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anticipation

Les histoires de super-héros sont méprisées, car souvent vues comme l'un des niveaux les plus bas de notre culture. Mais tel un éclat d'hologramme, elles contiennent en miniature tous les rêves et toutes les peurs des générations qui les racontent. Créées par des travailleurs qui en leur temps étaient marginalisés, moqués, utilisés comme bouc émissaires et exploités, elles n'ont jamais cessé de nous offrir une ligne directe vers l'inconscient collectif culturel, et ses convulsions. Elles nous racontent d'où nous venons, ce que nous avons craint ou désiré, et à présent elles sont plus populaires et plus ubiquitaires qu'elles en l'ont jamais été. Je le répète : les comics ont eu raison dès le début. Lorsque tout le monde s'en fichait, ils ont pris très au sérieux l'idée d'un futur surhumain, et l'ont embrassé, exaltée et testée jusqu'au point des destruction et retour. Et ils l'ont trouvée intacte, plus forte et mieux définie, comme l'acier passé au feu du raffinage. Indestructible, rien ne peut l'arrêter. Les super-héros étaient les champions des opprimés quand nous en avons eu besoin, puis patriotes, pionniers, rebelles, conformistes ou rock stars quand cela nous était nécessaire. Et à présent, ils entreprennent sous nos yeux ébahis d'abattre les murs séparant la réalité de la fiction.

Et il n'y a qu'un seul moyen de savoir ce qui se passera ensuite...

Auteur: Morrison Grant

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[ BD ] [ superman ] [ science-fiction ]

 

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totem et tabou

Ce coupable du mal, qui met la communauté en danger, à son insu peut-être, il faut le débusquer. Les animaux politiques, malades de la crise, se réunissent donc pour confesser leurs fautes et trouver le coupable - fût-ce le baudet, le bouc, le taureau, le cheval ou le premier venu – afin de le sacrifier (de le "faire sacré"), et d’apaiser la colère du ciel. Car, dit ce vieux salaud de Caïphe, le sacrificateur, "il est de votre intérêt qu’un seul homme meure pour le peuple, plutôt que la nation entière périsse." (Jean. Ch. 11, v.48, 51) On sait la suite. Le sacrifice unanime de la victime émissaire, son effusion de sang, purge, purifie la communauté de ses maux et fautes. Vient le moment où saisie de remord et de culpabilité, elle s’écrie d’une voix, "nous avons tué un dieu !" Ou, "brûlé une sainte !" Ou, "pendu un innocent !" Cette révélation prend souvent du temps. Elle travaille la communauté au fur et à mesure de la répétition du lynchage primitif, transformé en rite religieux (qui relie). Un rite de gratitude et d’adoration envers le dieu caché dans la victime, qui par sa mort a fait que tous vivent. Ensemble et en paix. Alors naît le culte du Loup, cette fierté d’appartenir à la meute, d’en être reconnu membre et de chasser avec.

Auteur: PMO Pièces et main-d'oeuvre

Info: http://www.piecesetmaindoeuvre.com/IMG/pdf/je_hurle_avec_les_loups.pdf

[ chasse au loup ] [ ambivalence ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

colonialisme

Un Problème Hors Contexte était le genre de circonstances que la plupart des civilisations ne rencontraient qu'une seule fois, de la même manière qu'une phrase rencontre un point final. L'exemple que l'on donnait habituellement pour illustrer un Problème Hors Contexte était celui d'un tribu vivant sur une grande île fertile. Imaginez que vous soyez cette tribu. Vous apprenez à domestiquer la terre, vous inventez la roue, l'écriture et tout le saint-frusquin. Vos voisins sont coopératifs, ou vous les réduisez en esclavage. Ils sont pacifiques, de toute manière. Vous vous activez alors à construire des temples à votre image grâce à tout l'excédent de capacité de production dont vous disposez. Vous êtes bientôt dans une position de pouvoir et d'autorité quasi absolus, que vos vénérés ancêtres n'auraient jamais pu imaginer, même en rêve. Tout baigne à merveille, comme un canoë dans l'eau sans rides d'un lac... Lorsque, soudain, cette masse de fer hérissée, sans voiles, apparaît au milieu de la baie, traînant derrière elle un filet de fumée, et dégorge sur le rivage des types avec des bâtons bizarres qui vous annoncent que vous venez d'être découverts et que vous êtes désormais des sujets de l'Empereur, qui est avide de présents qu'on appelle impôts et vous envoie des émissaires spirituels aux yeux brillants, qui demandent à dire deux mots à vos prêtres. C'était cela, un Problème Hors Contexte.

