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carcan sociétal

Défense des minorités, contrôle de ses pulsions sexuelles, condamnation de toutes formes de violence, respect de l’environnement, tri de ses déchets… Aujourd’hui, l’individu est sommé de devenir toujours plus civilisé dans tous les compartiments de sa vie sociale, mais également privée. L’injonction à devenir un “bon citoyen” a supplanté celle d’être un “bon chrétien”. Les modalités ont changé mais le principe est le même. Si bien que l’individu doit se surveiller en permanence, en même temps qu’il doit dénoncer toute attitude ou propos “déviants”. Cela au nom du bien général et particulier car il en va de la Civilisation, de la Démocratie, de la République, etc. Sauf que c’est trop pour la plupart des gens. Ils n’en peuvent plus. On leur implante à chaque instant le sentiment d’être fautif et d’être coupable de l’être. C’est comme si on leur demandait d’adopter en permanence une hyène. Pour beaucoup, l’idéal démocratique apparaît psychiquement trop exigeant, surtout s’il doit être assimilé de force et rapidement. Ce n’est pas pour rien si des gens se défoulent sur Internet ou font des burn out. Comme le disait Philippe Muray, Freud nous a libérés du refoulement, mais qui nous libérera du défoulement ? Et je ne vous parle pas de la vogue du développement personnel, afin d’arriver à se sentir bien dans sa peau et dans son époque, preuve que c’est loin d’être évident. Ces comportements témoignent d’un malaise général. Tout le monde semble assis sur des oursins et ne plus rien supporter. D’ailleurs, tout le monde veut que ça change. Même les conservateurs appellent au “changement”. C’est comme une fuite en avant. Il s’agit là d’un symptôme qui, loin de remédier au problème, l’exprime et le renforce. De là que la moindre étincelle provoque aujourd’hui d’incroyables incendies qui, en temps normal, ne prendraient pas. Nous prenons feu de partout. En devenant toujours plus morale, la conscience contemporaine est devenue un immense champ de bataille qui cache un véritable champ de mines. Nos démocraties marchandes, où la maîtrise de soi se doit d’être toujours plus intériorisée, portent en germe des violences envers soi-même ou envers les autres d’autant plus terrifiantes qu’elles sont volcaniques. C’est le syndrome de la cocotte-minute.

Auteur: Bouillier Grégoire

Info: Le coeur ne cède pas, 2022

[ étouffantes moralines ] [ sans échappatoire ] [ soupape manquante ]

 

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peinture surréaliste

À Mexico, ils se sont en quelque sorte égarés dans une exposition de peintures du bel exilé espagnol Remedios Varo : dans le tableau central d'un triptyque, intitulé "Bordando el Manto Terrestre", On pouvait voir un groupe de frêles jeunes filles aux visages en forme de coeur, avec des yeux immenses, des cheveux d'or filé, prisonnières au sommet d'une tour circulaire, et elles brodaient une sorte de tapisserie qui pendait dans le vide par les meurtrières, qui semblait vouloir désespérément combler le vide : car toutes les maisons, toutes les créatures, les vagues, les navires et toutes les forêts de la Terre étaient contenues dans cette tapisserie, et cette tapisserie, c'était le monde.  Oedipa, perverse, s'était tenue devant le tableau et avait pleuré. Personne ne l'avait remarqué ; elle portait des ombres de bulles vert foncé. Pendant un instant, elle s'était demandée si le joint autour de ses lunettes était assez serré pour permettre aux larmes de continuer à couler, de remplir tout l'espace de la lentille et de ne jamais sécher. Elle pouvait aisni porter la tristesse du moment avec elle de cette façon et, pour toujours, voir le monde réfracté au travers de ces larmes, ces larmes spécifiques, comme si des indices encore non trouvés variaient de façon importante d'un pleur à l'autre. Elle avait regardé ses pieds et avait su, grâce à un tableau, que ce sur quoi elle se tenait n'avait été tissé qu'à quelques milliers de kilomètres de là, dans sa propre tour, n'était que par un accident connu sous le nom de Mexique, et donc Pierce ne l'avait éloignée de rien, il n'y avait pas d'échappatoire. De quoi voulait-elle donc s'échapper ? Cette jeune fille si captive, qui a tout le temps de réfléchir, se rend vite compte que sa tour, sa hauteur et son architecture, sont comme son ego, accessoires : que ce qui la maintient vraiment là où elle est magique, anonyme et maléfique, projetté sur elle de l'extérieur et sans aucune raison. N'ayant aucun moyen, n'étaient la peur et la ruse féminine, pour examiner cette magie informe, pour comprendre son fonctionnement, mesurer son intensité ou compter ses lignes de force, elle risque de retomber dans la superstition, ou de s'adonner à un passe-temps utile comme la broderie, ou de devenir folle, voire épouser un disc-jockey. Si la tour est partout et que le preux chevalier de la providence ne peut rien contre sa magie, quoi d'autre ?  

Auteur: Pynchon Thomas

Info: The Crying of Lot 49, p.9, Penguin (2012).

[ sans issue ] [ réalité projetée ] [ littérature ] [ femme-par-homme ]

 
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déréalisation

Quand dose de rappel rime avec casque de réalité virtuelle. Pour la première fois, le centre installé au Multiplex à Dijon (Côte-d'Or) a ouvert des créneaux de vaccination dédiés aux enfants ce mercredi 12 janvier. Avec un équipement spécifique pour l'occasion : un casque de réalité virtuelle.

