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prophétie

Aujourd'hui l'incognito est mort tué par les photographes de presse, avec eux, comme avec les mitrailleurs, personne ne passe plus ; les héroïsmes, les vices deviennent propriété internationale, et l'être visé, dépossédé de son mystère, vidé de son secret, avoue à des millions d'exemplaires par tous ses traits, par toute sa personne, par sa pauvre figure qu'il cache en vain de la main. Les objectifs des cameramen américains sont des yeux sans paupières, mais aussi des yeux sans âme, sans discernement et sans pitié. Au moment où Hollywood affirme la prépotence de l'amour, il rend impossible cet arcane suprême. La photographie est pire que l'éloquence; elle proclame que rien n'est impénétrable, que rien n'est inavouable et que rien n'est voilé.

L'homme de demain aura-t-il droit à tout, sauf à l'ombre ?

Auteur: Morand Paul

Info: Chroniques 1931-1954 (2001, 651 p., Grasset, p.24)

[ images ] [ voyeurisme ] [ indiscrétion dominante ] [ interrogation ]

 

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femme-par-femme

Alors qu'elle n'était encore qu'une petite fille, elle réfléchissait à ce que le 19e siècle appelait la question de la femme, comme le montre son premier roman, - La nuit africaine -. A dix-huit ans, elle eut une expérience qui la transforma: une conversation avec une noire. Cette femme "était encore dans son état primitif, intact... je ne puis penser à elle autrement que comme une personne douée de génie. En un langage d'une éloquence et d'une intensité que je n'ai jamais retrouvées dans la bouche d'aucune autre personne, elle me peignit la condition des femmes de sa race; son labeur, son angoisse de vieillir, les limitations imposées à sa vie, les souffrances qu'elle devait à la polygamie et à sa sujétion; tout cela, elle le décrivit avec une passion et une force sans égales..."

Auteur: Lessing Doris

Info: Le temps mord, à propos d'Olive Schreiner, p.165

[ esclavage ] [ féminisme ]

 

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pouvoir

Plusieurs orientations littéraires du I er siècle s'expliquent par la pression que le pouvoir impérial a exercée sur les écrivains. Nous avons pu en effet noter que la censure impériale touche tous les genres littéraires : la philosophie, la poésie, le théâtre et, dans un registre différent, l'éloquence. Les empereurs ressentent comme une atteinte personnelle toute allusion délibérée ou fortuite. N'importe quel personnage mythologique ou historique, une situation fictive ou réelle, tout peut prêter à des interprétations dangereuses pour les écrivains. L'histoire se trouve en première ligne dans le combat et il devient de plus en plus difficile de traiter de sujets contemporains ou peu éloignés dans le temps. Non seulement les empereurs, mais tous ceux qui sont mêlés de près aux intrigues de la cour se méfient de toute relation ou commentaire d'événements proches. Tacite se plaint des contraintes que font peser sur la rédaction des Annales les menaces de gens haut placés.

Auteur: Salles Catherine

Info: Lire à Rome, p. 77

[ parano ] [ historique ] [ influence ]

 

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éloquence

Rien qu'un écho sonore, un redondant, un rhéteur, un verbeux diront ses ennemis. Une intelligence, une âme qui sait de souche que, dans la vie, il faut avoir envie de parler aux gens ; qui dit nos mots avec ses mots quand on l'écoute et qu'on l'entend, rétorqueront ses amis et même nombre de ses adversaires. Cette vocation oratoire, nous n'en avons hélas aucune preuve d'archives puisque sa voix, apparemment, n'a jamais été enregistrée. Mais les témoignages concordent, les souvenirs ont convergé : non seulement Jaurès ne fut vraiment Jaurès qu'en parole, mais il est resté de ceux, trop rares, qui ont osé dire que la politique c'est du vif et du noble criés haut et fort. Et qu'il faut proclamer partout, pour tous les publics, en visant le coeur et l'intelligence, la passion et la raison. Car "le courage, c'est de chercher la vérité et de la dire". En bref : moins tenter de séduire que de convaincre, à enjôler qu'à enrôler.

