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commerce
- Le fleuve s'appelle le Niger. Je ne connais pas son prénom.
- Et que faisiez-vous là-bas ? s'inquiète le gendarme-chef.
- Je leur racontais l'histoire de Louise.
- Pourquoi pas ? dit Louise, qui n'en croit rien.
- Et vous faisiez la quête après ? s'intéresse le gendarme-chef.
- Certainement, dit Brossard, et ils me donnaient ce qu'ils avaient de plus précieux : des boîtes de sardines vides et bien d'autres récipients du même genre. Vous ne me demandez pas ce que j'en faisais ?
- Si, répond la cantonade.
- Eh bien, dit Brossard, quand j'ai eu assez de boîtes vides, je les ai chargées sur mon âne et je me suis éloigné du fleuve. Or, plus je quittais le fleuve, plus je rencontrais des populations dépourvues de boîtes de conserves vides. J'échangeais donc les miennes contre des masques ou des totems. Voilà.
- Avez-vous interrogé ces populations ?
- Non. Je ne voulais pas tout leur prendre.
Auteur:
Dumayet Pierre
Années: 1923 - 2011
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: journaliste
Continent – Pays: Europe - France
Info:
"Brossard et moi", éd. Verdier, p.56-57
[
dialogue
]
[
absurde
]
musique
Etre réveillé à cinq heures du matin par la mélasse dévotionnelle d'Anup Jalota, Hari Om Sharan et autres confiseurs, tous issus simultanément de plusieurs lecteurs de cassette différents. Etre assailli sans relâche pour le reste de la journée et la plus grande partie de la nuit par les voix alternativement sérieuses ou insolentes de Kumar Sanu, Alisha Chinoy, Baba Sehgal chantant "Sexy, Sexy, Sexy", "Ladki hai kya re baba", "Sarkaye leyo khatiya" et autres chansons hideuses. Les laisser insidieusement imprégner votre mémoire et devenir d'imbéciles refrains qui se répètent encore et encore dans la tête; Avoir son environnement pollué et la journée détruite de cette façon c'était connaître une rage qui s'approfondissait, une incitation au meurtre, et, enfin, cette peur rampante quand au niveau dangereux de son propre déséquilibre. C'était comprendre ces gens parfaitement sains dont on parle dans les journaux, ceux qui un beau jour explosent soudainement dans la violence ; C'était concevoir une haine durable pour les auteurs, riches ou pauvres, de ces atrocités auditives. (Expliquant pourquoi il quitta Varanasi après quelques jours).
Auteur:
Pankaj Mishra
Années: 1969 -
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain, essayiste et journaliste
Continent – Pays: Asie – Inde
Info:
Butter Chicken in Ludhiana: Travels in Small Town India
[
abrutissement
]
prémonition
Voici, par exemple, un des cas où la vraisemblance est la plus forte. M. Frédéric Wingfield rêve une nuit qu’il voit son frère Richard Wingfield-Baker assis sur une chaise devant lui. Il lui parle, et son frère ne répond qu’en inclinant la tête, puis se lève et quitte la chambre. Lorsque M. Wingfield se réveille, il se trouve debout, un pied posé par terre et l’autre sur le lit, essayant de parler et de prononcer le nom de son frère. "L’impression qu’il était réellement présent était si forte, et toute la scène que j’avais rêvée était si vivante, que je quittai la chambre à coucher pour chercher mon frère dans le salon." M. Wingfield avait à ce moment des nouvelles récentes de son frère et le croyait en bonne santé. Cependant il eut après l’apparition le sentiment d’un malheur imminent ; il nota le fait dans son journal, et ajouta les mots : "Que Dieu l’empêche." Trois jours après, il apprenait que son frère était mort des suites de blessures terribles qu’il s’était faites dans une chute à la chasse.
Auteur:
Paulhan Frédéric
Années: 1856 - 1931
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: H
Profession et précisions: philosophe
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Les hallucinations véridiques et la suggestion mentale, Revue des Deux Mondes tome 114, 1892 p. 78
[
télépathie
]
[
songe
]
chauffage
Durant l'hiver, les populations paysannes - qui représentaient plus de 80% de la population avant 1800 - adaptaient ainsi leurs modes de vie à la rigueur du temps. Elles quittaient par exemple leurs demeures pour vivre dans l'étable où la chaleur des bêtes réchauffait les corps. Les veillées paysannes, où le travail domestique côtoyait les chants et les histoires, répondaient au même souci d'économiser le combustible en partageant la maigre chaleur et la faible lumière.