Les enfants qui se sont inscrits pour recevoir leur vaccin contre le Covid-19 sont donc pris en charge par les personnels soignants et enfilent l'outil juste avant que la terrible aiguille qui peut parfois leur faire peur ne vienne les piquer. "Ils ont un paysage apaisant qui leur permet de se concentrer sur autre chose. Ça permet de focaliser et attirer l'attention des enfants sur autre chose pour les vacciner sans leur fait mal", décrit Bruno Cabrita, responsable du centre et médecin chef du SDIS 21.

Pour l'heure, les équipes médicales du Multiplex disposent d'un seul casque prêté par l'association Rêve d'enfants malades, le Lions Club Dijon Doyen et le club Ferrari France. Le dispositif est expérimenté pour la première fois ce mercredi et le sera lors des prochaines sessions de vaccination réservée à nos petites têtes, à commencer par ce samedi 15 janvier.

Ce mercredi, ce sont alors 20 enfants qui ont pu enfiler le casque de réalité virtuelle au moment de se faire vacciner. Et le bilan est positif. "On est plutôt bluffé et étonné. On s'attendait à ce que ça marcherait, mais pas aussi bien. Ça a un effet dans l'image", analyse Bruno Cabrita.

Une fois le casque retiré, les enfants sont invités à donner leur avis sur le dispositif en lui attribuant une note sur 10. Pour Matthias*, c'est un bon 8/10. "Ça s'est bien passé, j'étais moins stressé", salue-t-il. "Le fait qu'il ne voit pas l'aiguille ça enlève du stress et ça le rassure je pense", ajoute sa mère. Du côté des autres enfants vaccinés ce mercredi, les notes sont toujours comprises entre 9 et 10. 

Après chaque utilisation, le casque est désinfecté par les personnels du Multiplex. D'une autonomie de 7 heures, l'équipement permet donc d'apaiser les enfants au moment d'un geste de santé auquel ils seront confrontés toute leur vie. "En vivant comme ça l'une des premières injections, ils voient que finalement la peur de l'aiguille n'est pas forcément fondée puisqu'avec le casque cela ne fait pas mal", explique le médecin chef du SDIS 21.

Si l'heure est encore à l'expérimentation des casques, Bruno Cabrita imagine pouvoir développer le dispositif à d'autres centres de vaccination de la région. "Si ça fonctionne, on pourrait avoir d'autres casques", conclut-il.

Auteur: Internet

Info: 16 janvier 2022, https://france3-regions.francetvinfo.fr/bourgogne-franche-comte/cote-d-or/dijon/casques-de-realite-virtuelle-sur-la-tete-les-enfants-vivent-mieux-la-vaccination-a-dijon-2414740.html

[ échappatoire ] [ acceptation de la contrainte ] [ moyens technologiques ]

 

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humeurs

Le discours dominant exalte le culte des émotions.

En témoigne l’aura du signifiant "émotion" dans les médias où la viabilité d’une émission (et même d’une information) se juge au degré d'émotion qu’elle est susceptible de susciter.

Cette dérive s’est propagée jusque dans l'enseignement où "l'émotion" des élèves est valorisée au détriment de leurs connaissances: "ce n'est pas ce que je ressens" est une objection qui autorise désormais l'élève à contredire son prof de philo...

C’est ainsi que par une curieuse rétroversion qui prend le contrepied d’un aboutissement logique de trente siècles de civilisation, on dit désormais se croire vivant "parce qu’on ressent", alors qu’il est connu depuis la haute antiquité que "le ressenti ment" et que les sensations manifestent, par leur fixation dans une signification, un etat de mort psychique, dû au fait que l’é-motion est "status", un mouvement immobilisé, qui s’oppose à la pensée logique, dialectique qui, elle, reste du côté du mouvement, du jeu incessant des métamorphoses et de la vie.

Si l’émotion est devenue à ce point un signifiant-phare du capitalisme de la bien-pensance, c’est que la communion par "les émotions" est ce qui vient se substituer à l’absence de lien social, et si des matchs de football ou des obsèques de vedettes de variétés suscitent tant de ferveur, c’est par l’illusion que ces "événements" montés en épingle nourrissent chez le spectateur l’illusion d’appartenir de plein droit à une communauté organique, le rassurant sur son "identité" toujours en souffrance...

[...]

Le recours aux émotions laisse croire à une vérité d’ordre supérieur qui serait contenue dans la spontanéité, associée à l’authenticité, qui prendrait le pas sur la réflexion et sur la pensée, or ce qui dans nos sociétés infantilisées, se couvre sous le nom trompeur de "spontanéité" n'est en vérité rien d'autre que la propension infantile à se laisser aller à ses impulsions immédiates...

Pour Kant, "se laisser aller à ses impulsions immédiates" est l'indice que nous ne sommes pas libres mais enchaînés au lien causal qui nous relie à la chaîne des causes et des effets.

La spontanéité authentique, telle qu'elle fut redéfinie par l'idéalisme allemand, ne peut pas avoir lieu sans un moment de réflexivité: ce qui semble me venir de l'extérieur ne me détermine que dans la mesure où je l'aurai toujours déjà fait mien, autrement dit les raisons externes (les prétextes à mes actes) ne comptent que si je les "accepte déjà comme miennes", ainsi la détermination de mon sujet par autre chose (cause), que je présente comme extérieure ("ce n’est pas de ma faute...") est toujours déjà une autodétermination de mon sujet lui-même.