Auteur: Rioux Jean-Pierre

Info: Jean Jaurès

[ Gaule ]

 

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rapport à la nature

L’esprit de ce poème diffère du poème japonais en deux points essentiels. D’abord Tennyson cueille la fleur "racines" et "tout et tout entière". Son sentiment peut être analogue à celui de Basho, mais Basho ne cueille pas la fleur. Il la contemple sans discourir. Une seule particule lui suffit pour exprimer toute l’intensité de son émotion. Tennyson, actif et analytique, arrache la fleur sans se soucier de la plante elle-même qui en mourra. Il lui faut satisfaire sa curiosité par un moyen qui tient de la vivisection. Basho, totalement inactif, se contente de la contempler. […] L’Orient est silence, l’Occident éloquence. Mais le silence de l’Orient est loin d’être le mutisme de qui n’a rien à dire. Il est aussi éloquent que la prolixité occidentale. L’Occident aime à transformer le mot en chair et ce charnel s’exprime, d’une manière parfois outrancière, dans son art et dans sa religion. Ensuite, Tennyson devant la fleur, qui commence sans doute à se flétrir, s’interroge. Basho, peu inquisiteur, se contente de plonger aux sources même de l’existence que lui révèle cette fleur sauvage et par un cri ineffable exprime l’ivresse qu’il en ressent.

Auteur: Suzuki Daisetz Téitaro

Info: Dans "Bouddhisme Zen et psychanalyse", pages 10-11

[ orient-occident ] [ littérature comparée ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

souper

Elle sourit, je regardai ma montre. Il était onze heures du soir. Sur la nappe comme dans un filet affluaient les poissons : le saumon, les truites en anneau, les harengs, les anchois en bouquet de six, liés par la queue. Mais on ne servit à boire que du lait et une bière non fermentée. D'un sac à éponges je sortis sournoisement l'aquavit norvégien. Aïno bat des mains, débouche la bouteille avec une épingle à cheveux et, de plaisir, éternue. Elle verse deux rase-bords, me tend l'un, prend l'autre; se mettant au garde à vous, elle claque les talons et la langue, me fait l'immédiat hommage de son verre vide, dont elle tourne vers moi le fond avec des mots de convention que je n'entends pas. Elle avait ôté ses bottes et revêtu d'une chemise intérieur avec des broderies paysannes; un collier d'ivoire végétal errait sur elle comme une deuxième dentition. Nous mangions sans parler, pareils à un couple anglais. Les joues d'Aïno étaient luisantes sans poudre ni rouge, ainsi que tous ces visages scandinaves où un sang agile étend son fard que renfoncent le grand air ou le moindre regard. Avec éloquence deux bouteilles parlèrent. Nos têtes bourdonnaient.

Auteur: Morand Paul

Info: Ouvert la nuit (1922, 253p., le livre de poche, p.227)

[ univers nordique ] [ épicurien ] [ repas copieux ] [ alcool ]

 

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éloquence sans fond

Avec Nixon, la politique du spectacle atteint un apogée tragi-comique. Ne s’intéressant ni aux principes ni aux programmes, poussé seulement par l’ambition et par une vague rancune dirigée contre les libéraux cultivés de la côte Est, Nixon consacra la plus grande partie de sa carrière à l’art d’impressionner un public invisible, par ses qualités de dirigeant politique. Les moments déterminants de sa carrière, ces "crises" dont il parle d’une manière si révélatrice, se présentèrent comme autant d’occasions où il fut tenté d’abandonner, mais auxquelles il survécut en démontrant son aptitude à faire face – et, chaque fois, en public. Nixon voyant la politique comme un spectacle et se vantait de pouvoir distinguer une prestation convaincante d’un bide théâtral.

