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machiavélisme
Par exemple il est utile que l'on sache que nous ne massacrons pas les prisonniers, parce que nous cultivons ainsi dans nos ennemis l'idée qu'ils peuvent se rendre pour sauver leur vie. Mais il serait utile de faire croire que l'ennemi massacre les prisonniers, car nos compagnies encerclées vendraient alors chèrement leur vie, ce que nous devons souhaiter. Et puisque vous tuez pour la patrie, je ne vois pas par quel scrupule vous rougiriez de mentir pour la patrie." Celui qui n'a pas conduit ses pensées jusque-là, je le soupçonne d'appeler pensée ce qui lui plaît. La guerre met l'homme tout nu ; il revient péniblement aux pensées d'Ésope. Socrate fut condamné très exactement parce qu'il refusait de soumettre aussi ses pensées au pouvoir. Nous n'avons peut-être pas avancé du tout depuis Socrate. Ne pas craindre, rester sobre, ne rien croire, trois ressources contre le tyran. Quelques centaines d'hommes ainsi disposés feraient un esprit public, et suffisant. Les maux humains comme guerre, abus de pouvoir, absurde concentration de richesse, ne sont possibles que par l'incroyable aveuglement de ceux qui passent pour instruits. Il s'agit de former son jugement par un massacre de pensées. Il n'y a pas d'autre sagesse.
Auteur:
Alain
Années: 1907 - 1994
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: H
Profession et précisions: indianiste et musicologue
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Souvenirs de guerre, Les Passions et la Sagesse, la Pléiade, nrf Gallimard 1960<p.456>
roman
Peu à peu, Fédor Mikhaïlovitch consentit à nous parler de sa vie en Sibérie et des mœurs des réprouvés, ses compagnons de bagne. La plupart de ces récits furent inclus ensuite dans les Souvenirs de la maison morte. Ce livre, d’ailleurs, parut dans des circonstances opportunes.
L’esprit de tolérance soufflait sur le pays et pénétrait jusqu’à la censure. Des ouvrages virent le jour dont, peu de temps avant, la publication paraissait impensable. Certes, la censure fut quelque peu troublée par ce livre sans précédent, tout entier consacré à illustrer des vies de forçats, par le fond noir des récits dont les héros étaient d’effroyables criminels et enfin par le fait que l’auteur lui-même était un ancien prisonnier politique, à peine revenu à la vie normale. Cependant, rien ne put détourner Dostoïevski de rapporter exactement ce qu’il avait connu. Aussi les Souvenirs de la maison morte bouleversèrent-ils l’opinion ; leur auteur apparut comme un autre Dante. L’enfer où il était descendu fut d’autant plus terrifiant pour le public que, loin d’être le fruit de l’imagination du poète, il appartenait incontestablement au monde de la réalité. Cependant, sur les instances de la censure, Dostoïevski supprima l’épisode des Polonais déportés et des détenus politiques.
Auteur:
Milioukov Alexandre
Années: 1816-1897
Epoque – Courant religieux: Récent et libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: Écrivain, critique littéraire, journaliste
Continent – Pays: Europe-Russie
Info:
"Dostoïevski vivant", trad. du russe par Raïssa Tarr, éditions Gallimard, 1972, page 67
[
contexte
]
[
réception
]
[
circonstances
]
beauté
Les choses tristes, douloureuses, plus belles pour l'esprit, y trouvant plus de prolongements, que les choses gaies, heureuses. Le mot soir plus beau que le mot matin, le mot nuit que le mot jour, le mot automne que le mot été, le mot adieu que le mot bonjour, le malheur plus beau que le bonheur, la solitude plus belle que la famille, la société, le groupement, la mélancolie plus belle que la gaieté, la mort que la naissance. À talent égal, l'échec plus beau que le succès. Le grand talent restant ignoré plus beau que l'auteur à grands tirages, adoré du public et célébré chaque jour. Un écrivain de grand talent mourant dans la pauvreté plus beau que l'écrivain mourant millionnaire. L'homme, la femme, qui ont aimé, ont été aimés, finissant leur vie dans une chambre au dernier étage, n'ayant pour fortune et pour compagnie que leurs souvenirs, plus beau que le grand-père entouré de ses petits-enfants et que la douairière encore fêtée dans son aisance. D'où cela vient-il, qui se trouve chez chacun de nous à des degrés différents ? Y a-t-il au fond de nous, plus ou moins, un désenchantement, une mélancolie qui se satisfont là, - et qu'il faut détester et rejeter comme un poison.
