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fraternité

Je n’ai pas de frères de race,
j’ai des frères de condition,
des frères de fortune et d’infortune,
de même fragilité, de même trouble
et pareillement promis à la poussière
et pareillement entêtés à servir
si possible à quelque chose,
à quelqu’un, même d’inconnu,
à quelque frère de même portée,
de même siècle, ou d’avenir…

Je n’ai pas de frères de race,
ni de religion, ni de communauté,
pas de frères de couleur,
pas de frères de guerre ou de combat,
je n’ai que des frères de Terre
secoués dans la galère
des espoirs et désespoirs
des mortels embarqués,
des frères de rêve partagés
de peurs trop communes.

Je n’ai pas de frères de race,
j’ai des frères de condition,
bien différents et très semblables,
d’ailleurs terriblement interchangeables
dans l’égoïsme
ou dans la compassion…
Des frères tout pétris de l’envie
de partager leur solitude avec le pain
et parfois le bonheur insigne
d’apprendre ensemble à dire non…

Je n’ai pas de frères de race,
mais des frères dans le refus
de n’être qu’un passant,
des frères par l’art et par le chant,
et l’énergie déployée chaque jour
à tenir tête au néant.
Des frères à travers les âges,
la géographie et les frontières,
- et qui sait même, au-delà de l’espèce,
peut-être un frère en tout vivant…

Auteur: Baglin Michel

Info: Un présent qui s'absente, Frères de terre

[ poème ]

 

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trouble psychologique

Les termes "autisme" ou "ipséisme", d’un emploi plus ancien, ne rendent absolument pas compte du trouble qu’ils désignent, et ont conduit de ce fait à de profondes confusions. En effet, les mots "ipséisme", du latin ipse, soi-même et "autisme" du grec αυτο, de même signification, laisseraient entendre que les personnes affectées de ce trouble se renfermeraient en elles-mêmes en s’absentant du réel. Cela est totalement impropre, en raison de ce que nous avons vu plus haut : ce qui n’est pas ou que très fragmentairement constitué ne peut par définition se refermer en soi-même, puisqu’il n’y a pas de "soi". Le problème de l’autisme est une absence ou une lacune de la constitution subjectale : comme nous venons de le dire, il n’y a pas de "soi-même" autoréférentiel, comme ces termes sembleraient vouloir nous le laisser imaginer. Au contraire, le sujet appelé à se constituer est noyé dans l’en-soi*, d’où il peine à s’extraire. Bien que je ne me fasse aucune illusion à ce sujet, il conviendrait cependant de requalifier l’autisme soit en pniguéisme, du grec να πνιγεί, se noyer, soit de manière plus euphonique en baltosisme, du grec βάλτος, le marais dans lequel on s'embourbe. Le mérite serait là de nommer correctement ce dont il s’agit, ce qui n’est pas un détail, il s’en faut de beaucoup. Or, on ne peut penser correctement qu’avec des désignations correctes.

Auteur: Farago Pierre

Info: Une proposition pour l'autisme, page 42. *Mode d'être de ce qui est sans conscience (et ne peut se modifier volontairement) opposé à pour-soi.

[ renomination ] [ étymologie ] [ imprécision ] [ imprécision terminologique ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

idéalisme déçu

Car quel intérêt pour ses élèves à chercher le savoir, là où d’autres activités sont susceptibles de leur rapporter bien plus d’argent ? Mieux vaut concentrer son attention sur les savoir-être : être beau pour vendre et gagner beaucoup d’argent, voire passer à la télé, se constituer un réseau relationnel, afin d’être pistonné à l’un des nombreux postes moyennement juteux restant (la maison grandit, la voiture grossit), voire même à partager le gâteau ; hériter après des années de plus en plus longues à mesure de l’augmentation de l’espérance de vie à avaler les couleuvres lâchées par les générations précédentes.

Comme beaucoup, il avait vu la dégradation du prestige de sa profession, en interne comme dans la société. Alors que, lorsqu’il avait débuté, un enseignant pouvait s’offrir avec son salaire une vie si ce n’est bourgeoise, tout du moins confortable, au crépuscule de sa carrière, ses jeunes collègues les plus avisés changeaient d’orientation professionnelle. Quant à leur statut social, il équivalait désormais à celui d’un gardien de parking : les uns gardent les voitures, les autres les enfants.