C'est ainsi que toute référence à ma nature immédiate ("je suis comme ça, qu'y puis-je...") est fausse, mon rapport à mes propres impulsions ne me détermine que dans la mesure où je les ai déjà reconnues comme miennes, où je les assume comme miennes, voilà pourquoi je suis entièrement responsable de mes actes (et de mes paroles) même si je ne peux jamais en connaître, à l'avance, les conséquences...

Les émotions, comme les sensations, les sentiments, les affects, les perceptions... restent donc à interpréter, de la même manière qu’on interprète un rêve, grâce aux procédés mis à jour par Freud du déplacement, de la condensation, de l’inversion, car si les "émotions" nous trompent, c’est en nous masquant la réalité en tant que Wirklichkeit, en constituant une échappatoire commode, rationnalisante et cependant imaginaire, de ce qui est réellement en jeu à ce moment-là dans le Symbolique, la logique des pensées qui s’enchaînent dans l’inconscient...

Auteur: Dubuis Santini Christian

Info: Publication facebook du 04.10.2021

[ démystification ] [ alibi du système marchand ] [ fausse innocence ] [ émoi ]

 

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question

La conscience est-elle partie prenante de l'univers et de sa structure ?

Des physiciens et des philosophes se sont récemment rencontrés pour débattre d'une théorie de la conscience appelée panpsychisme.

Il y a plus de 400 ans, Galilée a montré que de nombreux phénomènes quotidiens, tels qu'une balle qui roule sur une pente ou un lustre qui se balance doucement au plafond d'une église, obéissent à des lois mathématiques précises. Pour cette intuition, il est souvent salué comme le fondateur de la science moderne. Mais Galilée a reconnu que tout ne se prêtait pas à une approche quantitative. Des choses telles que les couleurs, les goûts et les odeurs "ne sont rien de plus que de simples noms", a déclaré Galilée, car "elles ne résident que dans la conscience". Ces qualités ne sont pas réellement présentes dans le monde, affirmait-il, mais existent uniquement dans l'esprit des créatures qui les perçoivent. "Par conséquent, si l'on supprimait la créature vivante, écrivait-il, toutes ces qualités seraient effacées et anéanties.

Depuis l'époque de Galilée, les sciences physiques ont fait un bond en avant, expliquant le fonctionnement des plus petits quarks jusqu'aux plus grands amas de galaxies. Mais expliquer les choses qui résident "uniquement dans la conscience" - le rouge d'un coucher de soleil, par exemple, ou le goût amer d'un citron - s'est avéré beaucoup plus difficile. Les neuroscientifiques ont identifié un certain nombre de corrélats neuronaux de la conscience - des états cérébraux associés à des états mentaux spécifiques - mais n'ont pas expliqué comment la matière forme les esprits en premier lieu. Comme l'a dit le philosophe Colin McGinn dans un article publié en 1989, "d'une manière ou d'une autre, nous avons l'impression que l'eau du cerveau physique est transformée en vin de la conscience". Le philosophe David Chalmers a célèbrement surnommé ce dilemme le "problème difficile" de la conscience*.

Des chercheurs se sont récemment réunis pour débattre de ce problème au Marist College de Poughkeepsie, dans l'État de New York, à l'occasion d'un atelier de deux jours consacré à une idée connue sous le nom de panpsychisme. Ce concept propose que la conscience soit un aspect fondamental de la réalité, au même titre que la masse ou la charge électrique. L'idée remonte à l'Antiquité - Platon l'a prise au sérieux - et a eu d'éminents partisans au fil des ans, notamment le psychologue William James et le philosophe et mathématicien Bertrand Russell. Elle connaît depuis peu un regain d'intérêt, notamment à la suite de la publication en 2019 du livre du philosophe Philip Goff, Galileo's Error, qui plaide vigoureusement en sa faveur.

M. Goff, de l'université de Durham en Angleterre, a organisé l'événement récent avec le philosophe mariste Andrei Buckareff, et il a été financé par une subvention de la Fondation John Templeton. Dans une petite salle de conférence dotée de fenêtres allant du sol au plafond et donnant sur l'Hudson, environ deux douzaines d'universitaires ont examiné la possibilité que la conscience se trouve peut-être en bas de l'échelle.

L'attrait du panpsychisme réside en partie dans le fait qu'il semble apporter une solution à la question posée par M. Chalmers : nous n'avons plus à nous préoccuper de la manière dont la matière inanimée forme des esprits, car l'esprit était là depuis le début, résidant dans le tissu de l'univers. Chalmers lui-même a adopté une forme de panpsychisme et a même suggéré que les particules individuelles pourraient être conscientes d'une manière ou d'une autre. Il a déclaré lors d'une conférence TED qu'un photon "pourrait avoir un élément de sentiment brut et subjectif, un précurseur primitif de la conscience". Le neuroscientifique Christof Koch est également d'accord avec cette idée. Dans son livre Consciousness paru en 2012, il note que si l'on accepte la conscience comme un phénomène réel qui ne dépend d'aucune matière particulière - qu'elle est "indépendante du substrat", comme le disent les philosophes - alors "il est facile de conclure que le cosmos tout entier est imprégné de sensibilité".

