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lecture

Quand la vie pèse, les livres apaisent.

Auteur: Hecquet Sabine

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[ thérapie ] [ jeu de mots ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

jeux de mots

Excusez-moi, je suis un peu essoufflé ! Je viens de traverser une ville où tout le monde courait...Je ne peux pas vous dire laquelle... je l'ai traversée en courant. Lorsque j'y suis entré, je marchais normalement, mais quand j'ai vu que tout le monde courait... je me suis mis à courir comme tout le monde, sans raison !

A un moment je courais au coude à coude avec un monsieur...

Je lui dis : "Dites-moi... Pourquoi tous ces gens-là courent-ils comme des fous ? "

Il me dit : "Parce qu'ils le sont ! "

"Vous êtes dans une ville de fous ici... Vous n'êtes pas au courant ? "

"Si, si, des bruits ont couru ! "

"Ils courent toujours ! "

"Qu'est-ce qui fait courir tous ces fous ? "

"Tout ! Tout ! Il y en a qui courent au plus pressé. D'autres qui courent après les honneurs... Celui-ci court pour la gloire... Celui-là court à sa perte ! "

"Mais pourquoi courent-ils si vite ? "

"Pour gagner du temps !

"Comme le temps c'est de l'argent, plus ils courent vite, plus ils en gagnent ! "

"Mais où courent-ils ? "

"À la banque ! Le temps de déposer l'argent qu'ils ont gagné sur un compte courant... et ils repartent toujours courant, en gagner d'autre ! "

"Et le reste du temps ? "

"Ils courent faire leurs courses au marché ! "

"Pourquoi font-ils leurs courses en courant ? "

Il me dit : "Je vous l'ai dit... parce qu'ils sont fous ! "

"Ils pourraient tout aussi bien faire leur marché en marchant...tout en restant fous !"

"On voit bien que vous ne les connaissez pas ! D'abord le fou n'aime pas la marche... "

"Pourquoi ? "

"Parce qu'il la rate ! "

"Pourtant, j'en vois un qui marche !? "

" Oui, c'est un contestataire ! Il en avait assez de courir comme un fou. Alors il a organisé une marche de protestation ! "

"Il n'a pas l'air d'être suivi ? "

"Si, mais comme tous ceux qui le suivent courent, il est dépassé ! "

"Et vous, peut-on savoir ce que vous faites dans cette ville ? "

"Oui ! Moi j'expédie les affaires courantes.

Parce que même ici, les affaires ne marchent pas ! "

"Et où courez-vous là ? "

"Je cours à la banque ! "

"Ah !... Pour y déposer votre argent ? "

"Non ! Pour le retirer ! Moi je ne suis pas fou ! "

"Mais si vous n'êtes pas fou, pourquoi restez-vous dans une ville où tout le monde l'est ?

"Parce que j'y gagne un argent fou !... C'est moi le banquier !




Auteur: Devos Raymond

Info: Où courent-ils

[ sketch ] [ humour ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

canicule

Ils arrivèrent devant la Maison par une chaude journée d’août. Écrasée par le soleil, la rue était déserte. Une femme et un petit garçon. Ni les arbres malingres qui bordaient la chaussée ni les immeubles ne les protégeaient de leurs ombres. La chaleur montait du sol en une multitude de langues incandescentes ondulant sur le bleu vif du ciel. L’asphalte se déformait légèrement sous leurs pieds, si bien que les talons de la femme s’y imprimaient en laissant derrière eux une ligne de pointillés, comme les traces d’un étrange animal.

Auteur: Petrosyan Mariam

Info: La Maison dans laquelle

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste

fondu-enchainé

Aussi imperceptiblement que le chagrin

L’été s’en est allé —

Trop imperceptible enfin

Pour ressembler à quelque perfidie —

Une quiétude s’est distillée

Comme un demi-jour commencé de longtemps,

Ou la Nature qui aurait passé avec elle-même

Un après-midi retiré —

L’obscurité s’est ramassée plus tôt —

Le matin, étranger, a brillé —

Courtoise, pourtant déchirante grâce,

Comme invitée, mais qui s’en serait allée —

Et ainsi, sans une aile,

Ni l’aide d’une quille

Notre été, léger, a pris la fuite

Vers la beauté.

Auteur: Dickinson Emily

Info: Poésies complètes: Édition bilingue, Flammarion 2020

[ automne ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

inversions linguistiques

La traduction antonymique consiste, dans un énoncé donné, à remplacer chacun des mots importants (substantif, verbe, adjectif, adverbe) par un de ses antonymes possibles, c'est-à-dire son contraire.

Paul Valéry, plagiant l'Oulipo par anticipation, avait ainsi manipulé l'une des Pensées de Pascal."Le silence éternel de ces espaces infinis m'effraye" a donné naissance à : "Le vacarme intermittent de ces petits coins me rassure." De même, Georges Perec a traité la première phrase d' A la recherche du temps perdu, "Longtemps je me suis couché de bonne heure":

Une fois, l'autre fit la grasse matinée.

Auteur: Oulipo

Info: Abrégé de littérature potentielle, traductions antonymiques, p 29

[ ludique langage ] [ jeux de mots ]

 

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femmes-par-homme

Quelles affinités particulières lui paraissaient exister entre la lune et la femme ?