Auteur: Banks Iain M.

Info: Excession

[ envahisseur ]

 

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pouvoir

L'antiterrorisme, contrairement à ce que voudrait insinuer le terme, n'est pas un moyen de lutter contre le terrorisme, c'est la méthode par quoi l'on produit, positivement, l'ennemi politique en tant que terroriste. Il s'agit, par tout un luxe de provocations, d'infiltrations, de surveillance, d'intimidation et de propagande, par toute une science de la manipulation médiatique, de l'"action psychologique", de la fabrication de preuves et de crimes, par la fusion aussi du policier et du judiciaire, d'anéantir la "menace subversive" en associant, au sein de la population, l'ennemi intérieur, l'ennemi politique à l'affect de la terreur. L'essentiel, dans la guerre moderne, est cette "bataille des coeurs et des esprits" où tous les coups sont permis. Le procédé élémentaire, ici, est invariable : individuer l'ennemi afin de le couper du peuple et de la raison commune, l'exposer sous les atours du monstre, le diffamer, l'humilier publiquement, inciter les plus vils à l'accabler de leurs crachats, les encourager à la haine. "La loi doit être utilisée comme simplement une autre arme dans l'arsenal du gouvernement et dans ce cas ne représente rien de plus qu'une couverture de propagande pour se débarrasser de membres indésirables du public. Pour la meilleure efficacité, il conviendra que les activités des services judiciaires soient liées à l'effort de guerre de la façon la plus discrète possible", conseillait déjà, en 1971, le brigadier Frank Kitson ancien général de l'armée britannique, théoricien de la guerre contre-insurrectionnelle.

Auteur: Coupat Julien

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[ contrôle ] [ manipulation ] [ bouc émissaire ]

 

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historique

Selon Girard, c’est le judéo-christianisme qui nous a appris à repérer le mécanisme sacrificiel par lequel les sociétés conjurent la violence mimétique en la polarisant sur une victime émissaire. La Bible hébraïque et les Evangiles révèlent ce qui doit demeurer caché pour que le procédé jouisse de sa pleine efficacité : la victime qu’on élimine est innocente de la gangrène sociale dont on la rend responsable. […]
En retirant aux sociétés humaines l’usage libre et innocent d’un moyen aussi efficace pour se purger de la violence mimétique qui menace périodiquement de les emporter, le judéo-christianisme a davantage fragilisé ces sociétés qu’il ne les a renforcées. […]
Contre le déchaînement de la violence mimétique, les sociétés modernes, interdites de rites sacrificiels – ou plutôt, très contraintes sur ce chapitre – ont dû recourir à d’autres instruments de régulation sociale. Entre autres, la production de masse, chargée de calme momentanément – très momentanément – l’envie ; l’apparition d’une instruction obligatoire prolongée, dont une des fonctions est d’inculquer à tous les enfants les principes de la vie commune ; la place croissante prise par le droit, saisi de tous les conflits et appelé à les trancher avant qu’ils puissent s’étendre ou prendre de dangereuses proportions ; le développement de la police, veillant au respect des lois et arrêtant les contrevenants, ainsi que la multiplication des prisons maintenant ces derniers à l’écart. Sans parler d’une multitude d’autres instances régulatrices comme les hôpitaux psychiatriques, l’industrie pharmaceutique pourvoyeuse de neuroleptiques, l’industrie des loisirs charge d’épuiser les surplus d’énergie en dérivatifs inoffensifs.

Auteur: Rey Olivier

Info: Dans "Une folle solitude", pages 34 à 36

[ contention ] [ vie en société ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

dramaturge

Un génie est un accusé.

Tant qu’Eschyle vécut, il fut contesté. On le contesta, puis on le persécuta, progression naturelle. Selon l’habitude athénienne, on démura sa vie privée ; on le noircit, on le calomnia. Une femme qu’il avait aimée, Planesia, sœur de Chrysilla, maîtresse de Périclès, s’est déshonorée devant l’avenir par les outrages qu’elle adressa à Eschyle publiquement. On lui supposa des amours contre nature ; on lui trouva, comme à Shakespeare, un lord Southampton. Sa popularité fut battue en brèche. On lui imputait à crime tout, jusqu’à sa bonne grâce envers les jeunes poètes qui lui offraient respectueusement leurs premières couronnes ; il est curieux de voir ce reproche reparaître toujours ; Pezay et Saint-Lambert le répètent au dix-huitième siècle :



 Pourquoi, Voltaire, à ces auteurs

Qui t’adressent des vers flatteurs,

Répondre, en toutes les missives,

Par des louanges excessives ?