Pourtant, le panpsychisme va à l'encontre du point de vue majoritaire dans les sciences physiques et en philosophie, qui considère la conscience comme un phénomène émergent, quelque chose qui apparaît dans certains systèmes complexes, tels que le cerveau humain. Selon ce point de vue, les neurones individuels ne sont pas conscients, mais grâce aux propriétés collectives de quelque 86 milliards de neurones et à leurs interactions - qui, il est vrai, ne sont encore que mal comprises - les cerveaux (ainsi que les corps, peut-être) sont conscients. Les enquêtes suggèrent qu'un peu plus de la moitié des philosophes universitaires soutiennent ce point de vue, connu sous le nom de "physicalisme" ou "émergentisme", tandis qu'environ un tiers rejette le physicalisme et penche pour une alternative, dont le panpsychisme est l'une des nombreuses possibilités.

Lors de l'atelier, M. Goff a expliqué que la physique avait manqué quelque chose d'essentiel en ce qui concerne notre vie mentale intérieure. En formulant leurs théories, "la plupart des physiciens pensent à des expériences", a-t-il déclaré. "Je pense qu'ils devraient se demander si ma théorie est compatible avec la conscience, car nous savons qu'elle est réelle.

De nombreux philosophes présents à la réunion ont semblé partager l'inquiétude de M. Goff quant à l'échec du physicalisme lorsqu'il s'agit de la conscience. "Si vous connaissez les moindres détails des processus de mon cerveau, vous ne saurez toujours pas ce que c'est que d'être moi", déclare Hedda Hassel Mørch, philosophe à l'université des sciences appliquées de Norvège intérieure. "Il existe un fossé explicatif évident entre le physique et le mental. Prenons l'exemple de la difficulté d'essayer de décrire la couleur à quelqu'un qui n'a vu le monde qu'en noir et blanc. Yanssel Garcia, philosophe à l'université du Nebraska Omaha, estime que les faits physiques seuls sont inadéquats pour une telle tâche. "Il n'y a rien de physique que l'on puisse fournir [à une personne qui ne voit qu'en nuances de gris] pour qu'elle comprenne ce qu'est l'expérience de la couleur ; il faudrait qu'elle en fasse elle-même l'expérience", explique-t-il. "La science physique est, en principe, incapable de nous raconter toute l'histoire. Parmi les différentes alternatives proposées, il estime que "le panpsychisme est notre meilleure chance".

Mais le panpsychisme attire également de nombreuses critiques. Certains soulignent qu'il n'explique pas comment de petits morceaux de conscience s'assemblent pour former des entités conscientes plus substantielles. Ses détracteurs affirment que cette énigme, connue sous le nom de "problème de la combinaison", équivaut à une version du problème difficile propre au panpsychisme. Le problème de la combinaison "est le défi majeur de la position panpsychiste", admet M. Goff. "Et c'est là que se concentre la majeure partie de notre énergie.

D'autres remettent en question le pouvoir explicatif du panpsychisme. Dans son livre Being You (2021), le neuroscientifique Anil Seth écrit que les principaux problèmes du panpsychisme sont qu'"il n'explique rien et qu'il ne conduit pas à des hypothèses vérifiables. C'est une échappatoire facile au mystère apparent posé par le problème difficile".

Si la plupart des personnes invitées à l'atelier étaient des philosophes, les physiciens Sean Carroll et Lee Smolin, ainsi que le psychologue cognitif Donald Hoffman, ont également pris la parole. Carroll, un physicaliste pur et dur, a joué le rôle de chef de file officieux de l'opposition pendant le déroulement de l'atelier. (Lors d'un débat public très suivi entre Goff et Carroll, la divergence de leurs visions du monde est rapidement devenue évidente. Goff a déclaré que le physicalisme ne menait "précisément nulle part" et a suggéré que l'idée même d'essayer d'expliquer la conscience en termes physiques était incohérente. M. Carroll a affirmé que le physicalisme se porte plutôt bien et que, bien que la conscience soit l'un des nombreux phénomènes qui ne peuvent être déduits des phénomènes microscopiques, elle constitue néanmoins une caractéristique réelle et émergente du monde macroscopique. Il a présenté la physique des gaz comme un exemple parallèle. Au niveau micro, on parle d'atomes, de molécules et de forces ; au niveau macro, on parle de pression, de volume et de température. Il s'agit de deux types d'explications, en fonction du "niveau" étudié, mais elles ne présentent pas de grand mystère et ne constituent pas un échec pour la physique. En peu de temps, Goff et Carroll se sont enfoncés dans les méandres de l'argument dit de la connaissance (également connu sous le nom de "Marie dans la chambre noire et blanche"), ainsi que de l'argument des "zombies". Tous deux se résument à la même question clé : Y a-t-il quelque chose à propos de la conscience qui ne peut être expliqué par les seuls faits physiques ? Une grande partie du ping-pong rhétorique entre Goff et Carroll a consisté pour Goff à répondre oui à cette question et pour Carroll à y répondre non.

Une autre objection soulevée par certains participants est que le panpsychisme n'aborde pas ce que les philosophes appellent le problème des "autres esprits". (Vous avez un accès direct à votre propre esprit, mais comment pouvez-vous déduire quoi que ce soit de l'esprit d'une autre personne ?) "Même si le panpsychisme est vrai, il y aura toujours un grand nombre de choses - notamment des choses liées à l'expérience des autres - que nous ne connaîtrons toujours pas", déclare Rebecca Chan, philosophe à l'université d'État de San José. Elle craint que l'invocation d'une couche sous-jacente d'esprit ne revienne à invoquer Dieu. Je me demande parfois si la position panpsychiste n'est pas similaire aux arguments du "dieu des lacunes"", dit-elle, en référence à l'idée que Dieu est nécessaire pour combler les lacunes de la connaissance scientifique.