Son antiquité qui précède les générations telluriennes successives et qui leur survit : sa prédominance nocturne : sa dépendance satellitique : sa réflexion lumineuse : sa constance dans toutes ses phases, se levant et se couchant aux moments désignés, croissant et décroissant : l’invariabilité contrainte de son aspect : sa réponse indéterminée à l’interrogation inaffirmative : son pouvoir sur les eaux effluentes et refluentes : sa capacité à énamourer, à mortifier, à investir de beauté, à rendre fou, à inciter et à favoriser la délinquance : l’inscrutabilité tranquille de son visage : la terribilité de sa propinquité isolée dominante implacable resplendissante : ses présages de tempête et de calme : la stimulation de sa lumière, de son mouvement et de sa présence : l’admonition de ses cratères, de ses mers arides, de son silence : sa splendeur, quand elle est visible : son attraction, quand elle est invisible.

Auteur: Joyce James

Info: Ulysse

[ analogie ] [ astre de la nuit ]

 

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imagination

Tout est absurde. Celui-ci consacre sa vie à gagner de l’argent pour le mettre de côté, sans avoir seulement d’enfants à qui le laisser, ni le moindre espoir de voir quelque ciel réserver un sort transcendantal à sa fortune. Cet autre consacre tous ses efforts à se faire une réputation qui ne lui servira qu’une fois mort, mais il ne croit nullement à la survie qui lui permettrait de jouir de cette même réputation. Cet autre encore s’épuise à rechercher mille choses qu’en fait il n’apprécie nullement. Un autre, un peu plus loin (…)

Celui-ci lit pour savoir, inutilement. Cet autre jouit pour vivre, tout aussi inutilement.

Je me trouve dans un tram, et j’examine lentement, à mon habitude, tous les détails concrets des personnes qui se trouvent devant moi. Pour moi les détails sont des choses, des mots, des lettres. Cette robe que porte la jeune fille assise en face de moi, je la décompose en ses divers éléments : l’étoffe dont elle est faite et le travail qu’elle a coûté — puisque je la vois en tant que robe, et non pas comme simple étoffe ; la fine broderie qui borde le ras du cou se décompose à son tour : le galon de soie dont on l’a brodé, et le travail qu’a demandé cette broderie. Et immédiatement, comme dans un ouvrage primaire d’économie politique, se déploient sous mes yeux les usines et les activités diverses — l’usine où l’on a fabriqué le galon, d’un ton plus foncé, qui a servi à orner, de petites choses entortillées, l’endroit qui fait le tour du cou ; et je vois les ateliers dans les usines— machines, ouvriers, cousettes — mes yeux tournés vers le dedans pénètrent dans les bureaux, je vois les directeurs chercher un peu de calme, et je surveille, dans les registres, la comptabilisation de chaque chose ; mais je ne m’arrête pas là : je vois, au-delà, la vie familiale de ceux dont la vie quotidienne s’écoule dans ces usines, dans ces bureaux… Le monde entier se déroule sous mes yeux, du seul fait que j’ai devant moi, au-dessous d’un cou brun, qui par ailleurs supporte je ne sais quelle tête, une bordure, irrégulièrement régulière, d’un vert sombre sur le vert plus clair de la robe.

La vie sociale tout entière gît sous mon regard.

En outre, je devine les amours, les cachotteries et l’âme de tous ceux qui ont œuvré pour que la femme qui se trouve là, devant moi, dans un tram, porte, autour de son cou de mortelle, la sinueuse banalité d’un galon de soie vert sombre se détachant sur un tissu d’un vert plus clair.

J’ai le vertige. Les banquettes du tram, dont le siège est garni de paille aux brins alternativement plus fins et plus robustes, m’emportent vers des régions lointaines, se multiplient en industries, ouvriers et maisons d’ouvriers, existences, réalités — tout.

Je descends du tram, épuisé, somnambulique. J’ai vécu la vie tout entière.

Auteur: Pessoa Fernando (Alv. de Campos)

Info: Oeuvre poétique, NRF 2001

[ réalité support ] [ désenchantement ]

 

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femmes-par-homme

les femmes n’ont que faire de se montrer compréhensives, tout ce qu’elles désirent, c’est de vous faire partager leur rancune vengeresse envers ce qui les préoccupe le plus. par nature, les femmes sont des animaux dénués de raison, et si elles parviennent si souvent à asservir les mâles, c’est parce qu’elles focalisent à fond sur la cible et qu’elles profitent alors du moindre moment d’inattention.

Auteur: Bukowski Charles

Info: Journal souvenirs et poèmes, Ça commence lundi dernier, Grasset 2007..

[ . ]

 

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fuite en avant

La confiance dans la technologie comme solution ultime à tous les problèmes détourne notre attention du problème le plus fondamental - celui de la croissance dans un système fini - et nous empêche d'entreprendre des action effectives pour le résoudre. Il faudra alors réagir dans l’urgence, et ce sera beaucoup plus douloureux que si la société avait fait elle-même ses choix.  






Auteur: Rapport Meadows

Info: En 1972

[ imprévoyance ] [ écologie ]

 

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enfance

Je me souviens des chevaux

sous la lune

je me souviens que je leur donnais

du sucre

de blancs rectangles de sucre

qui ressemblaient à de la glace

et ils avaient des têtes qui ressemblaient à

des aigles

des têtes chauves qui auraient pu mordre mais qui

ne le faisaient pas.



Les chevaux étaient plus réels que

mon père

plus réels que Dieu

et ils auraient pu m’écraser les

pieds mais ils ne le faisaient pas

ils auraient pu faire toutes sortes d’horreurs

mais ils ne le faisaient pas.



J’avais presque cinq ans

mais je n’ai pas oublié ;

dieu qu’elles étaient fortes et douces

ces langues rouges baveuses

dégoulinant de leurs âmes.

Auteur: Bukowski Charles

Info: Les Jours s'en vont comme des chevaux sauvages dans les collines, Poche 2011

[ équidés ] [ poème ] [ homme-animal ]

 

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