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création artistique

Dans la mesure où un écrivain est un propagandiste, tout ce qu’on peut exiger de lui est qu’il croie sincèrement aux idées qu’il exprime et que celles-ci ne soient pas d’une imbécillité flagrante. Aujourd’hui, par exemple, on peut imaginer un bon livre écrit par un catholique, un communiste, un fasciste, un pacifiste ou un anarchiste, peut-être même par un libéral à l’ancienne mode ou un conservateur ordinaire ; on ne peut imaginer qu’il soit écrit par un spirite ou un membre du Klu-Klux-Klan. Les opinions soutenues par un écrivain doivent être compatibles avec la santé mentale, au sens médical du terme, et avec la capacité de mener une réflexion suivie ; on attend en outre de lui qu’il fasse preuve de ce qu’on appelle talent, et qui n’est sans doute rien d’autre que la conviction. Swift manquait certes de la sagesse la plus commune, mais il possédait en revanche une puissance visionnaire d’une redoutable intensité, qui lui faisait déceler une vérité cachée, pour ensuite l’outrer et la déformer. La pérennité des Voyages de Gulliver démontre que, si une conviction suffisante l’anime, une vision du monde qui n’échappe que de justesse au diagnostic de pathologie mentale peut donner naissance à une grande œuvre d’art.

Auteur: Orwell George

Info: Politique contre littérature : à propos des Voyages de Gulliver, EAL-4, p. 270-271

[ imagination ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

enchaînement

Nous daubons tous allègrement sur les particularismes de classe, mais bien peu nombreux sont ceux qui souhaitent vraiment les abolir.

On en arrive ainsi à constater ce fait important que toute opinion révolutionnaire tire partie de sa force de la secrète conviction que rien ne saurait être changé. […]

Tant qu'il ne s'agit que d'améliorer le sort des travailleurs, les honnêtes gens sont unanimes. […]

Malheureusement, c'est à cela et rien de plus qu'on aboutit quand on se borne à souhaiter que disparaissent les distinctions de classe.

Plus exactement, il est nécessaire de souhaiter qu'elles s'effacent, mais votre souhait demeure parfaitement vain si vous ne saisissez pas tout ce qu'il implique.

Il faut regarder en face la réalité: abolir les distinctions de classe, c'est abolir une partie de soi-même.

Me voilà, par exemple — moi, typique représentant de la classe moyenne.

Rien de plus facile que d'affirmer mon désir de faire table rase des particularismes de classe ; mais la quasi-totalité de ce qui forme ma pensée et mon être repose sur des particularismes de classe. […]

Je dois opérer en moi une transformation si profonde qu'au bout du compte il ne restera pratiquement plus rien de la personne que j'étais.

Auteur: Orwell George

Info: Le quai de Wigan, Éditions Champ libre, 1982)

[ lutte ] [ impossible ] [ inégalités essentielles ] [ constitutif ] [ division interne ] [ contrastes nécessaires ] [ monde discriminé ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

passivité

Contre ce monde insaisissable et fantasmagorique où ce qui est noir aujourd’hui peut être blanc demain et où le temps qu’il faisait la veille peut être modifié par décret, il n’y a à vrai dire que deux remparts. Le premier est qu’on a beau s’acharner à nier la vérité, la vérité n’en continue pas moins d’exister, dans votre dos pour ainsi dire, et qu’il vous est par conséquent impossible de la violer sans nuire à l’efficacité militaire. La seconde, c’est qu’aussi longtemps qu’il demeurera sur cette terre des régions non conquises, la tradition libérale pourra continuer de vivre. Que le fascisme, ou l’association des fascismes divers, conquière le monde entier, et ces deux remparts s’écrouleront. Nous sous-estimons, en Angleterre, ce genre de danger, nos traditions et notre sécurité passée nous ayant inculqué la croyance sentimentale que tout finit toujours par s’arranger et que ce que l’on craint le plus n’arrive jamais pour de bon. Nourris pendant des siècles d’une littérature où le bon droit triomphe invariablement au dernier chapitre, nous sommes presque instinctivement convaincus qu’à long terme le mal va toujours de lui-même à sa perte. Le pacifisme, par exemple, repose largement sur cette idée. Ne résistez pas au mal, il se détruira tout seul, d’une façon ou d’une autre. Mais pourquoi se détruirait-il ? Quelles preuves avons-nous qu’il le fasse jamais ? Et quel exemple y a-t-il d’un État industrialisé moderne qui se soit effondré sans l’intervention armée d’une puissance extérieure ?