Dans certaines régions il existait même des petits habitats temporaires construits collectivement au début de l'hiver et détruits au printemps, à l'image des escraignes bourguignonnes. Il s'agissait d'un dispositif ingénieux, une sorte de hutte étroite faite de branchage et recouverte de terre ou de fumier, tapissé d'un drap afin que les occupant(e)s passent les veillées au chaud à filer et bavarder. L'ensemble des modes de vie s'adaptaient aux rigueurs du froid, même si ces pratiques furent de plus en plus repoussées par les médecins et hygiénistes comme immorales et insalubres, contraires au progrès et renvoyant à des moeurs animales qui feraient sans nul doute horreur à nos contemporains.
Auteur:
Jarrige François
Années: 197? -
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: historien, maître de conférence en histoire
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Dans le journal "La Décroissance", n°158, page 10
[
solutions
]
[
mode de vie
]
[
historique
]
habitude
Cet isolement forcé lui fit prendre conscience qu'il avait passé la majorité de sa vie enfermé, comme la plupart des gens.
Une routine de l'emprisonnement volontaire devenue inconsciente.
Le matin, on quittait sa maison pour se rendre en voiture au travail avant de retourner se confiner dans sa prison personnelle. Oh certes, il arrivait qu'on sorte faire du sport dans une "salle" sur des vélos immobiles ou des tapis roulants. Et lorsque l'on avait besoin de décompresser, où se rendait-on ? Parfois au cinéma, les yeux concentrés sur une toile, au milieu de quatre murs, parfois boire un coup dans un pub, et parfois en boîte, terme suffisamment explicite pour être développé.
Tous les prétextes étaient bons pour justifier sa propre captivité. En hiver, il faisait trop froid, en été, trop chaud (même si cette disposition tendait à s'effacer à cause du réchauffement climatique), et en automne ou au printemps, on se plaignait de la pluie ou du vent. Pas étonnant que certains détenus de longue date ne puissent quitter les barreaux rassurants de leur cellule.
On cultivait sa propre captivité.
Pire, il nous arrivait même de l'acheter.
Auteur:
Gaulon Pierre
Années: 1983 -
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: prof de français
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Enragés
[
cachot
]
[
renoncement
]
[
train-train
]
répartie
Quand le comte, qui ne fit rien pour se dérober, fut à sa hauteur, le duc vint vers lui de sorte que, flanqué de ses deux amis, il lui barra la route.
Beaufort n'y alla pas par quatre chemins :
- Mais ne serait-ce point le comte de Nissac ?... Voyez-vous, cher comte, je vous regardais, et je regardais également ce bassin et les poissons qui le peuplent en me disant "Tiens, voilà le premier Nissac qui n'est point marin. Souffrez-vous donc du roulement de la mer ? Refusez-vous de servir de nourriture aux crabes comme vos glorieux ancêtres ?... En un mot, seriez-vous un lâche, Nissac ?"
Les compagnons du duc partirent aussitôt à rire, forçant un peu la mesure.
Nissac, cependant, ne quittait pas Beaufort du regard et le duc, confronté à ces yeux sombres, froids et inexpressifs en ressentit un passager malaise.
Nissac répliqua enfin :
- Ce genre de question ne souffre pas de réponse mais une démonstration.
- J'en suis tout aise et désolé pour vous qui allez mourir !
- Je sais, je sais : des tas de cadavres m'ont dit cela bien avant vous.
Auteur:
Fajardie Frédéric H.
Années: 1947 - 2008
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Les Foulards rouges
[
menace
]
[
mort
]
matin
J’ai embrassé l’aube d’été.
Rien ne bougeait encore au front des palais. L’eau était morte. Les camps d’ombres ne quittaient pas la route
du bois. J’ai marché, réveillant les haleines vives et tièdes, et les pierreries regardèrent, et les ailes
se levèrent sans bruit.
La première entreprise fut, dans le sentier déjà empli de frais et blêmes éclats, une fleur qui me dit son nom.
Je ris au wasserfall blond qui s’échevela à travers les sapins : à la cime argentée je reconnus la déesse.
Alors je levai un à un les voiles. Dans l’allée, en agitant les bras. Par la plaine, où je l’ai dénoncée au coq.
A la grand’ville elle fuyait parmi les clochers et les dômes, et courant comme un mendiant sur les quais de marbre,
je la chassais.
En haut de la route, près d’un bois de lauriers, je l’ai entourée avec ses voiles amassés, et j’ai senti un peu
son immense corps. L’aube et l’enfant tombèrent au bas du bois.
Au réveil il était midi.