D'autres idées ont été évoquées. L'idée du cosmopsychisme a été évoquée - en gros, l'idée que l'univers lui-même est conscient. Paul Draper, philosophe à l'université de Purdue qui a participé via Zoom, a parlé d'une idée subtilement différente connue sous le nom de "théorie de l'éther psychologique", à savoir que les cerveaux ne produisent pas la conscience mais l'utilisent plutôt. Selon cette théorie, la conscience existait déjà avant que les cerveaux n'existent, comme un ether omniprésent. Si cette idée est correcte, écrit-il, "alors (selon toute vraisemblance) Dieu existe".

M. Hoffman, chercheur en sciences cognitives à l'université de Californie à Irvine, qui s'est également adressé à l'atelier via Zoom, préconise de rejeter l'idée de l'espace-temps et de rechercher quelque chose de plus profond. (Il a cité l'idée de plus en plus populaire en physique ces derniers temps selon laquelle l'espace et le temps ne sont peut-être pas fondamentaux, mais constituent plutôt des phénomènes émergents). L'entité plus profonde liée à la conscience, suggère Hoffman, pourrait consister en "sujets et expériences" qui, selon lui, "sont des entités au-delà de l'espace-temps, et non dans l'espace-temps". Il a développé cette idée dans un article de 2023 intitulé "Fusions of Consciousness" (Fusions de conscience).

M. Smolin, physicien à l'Institut Perimeter pour la physique théorique en Ontario, qui a également participé via Zoom, a également travaillé sur des théories qui semblent offrir un rôle plus central aux agents conscients. Dans un article publié en 2020, il a suggéré que l'univers "est composé d'un ensemble de vues partielles de lui-même" et que "les perceptions conscientes sont des aspects de certaines vues" - une perspective qui, selon lui, peut être considérée comme "une forme restreinte de panpsychisme".

Carroll, qui s'est exprimé après la session à laquelle participaient Hoffman et Smolin, a noté que ses propres opinions divergeaient de celles des intervenants dès les premières minutes (au cours du déjeuner, il a fait remarquer que participer à l'atelier donnait parfois l'impression d'être sur un subreddit pour les fans d'une série télévisée qui ne vous intéresse tout simplement pas). Il a admis que les débats interminables sur la nature de la "réalité" le laissaient parfois frustré. Les gens me demandent : "Qu'est-ce que la réalité physique ? C'est la réalité physique ! Il n'y a rien qu'elle 'soit'. Que voulez-vous que je dise, qu'elle est faite de macaronis ou d'autre chose ?" (Même Carroll admet cependant que la réalité est plus complexe qu'il n'y paraît. Il est un fervent partisan de l'interprétation "multi-mondes" de la mécanique quantique, selon laquelle notre univers n'est qu'une facette d'un vaste multivers quantique).

Si tout cela semble n'avoir aucune valeur pratique, M. Goff a évoqué la possibilité que la façon dont nous concevons les esprits puisse avoir des implications éthiques. Prenons la question de savoir si les poissons ressentent la douleur. La science traditionnelle ne peut étudier que le comportement extérieur d'un poisson, et non son état mental. Pour M. Goff, se concentrer sur le comportement du poisson n'est pas seulement une erreur, c'est aussi une "horreur", car cela laisse de côté ce qui est en fait le plus important : ce que le poisson ressent réellement. "Nous allons cesser de nous demander si les poissons sont conscients et nous contenter de regarder leur comportement ? Qui se soucie du comportement ? Je veux savoir s'il a une vie intérieure, c'est tout ce qui compte ! Pour les physicalistes comme Carroll, cependant, les sentiments et le comportement sont intimement liés, ce qui signifie que nous pouvons éviter de faire souffrir un animal en ne le plaçant pas dans une situation où il semble souffrir en raison de son comportement. "S'il n'y avait pas de lien entre eux [comportement et sentiments], nous serions en effet dans le pétrin", déclare Carroll, "mais ce n'est pas notre monde".

Seth, le neuroscientifique, n'était pas présent à l'atelier, mais je lui ai demandé quelle était sa position dans le débat sur le physicalisme et ses différentes alternatives. Selon lui, le physicalisme offre toujours plus de "prise empirique" que ses concurrents, et il déplore ce qu'il considère comme une crispation excessive sur ses prétendus échecs, y compris la difficulté supposée due à un problème complexe. Critiquer le physicalisme au motif qu'il a "échoué" est une erreur volontaire de représentation", déclare-t-il. "Il se porte très bien, comme l'attestent les progrès de la science de la conscience. Dans un article récemment publié dans le Journal of Consciousness Studies, Seth ajoute : "Affirmer que la conscience est fondamentale et omniprésente n'éclaire en rien la raison pour laquelle l'expérience du bleu est telle qu'elle est, et pas autrement. Cela n'explique pas non plus les fonctions possibles de la conscience, ni pourquoi la conscience est perdue dans des états tels que le sommeil sans rêve, l'anesthésie générale et le coma".

Même ceux qui penchent pour le panpsychisme semblent parfois hésiter à plonger dans le grand bain. Comme le dit Garcia, malgré l'attrait d'un univers imprégné de conscience, "j'aimerais qu'on vienne m'en dissuader".