Eschyle, vivant, fut une sorte de cible publique à toutes les haines. Jeunes, on lui préféra les anciens, Thespis et Phrynichus ; vieux, on lui préféra les nouveaux, Sophocle et Euripide. Enfin, il fut traduit devant l’aréopage, et, selon Suidas, parce que le théâtre s’était écroulé pendant une de ses pièces, selon Elien, parce qu’il avait blasphémé, ou, ce qui est la même chose, raconté les arcanes d’Eleusis, il fut exilé, il mourut en exil.



Alors l’orateur Lycurgue s’écria : Il faut élever à Eschyle une statue de bronze.

Athènes, qui avait chassé l’homme, éleva la statue.

Ainsi Shakespeare, mort, entra dans l’oubli ; Eschyle, dans la gloire.

Auteur: Hugo Victor

Info: William Shakespeare

[ Grèce antique ] [ visionnaire ] [ tête de Turc ] [ bouc émissaire ]

 

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Ajouté à la BD par Bandini

hypocrisie

Voici Clémence Arlon. Nous avons le même âge, à peu près... Quelle drôle de visite ! En ce moment... Non, ce n'est pas drôle... Elle est venue malgré les alertes, les pannes de métro, les rues barrées... et de si loin !... de Vanves... Clémence vient presque jamais me voir... son mari non plus, Marcel... elle est pas venue seule, son fils l'accompagne, Pierre... Elle est assise, là, devant ma table, son fils reste debout, le dos au mur. Il préfère me regarder de biais. C'est une visite embarrassée... Elle aussi me regarde de biais, assise de quart… ni l’un ni l’autre sont tranquilles, ils ont des pensées… ils ont tous des pensées les gens, les rencontres, les connaissances, ces temps-ci… ça va faire bien trois ou quatre mois qu’ils ont des pensées, que je suis plus regardé par personne vraiment en face… l’effet des événements, voilà. Les êtres se comportent tous en même temps de la même façon… les mêmes tics… Comme les petits canards autour de leur mère, au Daumsenil, au bois de Boulogne, tous en même temps, la tête à droite !... la tête à gauche ! qu’ils soient dix !... douze !... quinze !...pareil ! tous la tête à droite ! à la seconde ! Clémence Arlon me regarde de biais… c’est l’époque… Elle aurait dix… douze… quinze fils… qu’ils biaiseraient de la même façon ! Je suis entendu le notoire vendu traître félon qu’on va assassiner, demain … après demain… dans huit jours… ça les fascine de biais le traître… Il ressemble à sa mère ce Pierre, au physique et au moral aussi, c’est sûr… mais elle était mieux que lui de traits, plus fine, régulière… Je suis Athénien, je suis difficile pour le physique… Au moral mon Dieu je me contente… Eux c’est au moral leur souci, la preuve qu’ils veulent tous me tuer… pas spécialement Clémence ! son fils ! tous !... sous un prétexte, sous un autre, la guerre dans le moment, les Boches, M. de Brinon… les Martyrs du marché noir ! la défense du fort de Montrouge ! Ils ont toujours des prétextes…

Auteur: Céline Louis-Ferdinand

Info: Dans "Féérie pour une autre fois"

[ monologue intérieur ] [ visite de courtoisie ] [ non-dit ] [ bouc émissaire ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

