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femmes-hommes
Je ne coucherai pas avec cette femme parce que je suis marié, ou parce qu'elle l'est, mais personne ne peut exiger que je la chasse de ma pensée. Elle me préoccupe. Elle tient de la place en moi. Femme, si tu te mets en travers de mes rêveries, malheur à nous! Laisse-les plutôt vivre de leurs petits riens, puis mourir. J'ai plus de disposition à être saint que coureur de femmes. Ma vie, le sérieux de mon âme, mes ambitions, mes idées, tout me rapproche du saint; mais je sens bien qu'il faudrait un miracle pour que je le devienne. Je suis à la merci d'une grue, et cela me fait peur.
Auteur:
Renard Jules
Années: 1864 - 1910
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Journal, 1897 p.304.
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hommes-par-hommes
]
[
faible
]
[
impulsif
]
érotisme
Rêve. Dans un dortoir. Moi, dans un lit, elle, dans le lit voisin. Je lui dis : "Venez donc !" Elle vient. Je la serre d'abord contre moi et je la sens sous sa chemise. Puis, j'ose descendre la main, la remonter partout, sur la peau douce, sur les seins durs, et je couvre de baisers son visage. Comme, un instant, je détache ma bouche, je vois, au pied du lit, un pion qui nous regarde, sévère, désolé. Elle se sauve dans son lit. Je me cache sous mes draps. C'est fini.
Ce matin, je me réveille dans une gratitude légère, frissonnant comme un arbre qui a passé la nuit tout inondé de lune.
Auteur:
Renard Jules
Années: 1864 - 1910
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain
Continent – Pays: Europe - France
Info:
journal 15 février 1902
[
songe
]
[
littérature
]
perdu
Croire au village, c'est donner une limite à sa vie ; c'est lui croire un sens, et elle n'en a pas. C'est un peu sot de s'imaginer que nous avons une raison d'être là plutôt qu'ailleurs. Continuer nos pères, pour quoi faire ? Ils ne savaient pas. La feuille a une attache qui lui suffit. Le cerveau est nomade. Pas de petite patrie. Une fuite résignée. Être n'importe où, ne jamais consentir à se fixer comme si un point dans l'univers nous était réservé. N'ayons pas d'orgueil ! Au premier éclair de lucidité nous verrions que nous sommes dupes, et nous serions pleins de pitié pour nous-mêmes. Livrons-nous à l'universelle loi d'éparpillement. Ne pas être un homme qui regarde son village avec une loupe. Rappelons-nous que ce monde n'a aucun sens.
Auteur:
Renard Jules
Années: 1864 - 1910
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Journal, Robert Laffont, Bouquins 1990 <3 novembre 1906 p.854>
rigoler
Il ne faut pas rire tant qu'on n'est qu'à l'extérieur des choses, mais il faut d'abord y entrer. Il faut rire du milieu des choses. Plus clairement, je ne ris pas de toute politique, car il peut en être de belle que j'ignore, mais je ris des hommes politiques que je connais, et de la politique qu'ils font sous mes yeux. Que le rire soit, non pas frivole, mais sérieux et intérieur, et d'une philosophie consciente ! On n'a le droit de rire des larmes que si on a pleuré. Le ridicule n'existe que par moments, mais rien n'est tout à fait ni toujours ridicule. Il ne faut rire que des belles choses qu'on peut aimer. Le banal ne fait pas rire. Avant que de rire des grands hommes, il faut savoir les aimer de toute son âme. Le rire est inattaquable puisqu'il rit de lui-même, mais il meurt tout seul au milieu des figures graves et pensives. Renan a dit : " Les rieurs ne régneront jamais." Il est vrai qu'ils se moquent de régner.
Auteur:
Renard Jules
Années: 1864 - 1910
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Journal, 8 avril 1896 p.259
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]
cauchemar
Ma mère, dont je ne parle qu'avec terreur, me mettait en feu.
Et ce feu est resté dans mes veines. Le jour, il dort, mais, la nuit, il s'éveille, et j'ai des rêves effroyables. En présence de M. Lepic qui lit son journal et ne nous regarde même pas, je prends ma mère qui s'offre et je rentre dans ce sein d'où je suis sorti. Ma tête disparaît dans sa bouche. C'est une jouissance infernale. Quel réveil douloureux, demain, et comme toute la journée je serai triste ! Aussitôt après, nous redevenons ennemis. C'est maintenant moi le plus fort. De ces bras dont je l'enlaçais passionnément, je la jette à terre, l'écrase ; je la piétine, et je lui broie la figure sur les carreaux de la cuisine.
Mon père inattentif continue de lire son journal.
Je jure que, si je savais que cette nuit encore je ferai ce rêve, au lieu de me coucher et de m'endormir je m'enfuirais de ma maison. Je marcherais jusqu'à l'aurore, et je ne tomberais pas de fatigue, car la peur me tiendrait debout, tout suant et tout courant.
Auteur:
Renard Jules
Années: 1864 - 1910
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain
Continent – Pays: Europe - France
Info:
journal 18 oct 1896
[
angoisse
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[
littérature
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