Auteur:
Léautaud Paul
Années: 1872 - 1956
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Propos d'un jour/Oeuvres/Mercure de France 1988 <p.338>
camouflage
Beaucoup pensent que le numérique a introduit le faux dans les images, puisque tout est modifiable à la palette graphique. La manipulation remonte aux débuts de la photographie au XIXe siècle : on altérait la courbe du visage des actrices, on effaçait le révolutionnaire russe tombé en disgrâce. Dès qu’il y a un intermédiaire entre le sujet et l’observateur, il y a tromperie. Non, ce que le numérique a modifié, ce n’est pas le moins (moins de vrai, moins de réalisme), mais le plus. À commencer par un ajout d’informations. Il est devenu possible d’inscrire la date, l’heure, l’ouverture, la vitesse d’obturation de l’appareil, l’ISO et le lieu, de manière automatique.
Chacun peut alors trier ses souvenirs de vacances selon ses propres critères, sans se préoccuper du sujet. Automatique.
Toutefois, dans la masse de bits composant la matière même de l’image, certains ont découvert que l’on pouvait ajouter des messages – ils ont puisé dans l’art ancien de la dissimulation, la stéganographie. Je suis capable de détecter ce procédé grâce à des algorithmes et de chercher si on a modifié le codage des pixels. Invisible à l’œil nu, mais mon cerveau a peut-être enregistré la perturbation, et mon état en serait le résultat.
Auteur:
Paquet Olivier
Années: 1973 -
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain de SF, docteur en sciences politiques
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Composite
[
image subliminale
]
tutelle
Le gevulot fonctionne en générant un arbre composé de paires de codes publics/privés. Une paire apparaît dès que l'utilisateur enregistre un nouveau souvenir pour lequel il veut spécifier des droits d'accès, ladite paire étant également dépendante du nœud supérieur. Théoriquement, seul l'individu en question peut opérer à la racine de l'arbre.
Sauf que toutes les racines ont l'air d'être reliées à une autre paire, un genre de racine maître. Ceux qui la possèdent peuvent accéder à toutes les exomémoires de l'Oubliette et les réécrire à l'envi. Pour les citoyens en phase de Silence, cela veut dire que leur esprit est totalement accessible. C'est ce qui s'est passé pour Unruh. Les cryptarchs ont sans doute développé une sorte de système automatisé qui modifie tous les Silencieux.
Potentiellement, ils peuvent lire et modifier les souvenirs de tous les gens passés au moins une fois par le Silence. Comme cela représente trop de données à gérer pour un nombre réduit de comploteurs, je suppose qu'ils disposent de routines de gestion adaptées. Néanmoins, vu les changements restreints constatés chez Unruh, il serait logique de penser que leurs ressources de calcul sont limitées. En conclusion, l'Oubliette n'a rien d'une merveille d'oubli et de vie privée : c'est un panoptique.