 

Auteur: Internet

Info: Dan Falk, September 25, 2023

[ perspectiviste ] [ atman ] [ interrogation ]

 

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consumérisme

La pornographie c’est ce à quoi ressemble la fin du monde
"Cinquante nuances de Grey", le livre comme le film, est une glorification du sadisme qui domine quasiment tous les aspects de la culture américaine et qui repose au coeur de la pornographie et du capitalisme mondial. Il célèbre la déshumanisation des femmes. Il se fait le champion d’un monde dépourvu de compassion, d’empathie et d’amour. Il érotise le pouvoir hypermasculin à l’origine de l’abus, de la dégradation, de l’humiliation et de la torture des femmes dont les personnalités ont été supprimées, dont le seul désir est de s’avilir au service de la luxure mâle. Le film, tout comme "American Sniper", accepte inconditionnellement un monde prédateur où le faible et le vulnérable sont les objets de l’exploitation tandis que les puissants sont des demi-dieu violents et narcissiques. Il bénit l’enfer capitaliste comme naturel et bon.

"La pornographie", écrit Robert Jensen, "c’est ce à quoi ressemble la fin du monde."

Nous sommes aveuglés par un fantasme auto-destructeur. Un éventail de divertissements et de spectacles, avec les émissions de télé "réalité", les grands évènements sportifs, les médias sociaux, le porno (qui engrange au moins le double de ce que génèrent les films hollywoodiens), les produits de luxe attirants, les drogues, l’alcool et ce Jésus magique, nous offre des issues de secours — échappatoires à la réalité — séduisantes. Nous rêvons d’être riches, puissants et célèbres. Et ceux que l’on doit écraser afin de construire nos pathétiques petits empires sont considérés comme méritants leurs sorts. Que la quasi-totalité d’entre nous n’atteindra jamais ces ambitions est emblématique de notre auto-illusionnement collectif et de l’efficacité de cette culture submergée par manipulations et mensonges.

Le porno cherche à érotiser le sadisme. Dans le porno les femmes sont payées pour répéter les mantras "Je suis une chatte. Je suis une salope. Je suis une pute. Je suis une putain. Baise moi violemment avec ta grosse bite." Elles demandent à être physiquement abusées. Le porno répond au besoin de stéréotypes racistes dégradants. Les hommes noirs sont des bêtes sexuelles puissantes harcelant les femmes blanches. Les femmes noires ont une soif de luxure brute, primitive. Les femmes latinos sont sensuelles et ont le sang chaud. Les femmes asiatiques sont des geishas dociles, sexuellement soumises. Dans le porno, les imperfections humaines n’existent pas. Les poitrines siliconées démesurées, les lèvres pulpeuses gonflées de gel, les corps sculptés par des chirurgiens plastiques, les érections médicalement assistées qui ne cessent jamais et les régions pubiennes rasées — qui correspondent à la pédophilie du porno — transforment les exécutants en morceaux de plastique. L’odeur, la transpiration, l’haleine, les battements du cœur et le toucher sont effacés tout comme la tendresse. Les femmes dans le porno sont des marchandises conditionnées. Elles sont des poupées de plaisir et des marionnettes sexuelles. Elles sont dénuées de leurs véritables émotions. Le porno n’a rien à voir avec le sexe, si on définit le sexe comme un acte mutuel entre deux partenaires, mais relève de la masturbation, une auto-excitation solitaire et privée d’intimité et d’amour. Le culte du moi — qui est l’essence du porno — est au cœur de la culture corporatiste. Le porno, comme le capitalisme mondial, c’est là où les êtres humains sont envoyés pour mourir.

Il y a quelques personnes à gauche qui saisissent l’immense danger de permettre à la pornographie de remplacer l’intimité, le sexe et l’amour. La majorité de la gauche pense que la pornographie relève de la liberté d’expression, comme s’il était inacceptable d’exploiter financièrement et d’abuser physiquement une femme dans une usine en Chine mais que le faire sur un lieu de tournage d’un film porno était acceptable, comme si la torture à Abu Ghraib — où des prisonniers furent humiliés sexuellement et abusés comme s’ils étaient dans un tournage porno — était intolérable, mais tolérable sur des sites de pornographies commerciaux.

Une nouvelle vague de féministes, qui ont trahi l’ouvrage emblématique de radicales comme Andrea Dworkin, soutiennent que le porno est une forme de libération sexuelle et d’autonomisation. Ces "féministes", qui se basent sur Michel Foucault et Judith Butler, sont les produits attardés du néolibéralisme et du postmodernisme. Le féminisme, pour eux, ne relève plus de la libération de la femme opprimée; il se définit par une poignée de femmes qui ont du succès, sont riches et puissantes — où, comme c’est le cas dans "cinquante nuances de grey", capables d’accrocher un homme puissant et riche. C’est une femme qui a écrit le livre "Cinquante nuances", ainsi que le scénario du film. Une femme a réalisé le film. Une femme dirigeante d’un studio a acheté le film. Cette collusion des femmes fait partie de l’internalisation de l’oppression et de la violence sexuelle, qui s’ancre dans le porno. Dworkin l’avait compris. Elle avait écrit que "la nouvelle pornographie est un vaste cimetière où la Gauche est allée mourir. La Gauche ne peut avoir ses prostituées et leurs politiques."