pandémies

À partir du moment où nous disposons d'archives écrites, les preuves de l'occurence d'épidémies mortelles se multiplient et l'on peut en déduire de façon prudente leur existence à des périodes antérieures. L'épopée de Gilgamesh en est peut-être le témoignage le plus parlant, avec le passage où son héros affirme que sa renommée survivra à la mort tout en décrivant le spectacle d'un flot de cadavres descendant l'Euphrate, probablement victimes d'une maladie infectieuse. Il semble bien que les Mésopotamiens aient constamment vécu sous la menace d'épidémies létales. C'est ce dont témoignent les amulettes, les prières, les poupées prophylactiques et l'existence de déesses et de temples aux vertus " curatives " — le plus célèbre étant celui de Nippur — destinés à protéger les humains contre ces maladies collectives. Ces phénomènes étaient, bien entendu, assez mal compris à l'époque, et souvent attribués à la colère meurtrière d'un dieu, ou bien perçus comme la punition d'une transgression qui exigeait un rituel compensatoire, tel le sacrifice de boucs émissaires.
Les premières sources écrites montrent toutefois que les peuples de la Mésopotamie antique comprenaient le principe de la contagion. Chaque fois que c'était possible, ils prenaient des mesures afin de mettre en quarantaine les premiers cas identifiables en les confinant à leurs domiciles sans laisser entrer ni sortir personne. Ils comprenaient que les voyageurs de longue distance, les commerçants et les soldats pouvaient être porteurs de maladies. Leurs pratiques d'isolement et de prévention préfigurent les mesures de quarantaine des lazarets des ports de la Renaissance. Et cette compréhension de la contagion se manifestait non seulement par l'évitement des personnes infectées, mais aussi par celui de leur vaisselle, de leurs vêtements ou de leur literie. Les soldats de retour d'une campagne militaire et soupçonnés d'être porteurs d'infection étaient contraints de brûler leurs vêtements et leurs boucliers avant de pénétrer dans la ville. Lorsque l'isolement et la quarantaine échouaient, ceux qui le pouvaient fuyaient la cité, laissant derrière eux les morts et les agonisants, et ne revenant chez eux, s'ils revenaient, que bien longtemps après la fin de l'épidémie. Ce faisant, il est probable qu'ils aient fréquemment transporté avec eux la maladie dans les régions voisines, engendrant ainsi un nouveau cycle de quarantaines et de fuites. De mon point de vue, il y a peu de doute qu'une bonne partie des abandons précoces et non chroniqués de régions fortement peuplées aient eu des causes épidémiologiques plutôt que politiques.

Auteur: Scott James C.

Info: Homo Domesticus, Chapitre 3. Zoonoses : la tempête épidémiologique parfaite.

[ historique ] [ propagation ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

anti christianisme

Disons que le consensus est que notre espèce, c'est-à-dire les primates supérieurs, Homo Sapiens, est sur la planète depuis au moins 100 000 ans, peut-être plus. Francis Collins dit peut-être 100 000 ans. Richard Dawkins pense peut-être un quart de million. Disons 100 000. Comme chrétien il faut accepter que pendant 98 000 ans notre espèce a souffert, la plupart de ses enfants mourant en couches, les autres ayant une espérance de vie d'environ 25 ans, mourant à cause de leurs dents. Famine, lutte, amertume, guerre, souffrance, misère, tout ça pendant 98 000 ans.

Le ciel contemplait tout ça avec une totale indifférence. Et puis, il y a 2000 ans, il s'est dit : "Ça suffit. Il est temps d'intervenir", et la meilleure manière sera de condamner quelqu'un à un sacrifice humain quelque part dans les régions les moins alphabétisées du Moyen-Orient. Surtout pas chez les Chinois, par exemple, où les gens peuvent lire et étudier les preuves et avoir une civilisation. Allons donc dans le désert et créons une autre révélation là-bas. C'est absurde. Une personne qui réfléchit ne pourra y croire.

Pourquoi suis-je heureux que ce soit le cas ? Pour amener la question du caractère erroné du christianisme, parce que je pense que les enseignements du christianisme sont immoraux. L'enseignement central, le plus immoral de tous, c'est celui de la rédemption par procuration. Tu peux rejeter tes péchés sur quelqu'un d'autre, ce que l'on appelle vulgairement la désignation d'un bouc émissaire. En fait, l'origine du bouc émissaire est issu de la même région, dans le même désert. Je peux payer ta dette si je t'aime. Je peux purger ta peine de prison si je t'aime beaucoup. Je peux me porter volontaire pour ce faire. Je ne peux pas effacer tes péchés, parce que je ne peux pas abolir ta responsabilité, et je ne devrais pas offrir de le faire. Ta  responsabilité doit t'accompagner toujours. Il n'y a pas de rédemption par procuration. Il est très probable, en fait, qu'il n'y ait pas de rédemption du tout. C'est juste un aspect de la pensée magique, et je ne pense pas que la pensée magique soit bonne pour les gens non plus.