Auteur: Orwell George

Info: Dans "Pourquoi j'écris ?", trad. de l'anglais par Marc Chénetier, éditions Gallimard, 2022, pages 27-28

[ croyance réconfortante ] [ zen hypocrite ] [ optimisme ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

clochard

Les mendiants ne travaillent pas, dit-on. Mais alors, qu’est-ce que le travail ? Un terrassier travaille en maniant un pic. Un comptable travaille en additionnant des chiffres. Un mendiant travaille en restant dehors, qu’il pleuve ou qu’il vente, et en attrapant des varices, des bronchites, etc. C’est un métier comme un autre. Parfaitement inutile, bien sûr – mais alors bien des activités enveloppées d’une aura de bon ton sont elles aussi inutiles. En tant que type social, un mendiant soutient avantageusement la comparaison avec quantité d’autres. Il est honnête, comparé aux vendeurs de la plupart des spécialités pharmaceutiques ; il a l’âme noble comparé au propriétaire d’un journal du dimanche ; il est aimable à côté d’un représentant de biens à crédit – bref c’est un parasite, mais un parasite somme toute inoffensif. Il prend à la communauté rarement plus que ce qu’il lui faut pour subsister et – chose qui devrait le justifier à nos yeux si l’on s’en tient aux valeurs morales en cours – il paie cela par d’innombrables souffrances. Je ne vois décidément rien chez un mendiant qui puisse le faire ranger dans une catégorie d’êtres à part, ou donner à qui que ce soit d’entre nous le droit de le mépriser.

Un mendiant, à voir les choses sans passion, n'est qu'un homme d'affaires qui gagne sa vie comme tous les autres hommes d'affaires, en saisissant les occasions qui se présentent. Il n'a pas plus que la majorité de nos contemporains failli à son honneur : il a simplement commis l'erreur de choisir une profession dans laquelle il est impossible de faire fortune.

Auteur: Orwell George

Info: Dans la dèche à Paris et à Londres, 1933

[ SDF ] [ dignité ] [ éloge ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

éthique

S'il était possible qu'il se dégage des pages d'un livre une réelle puanteur, ce serait le cas pour celui-ci [l'autobiographie de Dali] [...]. Mais cela étant, il reste que Dali est un dessinateur exceptionnellement doué. C'est un exhibitionniste et un carriériste, mais ce n'est pas un imposteur. Il a cinquante fois plus de talent que la plupart des gens qui s'en prennent à sa moralité et ricanent devant ses tableaux. Et si l'on considère à la fois ces deux séries de faits, on se trouve face à un problème qui, en l'absence de toute base sérieuse d'accord, fait rarement l'objet d'une véritable discussion.
(...)
Ce que revendiquent en fait les défenseurs de Dali, c'est une sorte d'immunité artistique. L'artiste doit être exempté des lois morales qui pèsent sur les gens ordinaires. [...] On voit à quel point cette théorie est fausse si on l'applique à la criminalité ordinaire. [...] Si Shakespeare ressuscitait demain, et si l'on découvrait que sa distraction favorite consiste à violer des petites filles dans des voitures de chemin de fer, nous ne lui dirions sûrement pas de continuer à agir de la sorte sous prétexte qu'il écrira peut-être un nouveau Roi Lear.
(...)
Dali est un bon dessinateur et un être humain répugnant. L'un n'exclut pas l'autre et, en un sens, ne l'affecte même pas. Ce que nous demandons avant tout à un mur, c'est qu'il tienne debout. S'il tient debout, c'est un bon mur, et savoir à quoi il sert est une tout autre question. Et pourtant, le meilleur mur du monde mérite d'être abattu s'il entoure un camp de concentration.
(...)
Il représente un symptôme de la maladie du monde. L'important n'est pas de le dénoncer comme une crapule qui mériterait d'être cravachée en public, ni de le défendre comme un génie au-dessus de toute critique, mais de découvrir pourquoi il fait montre de ces aberrations particulières.

Auteur: Orwell George

Info: in L'immunité artistique. "Benefit of Clergy"

[ beaux-arts ] [ morale ]

 

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Ajouté à la BD par miguel