Auteur:
Rajaniemi Hannu
Années: 1978 -
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain de SF
Continent – Pays: Europe - Finlande
Info:
Le voleur quantique. *qui permet de voir sans être vu
[
surveillance
]
[
contrôle
]
vertes années
C’est vrai, je n’ai jamais repensé à mon enfance. À présent cependant, elle se trouve soudain à nouveau devant moi, et je suis à nouveau un enfant. Mon père est là à nouveau, son pas lourd résonne, comme jadis, revenant à la maison, il apporte la sécurité, la tranquillité et la protection avec lui. Ma mère est là à nouveau ; elle s’empresse laborieusement à travers les chambres, sans cesse en activité, sans cesse à se soucier de ses enfants et de sa maison. Et dans la cuisine les domestiques travaillent, ils nettoient et rangent et cuisinent les merveilleux gâteaux de fête. L’odeur du gâteau remplit à nouveau la maison, cette odeur, dans laquelle toute l’enfance est celée. Je roule à nouveau, comme jadis, dans les rues hivernales, je me plonge profondément dans les sièges mous de la voiture, autour de moi règnent le tourbillon des flocons de neige, le tintement des grelots et le bruit de l’agitation de la rue. À ma droite et à ma gauche cependant se trouvent mes parents qui m’entourent de leur amour et de leur protection. Tout cela est là à nouveau, mais ce ne sont pas que des souvenirs isolés ou des images, au contraire ils forment un tout, une seule sensation, une seule odeur…
Auteur:
Flinker Robert
Années: 1906 - 1945
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: F
Profession et précisions: écrivain, neurologue et poète de langue allemande
Continent – Pays: Europe - Roumanie
Info:
Le Voyageur
[
souvenir
]
[
ambiance
]
évasion
Tous les cinq rangs, marchait un soldat soviétique armé d'une mitraillette. Le sort voulait que l'un d'entre eux se tint à un mètre de moi. Dès que j'ai tourné la tête pour mieux l'observer et apprécier mes chances, immédiatement il a saisi mon regard et m'a foudroyé du sien. Au même instant, quatre rangs devant moi, se produisit un léger mouvement. Mon cœur se mit à battre plus fort. Retenant mon souffle, j'observais ce qui se passait. L'homme qui marchait à l'extérieur du rang s'est glissé hors de l'alignement et a sauté dans la foule dans le dos du gardien.Celui-ci à continué à marcher sans s'être aperçu de rien. Le gardien qui marchait à côté de moi n'a rien remarqué non plus parce qu'il observait attentivement "ses prisonniers". La foule* a immédiatement absorbé l'audacieux et la place vide fut aussitôt comblée par son voisin de droite. Tous les autres prisonniers se sont décalés d'une place et comme les rangs n'étaient pas très réguliers, , cette disparition fut ainsi camouflée.
Toute l'affaire n'avait duré qu'un bref instant. J'ai senti qu'un changement indéfinissable s'était produit dans l'attitude des prisonniers : un de leurs camarades venait de réussir à faire quelque chose de tout à fait différent et de bien plus sensé qu'eux tous jusqu'alors.
Auteur:
Karski Jan Kozielewski
Années: 1914 - 2000
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: H
Profession et précisions: résistant de la Seconde Guerre mondiale, ...
Continent – Pays: Europe - Pologne
Info:
Mon témoignage devant le monde - Souvenirs 1939 - 1943. Chapitre II - Prisonnier en Russie - Défaite de l'armée polonaise. *foule polonaise
[
espérance
]
[
modèle
]
suivi psychologique
Une psychothérapie est […] beaucoup moins longue, moins astreignante qu’une psychanalyse. Et surtout, le but est directement thérapeutique. On n’évoque que ce qui ne va pas actuellement pour le comprendre et sortir de la difficulté : on n’évoque pas tout ce qui vient à l’esprit. La psychothérapie vise plutôt les troubles conscients, la relation avec les proches, la réalité actuelle, et comment y faire face. Elle opère plus en surface et plus vite. Elle est souvent suffisante pour retrouver un équilibre viable, reprendre confiance, repartir du bon pied, sortir d’une période difficile dont on ne se serait pas sorti seul.