Auteur:
Rimbaud Arthur
Années: 1854 - 1891
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: H
Profession et précisions: poète, aventurier
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Illuminations. Aube
[
poème
]
[
nature
]
babas cool
Je quittai le cottage et Tucson après une prise de bec avec Webb au sujet des hippies. Non que le solitaire que j’étais éprouvât une tendresse particulière pour ces mectons. Qui venaient de se rendre compte, nuance, qui ne découvraient que maintenant, que la guerre était une saloperie, que passer quarante ou quarante-huit heures par semaine à faire un métier en tous points détestable vous foutait en l’air, et que le mariage était un piège tout aussi mortel. Je n’éprouvais toutefois pas la pleine petite envie de me joindre à eux. Outre qu’ils avaient un train de retard, les hippies adoraient se rassembler pour former de grandes rondes et gueuler leur mécontentement. Ah oui, parlons des drogues ! Qu’avaient-elles de si sensationnel ? J’en prenais lorsqu’on m’en offrait – amphétamines, barbituriques, antidépresseurs, LSD. Tout m’allait. Je les avalais sans faire mon délicat, mais je ne planais pas très longtemps. […]
Il découle de tout cela que je n’avais rien à voir avec ces hippies qui chantaient LOVE LOVE LOVE. De plus, ça sonnait comme un ordre, et mon poil se hérissait dès qu’on essayait de m’en donner. Aussi me tenais-je à bonne distance des hippies.
Auteur:
Bukowski Charles
Années: 1920 - 1994
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain
Continent – Pays: Amérique du nord - Usa
Info:
Dans "Un carnet taché de vin", pages 173-74
[
moquerie
]
[
mouvement
]
[
beat generation
]
cauchemar
Le dernier épisode lui était envoyé par une vessie pleine qui tira Arséni Andréiévitch du sommeil, quoique pas complètement.
En pilotage automatique, il quitta son lit et, sans ouvrir les yeux, pour rester en contact avec son rêve, il se rendit dans sa salle de bain à laquelle l'éclairage nocturne donnait une teinte légèrement verdâtre. Les deux pieds devant la cuvette, il abaissa son pantalon de pyjama et sa main s'aventura vers son bas-ventre. Rien. Elle ne parvenait pas à trouver l'objet de sa quête, l'appendice que l'organisme utilise en général pour se séparer d'un excès de liquide. Il lui fallut se réveiller afin de restaurer sa coordination. Ouvrant les yeux, il plaqua une main sur le mur, tandis que la seconde partait à la recherche de l'organe le plus important du corps masculin. Aucune trace... Tel un vieil ordinateur qui aurait planté, le cerveau d'Iratov analysait avec difficulté l'information transmise par voie tactile. Il dut se pencher pour activer sa vision. Et, à ce moment là, un cri d'agonie monta de sa conscience, comme si on venait de le perforer à l'aide d'un couteau électrique.
Il n'y avait rien !!! Que dalle !!!
Auteur:
Lipskerov Dimitri
Années: 1964 -
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain, romancier, nouvelliste et dramaturge
Continent – Pays: Europe - Russie
Info:
L'Outil et les papillons
[
réveil
]
femmes-hommes
Le temps n'avait pas entièrement calmé la passion de la jeune femme. Voyant que Wou-song apportait des provisions de toute espèce, Kin-lièn, réfléchissant, se dit au fond du coeur : " Est-ce que par hasard ce vaurien penserait à moi maintenant ? Oui, je n'en doute plus, le voilà qui revient ! mais c'est un homme calme ; il ne voudra pas employer la violence. Oh ! il faut que je l'amène tout doucement à une conversation particulière. " Elle monta dans sa chambre, égalisa le fard sur ses deux joues, ajusta de nouveau les noeuds de son épaisse chevelure et quitta la robe qu'elle portait pour en mettre une autre d'une grande beauté. Alors seulement elle redescendit et saluant son beau-frère : " En vérité, lui dit-elle d'un air souriant, je ne sais ce qui vous amène ici. Que de moments se sont écoulés depuis que je ne vous ai vu et sans que je puisse comprendre la cause d'un pareil éloignement ! Chaque jour je disais à votre frère : " Allez donc à la préfecture ; causez avec le major ; tâchez de le ramener, Mais chaque jour il répondait que cela n'était pas nécessaire. Enfin, je me réjouis de votre retour, mais pourquoi prodiguer de l'argent sans motif ?
Auteur:
Luo Guan zhong
Années: 133? - 14??
Epoque – Courant religieux: moyen-âge
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain de la fin des Yuan et du début des Ming.
Continent – Pays: Asie - Chine
Info:
Au bord de l'eau, tome 2, chapitres 47 à 92
[
conte
]