Là où la soif de savoir est absente, des espaces se créent. Les diplômés ont tout le temps au cours de leur carrière pour oublier leurs chères connaissances et s’insérer dans la société de consommation. Leur activité la plus intellectuelle consiste dès lors à programmer leur smartphone, qui l’est devenu à leur place.

Auteur: Danoux Gabrielle

Info: Le chemin du fort

[ progrès technologique ] [ pédagogie ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

père-fils

Je ne m’aime pas. Je n’éprouve que peu de sympathie, encore moins d’estime pour moi-même ; de plus, je ne m’intéresse pas beaucoup. Je connais mes caractéristiques principales depuis longtemps, et j’ai fini par m’en dégoûter. Adolescent, encore jeune homme, je parlais de moi, je pensais à moi, j’étais comme empli de ma propre personne ; ce n’est plus le cas. Je me suis absenté de mes pensées, et la seule perspective d’avoir à raconter une anecdote personnelle me plonge dans un ennui voisin de la catalepsie. Lorsque j’y suis absolument obligé, je mens.

Paradoxalement, pourtant, je n’ai jamais regretté de m’être reproduit. On peut même dire que j’aime mon fils, et que je l’aime davantage à chaque fois que je reconnais en lui la trace de mes propres défauts. Je les vois se manifester dans le temps, avec un déterminisme implacable, et je m’en réjouis. Je me réjouis sans pudeur de voir se répéter, et par là même s’éterniser, des caractéristiques personnelles qui n’ont rien de spécialement estimable ; qui sont même, assez souvent, méprisables ; qui n’ont, en réalité, d’autre mérité que d’être les miennes. D’ailleurs, ce ne sont pas exactement les miennes ; je me rends bien compte que certains sont recopiées telles quelles sur la personnalité de mon père, ce con ignoble ; mais, chose étrange, cela n’enlève rien à ma joie. Cette joie est plus que de l’égoïsme : elle est plus profonde, plus indiscutable.

Auteur: Houellebecq Michel

Info: "Lanzarote", Librio, 2021, page 87

[ ressemblances ] [ répétition ] [ fatalité familiale ] [ transmission ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

inactivité

À l'évidence, la mondialisation qui submerge notre monde moderne est un modèle hyperactif, hyperfinancier, perpétuellement à la recherche de progrès. Elle est dominée par l'Amérique, donc sous le joug de la position protestante. C'est sans doute pour cette raison que la notion de loisir a remplacé celle de vacances (étymologiquement : "vide"). Le vocable "loisir" vient du verbe latin licere signifiant "permettre". Littéralement, le loisir est ce qui est loisible, donc ce qui est permis. D'ailleurs, à l'armée comme à l'hôpital, quand on veut s'absenter, on sollicite une permission, la fameuse perm' bien connue des bidasses comme des malades. De nos jours, si ne pas travailler est (à la rigueur) autorisé, voire recommandé, ne rien faire, vaquer, être en vacance est mal vu. La cessation de travail ne signifie plus farniente, mais présuppose que l'on s'adonne à une autre activité. Flemmarder au soleil n'est plus à la mode. Vive les séjours à thème, les voyages sportifs ou culturels, les clubs Méditerranée où le GM pris en charge de matin au soir court de compétitions sportives en animations soi-disant culturelles ! La loi sur les trente-cinq heures a d'ailleurs constitué un signal fort dans ce sens et il est reconnu que ce sont les magasins de bricolage et de sport (et, en conséquence directe, la petite chirurgie et les urgences) qui en ont le plus bénéficié sur le plan commercial. Cesser de travailler signifie s'activer autrement.

Auteur: Lemoine Patrick

Info: S'ennuyer, quel bonheur !

[ chômage ] [ occupation ] [ passe-temps ]

 

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organisation du travail

Selon Adam Smith, le travail libre rapporte plus que le travail des esclaves. En effet, ces derniers auraient tendance à manquer de motivation. Depuis que cette abomination est - officiellement - abolie, nous avons fort heureusement accompli des progrès considérables puisque même l'ancienne forme de management (terriblement verticale et si peu conviviale) est désormais tombée dans les oubliettes de I'histoire de l'exploitation. Ceci dit, lorsqu'une injonction était émise du haut de la hiérarchie vers le bas, les choses avaient le mérite d'être claires. On obéissait ou non, on discutait, on argumentait, mais surtout, en dernier recours, on pouvait biaiser de bien des façons.