Dans l’affaire Hiss par exemple, il se convainquit de ce que Whittaker Chambers disait la vérité, parce qu’il eut "l’impression que sa prestation n’était pas un jeu d’acteur". Après avoir regardé à la télévision les hearings opposant l’armée et Joseph McCarthy, Nixon remarqua d’un ton méprisant qu’il préférait les acteurs professionnels aux amateurs. Durant sa célèbre "discussion dans la cuisine" avec Nikita Khrouchtchev, Nixon était sûr que ce dernier "jouait la comédie" et, plus tard, il reprocha au maréchal Joukov de sous-estimer l’intelligence du peuple soviétique. "Ils ne sont pas bêtes. Ils savent quand quelqu’un joue la comédie et quand c’est vrai, surtout quand les rôles sont tenus par des amateurs." 

Auteur: Lasch Christopher

Info: Dans "La culture du narcissisme", trad. Michel L. Landa, éd. Flammarion, Paris, 2018, pages 137-138

[ manipulation médiatique ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

philosophie

Je l’ai fait précéder de la question de savoir si le penseur gnostique voulait vraiment être Dieu ou si l’assurance de sa volonté n’était pas elle aussi une duperie. Le "Chant nocturne" [de Nietzsche] semble admettre la duperie – le penseur ne veut pas être Dieu, il lui faut l’être pour des raisons rebelles à tout examen. Face à cette seconde assurance, dépassant la première, surgit la question : devons-nous l’accepter ? Devons-nous considérer comme achevé le jeu des duperies ? Je ne le crois pas. Poursuivons le jeu et demandons-nous si le "Chant nocturne" ne serait pas lui aussi un masque. Gardons en mémoire que Nietzsche avoue connaître son exclusion et en souffrir ; retournons son aveu contre lui et posons la question suivante : celui qui perçoit sa situation comme un désordre irrémédiable de l’âme doit-il vraiment faire de nécessité vertu en érigeant cette condition en une image rectrice humaine ? Ses manques justifient-ils qu’il se livre à des danses dionysiaques en portant des masques ? Demandons-nous, avec la brutalité à laquelle l’époque nous contraint, si nous ne voulons pas en être les victimes, s’il n’eût pas plutôt eu l’obligation de se taire ? Et si sa plainte était plus qu’un masque, si elle était sincère, s’il souffrait de son état, ne se tairait-il pas ? Or Nietzsche ne se tait pas du tout ; et son éloquence est la preuve contraignante que sa plainte se situait seulement dans le domaine de sa compréhension empathique mais que, se dressant contre Dieu, il ne la laissait pas toucher au cœur de son existence, la preuve qu’elle n’était pas sincère, qu’elle était un masque. 

Auteur: Voegelin Eric

Info: Dans "Science, politique et gnose", trad. de l'allemand par Marc de Launay, Bayard, Paris, 2004, pages 45-46

[ pose de circonstance ] [ romantisme ] [ critique ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

féminisme

Les récits de viols, de femmes battues, de grossesses forcées, de massacres médicaux, de meurtres motivés par le sexe, de prostitution contrainte, de mutilations physiques, d'abus psychologiques sadiques et autres lieux communs de l'expérience féminine devraient laisser le cœur brûlé, l'esprit angoissé et la conscience bouleversée. qui sont exhumés du passé ou racontés par des survivantes contemporaines devraient rendre le coeur lourd, l'esprit angoissé, la conscience bouleversée. Mais ce n'est pas le cas. Quelle que soit la fréquence à laquelle ces histoires sont racontées, quelle que soit la clarté ou l'éloquence, l'amertume ou la douleur, elles pourraient aussi bien avoir été murmurées dans le vent ou écrites dans le sable : elles disparaissent, comme si elles ne comptaient pas. Les personnes qui les racontent et leurs histoires sont ignorées ou ridiculisées, menacées de retour au silence ou détruites, et l'expérience de la souffrance féminine reste invisible et enterrée sous le mépris culturels... la réalité même de la violence subie par les femmes, malgré son omniprésence et sa constance accablantes, est niée. Niée dans les activités de la vie quotidienne, tout comme elle est niée dans les livres d'histoire, laissée de côté, et elle est aussi niée par ceux qui prétendent se soucier de la souffrance mais qui sont aveugles à cette souffrance.