J’ai rencontré Gail Dines, l’une des radicales les plus prééminentes du pays, dans un petit café à Boston mardi. Elle est l’auteur de "Pornland: Comment le porno a détourné notre sexualité" (“Pornland: How Porn Has Hijacked Our Sexuality”) et est professeure de sociologie et d’études féminines à l’université de Wheelock. Dines, ainsi qu’une poignée d’autres, dont Jensen, dénoncent courageusement une culture aussi dépravée que la Rome de Caligula.

"L’industrie du porno a détourné la sexualité d’une culture toute entière, et dévaste toute une génération de garçons", nous avertit elle. "Et quand vous ravagez une génération de garçons, vous ravagez une génération de filles."

"Quand vous combattez le porno vous combattez le capitalisme mondial", dit-elle. "Les capitaux-risqueurs, les banques, les compagnies de carte de crédit sont tous partie intégrante de cette chaine alimentaire. C’est pourquoi vous ne voyez jamais d’histoires anti-porno. Les médias sont impliqués. Ils sont financièrement mêlés à ces compagnies. Le porno fait partie de tout ceci. Le porno nous dit que nous n’avons plus rien d’humains — limite, intégrité, désir, créativité et authenticité. Les femmes sont réduites à trois orifices et deux mains. Le porno est niché dans la destruction corporatiste de l’intimité et de l’interdépendance, et cela inclut la dépendance à la Terre. Si nous étions une société d’être humains entiers et connectés en véritables communautés, nous ne supporterions pas de regarder du porno. Nous ne supporterions pas de regarder un autre être humain se faire torturer."

"Si vous comptez accumuler la vaste majorité des biens dans une petite poignée de mains, vous devez être sûr d’avoir un bon système idéologique en place qui légitimise la souffrance économique des autres", dit elle. "Et c’est ce que fait le porno. Le porno vous dit que l’inégalité matérielle entre femmes et hommes n’est pas le résultat d’un système économique. Que cela relève de la biologie. Et les femmes, n’étant que des putes et des salopes bonnes au sexe, ne méritent pas l’égalité complète. Le porno c’est le porte-voix idéologique qui légitimise notre système matériel d’inégalités. Le porno est au patriarcat ce que les médias sont au capitalisme."

Pour garder excités les légions de mâles facilement ennuyés, les réalisateurs de porno produisent des vidéos qui sont de plus en plus violentes et avilissantes. "Extreme Associates", qui se spécialise dans les scènes réalistes de viols, ainsi que JM Productions, mettent en avant les souffrances bien réelles endurées par les femmes sur leurs plateaux. JM Productions est un pionnier des vidéos de "baise orale agressive" ou de "baise faciale" comme les séries "étouffements en série", dans lesquelles les femmes s’étouffent et vomissent souvent. Cela s’accompagne de "tournoiements", dans lesquels le mâle enfonce la tête de la femme dans les toilettes puis tire la chasse, après le sexe. La compagnie promet, "toutes les putes subissent le traitement tournoyant. Baise la, puis tire la chasse". Des pénétrations anales répétées et violentes entrainent des prolapsus anaux, une pathologie qui fait s’effondrer les parois internes du rectum de la femme et dépassent de son anus. Cela s’appelle le "rosebudding". Certaines femmes, pénétrées à de multiples reprises par nombre d’hommes lors de tournages pornos, bien souvent après avoir avalé des poignées d’analgésiques, ont besoin de chirurgie reconstructrices anales et vaginales. Les femmes peuvent être affectées par des maladies sexuellement transmissibles et des troubles de stress post-traumatique (TSPT). Et avec la démocratisation du porno — certains participants à des vidéos pornographiques sont traités comme des célébrités dans des émissions comme celles d’Oprah et d’Howard Stern — le comportement promu par le porno, dont le strip-tease, la promiscuité, le sadomasochisme et l’exhibition, deviennent chic. Le porno définit aussi les standards de beauté et de comportements de la femme. Et cela a des conséquences terribles pour les filles.

"On dit aux femmes qu’elles ont deux choix dans notre société", me dit Gail Dines. "Elles sont soit baisables soit invisibles. Être baisable signifie se conformer à la culture du porno, avoir l’air sexy, être soumise et faire ce que veut l’homme. C’est la seule façon d’être visible. Vous ne pouvez pas demander aux filles adolescentes, qui aspirent plus que tout à se faire remarquer, de choisir l’invisibilité."

Rien de tout ça, souligne Dines, n’est un accident. Le porno a émergé de la culture de la marchandise, du besoin de vendre des produits qu’ont les capitalistes corporatistes.

"Dans l’Amérique d’après la seconde guerre mondiale, vous avez l’émergence d’une classe moyenne avec un revenu disponible", explique-t-elle. "Le seul problème c’est que ce groupe est né de parents qui ont connu la dépression et la guerre. Ils ne savaient pas comment dépenser. Ils ne savaient qu’économiser. Ce dont [les capitalistes] avaient besoin pour faire démarrer l’économie c’était de gens prêts à dépenser leur argent pour des choses dont ils n’avaient pas besoin. Pour les femmes ils ont créé les séries télévisées. Une des raisons pour lesquelles les maisons style-ranch furent développées, c’était parce que [les familles] n’avaient qu’une seule télévision. La télévision était dans le salon et les femmes passaient beaucoup de temps dans la cuisine. Il fallait donc diviser la maison de façon à ce qu’elles puissent regarder la télévision depuis la cuisine. Afin qu’elle puisse être éduquée". [Via la télévision]