Tout ça parvient même à polluer la question centrale, le mot que je viens d'employer, le mot le plus important de tous : le mot amour. En rendant l'amour obligatoire, en disant que tu DOIS aimer. Il faut donc aimer ton prochain comme toi-même, ce qui est impossible en réalité. Tu n'y parviendras jamais, et tu pourras donc toujours être vu comme coupable. On t'a inculqué que tu dois aimer quelqu'un qu'il faut aussi craindre, un être suprême, un père éternel. Qui manque à ce devoir redevient un misérable pécheur. Voilà qui n'est pas sain mentalement, moralement ou intellectuellement.

Et ça m'amène à la dernière objection - que je vais condenser, Dr. Orlafsky - qui est que ce système est totalitaire. S'il y avait un Dieu qui pouvait faire ces choses et exiger de nous ces trucs, et qu'il était éternel et immuable, nous vivrions sous une dictature sans appel, un Dieu qui ne peut jamais changer et qui connaît nos pensées et peut nous condamner pour crime de pensée, et nous vouer au châtiment éternel pour des actions que nous sommes condamnés à l'avance à faire. Tout cela en boucle. Bref c'est une excellente chose que nous n'ayons absolument aucune raison de croire que tout cela soit vrai.

Auteur: Hitchens Christopher

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[ pouvoir sémantique ] [ insensé monothéisme ] [ dogme dictature ]

 

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pouvoir sémantique

Wokisme, un protestantisme déréglé?

À l’instar de plusieurs chercheurs américains qu’il cite largement dans son étude*, l'auteur observe dans cet activisme progressiste un post-protestantisme débarrassé de sa théologie, soit un nouveau puritanisme entièrement sécularisé.

L’analogie? "La rédemption des péchés du monde ne se réalise plus à travers le sacrifice christique, mais par celui du bouc émissaire, à savoir la figure de l’homme blanc hétérosexuel, symbole qui réunit les trois fautes à la racine des injustices sexuelles, raciales et de genre: la masculinité, la blanchité et l’hétéronormativité", lit-on dans le document. Ou encore: "Les rêves d’une société parfaite que le christianisme reportait à un Royaume céleste doivent être matérialisés ici-bas et immédiatement." Interview avec un chercheur très critique à l’endroit de son objet d’étude.

- Le wokisme découlerait du protestantisme. Comment cela?

- Un certain nombre d’intellectuels protestants et catholiques nord-américains analysent le phénomène woke comme une forme de protestantisme sécularisé, c’est-à-dire l’idée qu’un certain nombre de thèmes chrétiens (l’Éden, le péché originel, la confession, le blasphème, etc.) ont été capturés par la frange progressiste de la gauche et transférés dans le champ politique. L’orthodoxie morale n’est plus produite par les Églises mais par les divers activismes qui composent le mouvement de la Justice Sociale (anti-racisme, droits LGBT, féminisme, etc. ndlr).

- Concrètement, de quelle manière se manifeste ce nouveau puritanisme?

- De multiples manières et à différents étages de la société. Essentiellement, ce puritanisme est le produit de l’hégémonie de la gauche dans les champs intellectuel et culturel. Il fabrique des hiérarchies et des tabous utiles à un certain nombre de groupes d’intérêt et circonscrit les interprétations dicibles dans les universités et les grands médias.

- On assiste, avec ce courant, à une nouvelle moralisation de l’espace public, avec une mobilisation autour de la notion de justice sociale et le souci des minorités. Ne faudrait-il pas s’en réjouir?

- Plus d’un s’en réjouissent, mais je ne partage pas cet optimisme. L’impact des idées politiques ne s’évalue pas à partir des intentions de leurs promoteurs. Or nous avons affaire à un mouvement profondément anti-libéral et passablement anti-scientifique – il suffit de lire les intellectuels qui nourrissent ce phénomène pour s’en convaincre. Rien n’est plus dangereux que des révolutionnaires qui s’imaginent pur de cœur.

- Plusieurs observateurs parlent d’une "religion civile". L’analogie au champ religieux vous semble-t-elle pertinente ?