Désormais nous sommes passés à un mode de gestion et de communication horizontale. Désormais il n'y a plus de chef, mais un manager au sein d'une équipe. Plus de salariés, mais des collaborateurs. Des espaces de travail plus ouverts et conviviaux. Plus de vouvoiement, on se tutoie tous. Bref, oublié le management par la contrainte, place au management par la confiance. Youpi! "ll y a des résultats évidents sur la productivité et la qualité de l'engagement du personnel. Il y a moins d'arrêts maladie, moins d'absentéisme, moins de turn-over et donc de meilleurs résultats économiques." Hourra ! La preuve est faite que la bienveillance au travail, c'est payant. Chacun devra se sentir valorisé d'être ainsi pris en considération. Et chacun devra bien sûr se montrer à la hauteur des attentes.

Auteur: Jobard Thierry

Info: Contre le développement personnel. Page 40, Rue de l'échiquier.

[ post-lumières ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

oraison funèbre

Le cœur ne peut errer. La chair est un songe, elle se dissipe ; cet évanouissement, s’il était la fin de l’homme, ôterait à notre existence toute sanction. Nous ne nous contentons pas de cette fumée qui est la matière ; il nous faut une certitude. Quiconque aime sait et sent qu’aucun des points d’appui de l’homme n’est sur la terre ; aimer, c’est vivre au delà de la vie ; sans cette foi, aucun don profond du cœur ne serait possible. Aimer, qui est le but de l’homme, serait son supplice ; ce paradis serait l’enfer. Non ! disons-le bien haut, la créature aimante exige la créature immortelle ; le cœur a besoin de l’âme...

Le prodige de ce grand départ céleste qu’on appelle la mort, c’est que ceux qui partent ne s’éloignent point. Ils sont dans un monde de clarté, mais ils assistent, témoins attendris, à notre monde de ténèbres. Ils sont en haut et tout près. Oh ! qui que vous soyez, qui avez vu s’évanouir dans la tombe un être cher, ne vous croyez pas quittés par lui. Il est toujours là. Il est à côté de vous plus que jamais. La beauté de la mort, c’est la présence. Présence inexprimable des âmes aimées, souriant à nos yeux en larmes. L’être pleuré est disparu, non parti. Nous n’apercevons plus son doux visage ; nous nous sentons sous ses ailes. Les morts sont les invisibles, mais ils ne sont pas les absents.

Auteur: Hugo Victor

Info: Prononcé sur la tombe d’Émilie de Putron à Guernesey, le 19 janvier 1865. Elle était la fiancée de son fils cadet François-Victor, qui décèdera comme elle de la tuberculose en 1873.

[ au-delà ]

 
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deuil

Cette idée m’assaillait en leitmotiv, comme des vagues le rivage : Elle était là. Elle n’est plus là ! Jamais sans doute n’avais-je à ce point approché le mystère de ce verbe : ÊTRE. Elle était là, elle n’est plus là ! Elle n’était plus que cela, ça, cette chose. Ce corps mort. Mais le sujet même de cette sentence ("elle") était désormais superfétatoire, puisqu’ "elle" n’en était plus un, et pour cause, de Sujet, et surtout pas du verbe "être". Les morts ne parlent pas. Ils sont, à la rigueur, ce dont on parle. Des tiers absents. Elle avait retrouvé le monde (ou le néant) qu’elle avait tant chéri, celui des objets : devenant objet parmi les objets, chose parmi les choses. La marchande avait rejoint ses marchandises sur l’étal de son stand d’antiquaire aux Puces de Saint-Ouen (marchandises qu’il me faudrait d’ailleurs, plus tard, vendre à l’encan en salle des ventes). Pourtant, m’allongeant sur le bat-flanc de la fenêtre, parallèle au lit, en reprenant cette pose de bouddha couché que j’avais si souvent adoptée pour lui tenir compagnie, pendant sa maladie, et la contemplant, immobile, et désormais muette, j’avais le sentiment – encore : car ce sentiment ne durerait que quelques jours, ou quelques heures ? – qu’il subsistait d’elle on ne sait quoi. Qu’elle était toujours là, ne serait-ce qu’à l’état de trace. D’ombre ! Que l’un et l’autre nous restions liés par d’immarcescibles ondes, par je ne sais quel charme secret – envoûtés.