Le problème, en termes simples, est qu'il faut croire en l'existence de la personne pour reconnaître l'authenticité de sa souffrance. Ni les hommes ni les femmes ne croient en l'existence des femmes en tant qu'êtres significatifs. Il est impossible de considérer comme réelle la souffrance de quelqu'un qui, par définition, n'a pas d'accès légitime à la dignité ou à la liberté, quelqu'un qui est en fait considéré comme une chose, un objet ou une absence. Et si une femme, une femme singulière multipliée par des milliards, ne croit pas en sa propre existence discrète et ne peut donc pas créditer l'authenticité de sa propre souffrance, elle est effacée, annulée, et le sens de sa vie, quelle qu'elle soit, quelle qu'elle ait pu être, est perdu. Cette perte ne peut être ni calculée ni comprise. Elle est vaste et terrible, et rien ne pourra jamais la compenser.

Auteur: Dworkin Andrea

Info: Right-Wing Women

[ patriarcat omnipotent ]

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste

femmes-entre-elles

Parmi les femmes qui composaient la société de***, Mélanide était la moins aimable, et l'une des plus remarquables par son esprit ; mais personne encore n'avait poussé plus loin l'enivrement et l'aveuglement de l'amour-propre. Ce qui entraîne le défaut de goût, et produit toujours les ridicules les plus saillants.
Avec des traits et une taille hommasse, Mélanide ne pouvait se trouver jolie ; mais elle se persuadait qu'elle était belle, et d'après cette opinion, elle avait toute la recherche de la parure, toutes les mines d'une coquette uniquement occupée de sa figure. Il y avait dans sa personne et dans ses manières quelque chose de si affecté, de si bizarre, que dès qu'elle paraissait, tous les yeux se fixaient sur elle. Et, prenant alors l'étonnement et la curiosité pour de l'admiration, elle se disait tout bas, "nulle femme n'a produit cet effet"; et cette comique illusion de son orgueil était parfaitement exprimée par la mâle assurance de son maintien, par son air intrépide et conquérant : elle ignorait que les hommes qui aiment le mieux les femmes, ne regardent jamais fixement celles qui sont jeunes, jolies, et modestes. La galanterie à cet égard ressemble à l'amour: elle craint de blesser et de profaner son objet ; elle n'ose le contempler qu'à la dérobée; et c'est ainsi qu'en admirant la beauté elle rend hommage à la pudeur.
Mélanide avait infiniment d'esprit, mais un esprit absolument dénué de grâce; et le désir ardent et continuel de briller le rendait souvent faux. Ne pensant qu'à elle, rapportant tout à elle, ne parlant que d'elle, directement ou indirectement, elle ne savait ni écouler, ni répondre. Quand on ne voyait pas clairement sa vanité, on la sentait; on en était toujours ou frappé ou importuné. Les amis de Mélanide faisaient d'elle, sans le vouloir, la critique la plus piquante; ils avouaient qu'elle contait mal, qu'elle était dépourvue du charme, du naturel et de la naïveté, de celui de la gaîté. Mais ils prétendaient qu'elle avait dans la conversation "de la force et de l'éloquence".
Cette singulière admiration ressemblait plus à une épigramme qu'à un éloge. Sans doute on peut être éloquent en tête-à-tête avec ce qu'on aime, tandis que dans la conversation il faut, non les talents d'un orateur, mais de la grâce et du naturel. Dans la société la plus intime, un entretien agréable est toujours un dialogue vif et serré : l'usage du monde en exclut les "longues tirades", et par conséquent l'éloquence; rien n'y doit être approfondi : la variété, la légèreté en font le charme ; la force y serait déplacée, elle n'y paraîtrait que comme de la pesanteur.

Auteur: Genlis Madame de

Info: à propos de Mme de Staël

[ vacherie ] [ haine ] [ mondanités ]

 

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