"Mais qui apprenait aux hommes à dépenser leur argent?" continue-t-elle. "Ce fut Playboy [Magazine]. Ce fut le génie de Hugh Hefner. Il comprit qu’il ne suffisait pas de marchandiser la sexualité, mais qu’il fallait sexualiser les marchandises. Les promesses de Playboy n’étaient pas les filles où les femmes, c’était que si vous achetez autant, si vous consommez au niveau promu par Playboy, alors vous obtenez la récompense, qui sont les femmes. L’étape cruciale à l’obtention de la récompense était la consommation de marchandises. Il a incorporé le porno, qui sexualisait et marchandisait le corps des femmes, dans le manteau de la classe moyenne. Il lui a donné un vernis de respectabilité."

Le VCR, le DVD, et plus tard, Internet ont permis au porno de s’immiscer au sein des foyers. Les images satinées de Playboy, Penthouse et Hustler devinrent fades, voire pittoresques. L’Amérique, et la majeure partie du reste du monde, se pornifia. Les revenus de l’industrie du mondiale du porno sont estimés à 96 milliards de $, le marché des USA comptant pour environ 13 milliards. Il y a, écrit Dines, "420 millions de pages porno sur internet, 4.2 millions de sites Web porno, et 68 millions de requêtes porno dans les moteurs de recherches chaque jour."

Parallèlement à la croissance de la pornographie, il y a eu explosion des violences liées au sexe, y compris des abus domestiques, des viols et des viols en réunion. Un viol est signalé toutes les 6.2 minutes aux USA, mais le total estimé, qui prend en compte les assauts non-rapportés, est peut-être 5 fois plus élevé, comme le souligne Rebecca Solnit dans son livre "Les hommes m’expliquent des choses".

"Il y a tellement d’hommes qui assassinent leurs partenaires et anciennes partenaires, nous avons bien plus de 1000 homicides de ce type chaque année — ce qui signifie que tous les trois ans le nombre total de morts est la première cause d’homicides relevés par la police, bien que personne ne déclare la guerre contre cette forme particulière de terreur", écrit Solnit.

Pendant ce temps-là, le porno est de plus en plus accessible.

"Avec un téléphone mobile vous pouvez fournir du porno aux hommes qui vivent dans les zones densément peuplées du Brésil et de l’Inde", explique Dines. "Si vous avez un seul ordinateur portable dans la famille, l’homme ne peut pas s’assoir au milieu du salon et se masturber. Avec un téléphone, le porno devient portable. L’enfant moyen regarde son porno sur son téléphone mobile".

L’ancienne industrie du porno, qui engrangeait de l’argent grâce aux films, est morte. Les éléments de la production ne génèrent plus de profits. Les distributeurs de porno engrangent la monnaie. Et un distributeur, MindGeek, une compagnie mondiale d’informatique, domine la distribution du porno. Le porno gratuit est utilisé sur internet comme appât par MindGeek pour attirer les spectateurs vers des sites de pay-per-view (paye pour voir). La plupart des utilisateurs de ces sites sont des adolescents. C’est comme, explique Dines, "distribuer des cigarettes à la sortie du collège. Vous les rendez accrocs."

"Autour des âges de 12 à 15 ans vous développez vos modèles sexuels", explique-t-elle. "Vous attrapez [les garçons] quand ils construisent leurs identités sexuelles. Vous les marquez à vie. Si vous commencez par vous masturber devant du porno cruel et violent, alors vous n’allez pas rechercher intimité et connectivité. Les études montrent que les garçons perdent de l’intérêt pour le sexe avec de véritables femmes. Ils ne peuvent maintenir des érections avec des vraies femmes. Dans le porno il n’y a pas de "faire l’amour". Il s’agit de "faire la haine". Il la méprise. Elle le dégoute et le révolte. Si vous amputez l’amour vous devez utiliser quelque chose pour remplir le trou afin de garder le tout intéressant. Ils remplissent ça par la violence, la dégradation, la cruauté et la haine. Et ça aussi ça finit par être ennuyeux. Il faut sans cesse surenchérir. Les hommes jouissent du porno lorsque les femmes sont soumises. Qui est plus soumis que les enfants? La voie du porno mène inévitablement au porno infantile. Et c’est pourquoi des organisations qui combattent le porno infantile sans combattre le porno adulte font une grave erreur."

L’abus inhérent à la pornographie n’est pas remis en question par la majorité des hommes et des femmes. Regardez les entrées du film "cinquante nuances de grey", qui est sorti la veille de la saint valentin et qui prévoit d’engranger plus de 90 millions de $ sur ce week-end de quatre jours (avec la journée du président de ce lundi).

"La pornographie a socialisé une génération d’hommes au visionnage de tortures sexuelles’, explique Dines. Vous n’êtes pas né avec cette capacité. Vous devez être conditionné pour cela. Tout comme vous conditionnez des soldats afin qu’ils tuent. Si vous voulez être violent envers un groupe, vous devez d’abord le déshumaniser. C’est une vieille méthode. Les juifs deviennent des youpins. Les noirs des nègres. Les femmes des salopes. Et personne ne change les femmes en salope mieux que le porno."

Auteur: Hedges Christopher Lynn

Info: truthdig.com, 15 février 2015

[ vingt-et-unième siècle ]

 

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