- Elle est pertinente pour deux raisons: la première est que le wokisme fonctionne à la manière des cosmographies religieuses, c’est-à-dire qu’il procure une explication globale du fonctionnement de la société et de l’histoire, et offre à ses ouailles sens, ordre et direction. La seconde est que le comportement sectaire et les hyperboles moralisantes des activistes invitent naturellement une comparaison avec les mouvements religieux fondamentalistes. Pour preuve, le recours à des concepts infalsifiables et tout-puissants, comme le "patriarcat" ou le "racisme systémique".

- Comment comprendre que le langage du wokisme soit si présent au sein du monde protestant et de ses Églises?

- Il y a aussi beaucoup de résistance, mais je suppose qu’une partie du clergé entend profiter de la vitesse acquise de cette nouvelle religion civile, reproduisant des comportements analogues aux Églises, et capable de mobiliser certains segments de la population. Articulé autour de notions de justice sociale, d’équité, d’inclusivité, le militantisme woke peut assez aisément être réapproprié dans un contexte ecclésial. On peut aussi s’attendre à une demande par le bas, un certain nombre de membres motivés dans les communautés exigeant de leur hiérarchie un positionnement sur les grands thèmes du jour. La chose n’est pas très surprenante quand on pense, par exemple, à l’influence que le marxisme a pu exercer sur les théologiens de la libération en Amérique latine. Les Églises ne sont pas imperméables aux modes. 

- Vous pointez, au sein de ce phénomène, l’absence de "gardes-fous théologiques". Qu’entendez-vous par là?

- L’idée qu’un corpus théologique, qui s’est construit à travers des siècles d’affinage et de conciles, procure un cadre normatif à des notions de justice, de péché ou de rédemption. Libérées de ce cadre et réintroduites dans une religiosité révolutionnaire, ces idées prennent le mors aux dents. Le Royaume des Cieux se transforme en l’ambition d’établir ici-bas une société parfaitement égalitaire, quels qu’en soient les coûts.

- Vous êtes très critique à l’égard de ce mouvement. En quoi considérez-vous qu’il tende à glisser dans le fondamentalisme, voire le totalitarisme?

- La volonté de faire disparaître toutes les "inégalités", c’est-à-dire ici les disparités entre sexes ou entre populations, requiert nécessairement un État autoritaire régulant et corrigeant les effets des choix individuels. L’autoritarisme de la gauche progressiste n’est pas simplement la conséquence accidentelle d’une raideur idéologique propre au militantisme. Tout comme l’illustre l’histoire des économies planifiées, l’autoritarisme est l’inévitable propriété émergente du système.

- Votre étude souligne la contradiction de ce mouvement, dont les membres se proviennent majoritairement des classes les plus aisées…

- L’hypothèse que je trouve la plus séduisante a été formulée par le psychologue Rob Henderson: les classes supérieures nord-américaines signalent leur statut, c’est-à-dire se reconnaissent entre pairs et se distinguent du peuple, non plus seulement à l’aide de produits de luxe, mais aussi à l’aide d’idées luxueuses. Les coûts de ces idées sont assumés par les classes populaires tandis que les bénéfices à la fois matériels et immatériels sont capturés par les classes supérieures. Selon cette perspective, le wokisme est un outil dans un jeu de pouvoir et de statut. Son adoption signale son appartenance au camp du Bien et son institutionnalisation assure des débouchés professionnels à toute une classe de diplômés issus de filières académiques où le savoir tend à se dissiper au profit de l’activisme.

- N’allez-vous pas un peu loin en dénonçant une stratégie qui serait à nouveau profitable aux plus privilégiés, en faisant fi de leurs bonnes intentions?

-
Je ne pense pas que les activistes dont nous parlons ici soient des cyniques travaillant consciemment à consolider leur statut et je ne doute pas que leur mobilisation puise son énergie dans de bonnes intentions. Le problème réside dans la confusion entre les slogans et la réalité, d’une part, et dans la perception naïve que les bonnes intentions font de bonnes réformes, d’autre part. Or les réformes proposées par ces activistes (qui sont articulées sur toute une batterie de programmes préférentiels, de coûteuses formations, de régulations du langage) oscillent le plus souvent entre l’inutile et le contre-productif. 

Auteur: Moos Olivier

Info: Entretien avec Anne-Sylvie Sprenger à propos de *"The Great Awokening. Réveil militant, Justice Sociale et Religion", Religioscope, déc. 2020

[ cancel culture ] [ erreur catégorielle ] [ antispiritualisme ] [ bien maléfique ]

 

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