro Parodi, le détective qu'il imagina avec Bioy Casares, résout les énigmes alors qu'il est enfermé dans une prison. Dans les aventures de Sherlock Holmes comme dans celles d'Hercule Poirot, la vie du détective est parfois en danger imminent, mais ces risques sont éphémères et ne constituent jamais la matière narrative principale, sauf peut-être dans leurs dernières enquêtes. C. Auguste Dupin, la vieille Miss Marple, le père Brown et Perry Mason(4) sont tous des exemples de détectives à l'abri des risques physiques.

8 : Renoncement aux considérations ou jugements moraux

Sur la question de la "justice distributive", "la Huella del crimen" de Raúl Waleis, premier roman policier argentin (il date de 1877 et a été récemment réédité - (5)), avait l'intention déclarée de favoriser une nouvelle législation, à travers l'exposé d'une affaire mettant en évidence une faille dans la justice: "Le droit est la source où je puiserai mes arguments. Les mauvaises lois doivent être dénoncées pour les effets que produit leur application. Je crée le drame auquel j'applique la loi en vigueur. Ses conséquences fatales prouveront la nécessité de la réformer. " Les enquêtes de Perry Mason et les récits de Chesterton témoignaient peut-être d'un certain attachement aux canons de la justice et aux considérations morales sur les innocents et les coupables.

9 : Rejet du hasard

À cet égard, citons les intéressantes réflexions de Patricia Highsmith, qui ne craint pas de mettre à l'épreuve la crédulité du lecteur: " J'aime beaucoup qu'il y ait dans l'intrigue des coïncidences et des situations presque (mais pas entièrement) incroyables comme par exemple le plan audacieux qu'un homme propose à un autre qu'il connaît depuis deux heures à peine dans "L'Inconnu du Nord-Express". [...] L'idéal est que les événements prennent une tournure inattendue, en gardant une certaine consonance avec le caractère des personnages. La crédulité du lecteur, son sens de la logique - qui est très élastique -, peut être étirée au maximum, mais il ne faut pas la rompre " ("L'Art du suspense" (6), chap. 5). Le hasard peut survenir dans la narration comme ellipse, tout comme, dans les comédies, on accepte qu'une porte s'ouvre pour laisser sortir un personnage et qu'un autre apparaisse aussitôt. Ou comme le catalyseur d'une circonstance propice à l'accomplissement d'un crime quand le mobile n'est pas très affirmé. C'est ce qui arrive, par exemple, avec l'apparition d'un parent éloigné, dans "Paiement différé" (7) de Cecil Scott Forester. En revanche, le hasard ne devrait pas jouer un rôle décisif dans l'explication finale. À noter que, dans la nouvelle de Borges "la Mort et la Boussole", c'est un accident fortuit, une mort inattendue, qui donne à l'assassin l'idée de la série de meurtres qu'il va commettre. D'autres règles peuvent encore être tirées de l'article de Borges :

10 : Méfiance ou rejet des procédures de l'investigation policière

"Les démarches quotidiennes des investigations policières - empreintes digitales, torture et délation - sembleraient ici des solécismes." L'enquête policière appartient à l'ordre prosaïque des faits et du bon sens. C'est ce qui établit la différence entre le plan de l'enquête officielle de la justice et l'enquête parallèle, de l'ordre de la fiction - à l'écart des critères et des paramètres usuels -, que mène le détective. Dans "la Mort et la Boussole", ironiquement, le policier et le détective ont tous deux raison, mais chacun à sa manière.

11 : L'assassin doit appartenir à la distribution initiale des personnages

"Dans les récits honnêtes, écrit Borges, le criminel est l'une des personnes qui figurent dès le début."

12 : La solution doit éviter le recours au surnaturel, qui ne peut être invoqué que comme une conjecture transitoire à écarter

La réponse doit émerveiller le lecteur "sans faire appel bien sûr au surnaturel, dont l'usage dans ce genre de fiction est un alanguissement et une félonie. Chesterton réalise toujours le tour de force de proposer une explication surnaturelle et de la remplacer ensuite, sans perdre au change, par une autre, toute naturelle."

13 : La solution ne peut comporter des éléments inconnus du lecteur

"Sont également prohibés [...] les élixirs d'origine inconnue." Voici donc les règles énoncées par Borges dans son article. Nous pourrions en rajouter quelques autres :

14 : Omission de la vie privée du détective et de ses aventures sentimentales ou sexuelles

Règle enfreinte dans tous les films policiers, où immanquablement l'enquêteur divorce, mène une existence malheureuse et a une liaison avec l'actrice principale.

15 : Dans le cas d'un double ou triple dénouement, il doit y avoir une progression, chaque fin surpassant la précédente en ingéniosité et en rigueur

Comme dans la règle des trois adjectifs que mentionne Proust à propos des salons de la bonne société française, le troisième est tenu de surpasser les deux premiers.

16 : Le meurtrier ne peut être le majordome (à moins d'être dans un congrès de majordomes)

L'assassin ne peut être un personnage trop secondaire, maintenu en permanence caché, comme une carte que l'on garde pour la fin.

17 : L'assassin ne peut être l'immigré ou le fanatique religieux ou le suspect d'extrémisme politique

Règle toujours soigneusement respectée par Agatha Christie. Les mobiles du meurtre doivent être intimes et le meurtrier doit appartenir au noyau dur de l'histoire. Cette règle est négligée de manière particulièrement décevante dans "Meurtriers sans visage", de Henning Mankell.

18 : L'assassin ne doit pas être le narrateur

Règle admirablement transgressée par Agatha Christie dans "le Meurtre de Roger Ackroyd" et, de manière plus prévisible, par Tchekhov dans "la Confession".

19 : L'assassin ne doit pas être l'enquêteur

Règle non respectée par Agatha Christie dans "le Noël d'Hercule Poirot" et par Juan José Saer dans "l'Enquête". Pourrait-on encore allonger cette liste ? Assurément. Mais cela créerait peut-être une fausse illusion, l'illusion que le genre peut être circonscrit et réduit à un formalisme d'axiomes, à une liste de règles et de procédés. Une illusion symétrique et tout aussi erronée - bien que prisée dans les tables rondes, car elle permet la pose iconoclaste et les métaphores guerrières - veut que le genre doit être dynamité, qu'il faut faire voler en éclats toutes les règles, que les lois sont faites pour être violées. Quiconque s'y est essayé sait en tout cas qu'il est difficile, sinon impossible, de se défaire de toutes à la fois, et qu'il y a dans le genre policier une tension extraordinaire entre ce qui a déjà été dit, entre la rhétorique accumulée dans des milliers de romans, et ce qui reste encore à dire, à la limite des règles. Les lois sont, en ce sens, comme une barrière que l'astuce et la créativité doivent franchir. Dans une des très rares occasions où Borges conçoit un projet de roman (dans l'article "è vero, ma non troppo", paru en 1938 dans la revue "El Hogar") ce n'est pas un hasard s'il choisit, entre tous les genres littéraires, le roman policier. Le sien serait, dit-il, "un peu hétérodoxe". Et il souligne que c'est là un point important, car "le genre policier, comme tous les genres, vit de l'incessante et délicate infraction à ses lois". Oui, la délicate infraction à ses lois.

Auteur: Martinez Guillermo

Info: Texte paru dans le quotidien argentin La Nación, le 15 août 2009, traduit de l'espagnol par François Gaudry

[ recettes ] [ écriture ]

 

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