Dans une psychanalyse, le patient est sur le divan, il ne voit pas le psychanalyste qui reste silencieux. Il s’agit, pour le patient, de dire tout ce qu’il pense et ressent. L’expérience montre qu’à travers la relation imaginaire du psychanalysant avec le psychanalyste et les rêves dont il lui parle, il revit inconsciemment ses expériences passées en remontant son histoire. C’est comme une aventure au bout de laquelle on est moins fragile psychiquement, si je puis dire. Dans une psychanalyse, on évoque les souvenirs les plus anciens, ceux qu’on avait totalement oubliés. C’est une sorte de reviviscence de toute la vie – amour, haine, méfiance, confiance, etc. – autour de la relation imaginaire au psychanalyste.
Auteur:
Dolto Françoise
Années: 1908 - 1988
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: F
Profession et précisions: psychologue
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Dans "Lorsque l'enfant paraît", tome 2, éditions du Seuil, 1978, pages 191-192
[
différences
]
[
choisir
]
[
objectif
]
[
comparaison
]
autisme
Après viendra la peur
Qu’on m’ait vue sans armure
Au bord de la terreur,
Au cœur de la fêlure.
Quand cesseront les pleurs
Restera l’écorchure,
Un goût de déshonneur,
D’échec et de souillure.
Après viendra la peur
De n’avoir vu venir
La vague en sa fureur
Qui noie mes souvenirs
Et m’arrache des heures.
Dans vos yeux vais-je lire
La gêne ou la douceur,
La fuite ou le sourire ?
Après viendra la peur
De ma propre impuissance
Face au chaos rageur
Où j’implose en enfance.
Je sais mon impudeur
Même au fond de la transe,
Je sais votre stupeur
Devant sa fulgurance.
Après viendra la peur
D’avoir perdu mon corps
Dans l’absurde torpeur
D’un orage indolore
Où seuls restent les pleurs
Quand la mémoire se tord,
L’instant perd ses couleurs
Et l’émotion s’endort.
Après reviendra l’heure
De remettre l’armure,
De rajuster l’humeur,
De faire douce figure
Pour masquer la laideur
D’un instant de cassure.
Mais gravée dans mon cœur
Restera la brûlure.
Auteur:
Fazi Mélanie
Années: 1976 -
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: écrivaine de romans fantastiques et traductrice
Continent – Pays: Europe - France
Info:
sur son blog, 17 sept 2020. Avec ce texte : Inspiré par plusieurs événements qui pourraient être, quoique je n’en sois pas complètement sûre, ces crises autistiques que l’on nomme "meltdowns", sortes d’explosions face à une surcharge sensorielle ou émotionnelle impossible à gérer.
[
témoignage
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[
poème
]
animal domestique
Au-dessus de la terre, habitée par la pensée des hommes : un ciel clair, semé d'étoiles. La terre est très lumineuse. A l'endroit où la famille a laissé la maison, il n'y a rien. Des Âmes, peut-être ? et des souvenirs... Mais si, pourtant, le Vide s'écarte, le ciel apparaît admirable, d'une pureté divine. Puis la maison haute ! haute ! comme une cathédrale. Puis le jardin, avec une pelouse, comme un champ, et les allées, comme des routes de campagne.
Qui y a-t-il ? Il n'y a rien. Mais si, par terre, un peu au-dessus du sol, deux étoiles sont suspendues : Les yeux du chat qui regardent la maison. Le chat est là et pour lui, tout revit. Le chat se promène : c'est calme. Il va doucement, près d'un soupirail : il entre, les étoiles illuminent la cave, qui est toute blanche comme le couloir d'une abbaye. Le chat ronronne en marchant. Il est tranquille, rien n'est changé chez lui. Il ressaute sur la route de campagne et va se promener dans le champ. Le chat passe en revue : toute la Nuit. Aux fenêtres des maisons, des vitraux scintillent. Le chat se couche sur une marche de la maison. Devant lui le Vide revient. Ses yeux deviennent très grands, il voit dans le Néant !
Auteur:
Havet Mireille
Années: 1898 - 1932
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: F
Profession et précisions: poétesse
Continent – Pays: Europe - France - Suisse
Info:
La Maison dans l'oeil du chat
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poésie
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[
nuit
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