Auteur: Sportès Morgan

Info: Si je t'oublie

[ absence ]

 

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tour d'horizon

A mesure qu'ils avancent dans leur oeuvre de prospection, les sémioticiens s'aperçoivent que tout est communication, la langue bien sûr, mais aussi les images, les sons, les objets, les gestes, et que tous ces phénomènes constituent des systèmes de signes qui doivent être étudiés en ramenant chaque message aux codes qui en régissent l'émission et la compréhension. Comprendre les systèmes de signes impose toutefois d'envisager les codes comme des structures, puis de recouvrir à des structures toujours plus vastes, dans un mouvement de régression vers la matrice originelle de toute communication possible, vers un prétendu Code des Codes qui devrait représenter la détermination "naturelle" précédant toute culture. Mais si la sémiotique s'engageait dans cette voie, elle ne pourrait qu'aboutir à la "source" de toute structure possible, forcément non structurée, à ce qu'Eco appelle la structure absente. Son livre, tout en refusant ce Code des Codes, essaie de montrer que tout acte communicatif est dominé par la présence massive de codes socialement et historiquement déterminés. La sémiotique découvre ainsi dans la dialectique entre code et message les rapports entre l'univers de signes et l'univers des idéologies, qui se reflètent dans les modes communicatifs préconstitués, et elle relie le monde des choses au monde de la culture, qui formalise les choses non pas pour les reconnaître comme elles sont mais afin de les transformer. Après avoir étudié dans L'oeuvre ouverte (1965) les structures des langages expérimentaux de l'art contemporain, sont traités ici l'ensemble des problèmes sémiotiques et ce livre constitue à la fois sa contribution à la recherche en cours avec une tentative de constituer le panorama le plus vaste et le plus complet possible sur les préalables constitutifs à toute sémiotique et sur l'état présent du structuralisme.

Auteur: Eco Umberto

Info: Résumé de "La structure absente". Traduction Uccio Esposito-Torrigiani, Le Mercure de France, 1984

[ holisme ] [ linguistique ] [ interactions ]

 
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dissonance cognitive

L’attention incessante, et pourtant curieusement désincarnée, que la mère narcissique porte à son enfant, interfère à chaque étape du processus de "frustration optimale". Ce type de mère ressent souvent son enfant comme une extension d’elle-même ; elle prodigue des soins qui sont "gauchement inappropriés" aux besoins réels du petit, et l’entoure d’un excès de sollicitude apparente, mais qui manque de vraie chaleur. En le traitant comme une "possession exclusive", elle incite l’enfant à concevoir un sens exagéré de sa propre importance ; en même temps, elle lui rend difficile de s’avouer la déception qu’il ressent en constatant les imperfections maternelles. Dans la schizophrénie, la disjonction entre, d’une part, les soins superficiels et de pure forme que prodigue la mère et, d’autre part, sa dévotion apparemment exclusive, est si douloureuse pour l’enfant qu’il refuse de la reconnaître. Les défenses régressives, "la perte des frontières du moi", l’illusion d’omniscience, et la pensée magique, apparaissent, elles aussi, sous une forme moins prononcée, dans les désordres narcissiques. Bien que la schizophrénie ne puisse, en aucune manière, être considérée simplement comme une forme exagérée du narcissisme, un de leurs points communs est la rupture des frontières entre le moi et le monde des objets. […] Il n’est donc pas surprenant que les études effectuées sur l’arrière-plan familial des malades schizophrènes révèlent un certain nombre de traits que l’on retrouve dans les familles narcissiques. Dans les deux cas, une mère narcissique prodigue à sa progéniture des soins suffocants, qui sont pourtant affectivement distanciés. Narcisse, comme le schizophrène, occupe souvent une position privilégiée au sein de la famille, soit à cause de ses dons réels, soit parce que l’un de ses parents le traite comme le substitut d’un père, d’une mère, ou d’un conjoint absent. Ce parent-là attire parfois la famille entière dans le labyrinthe de sa névrose, que les membres de la famille s’accordent tacitement à flatter, afin de maintenir l’équilibre émotionnel de l’ensemble.

Auteur: Lasch Christopher

Info: Dans "La culture du narcissisme", trad. Michel L. Landa, éd. Flammarion, Paris, 2018, pages 273-274

[ haine forclose ] [ schizophrénogène ]

 

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